Contes de la mer II
Dans les jours qui suivirent, James ne reçut pas moins de trente-deux convocations – toutes moins officielles les unes que les autres – pour l'Université de Magie. Pour le palais résidentiel de l'Archi-Mage, M, pour être exact, dont il était devenu les yeux et les oreilles avant même qu'il ne connaisse le sens du mot politique. La question de comment un gamin perdu comme lui avait pu se faire remarquer par l'une des instances les plus puissante de la ville était une longue histoire que nous n'évoquerons pas ici.
Certaines des tâches qui lui étaient confiées étaient terriblement simple, comme traîner avec les marins dans les bouges de la ville, et écouter leurs conversations. Parfois il n'avait rien d'autre à faire que coller son oreille aux portes et aux murs. D'autres nécessitaient plus de doigté comme de s'introduire dans les hôtels où logeaient la délégation étrangère, ou bien de s'infiltrer dans les processions, et de monter à bord de leur navire qui mouillait encore, devant le port.
Bien sûr, il y avait le problème de la barrière de la langue, et aussi celle de la culture. Et les mages n'avaient pas de solution à tout. Par exemple, personne n'avait jamais étudié assez le langage, ni vu l'utilité de telles études, pour en venir à créer une magie permettant de comprendre un autre peuple. Puisque le monde entier était connu. Puisque tous les peuples étaient connus. Puisque toutes les langues étaient connues. Il leur fallut quelque temps, pour commencer, pour adapter un vieux traité de compréhension du langage animal à une fin plus appropriée. Et encore, les premiers véritables échanges de paroles entre les pontes de la ville et les ambassadeurs étrangers furent pour le moins chaotique.
James ne connaissait pas de magie, aussi, M devait lui fournir ce dont il avait besoin quand ses missions l'exigeaient. Les parchemins de magie jouissaient de pouvoirs fantastiques dans l'imaginaire populaire, cependant, ils ne permettaient pas dans les faits à un non initié de performer un quelconque rite magique. Ils étaient seulement utiles pour les apprentis adeptes du moindre effort. Et aussi utile que James ait pu se rendre, ce n'était pas assez pour devenir apprentis, et certainement pas assez pour le propulser dans la caste des mages, ni même seulement lui permettre d'entrer par les grandes portes de l'Université pour assister aux cours. Non, il devait vivre dans les coulisses et ne connaître que les portes dérobées.
L'aide fournie par M avait donc pris la forme d'Alec, un jeune mage que la mauvaise fortune avait précipité dans les jupons de M dans des conditions très semblables à celles qui avaient accablé James lui-même. À eux deux, ils formaient ce qu'on pourrait qualifier d'une bonne équipe. Jusqu'à maintenant, M semblait satisfaite de ce qu'ils pouvaient lui apprendre.
Et parfois, James devait partir seul. Toute la ville était en effervescence et Alec pouvait tout simplement être demandé ailleurs, ou bien la mission nécessitait une discrétion absolue. Dans tous les cas, ce n'était pas vraiment un problème pour James, il apprenait vite, et les personnes pouvaient en dire beaucoup plus avec des gestes, ou le ton qu'ils employaient, que même avec leur langage.
À SUIVRE.
Ce texte est une participation aux défis de la Gazette des bonbons aux citrons :
- Thème [831] Compréhension pour le Challenge « Si tu l'oses ».
Ainsi qu'à la 106è nuit du FoF :
- Thème 4 : Deux