VII. Le retour inattendu

Pdv Tris.

Nous n'avions pas eu le temps d'observer la ville lorsqu'une centaine de personnes nous étaient tombées dessus de tous les côtés, armées, énervées, et plus amochées que jamais. Je pourrais raconter une histoire fabuleuse sur le combat épique qui se serait produit si nous les avions vu arriver. Malheureusement, la réalité était tout autre. En un rien de temps, nous avions tous l'un de ces êtres agrippé farouchement à notre cou et la bataille fut très courte. Avec notre entraînement, il fut facile de les faire lâcher prise d'un coup de tête en arrière mais à peine étions nous libre qu'une autre rangée arriva plus lentement, dans un bruit sourd. Un étrange murmure se fit entendre. Une voix glaciale. Un croassement strident. Puis ces paroles : « ... tués... tous les deux... tu les as... tués... Nathalie... tuée... Andrew... tu les as tous tués...».
Ma tête tournait, les voix semblaient avoir prix possession de mon âme. J'étais comme tétanisée mais je parvenais à entendre mes camarades. Il semblait que les voix leur reprochait la mort de l'un de leurs défunts proches. Tous hurlaient, se tordaient de douleur. Petit à petit, mes yeux se refermaient, je me laissai donc emportée dans une vague de désespoir, avant de m'évanouir... sans pouvoir lutter contre ce mal...

Un léger souffle se faufile entre les rideaux et vient me réveiller en douceur. Un mal me lance dans la tête, j'ai la sensation d'avoir dormi des heures mais pourtant je suis si affaiblie. Je ne comprends pas pourquoi. Soudain, tout me revient ! Glenview, les morts, ces voix... Je me lève précipitamment, enfile des habits et sans même prendre le temps de me coiffer, je cours en dehors de notre logis. Je reconnais tout de suite la fosse. Je sors donc le plus rapidement possible de l'enceinte du territoire des audacieux pour me rendre à la clôture. Il ne fait aucun doute que je suis à Chicago. En descendant du train, je prends une paire de jumelle au poste de surveillance et escalade le mur. Arrivée en haut, je reste scotchée face au paysage de ces champs de céréales, des animaux qui se reposent au soleil mais... pas de ville en vue ! N'était-ce qu'un rêve ? Aurais-je pu imaginer une telle histoire ? En une seule nuit de sommeil ? Je descends de la clôture et demande par précaution la date d'aujourd'hui au gardien.
Il me regarde bizarrement face à mon expression de stupeur mais je repars sans même prendre le temps de lui expliquer. Cela fait trois jours que je dors. Pourquoi personne ne m'a réveillée ? J'ai du perdre beaucoup de points au classement. Tout en marchant, je me demande également si ce que j'ai fait à Peter, et ce que j'ai fait avec Four était réel. Cette dernière énigme est vite résolu quand, en retournant dans la salle à manger des audacieux, Four se lève de la table (où m'attendent tous ceux qui sont venus avec moi à Glenview) et m'étreint longuement. Au moins je n'ai pas rêvé là dessus ni sur le fait que j'ai mis une bonne raclée à Peter, ce qui me rassure.
Ils m'invitent à me rasseoir à table et j'apprends alors que les autres audacieux ont cherché à nous réveiller tous les cinq mais que nous dormions si profondément qu'il était impossible de le faire. Chacun notre tour, nous racontons ce que nous avons rêvé et tout correspond. Le grand portail noir, la cour à l'orée de la forêt, le sceptre, et l'attaque des morts vivants. Au bout d'une longue discussion sur les hypothèses farfelues à ce sujet, un silence s'installe que je brise en disant que je connais ce qu'il s'est passé dans l'histoire. Ils décident de m'accompagner chez les altruistes. La maison de mes parents a été réaffectée mais en promettant de ne pas déranger, la nouvelle famille qui s'y est installée nous ouvre et nous donne une boîte qui renferme les affaires de mes parents. Les altruistes condamnant la vanité, le tri est vite fait et je trouve rapidement un vieux livre poussiéreux. J'explique à mes amis que ma mère me le lisait lorsque j'étais petite et je le leur lit à mon tour. Tout est raconté exactement de la même façon que nous l'avons vécu, sauf que les personnages n'étaient pas les mêmes, évidement. C'était donc pour cela que je connaissais le nom des places et que la vue des paysages me rappelait les images du livre ! La seule chose étrange, c'est que le livre se termine lorsque la barrière s'ouvre grâce au sceptre (ou plutôt à la pierre) et que l'héroïne du livre a réussi à regagner sa ville natale. Mais jamais il n'est fait mention de l'attaque dans la cité.
Nous sortons de la maison, perplexes, lorsque j'aperçois une trappe que je n'avais jamais vu auparavant, aux abords du jardin où j'ai tant joué petite avec Caleb, mon frère. Je l'ouvre et m'y engage, suivie de mes amis. Notre arrivons dans une sorte de galerie que nous parcourons la tête penchée pour ne pas se cogner. Une petite porte s'ouvre pour laisser place à une immense salle d'un blanc éblouissant dans laquelle se trouve une femme. Ma...m...

« - Maman !»

Je lui saute dans les bras sans poser de question. C'est si bon de sentir sa chaleur contre moi alors qu'elle est morte si brutalement, devant moi qui devait abandonner son corps pour me sauver à mon tour.
Elle nous invite tous à déjeuner dans une salle, pour que nous puissions manger à notre faim « après avoir dormi si longtemps »!
Attendez, comment peut-elle savoir ceci ? Nous restons ensuite ébahi suite à ce qu'elle nous apprend. Elle n'est pas née à Chicago, mais dans la marge. La guerre faisait rage dans le monde, un monde où la magie était présente. On lui a décelé un pouvoir bien plus important que celui de toute autre personne. Chicago a été créé pour que toute la population soit décimée et que l'on puisse créer une civilisation non magique, nous. Maintenant qu'il n'y a plus de magie sur terre, ma mère a du nous endormir et me montrer ce rêve pour que j'ai l'idée de retourner chez eux, que je trouve la trappe, et qu'elle puisse m'expliquer que les habitants de Chicago n'ont plus besoin de s'enfermer, qu'ils peuvent habiter où bon leur semble. Nous avons tous crié de joie en entendant cette nouvelle.
Après une après midi à faire la fête, à écouter Four vanter mes progrès à ma mère, cette dernière nous a pris à part tous les deux pour nous annoncer que si toute la magie devait disparaître de la terre, elle devait disparaître elle aussi. Comme elle m'avait déjà faire croire qu'elle était morte, j'ai pensé qu'elle allait juste recommencer mais cette fois ci, elle devait quitter le monde des vivants. J'ai ressenti un pincement au cœur terrible, ma gorge s'est nouée et je peinais à respirer, et j'ai déversé toutes les larmes de mon corps, blottie dans les bras de Four.
L'incinération s'est faite le soir même, de façon privée : moi, ma mère, et Four, pour qu'il me soutienne. Nous avons jeté ses cendres dans son ancienne maison, là où elle souhaitait être, avant d'annoncer à toute la ville qu'il était temps de repeupler la planète.

« - Tris ?
- Oui Four ?
- Me ferais-tu l'honneur de t'installer avec moi ? Où tu voudras ? »

Après cela, je souriais à pleines dents, me disant que la vie allait repartir à zéro, peut-être d'une meilleure façon que la précédente.