Disclamer : Ni les personnages ni l'univers ne sont à moi, tout vient de Square Enix.

Hey !

Alors alors. C'est la première fois que je poste sur ce fanfom. Et que j'y écris, aussi - merci Crisis Core et FF7R qui m'ont tellement remotivé à venir jeter un coup d'oeil dans le coin. Donc coup, enchanté ?

J'espère que je ne fais pas n'importe quoi avec les personnages, vu que je n'ai pas du tout l'habitude d'écrire avec eux, ni avec l'univers, mais de base ça part sur du canon divergeant, dont y va forcément y avoir deux trois petits points qui change. Mais bref, si je fais vraiment nawak, hésitez pas à me le faire remarquer.

J'ai écris cette minie fic d'une traite pendant le confinement, et j'espère qu'elle vous plaira. Perso, j'ai beaucoup aimé travailler dessus, et … j'étais certains d'avoir un million de choses à dire pour l'introduire, mais mon esprit est actuellement vide. Donc voilà. J'éditerai si ça me revient un jour ? Oh, et le titre vient d'une phrase que Genesis prononce, et qui est elle même tirée de Loveless, La légende parle de sacrifice à la fin du monde, qui m'a donnée l'idée de tout ce qui va suivre.

Je n'ai pas encore de bêta pour cette histoire mais ça viendra. En attendant, j'espère qu'il ne reste pas trop de fautes ?

(je blablate parce que je stresse à l'idée de poster sur un nouveau fandom, en vrai.)

Bref ! Je vous souhaite une bonne lecture, et je vous remercie d'avance pour l'attention que vous portez aux lignes qui suivent !


Cloud pensait qu'il s'y habituerait, avec le temps. La fatigue lovée dans ses muscles qui lui donne des envies de paresse, la douleur ancrée dans son dos que l'effort a fait naître, l'odeur de sueur qui colle au mur des vestiaires, imprègne la tenue qu'il retire au profit d'un vêtement plus souple. L'élancement dans son poignet, souvenir des mouvements brusques effectués à répétition, son épée lancée comme un prolongement de son bras alors qu'elle cogne de son tranchant le malheureux mannequin de combat. Ce sifflement aigu du fer qui dessine une ligne nette dans la matière. Le souffle haché qui gonfle soudain ses poumons, alors que la force abandonne doucement son corps transpirant coup après coup.

La vie de soldat.

Il se disait, c'est dur au début. C'est dur au début, mais après, ça ira mieux. Passé les premières semaines, au bout de quelques mois. Une question d'habitude. Pourtant, chaque fois qu'il termine son entraînement quotidien, Cloud a l'impression que ses membres vont se détacher du reste de son corps, son corps trop épuisé pour maintenir encore ses deux lourds bras rattachés au reste du tronc par ses épaules. Il soupire en repliant la tenue violette qu'il porte depuis plusieurs année maintenant, la range à sa place, puis il se laisse tomber sur l'un des bancs de la salle de repos, le front encore collant. Toute sa peau est moite, poisseuse de sueur, et il ne doute pas de l'odeur de fauve qui doit flotter tout autour de lui comme un nuage menaçant, après la journée qu'il vient de passer. Le genre d'effluve qui fait grimacer les scientifiques qu'il voit passer devant lui.

Paradoxalement, une euphorie flottante le porte depuis qu'il a quitté la salle d'entraînement. L'endorphine générée par la séance d'exercice se fait sentir, se mêle à la fatigue, tire sur ses paupières déjà lourdes. Dormir. Il voudrait bien, dormir. Se reposer enfin, ouvrir une parenthèse loin de ce cycle sans fin qui semble se répéter chaque matin alors qu'il sort du lit pour rejoindre cet endroit. Il ne peut pas, pourtant. Pas pour l'instant. Il lui reste encore du travail. Des tâches à accomplir, avant de pouvoir enfin fermer les yeux et oublier tout ça.

Mais bientôt, bientôt, il aura terminé.

A peine reposé, le soldat de deuxième classe se relève, glissant son bras derrière son dos pour s'étirer longuement. Il entend un craquement sec au niveau de son épaule, qui se répète alors qu'il étire l'autre articulation, puis une suite de bruit osseux le long de ses vertèbres. Le genre de sons qui le faisaient grimacer, petit. Comme un squelette qu'on broie.

"- Cloud ?"

Surpris, et pressé d'aller prendre une douche, le blondin se tourne à peine vers la voix qui vient de raisonner dans le couloir. A l'oreille, il sait qu'il ne l'a jamais entendue. Timbre inconnu. Pourtant, l'individu qui s'approche de lui, son visage dissimulé sous un casque familier, s'approche d'un pas sûr.

"- C'est bien vous ? Le soldat de deuxième classe Cloud ?

- Oui."

Jusqu'à preuve du contraire, c'est bien lui. Il n'a jamais rencontré personne ici qui portait un nom similaire. Cloud, aussi, ça n'est pas courant à Midgar. C'est même typique de Nibelheim, alors il ne risque pas d'en croiser beaucoup dans le coin.

"- Oh."

L'information confirmée, le type s'arrête alors devant lui, stoppé par une forme de crainte admirative. Le combattant la devine aisément sur ses lèvres, la seule partie de son visage qu'il peut apercevoir. Cette manière qu'elles ont de se crisper, se perdre sous une rangée de dents nerveuses, alors qu'il se tient raide comme un piquet face à lui. Cloud l'a déjà vu, cette expression. Cette gêne mêlée d'admiration. Même, il l'a éprouvée plus jeune, du temps où il servait dans l'armée. Avant de monter en grade, et de prendre lentement la place de ceux qui brillaient dans ses yeux, des années auparavant.

Il l'a éprouvée, oui. Ça remonte.

"- Qu'est-ce que tu veux ?" il demande platement, tout en ajustant ses manches. "Si c'est pour une séance d'entraînement, c'est non. J'ai déjà terminé ma journée. Reviens demain matin, si tu n'as pas changé d'avis d'ici-

- Oh, non !" le garçon secoue vivement la tête et les mains d'un même mouvement. " Non non, pas du tout !"

Etonné, Cloud hausse à peine un sourcil. Quand les plus jeunes viennent le chercher, la plupart du temps, c'est pour lui demander de partager son expérience avec eux. Ils sont en quête de conseils, avides de progresser pour grimper les échelons de l'armée, tous motivés par cette lubie irréaliste de prendre un jour la place qu'ont occupée bien avant eux les héros de la nation. Ceux dont les noms ont marqué la mémoire collective.

Il y a, aussi, de tout jeunes troisième classe encore effrayés face aux premières missions qui leur tombent sur les bras. Ils s'approchent, hésitent, résument maladroitement l'ordre qu'on leur a assigné, avec ce regard égaré qui espère une aide bienvenue. Mais ce n'est apparemment pas ce que l'inconnu est venu chercher auprès de lui.

"- Qu'est-ce qui t'amène, alors ?

- J'voulais juste vous parler.

- A quel sujet ?"

Il semble hésiter. Alors qu'il cherche ses mots, ses deux mains viennent se poser sur son casque, tirent pour découvrir sa tête, laissant voir un minois juvénile piqué de taches de rousseurs, en partie cachés sous une tignasse roux terne que le port de la protection a passablement aplatie. Il essaie un sourire hésitant, ajuste la touffe folle. A voir son expression pleine d'espoir timide, et la maladresse dans ses gestes empressés, Cloud ne lui donne pas plus de dix-sept ans. Une nouvelle recrue, sûrement.

"- Bah c'est à dire ... J'voudrais pas paraître indiscret, mais y en a dans ma section, qui disent que vous avez connu Zack."

Ah. Oui, ça aussi, on le lui demande parfois. Moins souvent. Les gens interrogent plus volontier Kunsel, il a la parole facile et le sourire plus rassurant. Il aime élever la voix pour son vieil ami décédé, et il a bien plus d'histoires à raconter, pour l'avoir connu avant que le héros n'intègre la première classe. Mais, parfois, les fantassins les plus aventureux viennent trouver leur supérieur taciturne, le soir après l'entraînement, ou à l'heure du repas, quand il décide de prendre le sien dans la tour Shinra. Des jeunes avides de ces histoires qu'ils ont déjà entendues milles fois, histoires qui ont en partie bâti leur motivation à venir gonfler les rangs de l'armée.

"- Et du coup, j'voulais savoir ... Enfin, vous voulez bien m'parler un peu de lui ?

- Kunsel aura bien plus de choses à te dire à son sujet.

- J'sais, j'lui ai déjà demandé, même ! Y tourne un peu en boucle à la longue."

Le gamin tripote nerveusement son casque, se dandine d'un pied sur l'autre, incapable de tenir en place. L'excitation ne fait pas bon ménage avec la gêne, tout son corps le démange et il n'arrive pas à rester calme face à son interlocuteur. Parfois, ce genre d'énergie intenable irrite le soldat blond. Il aime la quiétude dormante de la salle de repos, le silence pesant qui écrase jusqu'à ses propres pensées, l'anesthésique de l'entraînement qui le laisse épuisé. Mais ces yeux à la limite du bleu, qui se posent sur lui pour déguerpir aussitôt, ces doigts fourmillants qui ne cessent de bouger, ce sourire qui refuse de s'effacer mais s'affaisse parfois, de peur d'une réponse négative, Cloud trouverait presque ça touchant. Il pense qu'il n'en voit pas souvent, des comme lui. Que son empressement lui rappelle sa propre arrivée au sein de l'infanterie. Voire même le comportement du grand brun qui l'a pris sous son aile.

Il se dit, si Zack se tenait là à sa place, il partirait d'un grand éclat de rire avant de tapoter la tête de ce gosse à peine adulte, et il lui raconterait tout ce qu'il voudrait savoir autour d'un chocolat chaud. Il ne se poserait pas la question. Il le ferait, simplement. Non sans dispenser une petite leçon sur l'honneur et les principes.

Bien sûr, Cloud n'est pas Zack. Il ne le sera jamais. Mais il peut au moins lui répondre.

"- Qu'est-ce que tu veux savoir ?"

A l'entente de la réponse, le jeune se redresse, sourit, ouvre la bouche, hésite, tapote son casque et se lance.

"- C'est vrai qu'il maniait une épée large comme deux fois son bras ? Genre, c'est possible d'soulever un truc pareil ?

- L'épée broyeuse. Et oui, c'est possible. Avec un peu d'entrainement."

Et une certaine dose d'énergie mako. Possible, le mot n'a pas le même sens pour ceux dont le corps est passé entre les mains de la Shinra.

"- Mais vous l'avez déjà vu s'battre avec ?

- Plusieurs fois.

- Wow ! Ça doit grave impressionner, non ?

- On s'y habitue."

Pressé de rentrer chez lui, Cloud prend le chemin de l'ascenseur, suivi de près par le jeune homme. Il ne manque pas de questions, maintenant qu'il a ouvert la bouche. Le garçon gaspille ses mots comme l'autre les économise, déverse un flot de curiosité que son supérieur contente patiemment, tout en s'éloignant de la salle d'entraînement.

"- Il était encore deuxième classe quand vous l'avez connu ?

- Quand j'ai entendu parler de lui, oui. Mais il avait monté en grade, la première fois qu'on est partis en mission ensemble.

- Et vous êtes allés où ?"

xoxoxox

Le froid qui lui griffe les muscles n'est plus qu'un mauvais souvenir.

Quoi que Cloud soit un garçon de la montagne - fière recrue de Nibelheim, comme il l'a dit à son camarade alors qu'ils trottaient loin devant le reste du groupe - il n'est pour autant pas habitué au températures mordante qui leur sont tombées dessus après le crash de l'hélicoptère. Son corps a cessé de trembler, enfin, mais le souvenir de la neige autour d'eux suffit à le faire grimacer. Heureusement pour eux, il restait de quoi faire du feu dans l'une des petites maisonnettes abandonnées qu'ils ont trouvées en arrivant à Modeoheim. De quoi de pas mourir congelé pendant la nuit.

Demain, ils iront visiter les vieux bâtiments déserts qui dorment sous la masse cotonneuse. Mais, pour l'instant, ils se remettent du trajet imposé qui les a épuisés.

"- Sandwich ?"

Cloud sursaute. Face à lui, son camarade originaire de Gongaga vient de s'asseoir, son bras musclé tendu dans sa direction. Deux morceaux de pains serrés, garnis comme il se doit, attendent entre ses doigts. D'ici, le fantassin peut presque deviner le goût frais de l'en-cas débordant de légumes, et son ventre laisse échapper un bruit qui trahit sa faim. Maintenant que la chaleur du feu est entrée dans son corps, l'enveloppe malmenée fait sentir les autres besoins qui l'assaillent, et le besoin de nourriture en fait partie. Les courbatures aussi, mais il ne peut pas y faire grand chose.

"- Ça veut dire oui?"

Le blondin détourne le regard.

"- On dirait.

- Sers-toi alors. J'les avais préparés pour tenir le trajet en hélico, mais … Enfin, t'as bien vu comment ça s'est fini. Et c'est meilleur que les rations de survies qu'on nous file."

Cloud hésite. Il a l'impression de voler quelque chose de précieux. Un morceau de réconfort caché dans un repas. Mais puisque Zack lui propose, et que la faim lui tord le ventre, autant en profiter.

"- Merci."

Sans attendre, il mord dans le sandwich. En effet, ça vaut mille fois les rations qui traînent dans leur sac, ces blocs au goût de sable qui s'effritent dans la bouche. Il a bien deux ou trois aliments appréciables, des dates et des tranches séchées de ce fruit dont il ne connaît le nom, mais dont la peau violette lui rappelle la tenue des soldat de deuxième classe. Mais rien qui ne vaille ce qui réveille alors ses papilles.

"- Allez, mange ! Va te falloir des forces pour la suite ! T'es un gars de la campagne, t'as de la ressource, ça nous sera utile.

- N'exagérez rien." il mord encore, plus affamé à chaque bouchée. "Je suis loin d'avoir vos compétences au combat.

- Bah, tu distances Tseng à la marche, c'est déjà bien !"

Il sourit, jette un regard vers le concerné qui téléphone à l'autre bout de la pièce, avant d'entamer son propre repas.

S'il n'insiste pas, Cloud ne partage pour autant pas son enthousiasme. Pour l'instant, c'est tout juste s'il réussi les missions qu'on lui confie, et il est loin d'être le meilleur élément de sa section. Son corps supporte peut-être aisément la marche, habitué qu'il est aux chemins tordus des montagnes de son pays natal, mais dès qu'il s'agit d'intensifier l'exercice, ses muscles lui font mal et ses poumons crient au supplie. On lui a dit qu'il finirait par s'améliorer, avec le temps, mais il commence à perdre espoir.

Quand il voit à quoi ressemble les membres du Soldat comme Zack, il doute sérieusement de pouvoir un jour lui arriver à la cheville.

"- Alors, c'est comment chez toi ?

- Chez moi ?

- A Nibelheim. J'suppose que ça doit changer de Midgar.

- Oh. Oui, assez."

Il jette un coup d'œil vers le feu de cheminée qui ronronne dans l'âtre. Le même que sa mère allumait, aux saisons les plus froides. Il se rappelle, les tas de brindilles qu'il allait ramasser avec Tifa pour le faire démarrer. Les étincelles qui dévoraient les branches avant de ronger la bûche.

"- C'est en altitude.

- Oh, comme Modeoheim ?

- Pas vraiment. Le village est moins haut, il ne neige pas autant.

- J'vois. Le geste tas de bicoques perdues entre deux falaises au bout d'un chemin tortueux ?

- Oui. C'est un peu ça.

- Tu m'étonnes que tu tiennes la route, ça a du te faire des cuisses en acier de grandir là-bas."

En acier, Cloud ne sait pas. Il est plutôt costaud, oui. Il n'y a jamais vraiment pensé.

"- T'as encore de la famille, là-bas ?

- Ma mère." il termine les derniers morceaux du sandwich trop vite avalé. "Et des amis, aussi. Enfin, une. Une amie d'enfance.

- Genre, une amie ..."

Le guerrier sourit et mime de ses doigts des guillemets. Son camarade écarquille aussitôt les yeux avant de secouer la tête, gagné par une bouffée de gêne.

"- Non ! C'est une amie de longue date, c'est tout.

- C'est tout

- Oui."

Entre Tifa et lui, il n'y a rien d'autre. Juste ces souvenirs du bon vieux temps qui les font rire quand ils se retrouvent et cette connaissance de l'autre que les heures partagées ont forgée. Il n'a jamais pensé ... Pas elle, pas comme ça. Ce serait étrange. Il préfère ne pas l'envisager, ça le met mal à l'aise.

Et puis, de toute façon ...

"- Bah, mignon comme t'es, doit bien y avoir quelqu'un à qui tu devais plaire, là-bas."

Mignon. Ce n'est pas vraiment le compliment qu'il attendait. Pas le genre de chose qu'on dit à un combattant, normalement. Il ne sait pas quoi répondre. Ses yeux trainent sur le sol. Ce genre de sujet, c'est compliqué. Il n'aime pas en parler.

"- Peut-être.

- T'as jamais fais gaffe ?

- Pas vraiment.

- Trop concentré sur les concours d'entrée de l'armée, c'est ça ?" le soldat rit. "Je vois le truc. J'étais pareil, avant d'intégrer le Soldat. Impossible de penser à autre chose."

Cloud se tend. Dans sa main, le papier qui protégeait son encas se froisse, alors qu'une douleur perce son cœur comme une aiguille passerait sous sa peau.

Lui aussi, oui, il était trop concentré. Mais pas sur les concours d'entré de l'armée, non. A l'instar de son nouvel ami, il visait le Soldat.

xoxoxox

Le soleil est déjà couché, alors que Cloud dépasse l'entrée de la tour Shinra. Les jours ont définitivement commencé à raccourcir.

Epuisé par une énième journée d'entraînement, le soldat s'éloigne du haut bâtiment marqué de l'emblème écarlate, pour retrouver les rues bondées de Midgard. A l'heure où les voitures envahissent les routes, le brouhaha de la fin du jour gronde entre les immeubles qu'il traverse. Il n'y fait plus attention, depuis le temps. Comme chaque fois qu'il quitte la caserne après que le soleil se soit effacé derrière la limite de la ville, une drôle de sensation l'habite. Le temps est suspendu, les rues se parent de lumières artificielles. Il ne reste que la nuit qui se dresse, cette ombre grandissante qui fait plus vive la lueur des néons placardés partout sur les buildings. La nuit pleine de bruit.

Cloud devrait rentrer chez. Il n'a plus que ça à faire, maintenant qu'il a bien transpiré et décliné toutes les invitations que ses collègues lui ont proposées. Non, la dernière représentation en date de Loveless ne l'intéresse pas. Pas plus que ce bar qui vient d'ouvrir, et qui fait son chiffre sur le portefeuille vide des nouvelles recrues.

Fut un temps, pourtant, où lui aussi se joignait aux autres pour boire, avant de regagner son toit d'un pas chancelant, le corps partagé entre la nausée et l'euphorie. Une manière comme une autre de s'intégrer, passé ses premier jours dans l'infanterie. Une solution pour oublier le Soldat qui le narguait comme un rêve mourant, et qu'il désespérait d'intégrer un jour.

Enfin. Ça n'a plus d'importance, maintenant.

Il devrait rentrer chez lui, donc. ll ne le fait pas. Pas tout de suite. Ses pas, qui devraient l'amener vers les quartiers du Secteur 8, le guident plutôt vers le square qui s'étend à la limite du Secteur 7, celui que les gens désertent maintenant que le jour a disparu. Il arrive sur l'esplanade qui surplombe l'endroit. Dos à l'immense bibliothèque bâtie non loin, il peut admirer pleinement la végétation assombrie sous l'aile de la nuit. L'herbe bleuie par la lumière blafarde, enracinée dans son peu de terre qui pèse sur la plaque. Les arbres disposés artificiellement, en droites rangées élancées le long des chemins de gravier. Ce puit de vie sylvestre planté entre les immeubles, qui n'a rien de naturel.

D'un regard, le jeune homme trouve son point de rendez-vous. Il entend comme un bruissement derrière lui, un son qui le fait sourire. Sans se retourner, il descend les escaliers taillés de part et d'autre de la place.

Quelques pas au milieu de la fausse nature, et c'est une immense statue de bronze qui s'élève face à lui, en plein milieu du parc. Elle projette son ombre écrasante sur la pelouse fraîche où attendent les derniers visiteurs. C'est du beau travail qu'ils ont fait, pour sûr, les types qui l'ont forgée. Le blondin ne doute pas de l'application que les artisans ont patiemment accordée à l'œuvre commandée par le maire, pour honorer leur héros. Mais, peu importe l'attention portée à ce visage familier, Cloud le trouve toujours désespérément fade, face au sourire inébranlable de Zack. La copie ne vaut rien contre l'original.

Il baisse les yeux. Sur le socle de marbre, les lettres d'or brillent.

"Zack Fair, Soldat de première classe, mort au combat contre Sephiroth.

Midgar lui rend honneur."

Le deuxième classe fixe ces mots, les mains dans les poches, l'esprit ailleurs. Il en sort une pour effleurer cette écriture sculptée. Un sourire sans joie apparaît sur sa face.

Il pense à l'ancienne statue, celle qui se dressait là avant, à la gloire du grand héros de la ville. Abattue, à l'annonce de la trahison de l'ex-première classe. Si vite remplacé.

Cloud reste là un moment, la tête pleine de souvenirs. Des années, il pense, et il se souvient encore de l'odeur du bois ravagé par le feu. Le murmure crépitant de l'incendie qui s'élevait tout autour, et les cris qu'il n'entendait plus. Des années. Et, parfois, il oublie comment souriait sa mère quand il étalait autour d'un repas ses rêves d'enfant et son admiration inconditionnelle pour Sephiroth. Il n'est plus bien sur du timbre que Zack prenait quand il tapotait son épaule, sa bouche pleine de paroles bateau pour le réconforter. Accroche-toi, crois en tes rêves. Est-ce qu'il lui parlait bien de rêves, d'ailleurs ? Non, peut-être qu'il évoquait plutôt ses convictions. La justice. Il n'est plus sûr.

Comme les rations fades qu'on leur donnait en mission, ces blocs de terre secs, ses souvenirs s'effritent peu à peu.

Cloud secoue la tête. Sa main s'éloigne, abandonne les lettres. Il se tourne, s'assoit dos contre la pierre qui soutient son vieux camarade. Se pose. Il voudrait juste arrête de penser, un instant. Se complaire dans la fatigue. Il n'est pas venu ici pour se torturer les méninges. Quand il rend visite à Zack, c'est toujours l'esprit serein. Il sait ce qu'il est venu chercher, au pied de cette effigie sacrée. Il ferme les yeux.

Il se demande s'il a fait le bon choix.

xoxoxox

Cloud sort de la salle d'entraînement, dépité. Il secoue la tête en soupirant, jette encore un coup d'œil aux bancs du couloir, mais il n'y trouve que les tenues bleues similaires à la sienne. Aucune trace de la tignasse noire et du rire franc qu'il traque depuis maintenant plus d'une heure. L'angoisse lui noue l'estomac.

On lui a bien dit, pourtant, que Zack n'était pas parti en mission. Kunsel le lui a confirmé ce matin.

"- Excusez-moi." il demande, en s'approchant d'un groupe de deuxième classe qu'il ne connaît pas.

Les deux hommes se tournent vers lui, surpris. Le premier enlève son casque. Son visage ne lui dit rien.

"- Oui ?

- Zack Fair n'est pas ici ?"

Les deux inconnus se regardent, avant de hausser les épaules.

"- Il a quitté le simulateur de combat en fin de matinée.

- Si tôt ?" le garçon s'étonne.

"- Le directeur l'a fait appelé dans son bureau. On l'a pas recroisé depuis."

Le bureau du directeur. A tous les coups, on va lui confier une nouvelle mission.

Sur ces indications, le jeune homme remercie les deux soldats avant de se diriger vers l'ascenseur, y grimpe et enfonce le bouton qui correspond à l'étage recherché. Son cœur tambourine, cogne fort comme le stress lui fait les mains moites. Est-ce qu'il a le droit de se trouver là ? Il n'est pas sûr. Dans le doute, il préfère ne pas y penser. Il doit vraiment parler au brun avant qu'il ne parte.

Il a appris, hier, qu'on l'envoyait sur les terres du Wutai pour traquer les déserteurs, disparus avant que le traité de paix ne soit signé. Un petit groupe aperçu plusieurs fois au sud des terres conquises, qui correspondrait à la description donnée. Cloud part avec trois de ses camarades d'ici vingt quatre heures, et la peur l'a gardé loin du sommeil toute la nuit. Dissimulé sous son casque, son visage porte les marques de la fatigue.

Lui, contre une bande de traîtres expérimentés. Il n'a pas le niveau pour ça. Le directeur devrait le savoir, pourtant, au vu de ses derniers résultats.

Il ne va jamais s'en sortir.

Mais il ne peut pas refuser. Il n'est pas suffisamment gradé pour se permettre pareil affront. Et il sait qu'il ne se démarquera jamais, s'il se repose sur la peur qui lui serre le ventre.

Le froid de l'angoisse partout dans le corps, le combattant s'approche du bureau de l'homme qui dirige le Soldat.

"Junon ?

- C'est une prison de haute sécurité. Il ne risque rien là-bas.

- Les interrogatoires ont porté leurs fruits ?

- Malheureusement, pas encore. Hollander refuse de nous donner la moindre information quant aux travaux qu'il a menés.

- Donc on ne sait pas où se trouvent les dernières copies de Génésis.

- Non."

La voix doucereuse de Lazard, Cloud l'identifie tout de suite. Il l'a entendue pour la première fois alors qu'il venait d'intégrer l'armée de la Shinra. L'homme tenait un discours au côté d'Heidegger, face aux nouvelles recrues de l'infanterie. Il s'étonne encore de ne pas lui trouver le timbre ferme et puissant qu'il avait imaginé au directeur du Soldat.

L'autre voix cependant, plus simple et discrète, le surprend. Elle est basse, non moins audible, articule clairement chaque mot comme pour s'assurer de la compréhension de son interlocuteur. Il ne mets pas longtemps à se souvenir de son propriétaire, alors que ce dernier sort de la pièce. Tseng. Son visage à peine étonné, entièrement dégagé par la queue de cheval qui retient ses cheveux profondément noir, il semble le reconnaître aussi.

"- Cloud ?"

Le concerné pâlit alors que le chef des Turks pose son regard sur lui, étonné de trouver là un simple membre de l'infanterie. Il ne fronce pas les sourcils, ne penche pas la tête, mais juste à la manière qu'il a de prononcer son nom, le garçon comprend qu'il ne s'attendait pas à le croiser. Evidemment.

"- Lazard t'a fait appeler ?

- Non." il secoue la tête, nerveux. "Je cherchais Zack. On m'a dit qu'il était dans son bureau."

Autant lui dire la vérité tout de suite, puisqu'il n'a rien à cacher.

"- Il n'est plus ici.

- Oh.

- Tu voulais lui dire quelque chose ?

- Rien d'important."

Il regarde vers le bureau du directeur, inquiet à l'idée que leur conversation ne lui parvienne d'ici. Il ne veut pas passer pour un espion, ni pour un soldat trop curieux, aux yeux de l'homme qui dirige cet endroit. Tseng doit le sentir, puisqu'il rejoint l'ascenseur d'un pas naturel, et l'invite à suivre d'un geste de la tête.

"- Si tu le cherches, il descend souvent dans les bidonvilles du Secteur 5, ces derniers temps.

- Dans les bidonvilles ?

- Oui."

Cloud fronce les sourcils. Ça l'étonne. Mais il comprend mieux pourquoi il ne l'a pas vu, ces derniers temps.

"Pourquoi ?"

Le Turk hausse les épaules.

"Il a ses raisons."

Le fantassin ne sait pas quel sens donner à cette réponse. Est-ce que Tseng ignore lui aussi les raisons qui poussent le soldat à disparaître dans les taudis ? Ou n'a-t-il simplement pas envie - pas le droit, peut-être - de les lui révéler ? Quoi qu'il en soit, Cloud ne se sent pas d'aller le chercher là-bas. Il ne connaît rien à cet endroit délabré, peuplé de maisons raccommodées et de monstres tapis sous les décombres. Il s'y perdrait sûrement.

Tant pis. Il ravale sa déception, et essaie tant bien que mal d'oublier la mission qui l'attend.

"Il s'y rend souvent, depuis qu'Angeal est mort."

Un souffle froid se glisse entre eux. Tout du moins, Cloud croit le sentir, alors qu'il regarde l'homme en noir disparaître derrière la porte de l'ascenseur qui vient de s'ouvrir. C'est comme un battement de cœur qui rate, comme le vent de Modeoheim qui lui soufflait sur la peau, la première fois que Zack lui a adressé la parole. La mort d'Angeal.

Encore aujourd'hui, il se demande s'il aurait pu y faire quelque chose, s'il ne s'était pas contenté de rester là, blessé dans un coin. Anéanti avant même d'avoir pu lever son arme.

Il revoir le visage égaré de Zack, dans l'hélicoptère qui les ramenait chez eux. Ses yeux qui ne savaient plus où s'appuyer. Ses larmes.

Il ne savait pas que les membres du Soldat pleuraient.


Voilà voilà. Comme tout est déjà écrit, et que j'ai retravaillé les premiers chapitres, je devrais pouvoir poster assez régulièrement. Une fois par semaine, ou tous les dix jours si vraiment j'ai pas le temps avec le déconfinement, mais normalement ça ira !

Des fois que le contexte serait trop flou, cette histoire se passe plusieurs années après Crisis Core, mais certains éléments de la fin diffèrent, et la situation de Cloud a évolué en conséquence. Voilà. Je sais pas si c'est plus clair, au final.

Du coup, j'espère que ça vous a plu ? Et à la semaine prochaine pour la suite !