Jingle : Cet os est écrit pour un jeu du FoF, il fallait le rédiger sur le thème "maëlstrom" en une heure. Pour plus de précisions vous pouvez m'envoyer un mp.

Disclaimer : Tolkien est notre maître !

J'ai un avis un peu plus mitigé sur celui-là, mais je trouve qu'en une heure, je ne m'en suis tout de même pas trop mal sortie, même si le thème est un peu plus tiré que d'habitude. Bonne lecture !

Les sept humeurs d'un hobbit

Aragorn découvrait à ses dépens qu'un hobbit pouvait être aussi versatile que le vent du nord. Deux hobbits plus particulièrement. Merry et Pippin étaient les plus jeunes des quatre compagnons qu'il comptait bien escorter jusqu'à Fondcombe, et était parfois deux belles épines dans son pied. Après une journée un peu plus éprouvante que les autres, le rôdeur se sentit légèrement découragé. Il savait cependant qu'il ne pouvait pas laisser ses émotions entraver sa mission et il continua à monter la garde alors que les semi-hommes se préparaient à aller se coucher.

Sam Gamegie avait cependant remarqué son changement d'humeur et vint donc s'installer à ses côtés près des braises, le rôdeur n'étant pas assez cruel pour imposer aux hobbits de grelotter de froid la nuit, mais pas assez imprudent pour tenter un véritable feu de camp.

« Vos pensées vous tourmentent-elle, Maître Gamegie ?, lui demanda le rôdeur. Vous auriez grand besoin de tout le repos que vous pouvez prendre, la route est encore longue et éprouvante jusqu'à Fondcombe, et je me méfie de ce qui peut suivre nos traces.

- Ne vous en faites pas Grand-Pas, je me reposerai bien comme il faut tout à l'heure, lui répondit le hobbit comme s'il faisait la conversation avec l'un de ses camarades. Je voulais juste m'assurer que tout allait bien pour vous.

- Merci de vous inquiéter de ma situation, mais je vous assure que j'ai survécu à des conditions de voyage bien pires. Vous n'avez pas à vous en faire pour moi, insista Aragorn avec un sourire.

- Je m'en fais un peu pour vous, c'est vrai, mais un peu pour Merry et Pippin aussi.

- Vraiment ? »

L'homme posa un regard interrogateur sur le hobbit, se demandant quel danger il pouvait bien imaginer pour ses deux amis.

« Il faut que je vous parle un peu plus de notre peuple, pour que vous compreniez leurs réactions et ne le preniez pas personnellement, au risque de leur en vouloir. Après tout, il vaut mieux connaître ceux avec qui l'on voyage avant de se lancer dans l'aventure, même si cela nous donne l'impression de nous plonger dans de longs chapitres ennuyeux d'introduction. »

Aragorn avait l'impression que Sam citait quelque chose qu'il avait déjà entendu auparavant.

« Si vous estimez cela nécessaire, répondit-il donc en se disant que si cela pouvait permettre au hobbit d'alléger ses pensées, il pouvait bien se distraire à l'écouter un moment.

- Je vais vous épargner la majeure partie du sujet, tenta de le rassurer Sam. Je ne vais pas m'aventurer sur l'herbe à pipe, notre goût pour la fête ou notre hospitalité, ni sur les caractéristiques de nos maisons et de notre mode de vie, ni sur nos habitudes de culture ou d'élevage...

- De quoi comptez-vous donc me parler ?

- Il est un sujet important sur lequel vous ne pouvez pas faire l'impasse, répondit Sam en rougissant un peu de son emportement, c'est la boustifaille. »

A cela, Aragorn leva un sourcil perplexe. Le matin même Pippin s'était plaint une fois encore de l'absence de second petit-déjeuner et était resté mélancolique une bonne partie de la matinée après cela. Mais le rôdeur ne voyait pas en quoi cela était un point aussi crucial. Sam vit clairement que son interlocuteur n'avait pas saisi l'importance de ce dont il comptait lui parler, alors il se lança dans ses explications pour exposer un peu mieux ses arguments.

« La journée d'un hobbit est rythmée par sept repas. Vous apprendrez probablement en notre compagnie, que ces sept moments rythment également nos émotions. Tout d'abord, nous nous levons le matin avec encore la lassitude du sommeil et de nos rêves douillets, et il nous faut bien le premier petit-déjeuner pour nous remettre de cette fatigue et parfois de l'humeur ronchonne qu'elle peut nous donner. »

Aragorn repensa au matin même. Il avait effectivement trouvé les deux hobbits qui avaient le moins conscience de l'enjeu du voyage tout ensommeillés. Il avait secoué l'épaule de Pippin pour le tirer de sous sa couverture et avait reçu en retour un « allez voir chez Merry s'il n'a pas pris vos oignons ». Le rôdeur avait un instant cru que les deux jeunes hobbits ne s'étaient pas suffisamment reposés, mais ils avaient été les premiers à s'endormir la veille et s'étaient à peine retournés pendant la nuit. Après leur petit-déjeuner cuisiné par Sam, ils avaient effectivement retrouvé un petit peu plus d'entrain et avait été prêts à prendre la route, toute trace de fatigue envolée.

Voyant qu'il avait saisi ce point, Sam reprit son explication.

« Le petit matin est propice à l'introspection car chacun aime se promener au calme à cette période. Cela pousse plus d'un hobbit à la mélancolie. Le second petit-déjeuner permet de marquer la véritable entrée dans la journée. Peu nombreux sont les hobbits à bavarder avec leurs voisins avant d'avoir pris ce repas. Il sert à effacer les doutes et à laisser derrière soit la journée de la veille. »

C'était donc cela qui avait manqué à Pippin et l'avait rendu si morose. Aragorn était habitué à vivre au jour le jour, mais pour les hobbits, cela devait être plus compliqué. Ils étaient un peuple agricole, qui vivait pour le long terme. Peut-être avaient-il ainsi plus tendance à s'inquiéter des conséquences que pouvaient avoir les petits détails de la veille. Mais le rôdeur avait du mal à comprendre comment un repas pouvait balayer cela. Cependant, il fit signe à Sam de poursuivre.

« Une fois la journée démarrée, c'est le moment où nous nous mettons habituellement aux gros travaux, mais aussi où nous sommes le plus volontaire et prêt à nous dépasser. La collation de onze heure entretient cet entrain jusqu'au déjeuner. Sans elle, nous devenons plus paresseux ou découragés. »

Une fois encore, le rôdeur pouvait comprendre de quoi parlait Sam. Ce dernier était parvenu à glisser une pomme à chacun pour l'occasion le matin même, et leur voyage avait pu se poursuivre sans accroc. Cependant, les jours précédents, Pippin en particulier s'était mis à traîner des pieds, se faisant sans arrêt fustiger par son cousin qui l'enjoignait à arrêter de se plaindre. Au final, les deux hobbits avaient fini d'une humeur massacrante qui avait duré jusqu'au déjeuner.

« Le déjeuner marque le milieu de journée. Lorsque le travail à accomplir n'a pas été suffisamment avancé dans la matinée, cela peut créer de fortes angoisses. Ce repas est le moment de nous poser et de nous ressourcer pour affronter la seconde partie du jour plus sereinement. C'est un temps sacré où on éloigne nos problèmes pour nous ressourcer. »

Ce qui expliquait la bonne humeur générale à cette occasion. Aragorn avait pensé que c'était simplement le fait de manger après avoir sauté deux repas, mais la signification du déjeuner pour les hobbits semblait leur être propre.

« Comme les adultes sont en général d'humeur à faire la sieste où à prendre un peu de bon temps après avoir déjeuné et calmé leurs angoisses, le début d'après-midi est en général le moment où les jeunes font le plus de bêtises car ils disposent de plus de liberté non supervisée. D'un côté, les jeunes dépensent beaucoup d'énergie à ce moment, et ils ont besoin de se ressourcer avec le goûter, et de l'autre, les adultes ont aussi besoin de calmer leurs nerfs après toutes les bêtises qui ont pu être commises dans leur dos. Et je vous assure que nous sommes un peuple qui peut être très espiègle. »

Ce n'était pas difficile à croire.

« Bref, le goûter permet de calmer toute cette excitation pour repartir sur des bases plus calmes. »

C'était donc ce qu'il fallait pour calmer les deux galopins quand ils se mettaient à raconter n'importe quoi et à se lancer mutuellement des défis absurdes. Aragorn avait simplement pensé qu'ils s'ennuyaient du voyage et faisaient passer le temps. En réalité, ils s'autorisaient leur moment d'espièglerie en attente du goûter pour redevenir sérieux. D'un certain point de vue, il était plutôt sain de se garder un moment de la journée où se laisser un peu plus aller que le reste, cela permettait de rester concentré le reste du temps, ce qui semblait avoir manqué aux hobbits en peine de goûter.

« Le dîner marque la fin des efforts de la journée, et l'ouverture des festivités. Nous sommes un peuple très festif, mais avec un grand sens des responsabilités. »

Au point de s'engager dans un périple de plusieurs semaines pour amener un anneau magique chez les elfes, ne put qu'acquiescer intérieurement Aragorn.

« Le dîner est un peu le signal de permission de se détendre. Sans lui, nous avons l'impression d'avoir passé une mauvaise journée. »

Heureusement qu'ils ne sautaient pas ce repas dans ce cas. Aragorn n'avait pas envie d'entendre les jérémiades de Pippin s'il avait l'impression d'avoir passé une mauvaise journée. Jusqu'à présent, les hobbits étaient toujours restés de bonne humeur après le dîner, parfois un peu trop. Aragorn devait souvent leur rappeler que leurs ennemis pouvaient avoir des oreilles partout et qu'il n'était donc pas sage de se mettre à chanter au milieu des plaines.

« Et enfin, le souper marque le retour au calme et encourage à aller se coucher en dormant sur un ventre bien plein qui ne peut apporter que de beaux rêves. »

Ce qui expliquait l'habitude qu'il avait surpris chez Merry et Pippin de grignoter sous leur couverture. Il était vrai que sans cela, ils étaient toujours en train de discuter entre eux, telles de vraies pipelettes et semblaient incapables de se calmer pour dormir.

Après ces explications, Sam souhaita bonne nuit au rôdeur et alla se coucher en croquant une pomme. Aragorn comprenait à présent l'importance de bien nourrir ses hobbits et se dit que ces sept repas étaient peut-être la raison pour laquelle on trouvait si peu de hobbit prêts à vivre la vie des grands chemins dans les épopées. Il n'allait cependant pas être très facile de les accommoder à cause de l'état de leurs réserves et le rôdeur se résolu donc à devoir en subir les aléas.

Plus tard dans la nuit, et alors que le sujet lui revint en tête et qu'il analysait le comportement de Frodon par exemple, Aragorn commença à se poser des questions et à douter de la véracité de ce que Sam lui avait expliqué. Frodon était toujours volontaire et un peu mélancolique, peu importe le moment de la journée ou le nombre de repas. Et le comportement de Pippin pouvait être parfaitement attribué à son immaturité plutôt qu'à l'effet de la réplétion de son estomac sur son humeur. Le rôdeur jeta un regard suspicieux vers la forme étendu et endormie de Sam, et aperçut son sac d'où pendaient casseroles et poêlons. Il ne put empêcher un sourire en coin de fendre ses lèvres.

Il avait cru que Pippin et Merry étaient les plus espiègles, mais c'était avant de parler de nourriture à un cuisinier.


Si toi aussi tu as sauté le chapitre d'introduction sur les hobbits la première fois que tu as lu (ou essayé de lire) le Seigneur des anneaux, ou que tu as faim là maintenant et que tu te prendrais bien une petite collation de onze heure (parce que qui n'a pas faim en permanence pendant ce confinement ?), ou simplement que tu veux me faire partager ton ressenti sur ce OS, n'hésite pas à m'en faire part dans une review :)