SHE DIDN'T KILL THEM

I. Elle n'est plus faible

Pdv Four.

Je leur ai demandé de se mettre en kamae. Les entraînements viennent de reprendre mais je ne compte pas les ménager pour autant. Ils sont là, tous les deux, sur le ring, ils ne parlent pas, ont les poings serrés, ils sont prêts. Ils n'attendent que mon signal pour se jeter l'un sur l'autre.

Tris a l'air décontracté. Il ne fait aucun doute qu'elle s'est entraînée cet été. Ses muscles sont désormais apparents sous cette peau dorée, d'un bronzage naturel. Ses cheveux ont repoussé. Ils sont plus foncés, plus brillants, et plus sauvages, ce qui lui donne un air de guerrière. Son teint n'est plus pâle, et son visage apaisé témoigne du calme qu'elle a retrouvé et qu'elle n'avait plus depuis longtemps. Je ne perçois plus l'angoisse du passé dans ses prunelles brunes claires. Ses yeux m'indiquent une immense détermination. Il paraît évident que la jeune femme faible que j'ai connue a changé. J'en suis persuadé à présent, elle vaincra.

Peter a dû faire une remarque puisque le doux visage de Tris s'est soudainement éteint. Puis, en un fragment de seconde, son expression s'est endurcie, ses yeux se sont effilés, et sa mâchoire s'est crispée comme je ne l'avais jamais vu auparavant. Tous les muscles de son corps semblaient contractés et elle bougeait maintenant avec des sursauts d'agacement. Elle balançait légèrement son poids d'avant en arrière, comme si elle hésitait à avancer. On sentait une certaine tension dans l'air. On voyait qu'elle tentait de se retenir, de rester calme.

Le coup est parti à une vitesse phénoménale. Jamais je n'avais vu Tris émettre tant de force, tant de haine visible sur sa posture, sur sa tête. C'était comme si elle eût voulu déverser toute sa colère, se libérer de toute sa souffrance dans ce coup de poing si violent que j'en entends encore le bruit du craquement de la mâchoire de Peter. Un gémissement sourd de douleur, presque inaudible parvint à nos oreilles. Puis il fut remplacé par un hurlement agressif rempli d'animosité. Je savais aussi bien que tous ceux qui regardaient la scène que ces deux là ne s'épargneraient pas.

Pdv Tris.

Cette fois, c'en était trop. J'avais avalé sans me plaindre toutes les plus niaises paroles de cette bête sans cœur, sans état d'âme, sans sentiments. Je n'étais plus la gentille petite altruiste que je me forçais à rester malgré mon choix audacieux. C'était fini. Plus rien ne me fixait, ne me rattachait à mon ancienne faction. J'avais assez piétiné sur place. Aussi, mon bras partit à la vitesse de l'éclair, jamais je n'aurais pensé faire ça un jour. Son gémissement me raviva malgré mon poing douloureux, et son hurlement ne fit qu'attiser la flamme d'agressivité, de haine qui sommeillait en moi. Il contre-attaqua d'un brutal coup de poing au nez qui me fit perdre l'équilibre. Mais je ne sentais pas la douleur, je ne sentais pas les regards posés sur nous. Tout ce que je voyais, c'était son sourire narquois qui m'incita à lui flanquer un violent coup qui l'atteignit tout droit à la glotte, comme me l'avait appris mon entraîneur.
Dès lors, les coups ne s'arrêtèrent plus. Il suffoquait, ce qui me donna une longueur d'avance me permettant de le mettre à terre et de lui bondir dessus. Je lui crachai à la figure, puis, me dressant pour faire face à ce visage que je déteste tant, je lui labourai la tête de coup de poings, de gifles. J'ignorais si je pleurais de haine mais il était certain que je ne me laisserais pas faire. Il esquiva ma dernière attaque qui se fit plus faible ce qui lui permit de me renverser puis de rouler sur le côté dans une espèce de contorsion. Cette fois, son imposante masse me dominait, et sa face ensanglantée me surplombait. Je souriais face à mon œuvre tandis que son sang gouttait, ou plutôt ruisselait sur ma tête. Je ne l'avais pas raté. Il se releva brusquement et me remonta à mon tour mais il me tenait la tête pour ensuite revenir à la charge en s'acharnant sur mon ventre par de violents coups de genoux qui me firent suffoquer.
Je sentais mes côtes se briser, éclater en mille morceaux. Je couinai de douleur. Il m'avait affaibli, mais je n'étais pas vaincue. J'émis de nouveau un cris perçant puis me jetai sur lui. Je lui avait bondi dessus telle une bête sauvage. Un violent coup à la nuque le fit tituber, puis je lui fouettai le tibia de mes pieds, ce qui le fit se mettre à genoux. Il était bien mal en point, il ne tiendrait plus longtemps. Il soufflait fort sous mes attaques au ventre et à la tête. Peter souffrait. Et c'était un vrai bonheur.
Il était désormais à plat ventre, et j'avais tout contrôle sur lui. Sa vie m'appartenait. Je revins soudain à la réalité et entendis le martèlement des pas de Four qui courait vers moi pour m'empêcher de continuer. Devant cette panique que je lisais dans les yeux de tous, je fixai avec mépris une dernière fois la tête charcutée de Peter qui s'était soulevée du sol, puis, j'ai achevé mon œuvre d'un coup de pied qui plaqua sa tête face au sol. Ce fut pour lui le trou noir, l'inconscience, le passage entre la vie et la mort, pour moi, le soulagement et le sentiment d'avoir accompli ma tâche.