Un nouvel OS, eh oui XDD Pendant l'écriture du souffle du Diable, ça n'empêche pas mon esprit de trouver d'autres idées ! Du coup voici l'une d'entre elles, sortie tout droit de mon cerveau étrange XD

Dans l'histoire originale de Shakespeare, on entend brièvement parler d'un certain « Valentin » ou « Valentino » en italien, qui serait le frère de Mercutio. Mais leurs parents n'apparaissent nulle part ! Sont-ils morts ? Ou tout simplement absents, leurs fils vivant loin de chez eux ? Et pourquoi Valentino n'apparait pas dans les adaptations de l'œuvre originale ? Voici peut-être une réponse…

DISCLAIMER : cette idée m'a été très largement été inspirée par l'œuvre de Marylène Delaisement, qui a écrit deux superbes livres sur notre trio de Rois du Monde. Les livres s'intitulent « Vivre, y a que ça d'important » et « Aimer, c'est payer le prix ». Oui, je me suis inspirée de son histoire pour créer celle-ci. Mais je ne la plagie absolument pas, et je tiens à le préciser. Je me sers simplement de certains éléments pour étayer mon histoire.

L'histoire sera en deux (voire 3 si besoin) parties, parce que sinon ça ferait trop de texte sur une seule publication XD

Famille

Mercutio ouvrit les yeux. Allongé dans l'herbe entourant le palais de son oncle, sous un arbre lui procurant une ombre bienfaisante, il s'était vite assoupi. Il n'était pas avec les Montaigu pour une fois, ses deux amis ayant été requis par la comtesse pour des questions de garde-robe. Il était donc seul, et avait préféré rester au palais princier plutôt que de courir les rues sans ses frères. Il s'étira de tout son long et se redressa en position assise, un léger sourire aux lèvres, ravi d'échapper à la corvée de dressing. Il plaignait presque Roméo et Benvolio. Lui-même n'avait pas à s'en faire de ce côté, son oncle ne lui ordonnant de renouveler ses vêtements que lorsque ceux-ci devenaient trop petits, ou trop abîmés pour être présentables. Et de toute manière, jamais le brun n'aurait consenti à porter des guenilles déchirées. Il avait un rang à tenir, de même qu'une certaine réputation après tout.

Car ils plaisaient, ses amis et lui. Ils avaient un grand succès auprès de la gente féminine de Vérone, et comptaient bon nombre d'amis partout en ville. Avec ses longs cheveux noirs qui lui tombaient à la taille, son visage aux traits fins et ses yeux vert pétillants de malice, il faisait partie des jeunes hommes les plus prisés des environs, tout comme ses deux amis. Et ils aimaient cette adoration qu'on leur portait, même s'ils essayaient de ne pas en abuser. Ils jouissaient des faveurs de ces dames et distribuaient les leurs sans distinction de rang ou de richesse, tant qu'ils en tiraient un plaisir mutuel. Ils ne s'engageaient que rarement dans une relation à long terme, préférant croquer la vie à pleines dents sans se fixer. Prendre femme ? Non merci, très peu pour eux !

Alors qu'il songeait avec plaisir aux frasques qu'il menait avec ses deux compères, un garde vint à sa rencontre :

-Messire…Pardonnez-moi, mais le Prince vous demande dans son bureau…

-J'irai dans un moment alors, répondit le brun avec un sourire espiègle. Je ne veux pas le déranger alors qu'il a sûrement autre chose à faire.

-En fait…Il a précisé que je devais vous amener à lui sitôt que je vous aurai trouvé…

-Ce qui est chose faite, manifestement, soupira le jeune homme, levant les yeux vers la voûte verdoyante de l'arbre. Entendu, je vous suis… Je ne voudrais pas que vous ayez des ennuis par ma faute…

Mercutio se mit debout, épousseta sa chemise d'un violet éclatant, et remit un peu d'ordre dans sa crinière avant de suivre le garde jusqu'au bureau de son oncle. Il ne s'y rendait pas souvent, et préférait donc être introduit plutôt que de débarquer ainsi, même invité. De fait, il n'avait guère de contacts avec sa seule famille vivant ici. Le Prince était très occupé, et n'avait pas le temps de chaperonner son neveu dissipé et doté d'une personnalité ne s'accordant pas à celle du monarque. Aussi, la plupart du temps, se contentait-il d'un sermon ou d'une remontrance légère, avant de le laisser vaquer à ses occupations et de retourner aux siennes. Leur relation était distante et pas franchement chaleureuse…

Le brun en était là de ses réflexions quand la porte du bureau s'ouvrit, le laissant entrer. Le garde referma derrière lui, et les laissa seuls. Le jeune homme laissa errer son regard rapidement, faisant le tour de la pièce. Immense, comme toutes celles du palais, elle était finalement peu ornée. Seules de lourdes tentures pendaient aux murs, maintenues par des cordons dorés. Une cheminée de marbre diffusait en permanence une douce chaleur, grâce au feu qui y brûlait. Et, trônant au centre de la pièce, un grand bureau remplissait l'espace, fier meuble de bois massif aux pieds délicatement sculptés, et surmonté d'une plaque de marbre où reposaient des dizaines de parchemins quelconques. Un fauteuil à haut dossier recouvert de velours bordeaux, aux accoudoirs sculptés et peints à l'or…Tout dans la pièce respirait la puissance et le pouvoir. Tout comme l'homme qui se trouvait assis là d'ailleurs. Le Prince de Vérone, Escalus, était penché sur un parchemin et ne prêtait aucune attention à son visiteur. Son couvre-chef, du même brun chaud que sa robe, reposait sur un coin du meuble.

Le jeune homme cessa son examen et soupira discrètement, avant de se racler la gorge et de se lancer, d'une voix relativement assurée et aussi gaie et bruyante qu'à son habitude :

-Vous avez envoyé un garde me chercher, mon oncle. Y a-t'il donc urgence, que vous vouliez me voir immédiatement ?

-Assieds-toi, veux-tu, et sois un peu sérieux deux minutes…

Le dirigeant n'avait même pas levé le nez de son papier. Mercutio, un peu déconcerté par l'accueil, haussa un sourcil, s'avança et prit place dans le siège des visiteurs, croisant ses longues jambes et attendant le bon plaisir du monarque, sans pour autant s'empêcher de lancer une pique de son cru :

-Vous vous abîmez les yeux sur ces papiers, mon oncle, bientôt vous devrez les avoir sous le nez en permanence !

Il ponctua sa phrase d'un rire léger, loin du son sonore qu'il lançait en temps normal. Mais il n'était pas totalement idiot, il voyait bien que son parent, à fleur de peau, risquait de l'envoyer sur les roses. Il tint donc sa langue et, un sourire aux lèvres, attendit patiemment. Escalus finit par lever le regard, et fixa son neveu si longtemps sans ciller que le brun s'agita légèrement dans son fauteuil, mal à l'aise. Que se passait-il donc, par tous les Saints ? L'homme finit par se redresser, et lui lança, d'une voix neutre :

-Tu sais que j'envoie régulièrement de tes nouvelles à tes parents, n'est-ce pas ? Et que, si tu le souhaites, je peux en obtenir d'eux.

-Je le sais oui, répliqua Mercutio, en croisant les bras. Je sais que vous correspondez avec eux.

Toute bonne humeur s'était effacée de son visage, et il s'était complètement fermé. Il enchaîna, d'une voix plus grave :

-Si vous avez demandé à me voir pour me parler d'eux, c'était inutile. Je ne veux pas…

-Je viens de recevoir une lettre.

Le jeune homme s'arrêta dans sa tirade, et fixa son oncle. Il avait reçu une lettre. Très bien, et alors, en quoi ça le concernait ? Il resta silencieux, attendant la suite, repoussant une mèche de cheveux en arrière. Escalus soupira, et, comme s'il n'y avait pas de bonne façon d'annoncer cela, il croisa les mains sur son bureau :

-Tes parents…seront ici dès demain. Ils viennent passer quelques jours à Vérone avec ton frère.

Il y eut un moment de silence. Un long moment. Puis Mercutio bondit sur ses pieds et regarda son oncle avec stupeur :

-Vous…Plaisantez, n'est-ce pas ? C'est une blague…

Il fixait le Prince, attendant qu'il se moque de lui, ou qu'il lui annonce que c'était une erreur…N'importe quoi qui lui permettrait de comprendre et de retrouver des couleurs. Il passa une main presque tremblante dans ses cheveux, sans le lâcher des yeux, attendant le verdict.

-Dites-moi que vous vous moquez de moi mon oncle…

-Vu ton état, je préfèrerais. Mais non, je ne plaisante pas, tes parents nous rejoindront dès demain matin. D'ailleurs, tu seras avec moi pour les accueillir.

-N'y pensez pas, jeta Mercutio, les yeux brillants. Je ne veux pas les voir.

-Tu seras avec moi pour les accueillir, répéta Escalus, sans hausser le ton. Tu n'y couperas pas, alors autant t'y faire tout de suite. Ma sœur compte sur ta présence, donc tu seras présent.

C'était clair et net, et le brun dut se rendre à l'évidence. Il devrait affronter cette épreuve. Il fixa son oncle dans les yeux un moment, avant de détourner la tête, baissant le regard sur le parquet ciré.

-Très bien…Je serai là. Mais n'en demandez pas davantage.

Il s'écarta du fauteuil, et commença à marcher vers la porte, dans l'intention évidente de quitter la pièce. Le Prince le retint un instant encore :

-Mercutio…Je sais que tu n'es pas heureux de ce que je t'apprends. Sache simplement que je n'y suis pour rien, et que si tu as besoin…

-Laissez, mon oncle…Je dirais bien que c'est gentil de votre part, mais…

Il serra les poings, avant de continuer :

-Mais j'ai un peu de mal à faire la part des choses, là tout de suite. Si vous voulez bien m'excuser…

Sur ces paroles, prononcées d'un ton presque triste, il quitta le bureau, refermant la porte derrière lui en silence. Il descendit les escaliers, sortit dans la cour, et se rendit directement aux écuries pour récupérer l'étalon qu'il montait depuis longtemps. Il s'approcha de la stalle, lui caressa doucement les naseaux avant d'ouvrir la porte et de l'enfourcher à cru, pour le lancer au grand galop. Cramponné à sa crinière, le visage enfoui dedans, il le laissa partir à bride abattue, sans chercher à le contrôler. Mercutio traversa ainsi la ville à toute allure, sans s'arrêter, obligeant les passants à s'écarter du chemin pour ne pas être piétiné. Il ne prit pas garde aux cris de colère qui marquaient son passage, enfermé dans une bulle où il n'entendait rien. Il finit par arriver sur une butte surplombant Vérone, où il venait parfois avec ses deux amis. Située un peu à l'écart tout en restant dans les murs, elle offrait un très beau panorama sur la cité coupée en deux par l'Adige. Il descendit de sa monture, et s'avança un peu dans l'herbe, perdu dans ses pensées. Sa famille…Sa famille était ici depuis 10 ans. Il était arrivé à Vérone à 10 ans, expédié là par son père qui ne supportait pas son caractère fantasque, si différent de Valentino, son aîné. Ses parents, qui ne savaient pas le cadrer, avaient laissé tomber et l'avait envoyé ici, loin de Venise et du palais qui l'avait vu naître et grandir.

C'était de loin la meilleure décision qu'ils avaient prise à son sujet. Il était arrivé sans attache, mis à part son oncle qu'il connaissait à peine, et sans savoir s'il allait pouvoir rester. Le jeune exilé qu'il était à l'époque avait pourtant rapidement trouvé deux autres enfants avec qui il s'était lié d'amitié, l'héritier Montaigu et son cousin. Et très vite, ils étaient devenus bien plus que des amis. De véritables frères de cœur, soudés par un lien bien plus fort que le sang. Une promesse : « A la vie, à la mort, ensemble toujours plus forts ! » Et rien n'avait démenti tout ça au fil des années, au contraire, le temps avait renforcé leurs accroches pour les rendre indestructibles.

Mercutio soupira, et passa ses deux mains dans ses cheveux. Vérone était sa maison désormais, et sa famille était composée de Roméo et Benvolio…et de son oncle, en périphérie. Il ne voulait pas que ce bonheur qu'il avait trouvé soit entaché ou menacé…et l'arrivée de ses géniteurs pour le lendemain était une menace, selon lui. Sa vue se brouilla, et il se rendit compte avec stupeur que ses yeux étaient remplis de larmes. Il passa ses doigts sous ses yeux, et regarda sans comprendre l'humidité qu'il avait recueillie. Il ne pleurait quasiment jamais, alors pourquoi maintenant ? Serrant les poings, il fixa l'horizon, s'efforçant de respirer calmement. Son équilibre était en péril, voilà pourquoi il était dans cet état. Bouleversé, stupéfait, inquiet aussi pour son devenir. Mais il se fit une promesse : il ne quitterait pas Vérone. Sa vie était ici, il avait grandi ici, hors de question de perdre tout ce qu'il avait gagné.

Il resta sur la butte toute la fin de journée et la soirée, perdu dans ses pensées, à marcher de long en large ou à rester assis dans l'herbe tendre, les genoux repliés sur la poitrine et entourés de ses bras. A la nuit tombée, il décida de se secouer un peu. Ses amis devaient se demander où il était passé, s'inquiétaient peut-être de ne pas le trouver. Il se leva, épousseta son pantalon, et rejoignit son cheval qu'il caressa un instant, pensif.

-Qu'est-ce que je vais faire…

Il le regarda en souriant piteusement :

-Je dois être en mauvais état pour te parler comme ça…Alors que tu ne peux pas vraiment m'aider…

Il lui caressa le chanfrein, et remonta sur son dos en souplesse. Excellent cavalier, il ne craignait pas de monter sans selle ni rênes, même s'il n'en avait pas l'habitude. Il repartit au trot, plus calme qu'en début d'après-midi. La tempête était plus ou moins passée. Il prit le chemin du palais Montaigu, n'ayant aucune envie de se confronter de nouveau à son oncle. Il avait besoin de voir ses amis, de les mettre au courant aussi. Il aurait besoin d'eux, de leur soutien et de leur amitié.

Arrivé à destination, il confia son cheval à un palefrenier, et pénétra dans la magnifique demeure assez rapidement. L'heure était assez avancée, il espérait ne pas déranger…l'Intendant l'annonça au salon, et il put ainsi retrouver les parents de Roméo, qu'il salua poliment.

-Je suis navré de vous déranger à cette heure assez indue…Je ne m'étais pas rendu compte qu'il était si tard.

-Vous allez bien, Mercutio ? demanda la comtesse, inquiète de voir ses yeux verts dépourvus de leur éclat de folie habituelle.

Il hocha la tête, un léger sourire aux lèvres :

-Un peu fatigué, mais tout va bien, je vous remercie.

Elle hocha la tête, un peu perplexe (lui, fatigué ?), mais n'insista pas. Le comte reprit, après un instant de silence :

-Vos amis sont probablement dans la chambre de Roméo. Vous connaissez le chemin je pense, ajouta-t'il avec un petit sourire. Ils ont hâte de vous voir je crois…

-La chambre que vous occupez quand vous venez est toujours prête à vous recevoir, si vous le souhaitez, termina la mère avec gentillesse.

Rougissant faiblement, le brun s'inclina devant eux et leur souhaita une bonne soirée avant de se retirer, chamboulé par la bienveillance avec laquelle il était traité chaque fois qu'il rencontrait les parents de ses amis. Il se sentait…accueilli, à défaut d'un meilleur terme. Même si les débuts avaient été difficiles, n'étant pas le garçon le plus équilibré qui soit, il avait réussi à faire leur conquête et maintenant…C'était sa maison ici, plus que chez son oncle où il n'était pratiquement jamais. La maison était chaleureuse, pleine de vie, le couple comtal toujours présent pour son fils et son neveu. Une vraie famille vivait dans ces murs, sans faux semblants, sans tricherie.

Il monta les escaliers lentement, réfléchissant à comment il allait présenter les choses à ses deux amis. Il ne pouvait pas garder ça pour lui, de toute manière ils parviendraient à lui tirer les vers du nez. Donc il n'avait guère le choix finalement. Il esquissa un léger sourire, attendri par cette amitié qui le liait à ses deux compères. Arrivé devant la porte de la chambre de Romeo, il n'hésita qu'une seconde avant de la pousser sans bruit, risquant un œil à l'intérieur. Il n'entendait aucun bruit, et sut très vite pourquoi : ses compagnons s'étaient réfugiés sur la terrasse, leur endroit préféré quand ils étaient tous ensemble. Il entra et referma la porte sans la claquer (pas question de les alarmer), puis traversa la pièce à grandes enjambées et parvint à la baie vitrée, où il resta immobile quelques secondes. Juste le temps que ses amis le repèrent, et ne lui sautent dessus en le harcelant de questions :

-Tu vas bien ?

-Où étais-tu ? On s'est fait un sang d'encre !

-Bon sang Mercutio, tu nous as fait peur !

-Tu aurais pu prévenir quand même…

-Tu vas bien ?

Cette question, répétée, eut le mérite de calmer le jeu des répliques et ils se turent, entraînant le brun derrière eux sur le balcon. Une chaise supplémentaire semblait l'attendre, et il y prit place, croisant ses longues jambes tout en regardant Roméo et Benvolio s'asseoir à ses côtés. Souriant doucement, il hocha la tête :

-Je vais bien oui…Je suis désolé de ne pas vous avoir prévenus, mais…j'avais besoin de réfléchir. Et d'être seul quelques instants.

-Quelques instants qui ont duré tout l'après-midi quand même, fit remarquer Benvolio. On est passé chez le Prince, mais l'intendant nous a dit que tu étais parti au grand galop et que personne ne savait où tu étais…

Mercutio soupira faiblement et se frotta les yeux de ses paumes.

-Oui, c'est vrai…

Roméo avança un peu son siège, et posa sa main sur son épaule, en murmurant doucement :

-On voit bien que tu n'es pas bien, mon ami…Dis-nous ce qui t'arrive, peut-être pourrons-nous t'aider ?

Il y eut un moment de silence, puis le bouclé posa ses coudes sur ses genoux, et penché en avant, chuchota d'une voix faible :

-Mon oncle m'a fait appeler dans son bureau en début d'après-midi…vous étiez encore aux prises avec la couturière, et j'étais dans les jardins du palais. Il avait…reçu une lettre de Venise.

Ses deux amis le regardèrent avec inquiétude, sachant très bien que Venise, la ville de l'eau, était proche de la maison d'enfance du jeune homme. Quoi qu'il n'en parle jamais. Donc Venise signifiait que la lettre venait probablement de ses parents. Avec une grimace compatissante, Benvolio demanda :

-Que disait la missive ?

Les yeux vert prairie se posèrent sur lui un long moment, en silence, avant que leur propriétaire ne réponde, serrant soudain les poings avec colère :

-Ils…seront là demain. Et mon oncle insiste pour que je les accueille avec lui.

Il détourna les yeux, incapable de soutenir leur regard. Fixant l'horizon illuminé par la lune et les étoiles, il ne dit plus rien, le cœur cognant douloureusement dans sa poitrine. Il finit par se lever, et s'accouda à la rambarde de pierre, ses prunelles se perdant dans l'immensité sombre du ciel nocturne. Le silence se prolongea, le temps que Roméo et Benvolio digèrent la nouvelle et la comprennent. Ils fixèrent leur ami, dont la silhouette se découpait dans le halo de la lumière de la chambre. Il n'allait pas bien, et c'était un euphémisme : le Vénitien allait vraiment mal, même s'il s'efforçait de le cacher. Ils savaient aussi qu'il gardait des cicatrices mentales de ses premières années, bien que le sujet soit tabou et qu'il n'en parle jamais. Le blond finit par le rejoindre, et posa une main sur son épaule, avant de demander lentement, ne sachant pas vraiment comment aborder le sujet :

-Je suppose que le Prince ne te laisse pas le choix… ?

Mercutio eut un bruit étrange, comme un grognement mêlé d'un ricanement :

-Non, pas vraiment…Je survivrai, la question n'est pas là…

-Mais tu ne peux pas les voir, termina Roméo en les rejoignant, se postant de l'autre côté du brun. Et tu as tes raisons, bien que tu n'en parles jamais…

-Je ne peux pas…J'aimerais pouvoir vous le dire, mais je ne peux pas, chuchota son ami. Je ne suis pas sûr que je pourrais un jour, de toute façon…

-On ne te le demande pas, ajouta Ben en lui serrant l'épaule. En revanche, j'ai une question : Veux-tu que nous soyons avec toi demain ?

Nouveau silence, ponctué uniquement par le bruit du vent, et soudain Mercutio laissa échapper un léger rire entrecoupé :

-Je…Je n'osais vous le demander…Je ne voulais pas vous mêler à ça…

-Idiot ! murmura son ami brun, amusé, en lui ébouriffant les cheveux. Penses-tu vraiment que nous allions te laisser seul dans un moment pareil ? La question de Benvolio n'en est pas vraiment une, car nous ne te lâcherons pas.

Ils échangèrent des sourires, et le plus petit des trois acquiesça doucement, en se redressant :

-Merci…d'être là.

-Toujours là les uns pour les autres, Mercutio…tu n'as pas oublié, n'est-ce pas ?

-Non, bien sûr que non…

Ainsi se termina cette conversation au clair de lune, et le brun était enfin apaisé. Il avait pu parler à ses amis, et ceux-ci le soutenaient…quoi qu'il arrive, ils seraient toujours là pour lui, comme lui serait là pour eux. Il donnerait sa vie pour eux si nécessaire. Et inversement.