Titre : Le temps des choix

Auteur : Gaëlle

Genre : dark, angst, suite de " Il court, il court le furet "

Source : Harry Potter

Le temps des choix

I

Une jambe en travers de la chaise, Draco Malfoy lisait un vieux livre d'histoire, calé confortablement contre le mur.

Il avait appris à ses dépends à ne plus tourner le dos… que ce soit à des amis ou des ennemis. Se retrouver dans la peau d'un furet et être lancé contre un mur n'avait rien de bien agréable.

La première chose qu'il avait fait après avoir retrouvé sa véritablement forme avait été d'attirer Goyle dans un coin sombre et de l''Oblitarer'

Quant à Nelville, il n'avait pas eu depuis l'occasion de lui adresser la parole… ni l'envie d'ailleurs.

L'expérience lui avait appris que la solitude valait mieux que la compagnie de soi-disant alliés.

Et il avait un devoir à rendre pour le lendemain… il n'avait plus qu'à fignoler deux, trois détails et ce serait parfait…

Il aurait pu aussi réfléchir à la meilleure manière de rendre la vie impossible à Potter mais avec les années, le jeu était devenu moins amusant.

D'autant plus qu'après tout, les jours de monsieur Harry J'ai-résisté-à-Voldemort-tout-seul-comme-un-grand-et-je-me-sens-tellement-coupable-que-le-pauuuuvre-Cédric-soit-mort ! Potter étaient comptés, maintenant que le meurtrier de ses parents avait regagné sa puissance.

Ses fins cheveux blonds, presque blancs, masquant ses yeux, il trempa la plume dans l'encrier et rajouta quelques lignes avant de relire le tout.

Le résultat était pas mal… ni trop succinct, ni trop long.

Cela lui vaudrait probablement un A.

Un bâillement discret lui fit relever la tête et froncer les sourcils.

Lui !

A moitié endormi sur un volumineux ouvrage, Longdubas semblait prêt à passer la nuit là.

Il ne l'avait pas vu, dissimulé par les autres étudiants, mais avec l'heure tardive, ils étaient les seuls présents dans la pièce.

Le Gryffondor releva la tête croisant son regard et lui dédia un petit sourire.

L'imbécile !

Les lèvres de Draco s'étirèrent en un rictus déplaisant et méprisant.

Cet idiot potelé était encore plus naïf qu'il ne le pensait, s'il croyait que son discours sur l'amitié l'avait convaincu.

L'amitié… vraiment !

Tout ce qu'il connaissait, c'était les sourires hypocrites et les coups dans le dos…

Enfant, il y avait eu droit plus souvent qu'à son tour mais la leçon avait porté ses fruits.

Désormais, ses condisciples se méfiaient autant de lui que lui d'eux.

Il ne les craignait pas… lui l'était.

Apparemment, la bande à Potter n'avait pas encore compris qu'elle courait après une illusion enfantine et ridicule.

Il avait reporté son attention sur son devoir, rectifiant quelques mots à gauche et à droite.

Depuis sa transformation en furet, il évitait la salle commune de sa maison, particulièrement les deux abrutis qui lui servaient de gorilles.

Non pas qu'il pensait que le sort eût été intentionnel… Goyle était trop stupide pour réussir quoi que ce soit. Mais quelqu'un avait pu se servir du garçon pour lui nuire…

L'une des leçons utiles que son père lui avait apprises.

La paranoïa est une vertu pour la survie en milieu hostile.

Deuxième leçon : où qu'il soit, il se trouvait en milieu hostile… même chez lui.

Le bruit d'une chaise repoussée ne lui fit pas relever les yeux. Le Gryffondor partait… tant mieux.

Une ombre tomba sur lui tandis que quelqu'un s'asseyait à ses côtés.

Un bref regard lui confirma que Nelville venait de prendre place à sa table, dans son espace vital et avait posé le coude sur ses livres.

" Je ne me rappelle pas t'avoir invité, " fit-il froidement.

Zen ! Ne pas s'énerver !

Ne pas Adava Kadavrer le téméraire !

" Bonjour aussi Draco… "

" Je ne me souviens pas avoir gardé les cochons avec toi, alors dégage et cesse ces familiarités ! "

" Harry et Ron t'ont cherché un bon moment… "

" Et ils m'ont trouvé, " ricana l'adolescent se rappelant les quelques paroles cinglantes échangées au coin d'un couloir et les expressions offusquées des deux garçons devant ses sous entendus venimeux.

Longdubas sourit gentiment.

" Ils n'en ont pas parlé… Je n'ose pas imaginer ce que tu leur as dit. "

Draco releva la tête, agacé.

" A quoi joues-tu, Longdubas ? " siffla-t-il les yeux étrécis. " Si tu veux t'amuser avec un ami, vas trouver un Gryffondor de première année… ou peut-être un Poutssoufle… Ils ignoreront sans doute encore le genre d'empoté geignard et grassouillet que tu es ! "

Il se leva et rassembla ses affaires avant de baisser les yeux vers le blondinet au regard embué de larmes et aux traits cramoisis.

Il laissa ses lèvres s'étirer en un sourire cruel comme il se penchait et caressait une joue arrondie.

" Je t'ai blessé, pauvre, pauvre Nelville ? Oh ! Vilain Draco ! "

Il se redressa moqueur.

" La prochaine fois tu apprendras à ne pas traîner dans mes pattes et à ne plus envahir mon espace vital, Gryffondor. "

Il ne se retourna pas en sortant de la bibliothèque, les traits figés en un masque glacé.

***

Nelville resta assis au même endroit un long moment, le regard fixé sur le bois de la table.

Ca faisait mal… mais…

S'il avait réussi à faire réagir Draco aussi violemment…

A le mettre à ce point sur la défensive…

Avec grand-ma, il avait un jour vu un dompteur de fauve. Il avait admiré l'homme et son courage face aux prédateurs.

Il avait eu l'occasion de lui parler après le spectacle. Grand-ma connaissait tant de monde que c'en était impressionnant pour une vieille dame comme elle.

Les lions étaient les plus paisibles mais avait tendance à s'emporter sans prévenir, il fallait avoir la volonté de leur tenir tête, de se montrer plus fort qu'eux.

Les tigres, quant à eux, étaient vicieux. Aux aguets du moindre signe de faiblesse, d'inattention, ils frappaient dans le dos, sur les côtés mais jamais de face.

Il avait ajouté qu'il fallait s'attendre à recevoir un coup de griffe ou de crocs à n'importe quel moment et se tenir prêt à encaisser.

Grand-ma, après cette brève conversation, lui avait bien fait comprendre que les seuls animaux qu'il dompterait – elle vivante – ne dépasseraient pas la taille d'un gros matou… et encore.

Draco avait en lui la violence du lion et, comme les tigres, frappait là où le bât blessait, utilisant les techniques les plus déloyales pour obtenir ce qu'il voulait.

Le petit blond sourit en se levant.

Il ne s'était pas montré assez prudent et avait reçu un coup de griffe… Il en recevrait d'autres très probablement mais au moins, il serait plus averti…

Sortant, il aperçut une ombre sinueuse du coin de l'œil mais ne vit rien lorsqu'il tourna la tête.

Sans doute son imagination.

***

Debout devant la porte de ses appartements, Severus Rogue fulminait. Où était passé cet imbécile heureux ?

Il ne pouvait pas partir à sa recherche maintenant… il attirerait trop l'attention.

Dumblemore devenait réellement gâteux…

Il devait l'être pour lui avoir demander, à lui, Rogue, de veiller sur lui.

Et par dessus le marché, lui envoyer cet – il fronça les narines en une expression pincée de dégoût – invité surprise et malvenu !

" Oh ! Severus "

Il reconnaîtrait n'importe où cette voix moqueuse.

" Tu m'attendais ? C'est trop mignon… "

" Black ! " cracha-t-il avec une haine non dissimulée en se tournant vers l'autre homme.

Haine pareille à la sienne qui se refléta dans les yeux bleus – enfoncés dans leurs orbites par les épreuves – de son protégé.

Tremblant de rage contenue et se maîtrisant pour ne pas sauter à la gorge de l'insolent, il se contenta de lui indiquer la porte de son bras tendu et raidi par l'indignation.

Sirius passa devant lui avec un sourire goguenard et le directeur des Serpentard dut se maîtriser pour ne pas le faire rentrer à coups de pieds dans le derrière.

" Où étais-tu ? " siffla-t-il lorsque la porte se referma derrière eux.

" J'avais un petit creux. Ce que tu me ramènes n'est pas ce que j'appellerais de copieux repas… "

" Ce sont des plats tout à fait normaux ! "

" Ouais, c'est ça… En tout cas, les cuisines n'ont pas changé… "

Severus retint un soupir d'exaspération.

" Bien… Je vois que tu es toujours brillant… dans la stupidité crasse ! "

Le fugitif se retourna vers lui, ses yeux bleus brillants de colère.

" T'es-tu posé une seule fois la question de ce qui arriverait si quelqu'un te voyait… ou pire te reconnaissait ? Non, évidemment ! Tu n'as pas changé, tu es toujours aussi insouciant et égoïste ! "

Sirius força un sourire insolent sur ses lèvres, ses pupilles réduites à deux épingles à cheveux.

Apparemment, il avait touché juste.

" Oh… Voyez qui me parle d'égoïsme ! Severus Rogue en personne ! "

" Moi au moins, je n'ai jamais tenté de te tuer en utilisant un 'ami'… Si du moins, tu considérais Lupin comme tel, " ajouta-t-il une lueur cruelle jouant dans ses yeux noirs.

" Tais-toi ! "

" Quant à ton filleul… Je suis certain qu'il serait follement heureux, si des détraqueurs débarquaient ici et te donnaient le dernier baiser… Je suis sûr qu'il ne demande que ça après la mort de Diggory ! "

Un choc l'atteignit à la mâchoire et il recula d'un pas pour ne pas tomber avant de porter la main à son visage avec un rictus sarcastique.

" Tais-toi… " souffla finalement l'ancien maraudeur, les yeux baissés sur son poing crispé et secoué de tremblements.

" Réfléchis la prochaine fois que tu voudras te dégourdir les jambes. "

" Severus ? Sirius ? "

Ce dernier se raidit et se tourna vers le propriétaire de la voix rauque qui venait de s'élever.

" Remus… "

Rogue grogna, il l'avait presque oublié celui-là.

Le châtain se tenait dans d'encadrement du petit vestibule dans lequel ils se trouvaient, la robe davantage rapiécée que la dernière fois, le teint gris et malade et des ombres sous ses yeux courant jusqu'au creux de ses joues.

" Hum… Si vous tenez tellement à vous battre, je suppose que vous aimeriez le faire dans un endroit moins étroit… "

Black eut la bonne grâce de rougir avant de rejoindre son ami, évitant son regard, suivi du maître de potion.

Il avait dû entendre leurs paroles, c'était inévitable mais rien ne se lisait dans ses doux yeux dorés ni dans son petit sourire omniprésent.

Note pour plus tard : ne jamais jouer au poker avec ce type !

" Que fais-tu ici ? " demanda abruptement l'animagus.

L'expression du loup-garou ne changea pas.

" Le directeur m'a… invité à passer quelques temps à Poudlard… "

Severus fronça les sourcils.

Avec l'annonce du retour de Voldemort et de ses mangemorts, une véritable psychose s'était levée et certaines créatures magiques s'étaient faites lyncher…

Dumbledore avait probablement voulu éviter au meilleur spécialiste de défense contre le mal de la génération 'maraudeurs' de se retrouver au bout d'une corde.

Sans son incapacité mensuelle et sa mauvaise santé, Lupin aurait fait un auror d'exception… il était bien obligé de le reconnaître.

De mauvaise grâce et avec des pieds de plomb… mais il le reconnaissait.

Il dépassa les deux anciens complices en farces diverses et de mauvais goût, se dirigeant vers un petit bar où la bouteille de cognac lui tendait les bras.

" Black… montre ta chambre à Lupin… Il restera avec toi et t'empêchera de faire trop de conneries… Ca me fera des vacances… "

Et sans attendre leur réaction, il entra dans son bureau, claquant la porte.

Il avait besoin de se détendre un peu…

***

La salle commune des Serpentards à cette heure n'était guère peuplée et les rares étudiants encore debout ne prirent pas le risque de commenter l'arrivée tardive d'un Draco Malefoy manifestement pas d'humeur jouasse.

Avec un regard méprisant, le blond balaya la salle du regard avant de se diriger vers les dortoirs sans un mot.

Il n'avait pas l'intention de s'arrêter faire causette et apparemment cela en soulageait plus d'un, sourit-il intérieurement comme des conversations étouffées reprenaient dans son dos.

Sans bruit, il rejoignit son lit et, se déshabillant rapidement, se glissa sous les couvertures, après avoir soufflé un sort de protection basique.

Quiconque s'approcherait de son lit à moins de cinquante centimètres se retrouverait recouvert de glu rose fluo… à la condition qu'il ou elle ait réussi à passer la barrière protectrice qu'il avait érigée autour de lui.

On n'est jamais trop prudent…

Fermant les yeux, il laissa son esprit dériver…

Son père devenait de plus en plus impatient et les plaidoiries sa mère ne parviendrait bientôt plus à retarder l'inévitable…

A suivre