Bonjour bonjour !
Tout d'abord, je tiens à m'excuser de ce long silence. J'ai eu des difficultés au début d'année (maladie, vol de mon ordi, rapport à rendre) et d'autres plus personnelles dont je ne tiens pas à parler.
Ce chapitre n'est donc pas bêta-readé et les prochains ne le seront peut-être pas non plus. En espérant que cela continuera à vous plaire tout de même !
Disclaimer : Seuls mes OCs m'appartiennent, le reste est à leur auteur respectif.
RAR anonymes :
inou : Encore désolée de l'attente, j'espère vraiment que la suite te plaira ! Et pour savoir si le nouveau personnage est un pirate de Roger ou non, je ne confirmerais ni n'infirmerais cette supposition X)
Arc 1
Grand Line
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Chapitre 7 : Portgas D Ace
Jouer avec le feu comporte des risques
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Un grondement sourd retentit dans toute la montagne, tandis que la pluie commençait à tomber en fines gouttes. Lilith ouvrit un œil, tout son corps douloureux. Elle se redressa lentement, endiguant les traits de souffrance qui parcouraient ses jambes et son dos pour porter la main à sa tête qui lui tournait. Elle ferma les yeux en gémissant, se concentrant sur le sol froid et dur sous ses fesses pour oublier la nausée qui lui tordait l'estomac. Ses doigts rencontrèrent un liquide poisseux sur sa tempe et ses pupilles se dilatèrent, avant qu'un juron ne passât ses lèvres.
Elle voulut se remettre debout, mais une douleur atroce parcourut alors sa jambe droite dès qu'elle voulut bouger, comme un trait de feu brûlant ses tissus des orteils au genou. Des larmes apparurent au bord de ses yeux alors qu'un hurlement lui déchirait la gorge. Il lui fallut quelques longues minutes pour endiguer à nouveau la douleur, tremblante comme une feuille, avant que sa main ne palpe doucement sa jambe droite en partant de sa hanche. Un geignement s'échappa de ses lèvres à peine ses doigts en eurent-ils effleuré la portion inférieure. Une fracture, sûrement, qui ne devait pas être ouverte puisqu'à travers ses larmes, elle ne détectait pas de sang sur son pantalon.
Elle avait donc dû faire une chute, mais elle peinait à se souvenir de ce qu'il lui était arrivé. Elle regarda alors autour d'elle et ses vertèbres cervicales craquèrent. Elle lâcha un grognement, suivi d'un juron quand elle se rendit compte qu'elle était sur un des paliers d'un des escaliers de pierre qui parcouraient la roche, alors qu'à ses pieds s'étendaient les champs et la ville.
Les souvenirs lui revenaient peu à peu, amplifiant l'impression que des doigts enserraient sa tête lourde. Aujourd'hui était le cinq octobre et elle n'avait pas cessé d'avoir l'esprit ailleurs, se demandant si Marco pensait ou non à leur anniversaire commun, s'il s'en voulait pour ses propos. Son inattention avait causé une violente explosion alors qu'elle manipulait des explosifs sous les consignes d'Ellen. Celle-ci n'avait pas manqué de lui tirer les oreilles, avant de l'envoyer chercher du salpêtre pour éviter qu'elle ne fasse sauter autre chose. Et elle, comme une idiote, avait été distraite par ses pensées et avait glissé dans les escaliers. Au moins, elle n'avait parcouru que cinq ou six mètres à vue d'œil. Elle frissonna, sa gorge se nouant en s'imaginant ce qui aurait pu arriver si elle avait roulé plus bas encore… Elle avait eu de la chance, indéniablement.
La pluie s'intensifia et un frisson la parcourut. Elle resserra les pans de sa veste pour tenter de se réchauffer, ses cheveux se plaquant sur son crâne sous l'effet de l'eau, qui ruisselait ensuite jusqu'au col de sa chemise. Elle souffla d'agacement, avant d'éternuer violemment. Un nouvel éclat de douleur la traversa et elle gémit. Elle devait se ménager et trouver une solution pour se tirer de là. Elle songea à utiliser sa magie pour léviter et redescendre sur le sol, mais elle devrait encore rentrer chez Ellen et dans son état, ce n'était pas possible.
Déjà, se protéger des intempéries serait une bonne option, ou elle tomberait malade. Elle incanta alors un sort qui l'entoura d'une fine bulle irisée déviant l'eau, avant d'en lancer un autre pour se sécher et cesser de frémir. Un nouveau grondement retentit et elle sursauta, prenant conscience qu'un orage se déchaînait à l'extérieur de la montagne. Les gouttes de pluie rentraient par la partie manquante du pic et les éclairs pourraient bien suivre.
Peut-être qu'Iqbal pourrait venir la chercher ? Elle pouvait sans doute le contacter avec les messages papillons qu'utilisaient les adultes sur Castarmir. Mais s'il était avec Ellen, cela serait prendre le risque que cette dernière n'apprenne pour sa magie. À moins que la demi-elfe ne le fasse passer pour un Fruit du Démon si jamais sa mentore posait des questions ? Il lui semblait qu'il s'agissait de sa meilleure option. Elle ne pouvait pas se soigner elle-même et, à partir de ce moment-là, était de toute façon obligée de recourir à la magie pour rentrer. Elle ne pouvait pas rester là à attendre des hypothétiques secours. Elle refusait de prendre le risque d'aggraver ses blessures en attendant trop longtemps.
Elle soupira alors que la douleur dans sa jambe droite devenait de plus en plus insupportable. Elle inspira profondément, passant son avant-bras tremblant sur ses yeux pour effacer ses larmes. Essayant de se concentrer, elle incanta à nouveau un sort et un papillon apparut devant elle, d'un beau violet foncé comme des prunes mûres. Son mal de tête se fit plus insistant et l'insecte vacilla, devenant un instant trouble. La demi-elfe se mordit la lèvre alors que ses mains tremblaient. Ses blessures l'avaient affaiblie et l'utilisation de la magie la fatiguait d'autant plus. Le message n'arriverait peut-être même pas jusqu'à son frère. Si elle s'évanouissait avant...
Non, elle ne devait pas y penser. Elle devait croire qu'elle y arriverait. Si elle perdait confiance en elle, ça ne marcherait pas.
— Iqbal, j'ai chuté dans les escaliers côté Nord-Est et je ne peux plus bouger. S'il te plaît, viens m'aider.
Une ombre la recouvrit soudain et elle releva brusquement la tête. Le papillon messager s'évanouit tandis que les yeux de l'adolescente s'écarquillaient. Son ventre se noua alors qu'un immense oiseau noir, aux plumes trempées par la pluie, passait et repassait au-dessus d'elle. Son bec était plutôt gros, d'un noir aussi profond que ses plumes, tandis que sa queue était relativement longue et cunéiforme. Rien à voir avec la finesse et la beauté de Marco sous sa forme de phénix, mais il faisait preuve de la même agilité. L'eau ne semblait pas l'alourdir et il descendait de plus en plus bas, comme s'il voulait se poser près d'elle.
Ça ressemblait à un corbeau, mais étant dans le Nouveau Monde, ça pouvait très bien être un oiseau anthropophage, ou, pire, un possesseur de Zoan et elle aurait du mal à se défendre dans sa situation. Elle se traita mentalement d'idiote et appuya ses mains sur le sol, essayant de s'éloigner. La douleur lui arracha néanmoins un cri et elle resta sur place, incapable de se traîner ne serait-ce de quelques centimètres.
— Espèce de lapin de six semaines, tu veux aggraver tes blessures ? Ne bouge pas.
La voix bien connue la figea, même si elle était plus rauque qu'en temps normal. Elle secoua la tête alors que l'oiseau posait ses pattes sur le rebord du palier, avant de prendre l'apparence de l'experte en explosifs. Cette dernière secoua ses cheveux gris en laissant échapper un soupir agacé. Lilith déglutit en se rappelant qu'il y avait toujours autour d'elle la bulle la protégeant de la pluie et elle songea qu'avec le papillon qu'Ellen avait dû voir, l'explication du Fruit du Démon aurait du mal à passer.
— J'aurais pas dû te laisser partir vu comment tu étais dans les nuages, on dirait, grogna la vieille dame. Même pas foutue d'utiliser ta magie pour ralentir ta chute, j'vous jure !
La demi-elfe écarquilla les yeux, son cerveau bloquant soudainement. De quoi ? La vieille dame avait bien parlé de magie ? Mais ce n'était pas possible, elle ne pouvait pas en avoir connaissance… Si ? Et dans ce cas, comment ? Était-elle en danger ? Merde, la Matriarche lui ferait la peau si elle mettait en péril Castarmir par ses bêtises !
La plus âgée leva les yeux au ciel, avant de se rapprocher et de donner une pichenette dans le front de la jeune fille. Cette dernière protesta faiblement, une lueur de peur bien visible dans ses yeux, et l'experte en explosifs soupira.
— Je suis au courant pour Castarmir. Ta Voix, comme celle d'Iqbal, a ce petit quelque chose en plus qui m'a fait deviner votre origine. Tu ne risques rien. Enfin, sauf une longue période de repos au lit.
Lilith soupira de soulagement, ses yeux se fermant un bref instant alors que son torse penchait vers l'avant. Ellen la rattrapa avant qu'elle ne s'effondre et l'adolescent posa sa tête sur son épaule, cessant enfin de réfléchir à une solution. Si l'adulte était là, nul doute qu'elle l'aiderait. Sa tête tournait à nouveau et elle sentit les doigts ridés de la vieille femme passer dans ses cheveux en un geste tendre et rassurant, presque maternel.
Comme Izou aurait pu le faire.
Un gouffre s'ouvrit soudain dans son coeur alors qu'elle pensait à sa mère d'adoption et elle retint des sanglots en posant sa main sur sa bouche. Elle aurait voulu que ce soit le commandant qui l'enserrât à cet instant dans ses bras, la rassurant et caressant ses cheveux, qui lui affirmât que tout irait bien. Plus que jamais, il lui manquait. L'odeur rassurante de son tabac, son parfum léger et fleuri, son doux sourire qui éloignait sans peine les cauchemars, le délicat bruit de froissement de la soie de ses kimonos… Ces détails semblaient presque appartenir à une autre époque, désormais révolue. Ellen en était si éloignée ! Elle portait la fragrance âcre de la poudre et celle plus ténue de feu qui prenaient à la gorge, tandis que le cuir de sa veste n'aidait pas la demi-elfe à lutter contre le froid qui l'envahissait.
— El'ma… geignit-elle s'en vraiment s'en rendre compte
Elle hoqueta, avant de redresser doucement sa tête qui dodelinait. Elle croisa le regard vert brillant de la vieille femme, à la fois teinté de colère et de bienveillance, avant de sombrer dans les ténèbres de l'inconscience.
La pluie avait laissé place à un pâle soleil d'automne quand Lilith ouvrit à demi les yeux, allongée sur un futon. Les rayons traversaient les carreaux salis de la fenêtre du mur en face d'elle et elle gémit, prise d'un mal de crâne à la soudaine luminosité. Ses souvenirs lui revinrent et elle jura, avant de se redresser lentement. Un soupir agacé lui échappa lorsqu'elle souleva la couette qui la recouvrait pour dévoiler un plâtre enserrant sa jambe droite, légèrement surélevée avec quelques coussins. Elle se traita à mi-voix de tous les noms, se trouvant des plus stupides. Si seulement elle ne s'inquiétait plus de ce que Marco pouvait penser d'elle ! Que ce vieux poulet déplumé et ses décisions à la con aillent se faire cuire un œuf plutôt que de hanter son esprit !
Elle se laissa retomber sur le futon, tournant la tête pour savoir où elle se trouvait. Un rideau d'un bleu délavé semblait la séparer du restant de la pièce aux murs de pierres, scellées entre elles par un mortier grisâtre qui commençait à s'effriter. De toute l'île, elle ne connaissait qu'une maison aux pierres apparentes.
— Ellen ? appela-t-elle doucement.
Elle entendit quelqu'un monter avec empressement des escaliers, lui faisant comprendre qu'elle devait se trouver à l'étage, si elle était bien chez l'experte en explosifs. Elle ferma les yeux et devina qu'il s'agissait d'Iqbal à son odeur qu'elle perçut juste avant qu'il n'écartât le rideau. Elle s'en voulut encore plus de sa chute lorsqu'elle vit les cernes sous les yeux roses de son frère.
— Si, à chaque fois que je te laisse seule, tu manques de te tuer, je ne vais plus te lâcher d'une semelle, la prévient-il d'une voix fatiguée. Ne me refais jamais ça.
Elle perçut du coin de l'œil les bras de son aîné trembler et elle lui adressa un sourire rassurant, saisissant son poignet pour l'obliger à s'asseoir à côté d'elle. Il s'agenouilla, avant de passer ses mains devant son visage, agrippant quelques mèches blondes entre ses doigts. Elle sentait presque la peur qui s'échappait de lui et son ventre se noua. Elle prit alors son avant-bras, le tirant doucement pour qu'il cesse de se cacher et la regarde. Elle ne pouvait pas lui promettre que cela n'arriverait jamais plus, ce serait une promesse vide de sens. Mais elle pouvait toujours lui assurer qu'elle ferait plus attention. Ça, c'était dans ses cordes.
— Je te promets d'être plus prudente à l'avenir, souffla-t-elle doucement.
Iqbal sembla sur le point de dire quelque chose, mais il resta finalement silencieux avant de se baisser légèrement pour la prendre dans ses bras et la serrer contre lui, bien plus fort qu'il ne l'avait jamais fait. Elle passa une main dans les cheveux blonds détachés, tentant tant bien que mal de lui rendre son étreinte.
L'adolescente avait un goût amer dans la bouche qui ne partait pas alors qu'elle sentait les tremblements du Dampyr contre elle. Il avait déjà perdu ses parents et le bébé qui aurait dû être son petit frère ou sa petite sœur. Il ne supporterait sans doute pas de la perdre aussi. Elle aurait voulu lui avouer à quel point elle était désolée de l'avoir inquiété et de lui avoir fait peur, mais les mots restaient bloqués derrière ses lèvres. Elle avait l'impression que tout ce qu'elle dirait sonnerait faux.
D'autres pas, plus lents, résonnèrent alors et elle redressa alors la tête, avant qu'Ellen ne tire à son tour le rideau, son regard vert recelant une lueur d'agacement. Lilith lui adressa un sourire piteux, baissant son visage pour se cacher dans l'épaule de son frère. Mais ce dernier la relâcha, s'éloignant alors que l'experte en explosifs se plantait au bout du futon, croisant ses bras sur sa poitrine avec un regard sévère, surplombant la demie-elfe malgré sa petite taille.
— Tu m'expliques, ou je dois considérer que tu es trop lunatique pour continuer à être mon apprentie ?
Un frisson glacé parcourut l'adolescent et elle plia sa jambe intacte pour serra son genou contre elle. Instinctivement, elle se recroquevillait alors que la peur s'insinuait dans ses veines. Elle aimait manipuler les explosifs, tester des combinaisons pour obtenir une propriété particulière. Elle ne voulait pas subir la honte de décevoir sa maîtresse d'apprentissage. Ses poings se crispèrent alors qu'elle cachait son visage contre l'articulation pour ne pas affronter l'adulte. Le silence pesait entre elles deux, au point d'alourdir l'atmosphère.
— Je… La date m'a rappelé de mauvais souvenirs. Ça ne se reproduira pas, lâcha-t-elle finalement dans un murmure.
Ellen soupira, décroisant les bras en secouant la tête. Elle se rapprocha, avant d'asséner un coup de poing sur le crâne de l'adolescente. Celle-ci lâcha un petit cri plus indigné que réellement de douleur, avant de passer une main là où l'adulte venait de la frapper, une moue boudeuse tordant ses lèvres fines. Elle n'osa cependant pas demander la raison derrière le geste et baissa les yeux en silence, ses dents venant mordiller sa lippe inférieure.
— Stupide crustacé d'eau douce ! Cesse de torturer les quelques pauvres neurones que tu as avec des choses passées que tu ne peux pas changer, la gronda l'experte en explosifs. Même si c'est dur à supporter, surmonte-le, point. Tu ne peux pas faire autrement. Tu finis même par impliquer les autres, que tu le veuilles ou non !
Lilith redressa légèrement la tête pour observer l'adulte en fronçant les sourcils, peu certaine de ce qu'elle voulait dire. Puis son regard dériva vers Iqbal, qui passa sa main droite sur sa nuque en détournant ses yeux. Sa figure était légèrement tournée vers le sol et sa main gauche était serrée sur son pantalon.
La demie-elfe écarquilla les yeux alors que l'insinuation d'Ellen prenait sens dans son esprit. Une goutte de sueur glacée coula le long de sa colonne vertébrale alors que les battements de son cœur s'accéléraient. Par Davy Jones, qu'avait fait son frère ?
La voix de sa mentore retentit à nouveau, froide et coupante, alors qu'elle énonçait les faits. Iqbal avait utilisé un Reparus pour réduire en partie sa fracture, ce qu'il avait fallu justifier auprès du médecin ensuite. Sur le coup, l'adulte avait inventé une histoire de Fruit du Démon de la réparation. Le Dampyr avait eu de la chance que le praticien la gobe sans discuter, beaucoup de chance.
— Est-ce que vous êtes au moins conscients des risques que vous prenez à être en dehors de votre île, bon sang ? Vous devez être prudents !
Les deux adolescents ne répondirent rien et Ellen soupira, secouant ses cheveux gris ébouriffés. Elle s'approcha d'Iqbal et le frappa à son tour sur le crâne en le traitant d'idiot, avant de lui ordonner de prendre soin de Lilith. Elle passa derrière le rideau et le Dampyr releva la tête vers sa cadette, un sourire penaud tordant ses lèvres pâles tandis que ses yeux roses luisaient de détermination.
— Je ne m'excuserais pas. Je sais quels risques je nous ai fait courir, mais je ne veux perdre personne d'autre. Quand Ellen t'as ramené sur son dos...
Sa voix se suspendit un instant et dans le silence, la demie-elfe pouvait presque sentir la crainte qu'avait dû éprouver son frère en la voyant. Alors non, elle ne lui en voulait pas. Au contraire, elle se sentait d'autant plus mal. D'eux deux, elle était certainement la plus stupide. Les mots d'Ellen résonnèrent dans son esprit et leur vérité lui donna un coup au coeur.
— J'ai paniqué. Tu aurais pu avoir une hémorragie interne, ou je ne sais quoi d'autre. continua son aîné. Alors j'ai lancé un Reparus. Je ne le regrette pas.
— Je serais mauvaise de te le reprocher, souffla-t-elle. C'est ma faute, après tout.
Elle lui fit un signe de la main pour qu'il se rapprochât et elle posa sa tête sur son épaule lorsqu'il s'assit à côté d'elle. Elle devait cesser de se torturer l'esprit à propos de Marco. Elle ne pouvait de toute façon pas changer ce qui s'était passé entre eux, Ellen avait raison.
Son grand frère lui souhaita soudain un joyeux anniversaire et elle le foudroya du regard. Il savait pourtant qu'elle n'aimait pas le fêter, et le lui rappeler après ce qu'il lui était arrivé était indélicat.
— Je préfère ce regard-là plutôt que tes yeux tous dépités, rit-il doucement.
Elle le frappa gentiment sur l'épaule gauche, avant de se rallonger. Il remonta la couverture sur elle, avant de lui énoncer les consignes du médecin. L'intenable jeune fille devrait apprendre la patience pour endurer cette immobilisation forcée.
Puis Iqbal ricana en avouant qu'Ellen avait laissé entendre que l'adolescente travaillerait encore plus la théorie pour lui apprendre à être tête en l'air. Cette dernière gémit en fermant les yeux, sentant le mal de tête poindre à l'idée de passer des heures et des heures sur des livres. Elle se souviendrait longtemps de cette jambe cassée, elle en était certaine !
Le sourire du Dampyr se fana néanmoins et Lilith détournant les yeux, songeant qu'ils avaient beau plaisanter de sa chute, cela n'était pas anodin pour autant. Enfin, elle pouvait au moins en dégager un point positif : ils savaient désormais qu'Ellen était au courant pour leur magie. Ils ne seraient plus obligés de la dissimuler dans la maison et la cadette pouvait cesser d'utiliser ses pouvoirs pour masquer certains points de son apparence.
— Lilith... J'ai surpris une conversation entre Ellen et le médecin, lâcha soudain son aîné. Il lui a dit qu'elle avait pris un risque en volant. Je crois… Je crois qu'elle nous cache quelque chose sur son état de santé.
La demie-elfe fronça un peu plus les sourcils, avant de passer sa main devant ses yeux. L'ouïe fine de son frère n'était pas toujours un avantage, surtout quand il entendait des choses personnelles. Elle savait qu'il partageait l'information parce qu'il aurait été incapable de le lui cacher sur le long terme, ça l'aurait rongé.
Ça ne signifiait pourtant pas qu'il voulait en savoir plus à ce propos. Il lui demandait simplement son avis. Elle était curieuse et intriguée, pour tout dire, mais Izou et Crystal lui tiraient les oreilles pour ne pas respecter la volonté d'autrui et le secret médical. Si Ellen ne leur disait rien, alors ça ne les concernait pas.
— C'est sa santé, pas la nôtre.
La sortcelière était tout de même un peu inquiète et sa culpabilité revint au galop, avant qu'elle ne secoue la tête pour la chasser. Sa mentore devait avoir conscience de ses limites et était venue la chercher en toute connaissance de cause. Elle n'était pas responsable.
Iqbal lui sourit de nouveau, avant d'ébouriffer ses cheveux et de lui conseiller de dormir. La jeune fille enfonça sa tête dans l'oreiller, acquiesçant doucement avant que son aîné ne se relève. Elle ferma lentement les yeux et se laissa sombrer dans le sommeil.
La neige tombait en petits flocons derrière la fenêtre, tandis que Lilith était assise dans la cuisine, lisant un livre avec un crayon à la main. Cela faisait presque trois mois après sa chute et elle n'avait plus son plâtre quelques semaines grâce aux soins apportés par le médecin du village et la magie d'Iqbal. Cependant, Ellen l'obligeait toujours à travailler uniquement la théorie et elle se traînait avec une canne, le temps que ses os se renforcent. La demie-elfe passa ses mains dans ses cheveux qui commençaient à atteindre sa nuque en soupirant, avant de tirer la feuille qui se trouvait sous son bouquin.
Elle relut dans le silence paisible de pièce les notes qu'elle avait prises, cherchant à comprendre pourquoi la réaction que lui avait donnée sa mentore donnait un explosif. Elle frotta ses yeux du bout des doigts, avant de déclarer forfait et de saisir la canne appuyée contre la table. Puis elle se leva doucement pour se faire du thé, espérant avoir un éclair d'illumination avant ce soir. Il y avait une fête au village pour le passage à l'année suivante cette nuit et, déjà qu'elle était exclue des préparatifs tant qu'elle n'avait pas terminé cet exercice, elle ne tenait pas non plus à manquer les festivités.
Elle se saisit de la bouilloire posée sur le plan de travail et se traîna jusqu'à l'évier, jetant un regard peu amène à son appui en bois qu'elle laisserait bien tomber sur le sol. Elle avait encore mal, mais elle était certaine que sa jambe pouvait supporter son poids, contrairement à ce que disait le médecin. Mais Crystal lui avait appris qu'on ne remettait pas en cause les ordres du personnel soignant, alors elle obéissait tant bien que mal.
Elle remplit la théière avant d'aller la poser sur la vieille cuisinière à bois en fonte. Elle posa sa canne contre le mur, puis se baissa pour ouvrir la trappe qui se trouvait sur le devant, sous la porte du four. Un souffle de chaleur l'enveloppa, accompagné de l'odeur et des petits craquements du bois brûlé, avant qu'elle ne se saisisse d'une petite bûche sous la cuisinière. Puis elle attisa le feu avec, avant de la mettre à l'intérieur. Elle referma la trappe et se redressa, sa jambe droite légèrement raide. Elle avait perdu de sa mobilité avec son plâtre et, si elle revenait peu à peu, ce n'en était pas moins agaçant. Un sifflement exaspéré lui échappa, avant qu'elle ne saisisse la boîte métallique renfermant le thé.
Elle attendit que la bouilloire siffle pour la retirer de la cuisinière et glisser une cuillère de thé odorant à l'intérieur. Elle la posa ensuite sur la table, avant de prendre une tasse dans l'évier et de la nettoyer rapidement. Sa jambe se mit à lui faire mal, lui tirant une grimace à chaque fois qu'elle posait le pied au sol et elle récupéra sa canne, avant de revenir s'asseoir. Elle étendit sa jambe droite, songeant qu'elle aurait dû prendre le tabouret qu'elle avait utilisé pour la surélever durant toute sa convalescence.
Elle laissa infuser son thé en tournant son crayon entre ses doigts. Peut-être qu'Ellen aurait quand même pitié d'elle et la laisserait rejoindre la fête ? De toute façon, elle ne pouvait pas lui mentir en affirmant avoir terminé, sa mentore le saurait en rentrant et elle ne voulait pas abîmer la confiance entre elles.
Elle se versa finalement sa boisson, saisissant le contenant désormais chaud à deux mains avant de souffler doucement sur la vapeur qui s'échappait de l'eau parfumée. Une effluve de bergamote lui chatouilla les narines et, sentant des picotements sur ses muqueuses, reposa rapidement la tasse avant d'éternuer bruyamment. Elle renifla en fronçant le nez, reprit sa tasse pour en boire une gorgée, avant de se pencher à nouveau sur sa réaction.
Et l'illumination vint.
Un sourire immense étira ses lèvres fines et elle leva le poing en un signe de victoire. Elle se dépêcha de noter sa réponse, referma le livre dans un claquement sec, avant de se relever, de saisir sa canne et de traverser le couloir pour déposer son travail dans la pièce d'à côté. Elle le posa sur la paillasse bien rangée, d'un blanc mat sans tache. S'il arrivait que les essais d'Ellen lui sautent à la figure, elle nettoyait son espace de travail avec un soin maniaque qu'elle s'efforçait de lui transmettre. Seule traînait encore une burette graduée au bord de l'évier et Lilith soupira, laissant sa canne contre la paillasse avant de ranger la verrerie à sa place dans l'une des armoires en face.
La porte d'entrée située dans le couloir claqua soudain contre le mur et elle tressaillit, avant de reconnaître l'odeur de la personne qui entrait. Elle reprit alors sa canne avant de passer la tête par l'embrasure du laboratoire pour saluer Iqbal d'un sourire immense qui dévoilait ses dents. Il eut le même en retour, avant de venir la serrer contre lui. Elle hurla et lui ordonna de la lâcher au contact de la peau froide et de la chemise gelée de son stupide frère. Il n'était pas sensible aux baisses de températures et il aurait pu se promener dehors en slip qu'il n'aurait pas bronché. Sur le coup, elle avait oublié son petit plaisir mesquin de lui faire un câlin alors qu'il était littéralement un glaçon.
Elle lui marcha avec force sur le pied de sa jambe valide, avant de lui donner un coup de coude dans l'estomac pour le faire lâcher. Ses bras se desserrèrent et elle recula de quelques pas en grelottant, le foudroyant du regard. Cela ne le fit que rire davantage et elle leva son majeur à son intention avant de partir vers l'escalier en grommelant, avec l'intention de se changer, autant pour la fête que pour cesser de trembler sous le froid qui l'assaillait.
— Je te déteste, yoi, grogna-t-elle en montant lentement les marches.
Bon sang ! Elle ne se souvenait pas qu'il avait été autant taquin quand ils étaient plus jeunes. Son amie Firiel avait peut-être eu raison de dire qu'elle avait fait changer le Dampyr. Parfois, l'ancien lui lui manquait un peu. Puis elle se rappelait leurs incessantes disputes et songeait que non, le changement était pour le mieux.
Elle se débarrassa de ses vêtements humides et les étendit sur le séchoir, maudissant encore son frère à voix basse, avant d'enfiler un t-shirt à manches longues et par-dessus un pull d'un beau bleu nuit, avec un col roulé épais. Elle saisit le premier pantalon noir qu'elle trouva dans son armoire, avant de redescendre aussi vite qu'elle était montée. Maintenant qu'elle avait terminé son travail, rien ne la retenait plus chez Ellen et elle ne risquait pas de se faire passer un savon pour son manque d'assiduité.
Iqbal ricanait encore lorsqu'ils sortirent et, alors qu'elle fermait la porte à clé avant de la glisser sous le paillasson, elle lui tira la langue. Elle se redressa et rabattit sa capuche alors que la neige tombait plus drue que lorsqu'elle avait regardé par la fenêtre. Le Dampyr se planta à sa gauche et passa son bras sous le sien, avant qu'ils ne se mettent à avancer en silence.
Les champs et la route avaient disparu sous un épais manteau blanc. Seules les lumières de la ville au loin leur permettaient de se diriger dans la pénombre du début de soirée. La nuit était en train de tomber, assombrissant le ciel gris. C'était reposant, mais autant de neige rappelait à l'adolescente le souvenir de batailles avec ses aînés, de rires tonitruants et de chocolat chaud dans le réfectoire. Le manque serra son cœur et elle ferma les yeux en soupirant.
Iqbal la poussa alors et elle atterrit le nez dans la neige. Sa veste s'humidifia alors qu'elle entendait son aîné prendre la fuite en riant. Une moue agacée passa sur son visage alors qu'elle se relevait, pestant alors qu'un frisson la traversait. Elle se redressa comme elle le put, récupérant sa canne en grommelant. Elle ne pouvait même pas le poursuivre !
Elle se lança un sort pour se sécher et éviter de prendre froid, réfléchissant à mille et un plans pour se venger de son insupportable aîné. Néanmoins, elle prit son temps pour se rendre jusqu'en ville, préférant éviter de se retrouver à nouveau le nez dans la neige en tentant de rattraper Iqbal. Elle lui rendrait la monnaie de sa pièce quand il s'y attendrait le moins.
À l'approche des premières maisons, les rires et les cris de joie des enfants commençaient à retentir et l'odeur épicée du vin chaud flottait dans les airs. Elle s'arrêta un instant pour respirer les effluves de cannelle, de girofle, de badiane et de gingembre qui s'entremêlaient, porté par la bise. Elle sourit et rejoignit la place de la mairie, guidée par les chants qu'elle entendait.
La place était illuminée de centaines de lampions en papier rouge, des guirlandes de triangles de tissu décorant les maisons, traversant les airs pour relier les habitations face à face. Les portes de la mairie étaient grandes ouvertes et rien qu'aux odeurs de gâteaux qui s'en échappaient, Lilith salivait déjà. Des habitants avaient sorti leur instrument de musique et étaient en train de s'accorder, alors que la nuit recouvrait définitivement le ciel de son ombre.
Puis ses yeux se plissèrent quand elle aperçut des personnes qui lui étaient inconnues. Elle aurait juré ne les avoir jamais vues en ville. Il y avait une dame assez grande et de forte corpulence aux longs cheveux roux qui riait grassement en cognant une chope contre celle que tenait le forgeron. Un gars aux cheveux bleus, dont une partie du visage était recouverte par un masque, aidait le maire à transporter une barrique de vin.
— Lilith ! Tu as fini ton travail ?
L'adolescente tressaillit à la voix puissante de sa mentore et elle tourna la tête dans la direction d'où le son provenait. Ellen la rejoignit en quelques pas et la demie-elfe acquiesça en réponse à sa question, avant de désigner du doigt les inconnus qu'elle avait remarqués, demandant de qui il s'agissait. La plus âgée expliqua alors que des pirates avaient débarqué peu après qu'Iqbal soit parti la chercher. Ils n'étaient pas agressifs et le maire les avait donc invités à partager les célébrations.
— Mais évite tout de même de les impliquer dans une blague, ou tu m'entendras ! la prévint-elle.
La demie-elfe leva les yeux au ciel tellement la recommandation était évidente, mais hocha tout de même vaguement la tête, plissant les yeux pour tenter d'apercevoir son frère dans la foule. Ses yeux accrochèrent soudain deux silhouettes reconnaissables malgré l'année écoulée et un rire légèrement machiavélique s'échappa de ses lèvres gercées. Elle sentit le regard d'Ellen lui vriller le dos et elle se retourna brièvement pour lui adresser un sourire innocent. Puis elle partit en quête de son aîné, restant bien à l'abri du regard de ses deux connaissances.
Elle trouva son frère en train de discuter avec le médecin du village et elle passa derrière l'homme pour faire de grands signes de la main à l'adolescent, essayant de lui faire comprendre qu'elle avait besoin de lui parler. Les yeux roses du Dampyr s'illuminèrent quand il la vit et il hocha discrètement la tête, avant d'abréger sa conversation pour la rejoindre.
— Tu sais, dans les pirates qui sont arrivés... Il y a Firiel et Alix, lui apprit-elle en se retenant de sautiller sur place.
Elle était tout excitée. Cela faisait longtemps qu'elle n'avait pas revu ses amis et elle devait avouer qu'elle avait envie de les embêter un peu. D'ici, elle pouvait voir que la jeune femme de dix-huit ans désormais avait ses cheveux auburn attachés en un chignon bas, dévoilant une paire de lunettes retenus par un cordon doré pour éviter de les perdre. Cela la fit rire doucement, avant qu'elle n'observe Alix, qui avait son Familier sur ses épaules. Le raton-laveur semblait boudeur, jouant avec les mèches courtes du jeune homme qui buvait de la bière en compagnie d'un garçon qui semblait de l'âge de Firiel.
Ce dernier attira son attention, son visage et son stetson orange avec deux smileys dessus lui semblant familier. Où avait-elle vu sa tête ? Comme il s'agissait sans doute d'un pirate, elle avait sûrement aperçu son avis de recherche dans les journaux. Cela lui semblait le plus probable. Mais quand même, le type lui donnait froid. Il ne portait qu'une simple chemise à manches courtes alors qu'il devait faire à peine zéro degré !
Néanmoins, elle se retourna finalement vers Iqbal et ils échangèrent un regard complice. Un sourire se forma sur leurs lèvres et la demie-elfe désigna son amie comme sa victime, ricanant légèrement. Son aîné hocha la tête, comprenant que lui s'occuperait d'Alix. Il s'éclipsa alors, la laissant seule pour réfléchir à une blague. Elle se rapprocha de sa cible en catimini, se demandant ce qui pourrait être drôle tout en retenant un ricanement provoqué par l'excitation. Cela faisait si longtemps qu'elle n'avait pas fait de blagues ! Ellen était très stricte à ce sujet et elle avait dû s'y faire.
Elle se glissa dans le dos de l'adolescente aux cheveux auburn, avec l'intention de lui faire bêtement peur. Mais comme elle était en train de manger une pâtisserie qui ressemblait à une religieuse, Lillith aurait parié qu'elle se retrouverait avec le nez plein de crème pâtissière. Mais elle n'eut pas le temps de mettre son plan à exécution qu'une main puissante attrapa le col de sa veste avant de la soulever une dizaine de centimètres au-dessus du sol. La demi-elfe fixa les pavés que ne touchaient plus ses pieds, avant de redresser la tête vers la personne qui la tenait. C'était un homme aussi grand que son frère Thatch, mais bien plus corpulent, un peu comme Teach de la seconde division, dont le visage ovale était encadré par des rouflaquettes épaisses.
— Je peux savoir ce que tu voulais faire, petite ? lui demanda-t-il d'une voix bourrue.
L'adolescente se renfrogna à l'adjectif, songeant soudain à mordre le poignet de l'homme pour lui faire lâcher sa prise. Elle n'avait pas ses dagues sous le coude de toute façon. Puis Firiel se retourna pour voir ce qu'il se passait et elle éclata de rire en la voyant ainsi suspendue dans les airs, ses yeux bleus comme l'océan pétillant de joie.
— Telle est prise qui croyait prendre ! lui lança-t-elle. Aggie, tu peux la relâcher, c'est une amie.
Le pirate haussa un sourcil avant de reposer la demie-elfe au sol. Son amie vint alors l'enlacer pendant quelques secondes, avant de la prendre par les épaules et de reculer légèrement pour observer les changements faits en une année chez elle. En revanche, Firiel n'avait presque pas changé. Elle avait pris encore quelques centimètres, tandis que des fleurs de jasmin violet étaient glissées dans son chignon. Des mèches s'échappaient de sa coiffure pour venir taquiner sa peau hâlée par le soleil, effleurant un départ de cicatrice sur sa gorge, que cachait mal l'écharpe de la jeune femme.
— Firiel, qu'est-ce que... commença Lilith, fronçant les sourcils.
Ses doigts s'approchèrent du visage de la jeune femme, avant que tous les deux ne sursautent en entendant un cri aigu suivi de près par des rires. Et la sortcelière aurait mis sa main au feu qu'elle entendait tout particulièrement celui de son aîné.
— Iqbal ! Reviens ici, sale blondinet ! hurla une voix qu'elle connaissait bien, celle d'Alix quand il était furieux.
Visiblement, le Dampyr avait eu plus de chance qu'elle et elle se dressa sur la pointe des pieds pour tenter d'apercevoir ce qu'il avait fait à leur ami. Firiel gloussa gaiement, avant de secouer la tête et de passer un bras autour des épaules de la plus jeune.
— Je me doutais que ton âme damnée n'était pas loin, plaisanta-t-elle. Même si je me demande ce que vous faites ici.
La sortcelière esquissa une grimace et elle sortit sa montre à gousset pour la tourner entre ses doigts, fuyant le regard bleu de son amie. Elle pouvait lui expliquer, bien sûr, elle voulait lui expliquer, mais pas ici, avec autant de monde autour. L'homme massif qui avait soulevé la plus jeune demanda alors qui elle était et Firiel la présenta comme une amie d'enfance. Une lueur de compréhension s'alluma alors dans le regard noisette du grand gaillard et il ajouta pour confirmer :
— Elle est comme toi ?
Lilith se tourna vers son amie, surprise et effarée. La question sous-entendait qu'Aggie était au courant pour la magie et ce n'était pas censé dépasser les barrières de Castarmir. Firiel risquait gros, si cela s'apprenait. Alix aussi, vu qu'ils étaient frère et sœur. Bon sang, ils étaient pourtant bien plus prudents et mesurés qu'Iqbal et elle !
Sa jambe droite la lançait, mais elle n'y prêta pas attention alors qu'elle commençait à faire les cents pas en cercle, se massant les tempes pour tenter de donner un sens aux informations qu'elle venait de recevoir. Son amie posa alors une main sur son épaule pour l'arrêter, avant de saisir une chope que venait de ramener un autre membre de l'équipage auquel elle appartenait pour lui mettre entre les mains.
— Je sais ce que tu vas dire. Mais le capitaine nous a sauvé la vie et en échange, il nous semblait juste de l'aider avec nos pouvoirs. On ne l'aurait pas fait si ce n'était pas quelqu'un de bien. Alors cesse de te faire du souci.
L'adolescente fit la moue, leva les yeux au ciel avant de boire une gorgée de bière. Firiel avait sans doute raison, elle ne devrait pas se faire du mouron pour quelque chose qu'elle ne contrôlait pas. Elle soupira, avant de laisser sa tête reposer contre l'épaule de son amie. Elle la questionna alors sur ses aventures et la jeune femme commença alors à raconter les îles qu'elle avait découvertes et surtout, elle parla en long, en large et en travers de la flore. Aggie fuit au plus vite la conversation, visiblement mal à l'aise à l'évocation de plantes carnivores plus grandes que lui. Ce fut ainsi que la demi-elfe apprit que la jeune femme avait désormais un Familier.
Une vague de jalousie déferla alors sur son coeur. Avec la présence d'un démon en son sein, elle n'aurait pas pu avoir un Familier. Et maintenant, elle craignait que son âme, assombrie par la magie démoniaque, soit incapable de se lier avec l'âme de l'animal qui lui était destiné. Et si ce dernier était sur Autremonde ? Elle n'avait plus aucune chance de le croiser. Néanmoins, l'absence de Familier à son âge n'était pas si rare, surtout en prenant en compte son ascendance elfique. Elle pouvait encore en avoir un.
Elle sourit donc, contente pour son amie, qui appela alors l'animal pour le lui présenter. La demi-elfe siffla en voyant arriver une panthère au pelage d'un noir profond comme les ténèbres, à la démarche souple, mais surtout d'une ou deux tête plus hautes que ses congénères habituels.
— Je te présente Kotatsu, lui annonça Firiel en passant une main dans le page de velours du félin. Il est beau, hein ?
La sortcelière songea que Stéfan avait quand même plus de gueule, mais acquiesça avec un sourire, présentant une main à la panthère pour qu'il puisse renifler son odeur. Elle prit une nouvelle gorgée de bière, appréciant les ronronnements sonores que son amie tirait à son Familier avec ses caresses. C'était apaisant.
Autour d'elles, les habitants discutaient, riaient, dansaient au son des fifres et des accordéons. L'air était chargé d'odeurs de nourriture et d'alcool, faisant soudain grogner son ventre de faim. Mais elle n'eut pas le temps de proposer à son amie d'aller chercher de quoi manger à la mairie ; le jeune homme qui discutait tout à l'heure avec Alix les héla.
— Firiel, t'as une idée d'où est passé ton frangin ? Depuis qu'il est parti à la poursuite d'un blondinet, je ne le trouve nulle part !
La pirate fronça les sourcils et Lilith tira sa montre à gousset de la poche de son pantalon, l'ouvrant pour lire l'heure. Cela faisait presque une heure. Effectivement, cela pouvait être inquiétant, à moins que les deux garçons ne soient en train de discuter à l'abri des regards après avoir couru pendant,... une bonne demi-heure, si elle se basait sur la durée habituelle de leurs courses-poursuites. En tout cas, le morceau de Vivre Card de son frère ne présentait pas un aspect anormal.
— Il doit simplement discuter avec le blondinet, comme tu l'appelles. C'est un ami d'enfance, expliqua la jeune femme avec un sourire.
La passionnée d'herboristerie profita de l'occasion pour présenter le jeune homme à Lilith, qui s'avéra être son capitaine. Et, à l'entente de son nom complet, cela fit tilt dans l'esprit de la demi-elfe. Portgas D Ace. Le rookie qui avait refusé le poste de Grand Corsaire. La nouvelle avait fait du bruit dans les journaux, en tout cas. Sa prime s'élevait à quatre cent mille berrys, si elle se souvenait bien.
Et surtout, des rumeurs prétendaient qu'il voulait prendre la tête de Shirohige.
Son poing se serra sur l'anse de sa chope tandis qu'elle tentait tant bien que mal de réfréner la colère qui l'envahissait. Il voulait assassiner son père et Firiel les présentait comme si de rien n'était ? Voulait-elle qu'elle le tue là, maintenant, tout de suite, ou était-ce une mauvaise blague de sa part ?
Au regard horrifié que son amie arbora soudain, elle venait de se souvenir de ce détail et regrettait d'avoir fait les présentations. Lilith vit son regard faire le yoyo entre le jeune brun et elle, appréhendant la suite des événements. La demie-elfe inspira profondément, enterrant les envies de frapper le connard qui se tenait devant elle avec un sourire poli. Elle ne doutait pas de son père, ce n'était pas un pirate tout juste sorti de l'adolescence qui ferait le poids contre lui. Puis ce dernier avait sauvé Firiel et Alix. Même si elle n'aimait pas l'idée qu'il veuille tuer l'Empereur, il ne devait pas être une aussi grande ordure que ce qu'elle voulait bien imaginer.
— Enchantée, yoi, lâcha-t-elle, avant d'enfoncer son nez dans sa bière.
C'était le minimum de politesse qu'elle pouvait montrer. Au vu de son regard soudain sombre, le brun en face d'elle avait compris qu'elle n'était pas du tout sincère. Il inclina son chapeau devant son visage un bref instant, avant d'ordonner à sa membre d'équipage d'aller chercher son frère. Firiel les fixa encore quelques secondes tous les deux, avant d'obéir à contre-coeur.
— Si vous voulez vous battre, au moins, votre amie n'est plus là, commenta Ace en relevant son chapeau.
Lilith sentit son sang ne faire qu'un tour. Il la provoquait, ce n'était pas possible autrement !
Elle termina sa chope et prit une nouvelle grande inspiration pour se calmer. Elle n'était pas une elfe qui avait le sang chaud et la bagarre comme unique solution. Ce soir était un jour de fête, elle ne le gâcherait pas en provoquant un esclandre. Son poing se serra, avant de se desserrer lentement, tandis qu'elle plantait ses yeux dans ceux noirs du jeune homme.
— Je ne vous cacherais pas mon envie de vous frapper, pour venir sur une île protégée par Shirohige alors que vous clamez que vous le tuerez. S'il meurt, c'est toutes les îles sous sa protection qui seront en danger. Mais...
Elle soupira, songeant aux risques qu'avaient pris Firiel et Alix en dévoilant leur magie à l'équipage du jeune homme. Ils devaient vraiment le respecter. Ils pourraient mourir, si ça revenait aux oreilles de la Matriarche ! Cette dernière ne plaisantait pas avec ce genre de choses ! Elle jura, une moue boudeuse déformant ses lèvres, avant qu'elle ne reprenne une expression plus sérieuse.
— Je ne vous déteste pas pour autant. Vous avez sauvé mes amis et pour cela, je vous en remercie. Mais exploitez-leur pouvoirs, faites d'eux des proies du Gouvernement Mondial, et tuer Shirohige sera la dernière de vos préoccupations, yoi, le menaça-t-elle.
Une lueur s'alluma dans le regard du jeune capitaine, une lueur dont elle ignorait la signification. Était-ce de bon augure pour ses deux amis, ou est-ce que le capitaine lui riait silencieusement au nez, la pensant incapable de mettre ses menaces à exécution ? Son corps se tendit légèrement sous l'appréhension, avant qu'elle n'écarquille de grands yeux surpris lorsqu'il se pencha à son oreille.
— Je ne laisserais pas le Gouvernement Mondial toucher à un membre de mon équipage. Vous pouvez être rassurée pour Alix et Firiel, ils ne les auront pas.
Le brun la dépassa alors, rejoignant sans doute d'autres membres de son équipage alors qu'elle restait plantée sur place comme un piquet. Un léger soupir s'échappa de ses lèvres et son corps se détendit d'un coup. Quelqu'un lui claqua alors l'arrière de la tête et elle gémit, avant de se retourner pour voir sa mentore, tenant sa canne à la main. Lilith grimaça, gênée, se demandant depuis quand elle l'avait inconsciemment abandonné.
— Tu mériterais de rester encore quelques temps à la théorie, doryphore de carottes ! l'invectiva la plus âgée avant de lui rendre son appui. Allez, file t'amuser et ne la perds pas à nouveau !
La demi-elfe esquissa un sourire désolé, avant de poser le bout de sa canne sur le sol, soulageant le poids sur sa jambe droite. Elle se retourna pour tenter d'apercevoir Portgas, avant de hausser les épaules. Tant qu'il gardait en mémoire ses menaces, elle resterait courtoise avec lui si elle le revoyait de nouveau.
Mais pour ce soir, elle avait déjà trop réfléchi. Elle remettrait la main sur Iqbal, passerait au buffet et ensuite profiterait d'une soirée agréable avec ses amis d'enfance. Le reste pouvait bien attendre.
Bon, j'espère que j'arrêterai de mettre 6 mois et plus entre chaque chapitre.
Enfin, mes examens sont terminés et, même s'il me reste des rattrapages en juin, je devrais en sortir un avant septembre X)
Une 'tite review ?