D'un geste sec, une main pâle referma le casier en fer blanc, le bruit causé par ce dernier noyé dans le brouhaha constant que provoquait la pléthore d'élèves du prestigieux collège Kunugigaoka. Tous n'ayant qu'une chose en tête, rentrer chez eux après cette rude journée d'école et poursuivre la soirée avec une bonne grosse séance de révision.

On en était qu'au début de l'année mais établissement sur-côté oblige, les professeurs n'en menaient pas large et n'hésitaient pas à doubler la charge de travail afin de conserver le niveau d'élite et d'assurer la réputation du collège.

foutaises

Soufflant les mèches qui s'étaient faufilées devant son visage alors qu'elle s'accroupissait, une jeune fille parmi toute cette foule ne put s'empêcher de maudire intérieurement, déjà au bord du gouffre après une telle journée. . .aujourd'hui était son transfert après tout et non elle n'était pas dramatique!

Pendant qu'elle continuait à maugréer en enfouissant son pied gauche dans l'une de ses baskets, un certain roux vint se placer derrière elle.

_On rentre ensemble aujourd'hui, Mebuki ?

La dénommée Mebuki se releva avant de tourner son visage pour faire face à Asano Gakushū, levant sa tête afin de pouvoir rencontrer son regard. Elle observa ses yeux violets qui contenaient cette même détermination, cette immanquable intelligence, un regard qui pouvait percer et mettre à nu toute personne qui se retrouverait face à celui-ci mais Mebuki pouvait lire plus que ces quelques traits de caractère, déterrant la fatigue qui se logeait au fond de ses orbes mauves.

Laissant sa frustration de côté, la blonde s'arma d'un immense sourire à s'en faire manger le visage avant d'énoncer un oui à l'encontre du roux.

_Après tout, je me lasserais jamais du regard emplit de jalousie de certaines timbrées.

_Langage, Mebuki, surveille ton langage. Toujours dans son rôle du sérieux coincé, Asano porta une main à son visage pour se masser les sinus, se dégageant ensuite pour ouvrir le passage à la blonde, en bon gentleman qu'il était. Ils se dirigèrent alors côte à côte vers la sortie, la marée d'élèves se séparant quelque peu pour leur laisser place.

_Je ne fais qu'exposer mon point de vue très cher. Répliqua Mebuki en ricanant.

Sur cette énième note de sarcasme, les deux adolescents poursuivirent leur route en silence, empruntant le pavé recouvert de fleurs de cerisier. Le mois d'Août s'était annoncé aussi splendide que chaque année, les effluves de la floraison embaumant l'air et la flore recouvrant le sol tel un léger tapis soyeux et coloré.

Aujourd'hui était l'une des rares fois où ils faisaient la route ensemble. C'était sans dire que ces derniers temps l'occasion manquait, Asano semblait de plus en plus pris par son rôle dans le conseil des élèves ainsi que d'élève faisant parti des cinq Prodiges de sa classe et plus le temps passait, plus il était à cheval sur son rang et ses priorités notamment envers son père, le principal de l'école. De son côté, Mebuki faisait partie d'une autre classe. Elle s'acharnait tout autant dans ses études, surplombant le classement mais elle refusait en même temps de tomber dans le moule de l'organisation et de l'ambiance du collège. Elle n'y était tout simplement pas très friand...et l'abscence d'une certaine tête rouge n'arrangeait pas du tout les choses non pas qu'elle allait le dire à haute voix devant son ami d'enfance, elle tenait toujours à sa dignité.

_C'est là que nos chemins se séparent. . .

Les deux adolescents s'arrêtèrent sur leur pas après les mots de Mebuki. Un bref silence les engloba une fois de plus alors qu'ils continuaient à se fixer semblant attendre le déluge. Finalement, Asano prit la parole après quelques secondes, hésitant.

_Je peux te raccompagner jusqu'au pas de ta porte si tu veux.

_Te donnes pas cette peine, je serais bientôt arrivée de toute façon. A demain 'shū !

Rigolant sous son souffle, Mebuki observa le tique qui semblait prendre le roux chaque fois qu'elle employait CE surnom, s'amusant de sa réaction. Elle lui fit un grand signe de la main pendant qu'elle s'éloignait, le laissant derrière elle.

Comme attendu, cela ne prit pas beaucoup de temps avant d'apercevoir le portail de sa maison. Entre-temps, ses épaules s'étaient détendues, son esprit se mettant déjà en bonne condition. Elle rêvait maintenant d'une bonne douche avant de se plonger dans ses bouquins et peut-être finir la soirée avec une partie de jeux vidéos.

Ouep, c'était un bon programme et il serait parfait si elle trouvait un endroit où caser son dîner. Elle n'allait pas dormir le ventre vide après tout.

_Tadaima.

A cette heure là, ses parents étaient au travail et ce fut un miaulement qui lui répondit après qu'elle eut franchi le pas de sa porte.

Un chat au pelage blanc vint frotter son petit nez rose contre sa peau, envoyant cette legère sensation humide et fraîche contre celle-ci. S'accroupissant pour le caresser, Mebuki empoigna délicatement l'une de ses pattes noires afin de caresser ses coussinets.

_T'es drôlement câlin ce soir, Na-san.

Un autre miaulement lui parvint aux oreilles comme si le chat répondait à ses propos. Se relevant pour de bon, Mebuki ôta ses chaussures et plaça ses clés sur une corbeille. Elle traversa le couloir avant d'arriver à l'escalier et d'enjamber les marches quatre à quatre pour se ruer vers sa chambre. Elle se jeta prestement sur son lit, le sac d'école oublié quelque part dans un coin de la pièce. Ses paupières recouvrirent ses yeux rubis, acceptant de se laisser aller dans ce pur moment de calme mais cet instant fut vite écourté par des bruits provenant de l'extérieur, séparé de sa chambre par une baie vitrée.

Et Mebuki ne connaissait qu'une seule personne qui oserait jeter des cailloux et autres objets non identifiables sur son balcon.