Harry était inexplicablement nerveux. C'était un acte plutôt banal, d'inviter un amant chez soi. Des milliers de personnes le faisaient tous les jours. Séverus avait été dans l'ancien appartement de Harry de nombreuses fois, quand ils avaient commencé leur relation.

Mais cette fois c'était différent.

« Tu n'es que la quatrième personne qui sait que je vis ici », dit Harry en regardant la réaction de Séverus. Il semblait être intéressé, mais ne montrait rien. « Les seules autres personnes qui viennent sont Ron, Hermione et mon éditrice. »

« Merci de me le montrer. », dit Séverus, en passant la main sur la cheminée. « Ce cottage est ton sanctuaire. J'imagine que tu as un lien très personnel avec lui, bien au-delà du lien d'un maître de maison. »

Harry hocha la tête. Honnêtement, le cottage était même plus qu'un sanctuaire pour lui. Pendant tant d'années, ça avait été bien plus. Ça avait été sa protection, sa famille, son amant ... ce n'était tout simplement pas un endroit facilement partagé avec d'autres. Harry pensait presque que c'était montrer de l'irrespect à cet endroit, d'y amener quelqu'un qui ne l'apprécierait pas complètement - un fait impossible, il le savait, pour un personne rationnelle qui ne comprendrait à quel point cet endroit était vitale pour le bien-être de Harry ? Mais malgré tout, il ne pouvait s'empêcher de se sentir soulagé que Séverus semblait traiter l'événement avec le respect qu'il avait espéré.

« Ça te va bien », dit finalement Séverus. « C'est exactement ce que j'imaginais. »

« Tu as imaginé ... » une pensée soudaine vint à Harry. « Tu savais que je vivais ici ? »

« J'étais un agent double qui s'attendait à ce que le Seigneur des ténèbres le tue », dit Séverus, un léger sourire sur le visage. « Bien sûr, j'ai pu déterminer où tu vivais, surtout quand tu étais si déterminé à ne pas être retrouvé. »

« Mais tu n'es jamais venu », dit Harry.

« Comme tu t'en souviens, j'étais certain que tu ne voudrait pas me voir. » Séverus regarda par une des fenêtre, essayant apparemment d'avoir une meilleure vue sur l'eau dehors.

« Mais, même ces derniers mois. Ces derniers jours. Tu aurais pu. »

« En effet », dit Séverus. Il se retourna, face à Harry une fois de plus. « En fait, si tu n'étais pas venu à Poudlard ce soir, je l'aurais fait. »

« Mais? »

« C'est ta maison, Harry. Une que tu as construite tout seul dans une période de grande lutte. Je devais attendre d'être invité à y venir. Faire irruption, frapper à ta porte, exiger l'entrée alors que je n'en avais pas encore gagné le privilège, m'aurait finalement fait plus de mal que de bien. »

Et à ce moment, Harry savait avec la plus grande certitude que lui et Séverus seraient ensemble pour la vie. Merlin, comment avaient-ils pu aller si loin ? Du plus féroce des adversaires à ça ? Non seulement partageaient-ils un lien qui venait d'expériences traumatisantes partagées, mais ils se comprenaient l'un l'autre. Ils savaient exactement ce qui faisait marcher l'autre, comment l'autre pensait, comment l'autre avait besoin d'être aimé. Associé à une attirance sexuelle indéniable et un profond respect l'un pour l'autre, c'était un lien indestructible et intouchable qui les unissait. Même deux décennies de souffrance et de malentendus n'ont pas pu le décimer. C'était, en fait, la seule façon que ça pouvait finir pour eux deux. Leur sort était tout à fait inévitable, et Harry en était profondément reconnaissant.

Mais malgré tout, il y avait encore plus à dire. Parce que même si Harry savait qu'ils continueraient d'être ensemble encore et encore, la dernière chose qu'il voulait était une autre séparation inutile provoquée par une autre incapacité à communiquer. Ils avaient réussi à survivre une fois, mais Harry ne savait pas ce que les dommages seraient si cela se reproduisait à nouveau.

« Tu as raison, » dit-il. « C'est mon sanctuaire. Pendant près de vingt ans, c'était le seul endroit où je me sentais en sécurité, où je pouvais avoir confiance en moi-même, où je me sentais même digne d'être en vie. Mais maintenant ... j'ai ça avec toi, aussi. »

Séverus prit les mains d'Harry et les serra fortement.

« Mais je ne suis pas tout à fait prêt à renoncer à cela » dit Harry, les mots venant dans un souffle. « Ça semble stupide, mais c'est plus qu'une maison pour moi. Et je sais que c'est peut-être une couverture de sécurité et que ce n'est pas tout à fait sain. J'espère qu'un jour je saurai avec certitude que c'est simplement ma maison bien-aimée, et pas un endroit où je vais me cacher. Mais je n'en suis pas tout à fait encore là. Mais quand je suis avec toi, j'ai l'impression qu'un jour je pourrais l'être. Et donc ... » Harry prit une profonde respiration. « Tu es le bienvenu ici. Si tu le souhaites. Aussi souvent que tu le souhaites. »

Séverus leva un sourcil. « Et si je disais que j'aimerais que ce soit pour toujours? »

Un petit sourire glissa sur le visage de Harry. « Si tu le souhaites. »

« Eh bien, il semble que le destin a conspiré pour nous deux, d'être ensemble pendant aussi longtemps que ça, de toute façon, » dit Séverus, souriant. « Ça n'a pas de sens de le combattre. Je déteste gaspiller de l'énergie pour des choses inutiles. »

Harry ne pouvait plus retenir son sourire. « Moi aussi, surtout quand il y a tant de meilleures façons d'utiliser cette énergie. »

« En effet », ronronna Séverus. Il s'est frôlé de ses lèvres le cou d'Harry. « Oh, oh, Harry... Est-ce que c'est ta baguette dans ta poche, ou tu es tout simplement heureux de me voir ?"

« Un vif d'or, en fait », dit Harry en riant. Il le sortit pour le montrer à Séverus. « Tu sais, je pensais qu'il s'ouvrirait à nouveau, pour me montrer que quelque chose se terminait et ça aurait été un signe que je saurais exactement quoi faire. Je pensais que peut-être ça arriverait, et puis je me réveillerais et serais tout à fait normal et prêt à commencer une relation saine et ce serait tout. »

« Mais? »

« Mais je me suis rendu compte que quelque chose n'avait pas besoin de finir, juste pour que quelque chose de nouveau commence », dit Harry. « Et c'est bon. Plus que bon. Ça rend la vie intéressante. » Il leva les yeux vers Séverus. « Aussi longtemps que tu peux le supporter. Le fait que je ne sois pas encore tout à fait normal. »

« Je peux supporter beaucoup de choses », dit Séverus, déboutonnant la robe d'Harry. "Et je ne te voudrais pas autrement de toute façon. Sauf, peut-être, sur ce tapis plutôt attrayant devant le feu. Hmm? »

« Mmm », Harry accepta, et enroula ses bras autour de Séverus, se permettant d'être pris dans un baiser féroce et passionné.

« Tu as tout ce – »

« Bien sûr », dit Harry, et il sortit un tube de lubrifiant des poches de ses robes. « Ce n'était pas seulement le vif d'or qui me portait chance. »

« Quel lubrifiant chanceux », dit Séverus. Il prit le tube, puis continua à tirer sur les robes d'Harry. « J'ai entendu des superstitions plus étranges. »

« Alors, ça ne ta dérange pas si demain je l'installe dans un lieu en valeur pour que nous puissions tous l'honorer comme il se doit? » taquina Harry, faisant tout aussi rapidement pour enlever les robes de Séverus.

« Eh bien, demain serait un peu hâtif » dit Séverus, parsemant de baisers le torse d'Harry. « J'ai de grands projets pour ce tube qui devrait durer au moins une semaine, et je crains que je vais être beaucoup trop occupé pour aller en acheter plus avant ça, surtout compte tenu de l'éloignement merveilleux de ce chalet. »

« Je-ahh, » soupira Harry alors que les baisers de Séverus pleuvaient de plus en plus bas, et finalement capitula, permettant à Séverus de l'attirer vers le bas sur le tapis doux et épais.

Ils ne parlèrent plus beaucoup après ça. Typiquement Harry aimait regarder Séverus perdre le contrôle et aimait entendre les mots grossiers qui s'échappaient de la bouche de cet homme habituellement si retenu, mais il y avait quelque chose d'exquis, presque révérant, dans leur acte d'amour de ce soir. Ils étaient parfaitement synchronisés, répondant aux mouvements de l'autre. C'était confortable, excitant, familier et enivrant, et Harry n'en pouvait plus. C'était son avenir – le passer avec un homme qui le connaissait, corps et âme, et qui l'aimait, le chérissait, en dépit – ou peut – être à cause-de cela.

Trop tôt, Harry atteignit l'orgasme, appelant le nom de Séverus, et Séverus le suivit peu de temps après.

"Mmm", dit Harry. La tête de l'homme reposait sur sa poitrine, et il en profita pour caresser ses cheveux trempés de sueur. Il semblait y avoir encore plus de stries argentées. D'une certaine manière, ça lui convenait. « C'était agréable. »

« En effet », dit Séverus. « Bien qu'il faille éventuellement nous déplacer vers un lit, du moins si nous voulons être en mesure de bouger assez pour le faire à nouveau dans les prochaines 24 heures. Mon dos n'est plus celui d'autrefois. »

Harry renifla. « Encore cinq minutes ? »

« Je suppose, » dit Séverus, et pressa ses lèvres sur le torse d'Harry.

Harry sourit. Ils étaient là, lui et Séverus, dans le dénouement de leur histoire. Ils avaient rencontré des obstacles énormes, avaient été déchirés plus d'une fois, mais maintenant ils avaient leur moment. Ils étaient en paix. Ils avaient gagné.

Il poussa un soupir de contentement, puis s'arrêta lorsque son œil aperçut le vif d'or, scintillant à la lueur du feu, rappelant à la fois les fantômes de leur passé et les espoirs de leur avenir.

Non, leurs problèmes n'étaient pas entièrement derrière eux. Harry avait appris ça en écrivant ses romans. Pour qu'une histoire ait un sens du réalisme, même s'il y avait une fin optimiste, il fallait qu'il y ait cette menace de malaise, la possibilité que tout s'écroule à nouveau si les pièces cruciales étaient une fois de plus déplacées. Les fins heureuses et éternelles n'avaient de sens que dans les contes de fées, et l'histoire d'amour qu'il partageait avec Séverus n'était certainement pas une adaptation de Cendrillon. Ils auraient toujours des problèmes à régler, dont le souvenir de la guerre n'était pas le moindre. Ils se battraient, se réconcilieraient avec le sexe, ils auraient des échecs et des victoires. Ils crieraient, se chamailleraient et se défieraient, et tomberaient amoureux l'un de l'autre encore et encore.

Et plutôt que de faire peur à Harry, finalement, ça l'excitait. Ça le motivait même. Comme toute bonne histoire le fait.

Oui, un million de petits orgasmes. C'est là où ils existeraient dans l'histoire de leur vie ensemble.

« Qu'est-ce qui te fait sourire ? » demanda Séverus avec suspicion.

« Oh, rien », dit Harry. « Je pense juste au chemin que nous avons parcouru et au chemin que nous devons parcourir. Et tout ce qu'il a entre les deux. »

« Tout ce qu'il y a entre les deux » murmura Séverus. « Ça sonne comme quelque chose de dangereux. »

« Les meilleures choses le sont habituellement, »dit Harry, et tira Séverus vers lui pour un profond baiser.

Ah, oui.

C'était assurément une histoire digne d'être vécue.

FINITE INCANTATEM