Merci infiniment à Blue Wendigo, Lanae's world, Maeglin Surion, Kaelyan et Alena Aeterna pour vos fantastiques reviews qui font si chaud au coeur.

Voici le chapitre final à cette histoire, en espérant qu'il vous plaise tout autant.

Bonne lecture,

Nalou


« Je m'attendais à vous trouver ici, » commence Charles. Il tente de retenir son réflexe de déglutition. « Vous aussi, Professeur Lecter. Il me semblait bien avoir reconnu votre aura. Celle de M. Graham est très similaire. C'est pour ça qu'il m'a intrigué, la première fois que nous nous sommes vus. »

Ses yeux s'habituent au manque de lumière, et il discerne les deux hommes debout face à lui. Will le retient toujours d'un bras sur le torse et de la lame contre son cou. Il est calme, cependant, alors Charles ne craint pas une action malheureuse induite par la panique. Il reste cependant sur ses gardes, prêt à prendre contrôle du corps de Graham si la situation dégénère et qu'il n'a plus le choix.

Lecter laisse échapper un petit rire sec. « Tu as toujours été un très bon élève, Charles, un peu trop intelligent pour ton propre bien, cela dit, et c'en est presque dommage. »

Charles profite du manque d'attention de Will à cet instant pour le repousser, dégageant son cou. La menace à peine voilée de son professeur le fait se raidir. « Pourquoi avez-vous fait ça à Reinhard ? Comment avez-vous découvert son identité ? » demande-t-il, le corps tendu dans l'éventualité où Will souhaiterait de nouveau s'approcher.

Cette fois-ci, c'est d'ailleurs le profiler qui lui répond. « C'est vous qui nous avez donné toutes les informations, vous ne vous rappelez pas ? Moi aussi, j'ai accès au canal radio de la police ; pour le reste, nous nous sommes débrouillés. »

« Vous savez que nous allons vous arrêter ? » continue-t-il.

« Je ne pense pas, non, » intervient le Professeur. « Tu vas nous laisser partir, Charles. »

Sa mâchoire se contracte. Hannibal Lecter est convaincu de ce qu'il dit, ne doute pas une seconde de ce qui va se passer ensuite. Pourtant, Charles n'ose pas aller voir quel destin il lui réserve. Le visage livide de Reinhard envahit ses rétines et le fait frissonner. Pourtant, il ne cède pas.

Ce qui lui vient ensuite à l'esprit, c'est qu'il ne reverra probablement pas Erik.

Il déglutit. Note le regard d'Hannibal sur le mouvement de sa pomme d'adam.

Ses yeux alternent entre les deux hommes face à lui ; entre son professeur en costume impeccable et la chemise à carreaux de Will. Plutôt que de lui fournir une solution, son cerveau préfère remarquer que celle-ci concorde avec la cravate d'Hannibal.

C'est comme si le temps avait ralenti, même si son coeur cogne brutalement contre sa cage thoracique, envoyant le sang dans ses artères par à-coups violents. Est-ce que les jets seront plus grands que ceux de Reinhard ?

Il reprend ses esprits rapidement. « Je crains que nous soyons dans une impasse, messieurs… » lance-t-il par bravade. Gagner du temps. Laisser à Erik la possibilité de le rejoindre. « Je raconterai tout au FBI. J'ai déjà récolté vos souvenirs de l'après-midi. Si vous faites le moindre mouvement dans ma direction, ils seront envoyés immédiatement à l'inspecteur Lehnsherr, et je vous promet qu'il ne vous laissera jamais en paix. »

Ils n'ont pas besoin de savoir que ce n'est pas vrai, ni que des récupérations télépathiques ne sont pas recevables devant la justice.

Mais au regard désintéressé que lui lance Hannibal, peut-être qu'il le sait déjà. Le Professeur le connaît trop bien.

« Tu sais, Charles, il ne faut pas voir les choses ainsi. Réfléchis un instant. Nous ne faisons que soulager le système de criminels. Tellement d'enquêtes restées non résolues, souvent par manque de preuves directes, tellement de coupables impunis dans la nature… C'est un service que nous rendons au FBI, à la population. Nous nous débarrassons des indésirables. Si, en plus, nous y trouvons notre compte, je ne vois pas le mal que cela pourrait causer. Sais-tu combien il y a d'auteurs de crimes monstrueux qui ont échappé à la justice et qui n'ont plus jamais refait surface ? Combien de violeurs dont les dossiers prennent la poussière sur les bureaux de ton cher inspecteur parce qu'ils n'ont plus jamais frappé ? »

« Nous ne devons pas rendre justice nous-même ! Vous le savez, l'un comme l'autre ! » siffle Charles, se décollant du mur contre lequel il s'était appuyé après avoir dégagé Will.

« Oh, Charles… Ne fais pas semblant d'être si naïf... » lui répond Hannibal d'une voix qu'il veut déçue, semblable à celle qu'il utilisait contre des élèves récalcitrants. « Toi comme moi nous rappelons de l'affaire Marko. Tu sais, la première sur laquelle tu as travaillé en tant que consultant. Celle où, de fureur après avoir découvert les cadavres sur son chemin, tu as effacé l'existence même de l'homme, ne laissant qu'une coquille vide prête à être cueillie par tes collègues des forces armées ? Et où j'ai ensuite déterminé le profil psychologique de cette épave aux glandes salivaires bien trop productives ? N'était-ce pas faire justice soi-même ? Aurais-tu préféré que je te laisse expliquer à la Cour et au FBI comment tu avais pu réaliser une telle prouesse, d'un niveau bien supérieur à celui indiqué dans ton dossier ? »

L'estomac de Charles se rebelle lorsque les souvenirs, habituellement si bien enfouis, l'assaillent. Il déglutit difficilement, tente de calmer sa respiration trop bruyante. Il transpire sous son gilet, se sent enfermé. Il sent la panique l'envahir, le besoin d'enlever ce vêtement qui l'emprisonne, de se prendre la tête entre les mains, de hurler.

Il pourrait lui faire oublier tout ça. Ce serait si facile. Leur faire oublier, à tous les deux, cette discussion mondaine en plein milieu de leur chasse macabre. Il est bien plus fort, bien plus entraîné, qu'il ne l'était à ce moment-là. Il ne laisserait pas de trace de son passage, n'aurait que les menottes à leur passer.

Il pourrait -

Il ne peut pas.

Il ne peut pas vivre en ayant triché une seconde fois.

Charles ferme les yeux, rejette la tête en arrière, reprend appui contre le mur. Ses jambes tremblent. Avaler sa salive est douloureux, tant sa gorge est serrée.

Il ne lui reste plus qu'une seule solution, et celle-ci ne l'enchante pas. C'est un fardeau de plus qu'il devra porter, seul.

« Le jour où votre victime est innocente, croyez-moi, vous n'aurez plus un seul endroit sur terre où vous cacher. C'est une promesse que je vous fais, à tous les deux. Je me ferai un plaisir de vous arrêter moi-même, quitte à vous accompagner en prison. »

Will reste impassible, mais Charles voit les lèvres généreuses d'Hannibal s'étirer doucement en un sourire sardonique. « C'est très généreux de ta part, Charles, mais rassure-toi. Ce ne sera pas nécessaire. Ton petit secret est en sécurité avec moi, tant que tu ne t'approches plus du nôtre… »

Le coeur battant, Charles voit Hannibal tirer sur les manches de sa chemise comme pour en ajuster la longueur déjà parfaite, puis ouvrir la porte par laquelle il est entré. Ses chaussures de cuir italiennes claquent sur le sol alors qu'il s'éloigne.

Will reste un instant de plus, le regarde. La lumière apportée par le couloir fait briller ses yeux toujours aussi fiévreux. « C'est un homme bon, vous savez, » commence-t-il. « Et c'est mon dessein de l'accompagner dans sa quête. » Il marche jusqu'à sa porte, glisse ses mains dans les poches de son pantalon. « Nous nous recroiserons peut-être au bureau, » dit-il avant de lui adresser un hochement de tête et de suivre Hannibal Lecter.

Les jambes de Charles cèdent sous son poids.

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Quand Erik voit Xavier revenir près de lui, dans ce bâtiment désaffecté où rôde encore certainement le tueur, il est à deux doigts d'exploser. Mais qu'est-ce qui lui a pris de s'éloigner de lui, dans un endroit non sécurisé, avant même la fin de l'opération ?

Quelque chose dans ses yeux couleur d'azur l'en empêche, cependant. Il ne sait pas quoi, exactement.

Alors il attrape son poignet et l'attire à lui, le plaque contre son flanc pour limiter la taille de la cible qu'il représente. Pour sentir son pouls battre contre ses doigts.

Quand il s'est rendu compte de son absence, il l'a fustigé intérieurement et a redoublé d'efforts, fouillant les pièces avec toute sa rage et sa détermination, obligé de rester concentré sur de courtes distances pour ne pas risquer de tomber dans un piège. Et ce crétin de Xavier est parti au delà des limites de sa perception, sans aucune protection mis à part l'arme qui, Erik le sait, ne lui servira jamais et sa télépathie.

Du coin de l'oeil, Erik l'aperçoit glisser deux doigts contre sa tempe et fermer les yeux. Il maintient son attention sur ce qui les entoure, restant vigilant jusqu'à ce que Xavier termine de scanner le bâtiment.

Sa chaleur tout contre lui le rassure, malgré la colère qu'il ressent encore. Il se focalise sur la tâche actuelle en se disant qu'il s'occuperait de réexpliquer à son coéquipier l'utilité d'être à deux une fois qu'ils seront sortis de ce guêpier.

Il est interrompu dans ses pensées par le soupir de Xavier.

« Il n'y a plus aucun adulte dans le bâtiment, » l'assure-t-il doucement.

Le plan de la structure métallique qu'Erik s'est dessiné au fur et à mesure se complète soudainement de cinq points chaudement colorés. Les enfants. Xavier les a trouvés.

Considérant les mouvements que Xavier projette toujours directement en lui, il l'emmène à travers de nouveaux dédales, passe la porte coupe-feu qui leur fait face, descend la volée d'escaliers qui mène au sous-sol avant de tomber sur une lourde porte en métal. Evidemment, pense-t-il en laissant un sourire carnassier tendre ses lèvres. Un peu de facilité pour terminer, ça change. Il tend le bras gauche en direction de la dernière barrière entre les enfants et la liberté. Entre la fin de l'enquête et lui. Il ne lâche pas pour autant Xavier, qui a de nouveau joint ses doigts à sa tempe.

La porte sort de ses gonds en un claquement de doigts, et Xavier se précipite à la rencontre de ces petits êtres effrayés, mais physiquement indemnes.

Le froid de son absence envahit Erik aussi sûrement que la glace.

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Les gyrophares des voitures de police les accueillent lorsqu'ils sortent enfin de ce maudit lieu. Les cinq enfants sont rapidements pris en charge par deux hommes en uniforme en attendant l'arrivée des ambulances.

Reste encore à gérer l'arrivée de l'équipe technique et du légiste, mais Erik sent Xavier chanceler contre lui.

« Ça va ? » demande-t-il en passant le bras de Xavier au dessus de son épaule.

« Oui, juste le contrecoup de la journée. Laisse-moi là et va terminer, on se retrouve après. » lui répond Xavier.

Il n'a très certainement pas envie de faire ça, mais il doit clôturer la scène de crime au plus tôt afin de limiter la dégradation des indices. Il le soutient jusqu'à la voiture la plus proche et le fait s'asseoir sur le siège arrière. Un policier s'approche, certainement parce qu'Erik a installé Xavier dans son véhicule. « Tout va bien, Détective Lehnsherr ? » demande-t-il, hésitant.

Erik le regarde, observe le badge sur sa poitrine. « Agent Summers, vous voulez bien le garder le temps que je boucle tout ça ? » ordonne-t-il en s'éloignant déjà. ça ne l'empêche pas d'entendre Xavier grogner.

« Je peux me garder tout seul, merci bien ! »

Il ne regarde pas en arrière, mais il sourit discrètement, à l'abri des regards, de celui de Charles.

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Erik transmet rapidement l'affaire du meurtre du ravisseur à l'équipe d'enquête rattachée aux crimes. Son boulot est terminé. Leur boulot.

Les enfants ont été accompagnés à l'hôpital pour un bilan complet, les familles contactées et sommées de les retrouver là bas. Il ne reste plus que la voiture de patrouille dans laquelle l'attend Xavier.

Il commence à marcher dans sa direction quand son téléphone se met à vibrer dans sa poche. Il le sort et le lève à hauteur de ses yeux pour apercevoir le nom de l'appelant.

Il soupire, décroche.

« Quoi ? » demande-t-il brusquement.

Un rire résonne au bout du fil.

« Félicitations, Lehnsherr, » commence son chef. « Bon score. »

« Compte pas sur moi pour te rédiger le rapport maintenant, » s'empresse-t-il de dire. « Je rentre. Tu patienteras. »

Encore une fois ce rire qui le fait grincer des dents. Howlett a un sérieux problème mental.

« Justement, à ce propos. Je veux pas voir vos tronches avant après-demain, c'est clair ? Chuck tire trop sur la corde. »

« Rien ne m'empêche de venir demain matin, alors, » s'énerve Erik. « Je sais encore faire les tâches administratives seul. »

« C'était une manière polie de te dire que toi aussi, t'as besoin de repos, vieille cagne. Je veux pas voir ta tête de déterré demain, c'est clair ? »

Erik ne prend pas la peine de répondre avant de raccrocher.

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Quand il arrive près de la voiture, la portière arrière est toujours ouverte, Xavier assis les jambes à l'extérieur. Il se frictionne les bras dans l'air rafraîchi du début de soirée. Il a l'air tout aussi épuisé, mais lève les yeux quand Erik s'approche de lui.

« Je ne veux pas être seul ce soir… » murmure Xavier lorsqu'il arrive à son niveau. Il garde la tête baissée, et ses mains se tordent, maintenant posées sur ses genoux. Il lève les yeux au bout de quelques secondes, quand Erik ne répond pas. Le réverbère qui les éclaire en ce début de soirée les fait briller encore plus que d'ordinaire, et Erik se perd dans leur contemplation. Lui non plus n'a pas envie de rentrer dans son appartement silencieux et de se glisser dans ses draps froids et tristement vides.

Il soupire, baisse les yeux et gratte l'avant de la semelle de sa chaussure au sol, les mains dans les poches.

« Tu veux qu'on aille boire un verre ? » finit-il par proposer à Xavier.

« J'ai… » commence son partenaire. « J'ai de la bière, chez moi, si ça te dit. »

Erik se redresse vivement, surpris. Il n'est jamais allé chez Charles ; le télépathe le suit toujours lorsqu'ils couchent ensemble. Couchent ensemble. Son coeur se serre inexplicablement.

Il finit par hocher la tête et accompagne Charles à leur voiture. Il lui ouvre la portière après que Charles a retiré son gilet pare-balles, et la referme lorsqu'il est installé avant de contourner le véhicule et de prendre place au volant.

« Indique-moi l'adresse. »

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Les capsules résonnent lorsqu'elles entrent en contact avec le comptoir en marbre de la cuisine américaine de Charles. Erik prend une gorgée fraîche et amère en tournant sur lui-même, prenant soin d'observer le salon élégamment fourni, mais pourtant envahi de livres et de documents en équilibre précaire sur toutes ses surfaces.

Ce n'est définitivement pas la même chose que son propre logement purement fonctionnel, mais c'est ce qui caractérise Charles : en totale opposition à Erik.

Le silence est encore lourd entre eux, et Erik repense aux risques qu'a pris Charles, plus tôt. La colère roule encore sous sa peau, pernicieuse, prête à bondir à tout moment. Pourtant, lorsqu'il se tourne, au bruit du verre sur le marbre, c'est la surprise qui le saisit.

Charles s'est rapproché de lui, lui a saisi la mâchoire de ses deux mains, et l'attire à ses lèvres, le forçant à se plier un peu pour être à sa hauteur.

Elles sont fraîches et humides contre les siennes, et il faut un instant à Erik pour réaliser ce qui se passe et le repousser.

« Je croyais que tu voulais arrêter. » gronde-t-il, bouillonnant. Charles le regarde, les yeux écarquillés. « C'est ce que tu m'as dit, rappelle-toi. »

Il lui en veut encore pour ces mots. Il lui en veut d'avoir mal comme ça, sans qu'il ne parvienne à réellement comprendre pourquoi.

« Oui, Erik, » finit par dire Charles, les joues rouges. « Arrêter de nous sauter à la gorge pour la moindre connerie. Arrêter de faire du mal à l'autre lorsqu'on ne sait plus comment penser, comment ressentir. Arrêter de nous voiler la face. »

Erik ne peut que le regarder en silence, totalement perdu. Son cerveau met du temps à analyser les paroles, et les fils de sa colère lui glissent entre les doigts, insaisissables.

Charles fait à nouveau un pas vers lui, pose sa main droite sur le torse d'Erik. Sur son coeur.

« Je suis amoureux de toi, Erik. Je ne peux plus te voir que lorsqu'on a besoin de se décharger. J'ai trop mal. Alors s'il te plait, dis-moi ce que tu veux. »

Il sent son coeur taper fort contre sa cage thoracique, se demande si Charles peut le sentir marteler tout contre sa paume.

Il sait que c'est maintenant qu'il doit prendre une décision. Accepter entièrement Charles dans sa vie, admettre ce qu'il ressent depuis bien trop longtemps, ou bien faire demi-tour et partir, là, maintenant, et fermer la porte sur cette relation devenue bien trop compliquée et pourtant à la fois si simple.

Le temps ralentit entre deux battements.

Puis il encercle Charles de ses bras, le colle à son torse, et écrase ses lèvres contre les siennes. Charles reste figé quelques instants, puis Erik le sent se relâcher et couler dans son étreinte, rendre son baiser.

Il ouvre la bouche, saisit la lèvre inférieure sanguine entre ses dents, la caresse de sa langue, la libère. Charles lui rend coup pour coup, mêle leurs bouches en une danse nouvelle qu'ils découvrent à deux. Il l'entend respirer par le nez, sent son souffle contre son visage, sait qu'il en fait de même, avide et incapable de s'éloigner. Erik pose sa bouteille un peu trop fort sur le comptoir et de la mousse lui éclabousse les mains, mais il ne le remarque même pas.

Tout ce qui compte, c'est Charles, dans ses bras, contre lui, à lui.

Les mains de Charles s'agrippent à sa chemise collée à son dos, et les siennes parcourent un chemin qu'elles connaissent bien, glissent sur les fesses rebondies, s'arrêtent sur les cuisses musclées. Il n'a besoin que d'un effort minime pour les soulever et asseoir Charles sur le comptoir, jambes écartées pour qu'Erik vienne s'installer entre elles. Leurs lèvres se retrouvent immédiatement, et cette fois-ci, c'est Erik qui doit lever la tête pour embrasser Charles. Il sent les doigts de son partenaire se glisser dans ses cheveux, alterner entre douceur et force lorsqu'ils massent son crâne, comme si Charles ne pouvait se décider.

Ceux d'Erik glissent sur le gilet de laine, trouvent les boutons à l'aveugle, l'ouvrent. Il sent Charles frissonner sous ses paumes, alors il lui agrippe les hanches, ses pouces caressant l'os délicieusement saillant, pour le maintenir tout contre lui.

Charles referme ses jambes sur sa taille et ses bras autour de son cou, alignant leurs bassins, et Erik ne peut empêcher un gémissement rauque de franchir ses lèvres. Sa main droite serpente dans le dos de Charles et vient soutenir la base de son crâne, le bout de ses doigts perdus dans la longue chevelure soyeuse, alors qu'il abandonne ses lèvres si rouges au profit de son cou offert.

Erik prend le temps de caresser la peau fiévreuse du bout de sa langue avant de la mordre pour y laisser son empreinte.

« Erik… » gémit Charles, et c'est tout ce dont il a besoin pour serrer le corps de son amant contre le sien et de le soulever pour se diriger dans le couloir qui mène indubitablement à sa chambre. Il le plaque contre le mur, les cuisses de Charles comme un étau autour de lui, pour l'embrasser à nouveau.

« Porte de droite, » parvient à glisser Charles, à bout de souffle contre ses lèvres. Erik obéit docilement, abaisse la poignée et allume la lumière d'une courte pensée, puis les fait entrer dans la pièce. Il laisse tomber sa charge sur les couvertures, ne perd pas de temps à la rejoindre. Charles est chaud tout contre lui, et sa chaleur rayonne jusqu'au plus profond de son âme. Ils se retrouvent rapidement, sans une hésitation, leurs corps se moulent à l'autre et ne se séparent plus. Le bassin d'Erik frotte contre celui de Charles, qui gémit sous lui comme jamais encore il ne l'avait fait. Chaque bruit qui lui échappe excite Erik encore plus, alors il ne tarde pas à tirer sur les vêtements qui forment encore une barrière entre eux. Charles saisit l'implication et se redresse, d'abord sur ses coudes, puis, une fois qu'Erik s'est mis sur ses talons, il s'assoit. Il s'attaque en premier aux boutons de manchettes de la chemise d'Erik avant d'en attraper le bas pour la faire passer par dessus sa tête, sans même prendre la peine de défaire les autres boutons. Erik la lance au sol derrière lui, fait subir le même sort au haut de Charles avant de s'en prendre à la boucle de sa ceinture.

Ce sont des gestes qu'ils connaissent, qu'ils appliquent avec la dextérité de l'habitude, alors ils se retrouvent rapidement à nu, autant de corps que d'âme.

Mais au lieu d'aller directement à l'essentiel, à l'absolution, Erik prend le temps de regarder, d'admirer le corps allongé sous lui. Note les vagues de taches de rousseur qui couvrent ses épaules et viennent lécher ses bras, son torse. Les trois qui soulignent la clavicule gauche, parfaitement alignées, et qu'il ne peut s'empêcher de venir caresser du bout des doigts. Elles le guident vers les pectoraux finement dessinés, vers les tétons dressés.

Erik se penche alors, plie sa colonne vertébrale pour pouvoir les atteindre de sa bouche, tandis que ses mains parcourent les côtes offertes et tremblantes d'un désir partagé.

« Laisse-toi aller, Charles… » murmure-t-il tout contre la peau brûlante. « S'il te plait, je veux te sentir. »

Charles geint, son corps se soulève légèrement pour retrouver le contact des lèvres d'Erik, et enfin, enfin, il lâche la bride à son pouvoir et leurs esprits se rencontrent enfin, se mêlent, s'accrochent et se retiennent, comme la rencontre de deux océans tumultueux.

Les yeux de Charles s'ouvrent à nouveau, et Erik s'y accroche comme à une ancre, le souffle coupé l'espace d'un instant, le coeur comme au bord de l'explosion.

« Erik, » souffle Charles, « Erik… »

Sa main cherche celle d'Erik, alors il la saisit et lace leurs doigts contre la couverture, serrant à s'en faire blanchir les jointures. « Je suis là, Charles, je suis là... » Il pose son front contre le sien, inspire profondément. « Prépare-moi. » Il expire fébrilement, cueille le gémissement de Charles tout contre ses lèvres lorsque celui-ci réalise la portée des derniers mots d'Erik.

Erik finit par s'allonger à côté de Charles pour que celui-ci puisse atteindre sa table de nuit. Il en extirpe lubrifiant et préservatif, puis revient tout contre Erik, le regarde dans les yeux. « Tu en es sûr ? » demande-t-il, ses yeux cherchant, Erik le sait, le moindre doute dans les siens. Alors il hoche la tête, montre sa volonté de fer à travers leur connexion.

« Mets-toi sur le ventre et replie tes genoux sous toi, » chuchote-t-il entre deux baisers.

Erik obéit, sent un tressaillement parcourir sa colonne vertébrale.

Charles se poste à genoux derrière lui, pompe un peu de lubrifiant au creux de ses doigts, puis vient caresser les reins d'Erik de sa main nouvellement libre. « Au moindre problème, préviens-moi. » dit-il en venant embrasser délicatement les bosses qui forment la colonne d'Erik.

La sensation est étrange quand Charles insère un premier doigt en lui, mais pas désagréable. Il sent quand même son corps se tendre à l'intrusion, mais les caresses répétées sur son dos et les doux mots d'encouragement que Charles chuchote tout près de lui l'aident à souffler et relâcher ses muscles.

Erik est rapidement réduit à de simples grognements, sa verge coincée entre ses cuisses et son ventre avide de contact, son coeur battant à tout rompre et ses pensées une mélopée de Charles encore Charles, continue, comme ça -

Il est presque déçu quand Charles retire ses doigts, et tourne la tête pour l'observer ouvrir le sachet du préservatif puis l'enfiler sur son propre membre impatient.

« Tourne-toi, » lui dit Charles, la voix rauque de désir. « Je veux te voir pendant que je te fais l'amour. »

Faire l'amour. C'est la première fois que Charles emploie ce terme, la première fois qu'Erik le met sur ce qu'ils partagent depuis déjà si longtemps.

Il reconnaît les gestes qu'il a lui-même employé de nombreuses fois durant dans ceux de Charles, se sent pourtant gêné lorsqu'il change de position, presque honteux.

Charles pose une main près de sa tête, l'autre tout contre sa joue, et le regarde alors avec tellement de tendresse qu'Erik se sent presque prêt à laisser ses émotions l'envahir - ces émotions qu'il a laissé de côté pendant si longtemps, persuadé de ne pas les ressentir, ou, lorsqu'elles apparaissaient au moment le plus inopportun, qu'elles étaient illégitimes.

Il ferme alors les yeux et laisse monter tout ce que Charles lui fait ressentir à travers leur lien, et il sait que son partenaire l'a vu lorsque celui-ci inspire bruyamment, surpris. Les émotions fortes se mélangent, celles qu'il ressent lorsqu'il travaille ensemble, lorsque Charles prend un risque inutile en mission, lorsqu'il refuse d'utiliser son arme, lorsque Erik a peur que quelque chose ne tourne mal, mais aussi celles, plus positives, lorsqu'ils parviennent à résoudre leurs enquêtes ensemble, lorsque Charles lève les yeux de sa lecture sur leur bureau partagé pour le regarder, lui. Son coeur s'emballe toujours, et c'est le cas encore une fois, maintenant, alors qu'ils sont prêt à franchir une nouvelle étape ensemble.

Charles se penche, lui embrasse le front, la joue, puis ses lèvres, chastement. C'est ce qui sort Erik de sa douce torpeur, et il saisit la nuque de Charles pour le ramener tout contre lui, prendre possession de ses lèvres et du baiser, nettement moins sage alors que leurs langues se mêlent une nouvelle fois.

Il écarte et soulève les cuisses, s'offre à Charles, et celui-ci aligne leurs membres un instant, savoure la douce tension qui prend leurs bas-ventres impatients. Puis Charles s'éloigne de sa bouche, se met en place. Il reste redressé, les bras derrière les genoux d'Erik, glisse l'un des coussins sous ses reins, puis enfin, enfin, aligne sa verge avec l'entrée d'Erik.

Il s'insère lentement, laisse tout le temps au corps d'Erik de s'habituer, à son esprit de s'impatienter. Erik grogne des vulgarités et tente de pousser Charles de ses chevilles cerclées autour de lui, mais Charles rit doucement à la tentative.

Finalement enfoncé jusqu'à la garde, Charles reste immobile, repose délicatement les jambes d'Erik le long de sa taille, puis se penche en avant, prenant appui sur ses bras. Le changement d'angle seul procure à Erik un plaisir inattendu, et ils gémissent à l'unisson lorsque Charles entame un mouvement de va-et-vient en lui.

Ses mains viennent capturer de longues mèches brunes, une épaule humide de transpiration, avides d'un point d'ancrage lorsqu'il perd tous ses repères, envahi par la sensation du corps de Charles contre lui, en lui. Ses ongles laissent des traces sur le dos luisant de Charles quand celui-ci accélère. Les bras de Charles tremblent, et il prend un peu plus appui sur Erik, vient poser son front sur la clavicule. Son souffle chatouille le téton dressé sous lui, et Erik ne peut s'empêcher d'arquer le dos.

Charles finit par enrouler les bras autour des omoplates d'Erik, le garde tout contre lui, légèrement replié en avant, et les sensations en sont décuplées.

« Ch… Charles, » parvient-il difficilement à articuler alors que son bas-ventre se contracte, l'orgasme plus proche que jamais. Son corps entier frissonne alors que la chaleur se répand jusque dans ses orteils, et, le souffle court, il vient prendre son érection en main, y applique le même mouvement impardonnable que celui des hanches de Charles.

Quelques allez-retours lui suffisent pour que l'orgasme explose dans son corps, dans sa tête, sur son ventre. Il entend, comme à distance, les râles erratiques de Charles alors que celui-ci jouit à son tour, emporté par la vague instoppable de plaisir que ressent Erik.

Erik retrouve son souffle et ses esprits quelques instants plus tard, vibrant de contentement. Charles s'est étalé de tout son long sur lui et respire dans son cou. Il s'est déjà retiré, et glisse doucement sur le côté pour ne pas écraser Erik.

Erik bascule alors sur le côté, l'entoure de ses bras, mêle leurs jambes.

C'est maintenant qu'il réalise deux choses.

Charles et Xavier sont désormais une seule et même personne. Charles. Et cette fois-ci, Charles ne partira pas.

Cette fois-ci, Charles restera dans ses bras.

Et les fois suivantes aussi.

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Ils parviennent à s'extirper du lit un peu plus tard, leurs corps délicieusement fourbus et satisfaits. Après une douche commune longue et savoureuse, emplie de baisers lents, Erik enfile son boxer et, parcourant le salon, retrouve leurs bières oubliées.

Il reste là à les regarder jusqu'à ce que Charles vienne glisser ses bras autour de sa taille, ses mains se frayant un chemin sur ses abdominaux puis ses pectoraux, son ventre collé au dos d'Erik.

C'est là que la notion du temps lui revient, avec la faim.

Il se tourne dans l'étreinte de Charles, passe ses bras autour de sa nuque, se penche pour un autre baiser dont il a la sensation qu'il ne se lassera jamais de donner, et murmure, « Veux-tu dîner avec moi ? »

Les yeux si bleus de Charles brillent, ses joues se couvrent de rose tandis que ses lèvres carmin s'étirent en un doux sourire.

« Serait-ce un rendez-vous ? »