Le confinement m'a permis de retrouver mon écriture, hourra !

Reprise de Virus :) Je remercie grandement tous ceux qui découvrent cette fic et qui prennent le temps de laisser un message, vous m'avez encouragée à la reprendre. Et merci à tous ceux qui tiennent un oeil sur Virus, vous êtes vous aussi ma motivation merci à ma beta qui a corrigé ça cette nuit dans la foulée pour que vous l'ayez vite ;)

Bonne lecture et au plaisir de voir vos réactions.

Kara avait commandé quelques plats au traiteur asiatique du coin et elle avait disposé des assiettes et des baguettes en bambou sur la table. Elle avait réalisé des cygnes en origami avec les serviettes, car elle était angoissée à l'idée d'avoir son âme sœur dans son humble demeure.

Ce n'était pas tous les jours que cela arrivait.

Pour ainsi dire, c'était une grande première.

Et cerise sur le gâteau, Lena n'en avait pas la moindre idée.

Kara ne put que lui faire un sourire contrit quand elle la vit. Ses cheveux étaient encore humides suite à sa douche et elle portait des vêtements que Kara lui avait prêtés. Lena leva un sourcil étonné quand elle arriva près de la table.

- Tadaaaaaaaaaa, fit Kara, finalement gênée de son idée. C'était peut-être présomptueux de sa part de commander sans lui demander son avis.

- C'est une invitation à dîner ? fit Lena avec un sourire, elle semblait enthousiaste et essayait de voir ce que Kara avait commandé. Oh, ça j'adore, et ça aussi, oh des gyozas ! Tu es une crème, Kara Danvers.

Kara fut déstabilisée de voir que Lena Luthor était bien moins stricte et posée dans un cadre moins officiel. Elle avait les cheveux lâchés, des minis gouttes d'eau tombaient de ses mèches folles.

- Je n'ai pas résisté à l'idée, vu l'heure, j'ai supposé que tu n'avais pas besoin de rentrer au bureau. Plus encore, après une telle douche boueuse et la perte d'un si beau manteau, je me disais qu'un lot de consolation ne serait pas du luxe.

- Je venais justement te voir. Le bureau était vide, j'allais craquer et écrire à Supergirl sur ma peau et j'ai… ça va paraître idiot, mais je ne sais pas comment lui écrire et sembler intéressante.

S'étranglant avec sa gorgée d'eau, Kara toussa un peu.

- Mais non.

- Si, je ne suis qu'une Luthor, ma famille est censée détester les Super et clairement, je n'ai jamais croisé Supergirl… Il serait présomptueux de ma part de penser qu'elle puisse me connaî!tre autrement que comme 'super méchante potentielle'.

- Je ne la connais pas bien, mentit Kara en redressant ses lunettes, seul rempart cachant son identité, mais je ne pense pas qu'elle puisse penser ça d'une personne qu'elle ne connaît pas. Sauf si c'est un monstre qui essaie de la tuer ou de tuer des innocents, ce que tu ne fais pas, n'est-ce pas ?

Lena éclata de rire.

- Non, je ne fais pas ça, fit la brunette en s'installant à table. Et du coup, je voulais juste dire que je venais t'inviter à boire un verre si tu étais libre. Ce camion m'aura permis de ne pas passer ma soirée seule, je commence à l'apprécier. On attaque ?

Kara appréciait de voir Lena dans ses vêtements. Lena allait repartir chez elle avec ces vêtements et un jour ou l'autre, elle voudrait probablement les lui rendre… Kara réfréna un sourire. Ce n'était pas là une tentative de la revoir, enfin, du moins, ce n'était pas son intention première. Mais au-delà de leurs futures rencontres pour parler de l'enquête sur Supergirl la seule et unique âme sœur de Lena Luthor, la kyptonienne voulait apprendre à connaître Lena.

- On attaque.

OOO

'J'aime tellement mon métier que je ne prends pratiquement jamais de congés'

Alex restait particulièrement vague, mais elle avait décidé qu'elle voulait tenter le diable. Elle avait commencé par lancer des informations à son âme sœur, des choses banales. Qu'elle n'avait qu'une sœur. Qu'elle aimait taquiner un de ses amis et collègue. Son dessert favori…

Juste pour frôler du bout des doigts des informations personnelles. Elle jouait avec le feu et ne pouvait pas s'en empêcher. Elle ne savait pas encore si elle voulait avouer à son âme sœur des choses essentielles comme son prénom ou sa localisation.

Elle continua à écrire.

'Je pense que c'est aussi parce qu'à part quelques amis ou ma sœur, je ne sais pas trop avec qui passer ces congés…' flirta Alex.

Un message arriva sur son portable. C'était Maysan qui lui proposait d'aller boire un verre. En tout bien tout honneur avait-elle précisé avec un smiley.

Est-ce que voir une connaissance était quelque chose qu'Alex voudrait raconter à son âme sœur ? Pas vraiment. Pas qu'elle la trompait avec quelqu'un d'autre, c'était idiot, elles n'étaient pas en couple, n'est-ce pas ?

Alex décida d'accepter. Elle pouvait se rendre assez vite en ville et parler avec quelqu'un lui ferait le plus grand bien. Mais elle culpabilisait de dire oui.

'La connaissance que j'ai faite au bar en te cherchant m'invite à boire un verre en tout bien tout honneur' écrivit Alex sur son bras avant de le regretter immédiatement. Demandait-elle la permission de la voir ? Ou essayait-elle de rendre son âme sœur jalouse ?

'Désolée. Je ne sais pas pourquoi je te dis ça. Je…' continua Alex avant de bloquer.

'Je ne sais pas quoi lui dire et je ne sais pas non plus quoi te dire'.

OOO

Maggie fixait son bras. Si son âme sœur ne savait pas quoi dire, elle aussi était perdue. Était-elle jalouse ? De cette inconnue qui invitait de son âme sœur ? Certainement. Parce que cette fille osait demander des choses que Maggie n'osait pas.

Elle n'allait pas l'en empêcher.

Bien sûr que non.

Ce serait stupide. Mesquin. Idiot même.

Maggie voulait écrire 'viens boire un verre avec moi' mais elle ne le fit pas. Elle ne pouvait pas presser son âme sœur juste parce qu'elle avait peur que son âme sœur tombe amoureuse d'une autre. Bien sûr que non.

Alors Maggie ferma les yeux, repensa à ce bar, rempli de filles plus jolies les unes que les autres. Elle était là, elle aurait pu la chercher et la trouver…

Elle avait eu peur.

C'était idiot de paniquer à ce point.

Et puis, elle pensa à Eileen et Ashley qui découvrant leur amour et leurs sentiments avaient eu besoin de parler avec elle.

'Tu devrais y aller. Je pense que parler à quelqu'un de vive voix doit te manquer.'

La réponse fut pratiquement instantanée.

'Elle n'est pas toi.'

Et Maggie ne put que sourire et rougir.

OOO

Kara fixait avec attention Lena. Lena fixait avec attention Kara.

La bataille était rude.

La première qui clignait des yeux avait le droit de manger le dernier gyoza. Qui avait eu cette idée idiote ? Kara ne s'en souvenait plus. Elle était trop hypnotisée par les yeux qui la fixaient. Lena était son âme sœur. Et elle l'ignorait.

C'était injuste de ne pas lui dire.

Mais d'un autre côté, lui révéler ce petit détail d'importance, c'était lui dire qu'elle était Supergirl. Et ça, ce n'était pas envisageable. C'était bien trop dangereux. Du coup, elle envisageait de voler à sa fenêtre et discuter des heures durant.

Quelle était la solution ?

Y-en-avait-il seulement une ?

Kara n'arrivait pas à se décider et elle cligna des yeux par réflexe.

- J'ai gagné ! fit Lena avec un gazouillis pour le moins surprenant en s'emparant du gyoza. La prochaine fois, il faudra en commander un nombre pair pour éviter les bagarres, Kara.

OOO

Maysan et elle avaient décidé de se voir en fin de semaine. Alex s'était habillée en y réfléchissant un peu trop. Elle voulait une tenue qui clamerait qu'elle était là pour se faire une amie. Pas pour draguer. Un pantalon noir, une blouse colorée et légèrement décolletée avec des jeux de laçages dans le dos. Maysan, elle, était juste décontractée, en jeans et avec un T-shirt blanc clamant son amour pour Euripide.

- Je suis trop habillée.

- Absolument pas, Alex. Tu es magnifique. Si tu étais en robe longue, par contre, je serais forcée de t'emmener au théâtre et pas dans ce petit bar.

- J'aurais dû…

- Chut, petit Padawan. J'ai quelque chose pour toi.

- Ah bon ?

L'aînée des Danvers se demandait si elle avait bien fait de venir. La brunette était toujours aussi magnifique, mais elle n'était pas son âme sœur bleue avec qui elle communiquait tous les jours depuis des semaines.

- Tes cookies.

- Pardon ? Attends, tu veux dire que tu m'as apporté les cookies du côté obscur de la force ?

- Exactement. Même pompette, il y a des choses que je ne peux pas oublier. Comme par exemple le fait que tu doutais que le côté obscur de la force avait des cookies. Maintenant, tu pourras faire ton choix. Ou ne pas faire de choix. Tu peux aimer qui tu veux.

Alex croqua dans un cookie.

- Ils sont divins.

- Attends de les manger avec un cocktail, c'est encore plus diabolique que ce que tu crois.

Il n'y avait pas de raison de paniquer. Maysan faisait attention. Elle ne la draguait pas vraiment. C'était plus un flirt amical. C'était agréable.

- J'avais peur que tu me dragues, avoua Alex.

- Si ça peut te rassurer, je drague comme je respire. C'est inné.

- Maysaaaan.

- Je suis honnête. Est-ce que tu vas mieux ? Moins en panique ?

- On peut dire ça. Je crois que te parler m'a permis de… de lui avouer que ce virus m'avait révélé plus de choses encore que ce que j'envisageais ? Sur moi, je veux dire.

- C'est bien, la communication dans un couple, c'est essentiel.

- On est pas en couple, rectifia Alex rapidement.

Maysan éclata de rire.

- Ce n'est pas un crime, tu sais. Je vous considère comme un couple parce que manifestement vous flirtez. Et je crois qu'elle essaie de me le faire comprendre de manière peu subtile. Tu as des cœurs sur le poignet.

Alex rougissait.

- Je…

- Oui, tu ?

- Je suis gênée.

- Mais diablement fière aussi qu'elle te drague l'air de rien pour éloigner les viles prédatrices ?

- Silence.

- Je savais bien que tu m'aimais bien, ordonner le silence d'un ami quand il vise droit au but, c'est la première preuve d'amitié.

OOO

Maggie était en train de réfléchir à une réponse aussi sexy que drôle pour éviter d'avouer qu'elle avait dessiné des cœurs pour éloigner la fille avec qui elle buvait un verre.

Elle n'avait pourtant aucune bonne excuse.

C'était juste… puéril.

Elle se décida à se mettre en pyjama et au moment où elle rentrait sous la douche, elle reçut un coup de téléphone du poste de police. Maggie dut prestement sortir, se sécher un peu et attrapa son téléphone. Tous les policiers étaient réquisitionnés, la situation était très grave. Maggie paniqua. Sa première pensée était pour son âme sœur. Elle était dehors, elle était dehors et potentiellement en danger.

Elle écrivit sur sa main un message pour indiquer à son âme sœur de rentrer chez elle et de se mettre à l'abri le plus vite possible. Elle envoya aussi un message à Eileen et Ashley.

Le cœur battant, elle finit de se sécher à la hâte. Elle attrapa une bouteille d'eau et un paquet de biscuits et un instant plus tard, elle prit sa veste et les clés de sa moto. Elle n'allait pas revoir son appartement avant un moment.

Une fois sur place, Matilda eut vite fait de la briffer sur l'attaque de la ville par une bande de vandales invisibles qui semblaient venus d'ailleurs. Supergirl avait été informée de la situation catastrophique et faisait tout son possible pour protéger la ville, mais seule, elle n'allait jamais s'en sortir. Tous les postes de police avaient donc été alarmés et avaient rappelé tous leurs effectifs.

Maggie était en train de s'habiller pour le combat et elle vit sur son bras que son message avait été en grande partie effacé, probablement pendant qu'elle se préparait et se séchait en vitesse. Elle craignait que son âme sœur n'ait pas vu son avertissement. Néanmoins, un message écrit à l'encre bleu sur sa peau l'alarma plus encore, si cela était possible.

'Attaque de National City en cours… Je dois y aller. Fuis, par le nord-est si tu peux. Mon boulot c'est de protéger et sauver cette ville, mais égoïstement, je préférerais te savoir en sécurité loin de tout ça. Fais attention à toi'

La jeune latino s'adossa à un casier du poste de police. Elle était en panique.

Elles avaient le même travail.

Maggie en eut le souffle coupé.

Tout prenait sens. C'était de là que venaient ses bleus ? C'était pour ça les mensonges concernant des chutes à moto ?

Elle était en danger. Son âme sœur était en danger. Elle ne pouvait pas… non, elle ne pouvait pas être blessée. Son supérieur hiérarchique arriva dans les vestiaires.

- Sawyer ? Vous êtes prête ? Je vous envoie dans les quartiers nord. Sécurisez ce qui peut encore l'être et mettez les civils en sécurité.

- Bien. Bien.

- Vous allez bien ?

Son commandant la regarda d'un air étrange mais Maggie avait d'autres choses en tête.

- Oui. Je crois. Je dois l'être. Murphy est déjà sur le terrain ?

- Oui.

OOO

Une équipe complète du DEO avait été envoyée pour aider Supergirl et la protéger en cas de problèmes. Le reste du bureau était réparti à travers toute la ville.

- Alex ! À ta droite !

En entendant Kara la prévenir, Alex se retourna brusquement et évita un tir qui lui aurait très certainement causé de gros dégâts.

L'ennemi était en grand nombre et Alex dénombrait au moins six ou sept espèces différentes d'extra-terrestres. Une autre espèce était en plus invisible. Ce qui voulait dire qu'elle avait affaire à autant d'attaques différentes : des tirs de feu, des attaques magnétiques, des électriques... Cela n'allait pas arranger leurs affaires. Il allait y avoir beaucoup de dégâts.

Elle pestait comme rarement. Pourquoi fallait-il qu'une attaque sans précédent vienne ruiner sa soirée à discuter avec Maysan alors qu'elles en étaient arrivées à discuter de ce flirt sans demi-mesure qu'elle vivait avec son âme sœur bleue et qui avait transformé sa vie en pure félicité ?

Alex sursauta et hurla rageusement en voyant du mouvement à sa droite.

- Nous n'avons pas le temps pour vous protéger en plus de tout ! s'énerva-t-elle en tuant un alien qui tentait de la blesser.

Un groupe de policiers avait fait irruption sur la scène et les sœurs Danvers allaient devoir faire en sorte de les protéger. Et clairement, ce n'était pas le moment.

- Notre job est de protéger. Et vous avez besoin d'aide, ils sont en surnombre et vous le savez.

S'il n'avait tenu qu'à elle, Alex les aurait renvoyés sur le champ à l'abri. C'était bien trop dangereux. Des agents du DEO surentraînés avaient déjà été envoyés au tapis. L'équipe menée par J'onn à l'autre bout de la ville avait elle aussi subi des pertes importantes. Mais elle avait aussi peur pour Kara. La kryptonienne ne pouvait pas sauver la ville à elle seule, quoi qu'elle en dise.

Supergirl vola droit dans un immeuble suite à une attaque particulièrement vicieuse et Alex eut un instant de panique. La savoir invincible n'amoindrissait en rien sa peur. Sa petite sœur sortit de l'immeuble en volant et elle reprit sa respiration. Kara pouvait le faire, à une seule condition, qu'elle l'aide du mieux qu'elle pouvait.

- Vous êtes sous mes ordres, est-ce bien clair ? ragea Alex.

- Oui madame.

Alex voulait que cela se passe au mieux. Elle devait se concentrer. Si seulement elle arrivait à se concentrer avec succès. Voir sa sœur prendre des coups, ses hommes être blessés était une chose déjà bien assez difficile à gérer. Mais la pensée de son âme sœur dans un lieu dangereux l'inquiétait tout autant. Elle avait vu des traces d'un message à moitié effacé et illisible.

Son inquiétude était que son âme sœur n'ait pas vu le message sur son bras lui indiquant de fuir la ville au plus vite. Et si elle était endormie chez elle ? Ou bien, otage de ces aliens fous furieux qui avaient profité d'un moment de calme à National City pour lancer une attaque conjointe ?

Il y avait au minimum vingt extra-terrestres impliqués si elle en croyait les informations que Winn lui envoyait depuis le DEO. Cela rappelait à l'aînée des Danvers l'attaque des kryptonniens quelques mois auparavant.

Elle se répétait en boucle le même mantra. Leur devoir était de sauver la ville et ses habitants. Elle désigna le toit de plusieurs habitations en hauteur, les agents sous ses ordres comprirent son intention et allèrent se mettre en position. Ils avaient du pain sur la planche et ce n'était pas peu dire.

OOO

Maggie était face à un dilemme sans nom. À chaque équipe de police ou d'intervention fédérale, elle tournait la tête pour essayer de reconnaître son âme sœur. Ce qui était parfaitement stupide, elle ne pouvait décemment pas reconnaître une personne qu'elle n'avait jamais vue.

La peur au ventre, elle s'attendait à la voir blessée ou pire… Et c'était un sentiment affreux.

Elle attrapa dans ses bras une petite fille en pyjama qui tentait de fuir dans la mauvaise direction.

- Tu es blessée ?

La gamine, apeurée fut rassurée en constatant qu'elle faisait partie de la police et se blottit contre elle, posant sa tête dans son cou.

- Non, murmura-t-elle dans ses cheveux. Elle tremblait.

- Je m'occupe de toi, d'accord ?

- Oui.

- Tu sais dans quelle direction sont partis tes parents ?

La petite tendit le bras en direction du parc qui n'était qu'à deux pas de leur position. C'était là qu'elle fuyait. S'ils avaient fui dans ce lieu ouvert et sans cachette valable, elle allait devoir confier la gamine à des collègues qui l'emmèneraient en lieu sûr pendant qu'elle irait les récupérer. Elle fit un signe à Matilda qui accourut.

- Je vais te laisser avec cette dame, elle va te protéger. Je vais chercher tes parents, d'accord ?

Elle hocha frénétiquement la tête, refusant de la lâcher.

- Si je dois te protéger, je veux aussi m'assurer que tes parents vont bien. Matilda est une princesse policière, inventa Maggie. Tu peux lui faire confiance.

Une fois libre de ses mouvements, la jeune inspectrice de police n'avait pas fait plus de trois mètres dans le parc lorsqu'un tir l'atteignit dans la cuisse et un autre frôla son épaule gauche. La douleur ne sembla pas importante sur le coup. C'était là sa principale pensée avant que le monde ne commence à vaciller sous son regard et qu'elle s'effondre à même le sol.

OOO

L'attaque avait été longue et intense et les pertes étaient nombreuses, tant humaines, extraterrestres que matérielles. Ils étaient enfin de retour au DEO et Winn supervisait les opérations. Les aliens semblaient satisfaits de leur attaque et avaient disparus de la circulation. C'était incompréhensible.

Kara se posa au sol et relâcha la prise qu'elle avait sur sa sœur. Elle l'avait transportée dans ses bras, contre le gré de son aînée.

- Passage à l'infirmerie obligatoire, annonça J'onn. Pour ceux qui se sentent encore assez vaillants, nous aurons besoin de volontaires pour veiller sur les hôpitaux et sur leur sécurité. La police a eu de très gros dégâts également. Nous devons nous assurer que cela ne sera pas préjudiciable dans les jours à venir. Nous sommes vulnérables.

- Je pourrai aider, annonça Kara qui tenait à peine sur ses jambes.

Alex leva les yeux au ciel en rattrapant sa sœur qui s'effondrait au sol et fit en sorte de la soutenir du mieux qu'elle pouvait. Elle lui fit traverser le hall du DEO jusqu'à atteindre la salle réservée aux lits de lumière solaire. Elle se sentait elle-même particulièrement courbaturée et elle devrait très certainement faire un check-up complet au matin. Mais Kara passait avant elle.

Une fois sa sœur étendue et passablement endormie, Alex commença à ôter sa tenue de combat pour passer une tenue plus légère et plus adaptée pour veiller sur sa cadette. En enlevant ses sangles qui lui permettaient de tenir ses armes puis son pantalon, elle vit que sa cuisse était d'un bleu inquiétant et pendant un court instant, elle la fixa d'un air interdit. Elle passa sa main dessus, s'attendant à la douleur. Il n'en fut rien.

Interdite, elle fixa sa jambe, oubliant qu'elle était en culotte en dentelle.

Puis, lentement, prudemment, elle comprit ce qui était sous ses yeux. Ce n'était pas elle qui était blessée, c'était Elle. Elle était blessée. Elle avait été touchée pendant l'attaque.

Avec fébrilité, elle défit son gilet pare-balle et enleva le reste de ses vêtements pour rester en sous-vêtements. Son épaule présentait elle-aussi des couleurs inquiétantes.

Elle laissa échapper une respiration tremblante.

Les blessures étaient étendues.

Mais cela ne pouvait pas être mortel.

Non, cela ne pouvait pas être mortel.

Cela ne pouvait tout simplement pas être mortel.

Elle ne pouvait pas mourir. Pas maintenant. Jamais.

Pas maintenant qu'elles s'étaient rencontrées par peaux interposées.

Pas quand Alex commençait à accepter le fait qu'elle tombait certainement amoureuse d'elle. Elle était SON inconnue. Elle devait vivre. Elle le devait. Elle n'avait pas le choix.

Alex se laissa tomber à terre et des larmes d'épuisement courraient sur ses joues. Elle se fichait bien de ses propres blessures. Elle devait avoir quelques côtes fêlées, une entorse à la cheville et des égratignures diverses. Mais ce n'était rien à côté de ce qu'elle avait.

OOO

Une douleur sourde lui vrillait le crâne avec insistance et sa jambe lui faisait un mal de chien. Voilà ce qui lui passa par la tête lorsqu'elle se réveilla à l'hôpital. Maggie tenta de se redresser en s'appuyant sur ses bras et laissa échapper une volée de jurons devant la douleur qui l'étreignait. Ses souvenirs étaient vagues. Elle se rappelait l'attaque des extraterrestres, des civils à protéger et… et de son âme sœur qui lui demandait de fuir.

- On se réveille enfin, la belle au bois dormant ?

- Murphy ? grogna Maggie.

- Oui. Le seul l'unique, le merveilleux, le fantastique…

Murphy souriait de toutes ses dents, mais son regard exprimait clairement son inquiétude. Maggie grimaça en souriant ce qui n'était pas une chose aisée. Même s'il ne parlait pas aussi fort que ça, sa voix était bien trop forte pour la jeune inspectrice.

- Parle moins fort, pitié.

Il leva les yeux au ciel, mais adapta immédiatement le ton de sa voix. Il tapota son pied qui était sous les couvertures avec douceur et lui demanda :

- Alors gamine, ça va ?

- J'ai connu mieux, je suppose. Pire aussi… Enfin, je pense.

Maggie avait l'impression d'être passée sous un bus.

- Pire, je ne pense pas. Double opération tout de même et tu dors depuis plus de quarante-huit heures et vingt-deux minutes. Pas que je comptais, bien entendu. Matilda s'en chargeait pendant que je questionnais et menaçais en boucle tes médecins.

- Depuis tout ce temps ? Réellement ? Je peux avoir un peu d'eau, s'il te plaît ?

Murphy lui prépara un verre d'eau et y ajouta une paille. Il lui tint le verre pendant qu'elle buvait quelques minuscules gorgées.

- D'après les spécialistes, tout traumatisme est aggravé par la présence du virus bleu. Ou du moins, il ralentit fortement le métabolisme et la guérison prend énormément de temps. Tu nous as fichu la trouille, Sawyer.

- Désolée.

Maggie se mordit la lèvre. Si elle était endormie depuis deux jours… elle avait pu lui écrire. Ou lui laisser des traces de blessures… Elle voulut se redresser une nouvelle fois, sans succès. Elle hurla.

- Reste comme tu es gamine. Pardon de te le dire, mais tu es dans un sale état.

- Ils t'ont parlé de mes traces bleues ? s'enquit-elle pour éviter de le voir aussi triste, elle détestait le voir triste.

Murphy savait qu'elle allait poser la question, mais il ne pouvait pas la rassurer plus que ça. Il ignorait tout de l'état réel de son âme sœur… juste les traces que Maggie avait d'elle sur son corps.

- Elle a bien morflé aussi. Principalement le ventre et les jambes. Quoique, tu as toujours le bleu qu'elle arbore sur la joue. Ou que tu arbores sur la joue. J'ai du mal de différencier tes blessures des siennes, j'avoue. Et il y en a un paquet à vous deux.

- Pas d'écriture ?

- Une pluie d'écritures rapides qui disparaissaient assez vite. Il y a des chances que ce soit simplement un conflit entre le virus et ton organisme qui se concentrait sur ta guérison. Je ne saurais pas te dire ce qui était dit. Mais il ne tient qu'à toi de lui écrire que tu vas bien. Elle doit être morte d'inquiétude.

- Je le ferai.

- Non. Tu vas le faire, tout de suite, je te donne ton stylo et je vais aller au poste rassurer tous ceux qui s'inquiètent pour toi. N'essaie surtout pas de bouger ton épaule, fais juste ton possible d'accord ? Et après, repose-toi. C'est un ordre.

Maggie n'osa pas lui dire qu'elle avait peur de le faire.

OOO

Alex était étendue sur son lit et ouvrit l'œil. Sa sœur était dans la cuisine pour lui préparer un repas bien trop consistant. Des odeurs planaient. Celles du bacon et des pancakes étaient les plus fortes.

- Tu veux me gaver, l'accusa-t-elle.

- Oui, confirma Kara avec un sourire ravageur. Tu as besoin de reprendre des forces. Ce virus et tes blessures t'ont mise KO bien trop longtemps. D'accord, tu n'es pas dans le même état que tous les autres, probablement parce que tes blessures étaient pour la plupart superficielles, à part bien entendu tes côtes, mais tout de même. Il est hors de question que je te laisse dans cet état. Tu as besoin de beaucoup d'amour et plus encore… de nourriture.

Une immense assiette se posa devant elle en un éclair.

- Kara…

- Non, dis-moi juste merci, c'est un plaisir que de m'occuper de toi.

- Maman t'a dit de prendre soin de moi ?

- Aussi. C'est elle qui a suggéré de te veiller.

Alex se redressa malgré la fébrilité générale qui s'était emparée de son corps. Elle vérifia ses bras et constata qu'elle n'avait toujours aucune nouvelle de son âme sœur bleue et elle paniquait réellement. Elle avait discuté la veille avec les membres de son laboratoire au DEO et avec Winn. Les nouvelles n'étaient pas rassurantes.

Le virus bleu était problématique dans les cas de traumatisme sévère, mais pour une raison inexplicable, certains liens devenaient plus faibles. La grenouille de Winn était toujours bien présente mais les paroles de chansons de Lucy avaient disparu du jour au lendemain.

Alex était inquiète. Pouvait-elle avoir perdu son âme sœur ?

Elle n'avait pas envie de penser à cette éventualité, mais il n'y avait pas des millions de possibilités pour l'absence de messages. Mais était-ce suite à la disparition du lien bleu ou bien autre chose…

La pire était bien entendu la mort de son âme sœur. Cette perspective lui fit comme un coup de poignard dans le ventre, mais Alex refusait de penser à cette éventualité. Si elle était dans le coma, ou trop blessée pour écrire, par contre… cela faisait bien plus sens.

Elle devait faire quelque chose.

Non. En fait, non. Elle ne pouvait pas faire le tour des hôpitaux en décrivant les traces de blessures peintes en bleu sur sa peau pour la retrouver.

Et puis, elle vérifia qu'elle avait toujours les traces de blessure sur sa peau. Leur lien était toujours là, bien présent. C'était sa seule indication qu'elle devait encore être en vie.

- Tu ne vas pas lui écrire quelque chose ? demanda gentiment Kara en lui tendant un verre de jus d'orange.

- Je ne sais pas trop, répondit Alex, j'aimerais juste avoir un signe qu'elle va bien. Et ton âme sœur, enfin, je veux dire, tu es toujours connectée avec Lena ?

- Non, elle a juste disparu de ma peau. Aucune trace bleue depuis l'attaque. Je ne sais pas trop comment je vais pouvoir encore communiquer anonymement avec elle. Quand elle est avec moi, elle me voit comme Kara. Pas comme Supergirl son âme sœur bleue. Winn pense que les attaquants ont utilisé une arme qui a déconnecté certaines âme-sœurs. Il est dans les rares avec toi au DEO qui a encore un lien bleu.

- Kara…

- Non, je vais bien. Je trouverai un moyen. Ou pas. Lena et moi, on s'entend bien. Je trouverai un moyen, mais un autre jour. On a toute la vie devant nous.

Kara avait les larmes aux yeux, quoiqu'elle puisse dire, sa grande sœur comprit que ce changement dans sa vie la bouleversait.

OOO

Matilda avait eu la bonne idée de lire les messages sur le téléphone de Maggie. Cela l'avait distraite un peu au matin, juste avant que la jeune femme retourne au poste de police.

- Eileen te signale qu'elle a survécu et que tout va bien. Elle rajoute qu'elle espère que les examens seront annulés. Ashley a envoyé juste une série de smiley. Je suppose qu'elle veut dire qu'elle est vivante, qu'elle va bien et qu'elle n'est pas en état de parler. Murphy t'envoie des 'courage gamine'…

- Tu imites très mal.

- Silence, Sawyer. Et je vois ici que ta merveilleuse amie et collègue Matilda t'a envoyé un gros bisou.

- Cette brave chouquette. Tu as vérifié si la petite que je t'avais confiée avant de finir à l'hôpital a retrouvé ses parents ? Tout le monde va bien ?

- Oui, et arrête de t'inquiéter, d'accord ?

- J'essaierai.

Enfin seule dans son lit d'hôpital, le bruit des machines qui contrôlaient ses constantes vitales la berçait doucement, Maggie regardait son bras sans réellement le voir. Il n'y avait pas d'écriture bleue dessus. Juste des traces de blessures ou de bleus.

Elle voulait dessiner quelque chose. Elle ne voulait pas discuter parce qu'elle ne savait pas par où commencer. Lui avouer qu'elle avait eu peur pour elle ? Qu'elles faisaient très probablement le même travail ? Qu'elle voulait la rencontrer dans le petit restaurant indien qui était à deux pas du centre-ville et dont tout le monde disait le plus grand bien ? Du moins, s'il n'avait pas été détruit durant l'attaque. Qu'elle voulait la courtiser pour de vrai et non pas par peaux interposées ? Qu'elle voulait voir son sourire et savoir quel parfum elle portait ? Qu'elle voulait l'enlacer doucement et s'endormir dans ses bras ? Ou juste qu'elle voulait connaître son prénom.

Parler était trop fastidieux pour cette nuit.

C'était trop douloureux. Elle avait eu peur. Peur de la perdre.

Alors elle eut l'idée de lui envoyer quelque chose qui lui dirait qu'elle allait bien, qu'elle se souvenait de tout ce qui faisait leur histoire commune qui n'était pas banale et qu'elle voulait la connaître mieux.

Ses gestes étaient lents. Elle grimaçait à cause de la douleur lancinante mais elle parvint à tenir son stylo correctement. Elle dessina plus ou moins correctement et lorsqu'elle eut fini, elle se demanda si son âme-sœur comprendrait le message.

Elle n'eut pas l'occasion d'y réfléchir très longtemps, l'épuisement et le manque de sommeil réparateur la rattrapèrent rapidement.

OOO

Alex était en train de manger un peu, lorsqu'elle vit sur l'intérieur de son poignet une trace d'un bleu clair familier se dessiner.

Elle faillit en pleurer de soulagement.

Le trait était lent et hésitant mais il était bien là, Alex en eut le souffle coupé. Elle était vivante. Elle écrivait, non, elle dessinait. Un trait, puis l'autre et peu à peu. Alex s'amusait à suivre du bout des doigts le trait fin. Elle avait des gestes lents, elle devait avoir du mal. Tous ces traits révélèrent une petite étoile. Ensuite, vint un lys, à peine plus grand. C'était très certainement, un clin d'œil aux dessins de fleurs qu'elle avait découverts des semaines auparavant. Cela semblait comme un rêve de retrouver ce dessin familier sur sa peau. Elle se revoyait encore en train de rechercher la signification du lys.

'Ose m'aimer'.

Et l'étoile était très semblable à son premier dessin de constellations, lorsqu'elle avait tenté le tout pour le tout pour rentrer en contact avec un inconnu qui lui était relié. Inconnu qui était devenu une inconnue et qui avait révélé bien des choses à Alex.

Cela semblait si familier et si lointain à la fois…

Alex prit un stylo – ou plutôt demanda à Kara qui était en train de ranger l'appartement à la vitesse de l'éclair de lui en apporter un – et voulut dessiner à son tour.

- Tu as une idée de ce que tu veux faire ? demanda sa cadette.

- Non. Enfin, peut-être. Une fleur. C'est elle qui a commencé cette mode, ce serait un clin d'œil de lui répondre de la même manière.

- Et tu comptes dessiner ça où ? Vu ses multiples blessures, tu n'as pas vraiment l'embarras du choix, ricana Kara.

- Kara…

- Je propose simplement de trouver une zone du corps qui soit visible pour elle qui doit être alitée, tout en étant originale et un peu… olé olé. Avec des blessures au bras et à la jambe et comme tu es toi-même droitière…

- Tu me dis de dessiner sur sa hanche ?

- Tu interprètes comme tu veux mes propos, ma chère Alex. Comme tu veux. Fais-toi plaisir. Je te laisse, je vais nettoyer la salle de bain. Si tu te mets à poil, préviens-moi de ne pas sortir trop vite.

- Karaaaaaa !

Le bruit de la vitesse de Kara parvint à ses oreilles et elle entendit la porte de la salle de bain se fermer.

- Je ne suis déjà plus làààààà, clama Kara derrière la porte.

Alex Danvers n'était pas douée pour le dessin, mais elle avait juste envie de lui faire le même clin d'œil. L'hibiscus était probablement assez faisable et reconnaissable, aussi, elle tenta de faire pour un mieux. Puis, toujours dans le but de lui signifier qu'elle allait bien, elle dessina la lune comme elle était dans le ciel de National City cette nuit. Un fin croissant de lune qui surplombait l'hibiscus. Le dessin était relativement petit mais correct. Du moins, à ses yeux. Elle décida de prendre en photo son poignet. Puis, une fois qu'elle eut fini, elle remarqua un message sur son téléphone.

Winn : Faire un tatouage de grenouille, bonne ou mauvaise idée ?

Alex : Bonne question. C'est pour avoir une trace du lien, je suppose ?

Winn : Ils disparaissent de plus en plus en ville et dans d'autres pays du monde également. D'autres attaques similaires ont été répertoriées un peu partout. Les armes utilisées sont certainement responsables. Je crois qu'il ne nous reste plus longtemps.

Alex : Tu as trouvé le tatoueur qui accepte de faire ça ?

Winn : Oui.

Winn : Pourquoi ?

Alex : J'irai avec toi.

OOO

La blessure sur sa cuisse se résorbait désormais un peu plus vite. Ses médecins l'avaient informée que la disparition du lien bleu en était la cause la plus probable et Maggie avait juste eut la pensée fugace qu'elle n'avait peut-être pas reçu son dessin à temps.

Elle en aurait pleuré de détresse.

Son étoile et son lys étaient toujours visibles sur sa peau, elle avait bien insisté auprès de l'infirmière qui venait l'aider à se laver qu'elle voulait que son dessin reste intact le plus longtemps possible. Mais cela ne servait à rien si le lien bleu n'existait plus. Elle n'avait pas reçu de message en retour, ce qui confirmait probablement la disparition de leur lien unique.

- Bonjour mademoiselle Sawyer.

- Bonjour Betty.

- Vous avez une petite mine aujourd'hui, fit l'infirmière en ajustant les oreillers qui soutenaient Maggie.

- Je vais bien, c'est juste… juste le lien qui disparaît. C'est idiot mais je pense que je m'y étais attachée.

- Je comprends. Mon lien a disparu hier. J'ai tenté de lui écrire mon adresse… Nous verrons bien s'il débarque un jour ou non.

C'était étrange de se dire qu'ils avaient tous pris leurs habitudes avec ce virus bleu et qu'il disparaissait désormais sans laisser de traces. Maggie savait en plus qu'elle n'avait donné aucune information personnelle avant qu'il disparaisse. Il y avait bien sa playlist préférée, ses films préférés et également quelques-unes de ses recettes préférées entre les mains. Mais elle ne connaissait rien de réellement utile pour la retrouver.

- Je vais vérifier vos pansements, d'accord ?

Maggie hocha la tête. C'était toujours assez gênant de se retrouver à moitié nue devant une inconnue avec qui elle n'avait aucune affinité amoureuse. Pour ainsi dire, elle aurait préféré avoir un infirmier. Elle n'aurait pas eu cette impression de tromper son âme sœur bleue. Ce qui était une pensée réellement malvenue et dénuée de tout fondement.

- Oh. Je crois que je dois vous prévenir, commença l'infirmière en un sourire, le lien est toujours là. Je pensais qu'il avait disparu comme le mien… mais je me trompais.

- Quoi ?

Le cœur battant à tout rompre, Maggie se redressa un peu trop brusquement. Son épaule était toujours douloureuse et elle laissa échapper un cri. Betty lui désigna sa hanche, puis lui dit qu'elle était trop bouleversée, qu'elle enverrait une collègue pour l'aider.

Maggie s'en fichait.

Sur sa hanche, à gauche, il y avait une petite lune et un hibiscus. Aucun doute n'était possible. C'était bien elle, son âme sœur. Maggie crut qu'elle allait pleurer de soulagement, elle était vivante.

Elle n'avait pas de temps à perdre. Elle devait lui envoyer un message au plus vite, son nom, son adresse, n'importe quoi. Elle souleva sa manche et vit des traces bleutées sur son bras. Son âme sœur était elle aussi couverte de bleus. Mais leur couleur faiblissait. Ce qui signifiait que leur lien faiblissait aussi à vue d'œil. Elle n'avait plus de temps devant elle.

Elle était en train de la perdre.

Maggie s'empara de son téléphone en grimaçant de douleur au changement de position, maudissant d'avoir été blessée et d'avoir raté des heures cruciales pour la retrouver.

Il lui fallait une trace. Une photographie de son dernier dessin. C'était tout ce qu'elle voulait là de suite. S'il n'était pas trop tard.

Un médecin qui serait rentré à ce moment précis dans la chambre aurait eu des tas de questions à poser à sa patiente qui photographiait sa hanche comme si sa vie en dépendait. Maggie, elle, vérifia la qualité de la photo et soupira en comparant la photographie avec l'originale qui devenait de plus en plus clair et qui finit par disparaître.

OOO

Kara la regardait avec autant d'admiration que d'incompréhension pure. Elle tenait dans ses mains le poignet de sa sœur qui était bandé. Elle utilisa sa vision extraterrestre pour confirmer les dires de sa sœur. En dessous du pansement, sa peau était rouge et irritée mais l'on distinguait parfaitement la petite étoile et le lys qui était tatoués dessus.

- Ça t'est venu comme ça ? Tu t'es dit que c'était le moment ou jamais ? demanda Kara.

- Je voulais garder une trace de ce moment. Pour ne pas me dire dans quelques années que ce n'était qu'un rêve. J'avais envie de me souvenir d'elle et du moment où j'ai compris que j'étais… ce que j'étais.

Alex rougissait rarement, mais elle le fit ce qui provoqua le sourire de sa cadette.

- Et d'avoir une preuve de ce qu'elle faisait d'unique pour peut-être la retrouver comme ça ? commenta Kara qui décidément posait les bonnes questions au bon moment, au grand dam de son aînée.

- Peut-être. Je ne sais pas si c'est possible. Il va y avoir des milliers de personnes, non, des millions de personnes qui vont rechercher leur âme sœur maintenant que les liens disparaissent. Winn et moi nous avons…

Kara ouvrit grand la bouche avant d'interrompre sa sœur rapidement.

- Comment ça, Winn et moi ? Vous avez fait ça à deux ?

- Hin hin. C'est lui qui m'a donné l'idée. Il voulait savoir si c'était une bonne ou une mauvaise idée.

- Et tu lui as dit que c'était une bonne idée ?! Eh bien, Alex Danvers, te voilà redevenue une vraie rebelle. Sa grenouille était toujours sur son pouce ?

- Oui. Et il a pleuré comme un bébé.

- C'est trop mignon.

- Oui. Très. Mais au moins, j'ai une trace d'elle.

- On fera tout pour la retrouver. Nous pourrons vérifier quelles traces de blessures tu avais en copie sur le corps pour se renseigner sur les différentes victimes de l'attaque.

- Tout a disparu. Nous ne sommes plus liées.

Le regard compatissant de Kara était empli de tristesse et Alex sentit les larmes qui coulaient sur ses propres joues.

OOO

Cela faisait maintenant deux mois que les liens avaient disparu. Partout en ville, des centaines d'appels à témoins recouvraient les façades et les vitrines. Chacun voulait retrouver son âme sœur pour lui dire tout ce qui n'avait pas pu être dit au cours des trois derniers mois. Certains avaient des informations très précises, d'autres avaient un simple dessin à présenter. Maggie n'avait qu'une photographie sur son téléphone pour se souvenir de tout ce qui s'était passé.

Elle accompagnait Murphy pour une visite de routine. On lui avait confié des tâches de bureau pour l'aider à se remettre tranquillement de ses dernières péripéties et Maggie, pour une fois, en était reconnaissante. Sa cuisse et son épaule se remettaient bien, elle avait une bonne santé générale, mais elle avait encore des douleurs résiduelles importantes suite à ses deux opérations. Elle ne pourrait pas reprendre le sport de manière intensive avant un bon mois encore et elle avait l'impression qu'elle allait devenir inutile sur le terrain d'ici là.

Murphy vit bien qu'elle n'était pas dans son assiette.

- Sawyer, tu ne m'as rien dit sur ton âme sœur depuis l'incident.

L'incident, c'était le terme employé pour désigner la fin des liens bleus. Murphy n'en parlait pas vraiment depuis lors, il sortait avec son âme sœur bleue avant l'arrivée des liens. En soi, rien n'avait changé dans sa vie. Il tentait cependant de ménager sa coéquipière.

- Y a-t-il quelque chose à dire ? demanda Maggie.

- Tu lui as donné ton nom ?

- Non.

- Maggie…

- Non, je ne lui ai pas donné. Et ce n'est pas le moment d'avoir des regrets ou des remords ou quoi que ce soit. Je n'ai pas non plus de traces d'elle. Je soupçonne qu'elle était dans les équipes d'intervention pour défendre la ville mais c'est une piste bien trop vaste que pour l'exploiter. Je me suis simplement fait à l'idée que ce ne serait pas utile de creuser ça.

- Tu n'as vraiment aucune piste ?

- Non.

Elle mentait très mal parfois et en voyant la tête de son collègue elle comprit qu'elle était très mauvaise sur ce coup-là. Elle soupira avant d'avouer qu'elle avait bien une photographie.

- De ?

- D'un dessin qu'elle a fait pour me dire qu'elle allait bien, je suppose. Je lui en avais fait un similaire à mon réveil pour lui dire que j'étais toujours en vie même si j'étais blessée.

- Tu sais que les tatoueurs croulent sous ce genre de demandes ? Pour garder une trace de l'être bleu qui a embellit leur vie, une histoire ainsi… C'est un peu idiot si tu tombes ensuite amoureux de quelqu'un d'autre d'après moi mais…

Murphy se retourna pour voir Maggie qui s'était figée un peu derrière lui. Il soupira avant de se traiter d'idiot fini et de crétin des Carpates.

- Je viens de te donner cette idée, c'est ça ?

- Oui. Non. Je ne suis pas certaine. Mais c'est envisageable. Je pense. Après tout, c'est une sorte de cadeau qu'elle m'a fait, non ? Maggie avait un vrai sourire pour la première fois depuis sa sortie de l'hôpital.

- Sawyer… les listes d'attentes sont monstrueuses. Je viens de te le dire.

- On est de la police ou pas ?

Il sembla choqué et elle éclata de rire.

- Je plaisante, je plaisante. De toutes façons, je dois attendre que mes blessures soient cicatrisées un minimum avant de tenter un tatouage. Pour mon anniversaire peut-être. Ce serait un bon plan.

- Nous allons devoir surveiller tous ces gens pour qu'ils ne fassent pas de bêtises. Le virus bleu va laisser des traces que nous le voulions ou pas.

Maggie écoutait son ami d'une oreille distraite.

- Tu penses que je devrais le faire en noir ou en bleu ce tatouage ?

- Sawyer…