THE VOID - A STAR WARS STORY

Elle n'avait pas pris sa main. Il ne l'avait pas suivi. Ils étaient les leaders de deux camps opposés, les protagonistes de deux forces contraires. Elle était la Lumière et il était les Ténèbres. Tout cela était très simple, figé. Tout cela était très simple, avant qu'ils ne décident d'être bien plus que cela, ensemble.


« Find my hand in the darkness

And if we cannot find the light,

We will always make our own. »

Tyler Knot Gregson.


CHAPITRE I – The Call

PVRIS ; Heaven.

Le temps. Cette notion implacable, ce sentiment pesant d'attirance, de gravité et de fatalité mêlés. Le temps ne pouvait être touché, ni du bout des doigts, ni par la plus belle des volontés. Le temps ne pouvait être changé, ni d'une seconde, ni par l'œuvre d'une puissance supérieure. Le temps ne répondait de personne, ne se laissait pas influencer. Le temps jouait son rôle. Immuable. Egalitaire. Précis. Sans fin. Le temps s'étirait, seconde après seconde, et les tics et les tacs des horloges mécaniques résonnaient, et les mouvements des cadrans analogiques s'étiraient, et le monde continuait sa marche, sans arrêt.

Rey pouvait voir le temps, sa marche, son fil. Elle pouvait tendre la main et, du bout des doigts, caresser l'ordre des choses : le passé, le présent, le futur, s'étiraient dans la Force, et la Force vivait en elle. Lorsqu'elle fermait les yeux assez fort, lorsqu'elle se laissait sombrer dans un temps de méditation assez dense, elle pouvait presque le croire, presque le penser : elle pouvait comprendre le temps, elle pouvait en prendre possession.

Ce n'était qu'une illusion, bien sûr. Le temps restait hors d'atteinte, imprenable, se laissant séduire et désirer, mais n'offrant ses secrets que sous sa propre volonté. Rey parvenait parfois à voler des instants dans le fil, des bribes d'histoires, des secrets de jadis, des bouts du présent et des projections de certains futurs. Cela ne concernait pas forcément des personnes qu'elle connaissait – si elle se concentrait assez fort, elle pouvait diriger le flux vers une personne en particulier, mais ce n'était jamais très précis. -, parfois parvenait-elle à piéger un son, une image, une scène de temps jadis, appartenant à des personnes mortes depuis bien longtemps, ou des bribes de présent et de futur qu'elle ne comprenait pas. Le temps avait sa propre force. Le temps ne se pliait pas à sa volonté.

Même si ses pouvoirs augmentaient, même si elle ressentait désormais la Force comme partie intégrante d'elle-même et de son univers, même si les autres s'abaissaient et la saluaient comme la « Dernière Jedi », même si elle représentait désormais l'étincelle, la lumière, rien n'y faisait : le temps ne lui obéissait pas, ne se laissait pas apprivoiser.

Elle soupira et rouvrit les yeux, agacée, reprenant conscience de son corps et de son environnement. Sa trance l'avait plus vidé d'énergie que ne lui avait véritablement servie, et c'était de plus en plus le cas, désormais. Sa chambre, perdue dans les dédales de l'ancienne base rebelle qui avait pourrie pendant de longues années sur Dantooine, sentait le renfermé, et de l'eau de pluie gouttait du plafond à plusieurs endroits. Le tout était humide, froid, impersonnel. Rey ne s'en formalisait pas, ayant vécue dans de bien pires endroits, mais l'humidité ambiante la rongeait, les courants d'air la tétanisaient. La moisissure l'emprisonnait, l'empêchait de respirer. Habituée aux plaines arides, au soleil éclatant, elle avait dû renforcer sa garde-robe d'habits plus chauds, et avait accepté, bon gré mal gré, que Leia lui prête une de ses capes de voyage et plusieurs tenues plus adaptées aux températures ambiantes.

C'est donc enserré dans une cape grise, emmitouflée du nez aux hanches, qu'elle quitta sa chambre, déverrouillant la porte d'un mouvement de la main, récupérant d'un tour de poignet son sabre laser laissé un temps sur son lit de fortune.

Elle avait gardé celui brisé lors de sa dernière confrontation avec Kylo Ren. Celui qui avait appartenu à Luke et à Anakin avant lui. Elle n'avait pu se résoudre à le jeter, à l'abandonner. Il était plus qu'une relique – comme se plaisait à plaisanter Finn -, plus qu'un souvenir douloureux – comme l'avait un jour laissé penser Leia -, plus qu'un vieil artefact poussiéreux – comme aimait en rire Poe. Il était la preuve d'un échec cuisant, du premier, du dernier. Il était la preuve de ce qu'elle avait perdue, de ce qu'elle ne gagnerait jamais, des pertes, des morts, des trahisons, des espoirs déçus. Il était la preuve qu'elle devait avancer, qu'importe le prix, qu'elle devait se détacher des biens matériels, des possessions, des sentiments.

Le sabre brisé reposait sous son lit, dans un coffret qu'elle n'avait plus ouvert depuis qu'elle l'y avait déposé. Dès qu'elle le touchait, le visage de Ben venait immédiatement s'imprimer sur sa rétine, la vision du corps découpé en deux de Snoke revenait. Le sabre s'était gorgé de tous ceux qui l'avaient touché. Rey n'avait pas envie d'y penser.

Elle porta son propre sabre, celui qu'elle avait construit de ses mains et de ses pauvres capacités, dans les ruines de Dantooine, à sa ceinture, appréciant de le sentir contre sa hanche.

Il était à elle. Il représentait tout ce qu'elle était, tout ce qu'elle voulait, tout ce pour quoi elle se battait. La lame n'en était pas bleue. La poignée n'était pas chromée. Elle avait elle-même trouvé toutes les pièces, l'avait construit, assemblé, avait pensé à la moindre de ses améliorations, à toutes ses capacités. Elle avait trouvé le cristal dans des ruines, lors d'une de ses longues et nombreuses expéditions sur cette planète sur laquelle ce qui restait de la rébellion s'était installée. La lentille provenait d'un vieux système de navigation d'un X-Wing en décrépitude. Elle y avait couplé assez de cellules d'énergie pour que rien ne puisse arriver, pour que le système soit constamment alimenté. L'émetteur lui avait été offert par R2-D2, qui en possédait toujours un, dans les tiroirs et tréfonds de sa caboche cabossée. Elle avait passé de longues semaines à le construire, à le modeler, enfermée dans sa chambre, passant de transes en transes, de journées humides à des nuits au froid mordant.

Elle resserra sa cape autour d'elle, laissa ses bras se croiser en-dessous, frissonnant sous les courants d'air froid qui venaient tourbillonner jusque dans les couloirs de ce vieux bunker usé jusqu'à la moelle. Ils n'étaient pas assez nombreux pour s'occuper de toute l'intendance, ni même fortement préoccupés par la décoration et les fuites engendrées par l'usure, pas quand tout le Premier Ordre était à leur recherche, et que la mise en état de leurs armes et le contact de leurs derniers alliés étaient une priorité.

Leurs alliés, d'ailleurs, revenaient. Lentement, effrayés et honteux, ils étaient déposés par petits groupes, les contactaient timidement via des canaux et fréquences sécurisés, détournant les yeux et s'excusant face au regard implacable de leur commandante, face à la leçon de morale qu'elle se permettait de leur servir dès qu'ils se révélaient plus intrigués par la Dernière Jedi et son étincelle que par la survie de leur flotte, dont ils s'étaient détournés sans états d'âme.

Agamar, Bakura, Alzoc III, Bespin, Endor …

Tous revenaient, doucement, venant regonfler leurs rangs, redonnant un nouveau souffle à leur combat, un nouveau courage à ceux qui avaient survécus à la bataille de Crait et à leur fuite. Les volontaires revenaient, les contactaient à nouveau, avides de rejoindre leurs rangs. Cela rendait Poe légèrement cynique, Rose et Finn plutôt extatiques. Rey, elle, s'y sentait presque indifférente.

Elle détourna d'ailleurs le regard lorsqu'elle passa par le hangar, immense et décrépi, où reposaient leur maigre flotte et où les nouveaux pilotes s'entrainaient, parfois avec un peu trop d'entrain et de nonchalance. Certains murmures n'étaient évoqués que pour elle, certains sourires et regards aussi. Partout s'imprimaient la déférence, l'admiration, l'attente. Partout, les regards se baissaient, les yeux s'écarquillaient, les bouches s'ouvraient. Elle n'était pas Rey pour eux. Pour eux, elle était la Dernière Jedi. L'étincelle. L'espoir. Elle qui n'avait rien demandé d'autre que de quitter l'Enfer de Jakku et de survivre.

La voyant passer, et ses troupes se faire plus agitées à cela, Poe, qui commandait en grande partie leur flotte, fit resserrer les rangs autour de lui et, après que les murmures aient cessés, adressa un clin d'œil à la jeune femme, qui le salua d'un signe de la tête en retour.

Le calme se fit très soudainement autour d'elle, alors que ses pas la menaient vers l'extérieur, et que les portes du hangar et les gardes la laissaient passer. Dantooine était très peu peuplée. Une planète pas si hostile, mais venteuse, herbeuse, humide. La pluie y ruisselait sans fin, le soleil y était timide, la température n'était jamais très haute. Un petit paradis pour certains, après les monts neigeux de Hoth et les falaises de Crait. Pas pour elle.

Le temps passait. Ici aussi, sa nature semblait implacable, stable, mortelle. Cela faisait des semaines qu'ils stagnaient sur cette planète, rassemblant leurs forces, des armes, des alliés. Des semaines que Rey cherchait un sens à ce qui allait suivre, un but, un endroit où aller, sans parvenir à se fixer. Le temps restait sourd à ses appels, muet à ses sens. Le temps ne lui montrait rien d'intéressant, se laissait porter, inlassablement, sans répondre à ses questions. La Force n'aidait pas, pas en cet instant. La Force, par-dessus tout, ne parvenait pas à lui apporter les réponses aux questions qui lui brûlaient les lèvres.

Elle avait détaché ses cheveux. Elle le faisait souvent, maintenant, comme une fainéantise nouvelle, ou un instinct indiscipliné. Elle aimait sentir les mèches voleter autour de son visage lorsque la Force la plongeait en méditation, et elle aimait penser que ses cheveux bruns agissaient comme un voile autour de son visage, la protégeant, la dissimulant. Et puis, Leia avait dit que cela lui allait bien. Elle avait accompagné ses mots d'un geste, d'une caresse sur sa joue, et cela avait été suffisant pour que Rey le prenne comme un acte de cœur, de tendresse, de sincérité, et y croit assez pour en faire sa nouvelle routine. Ainsi, les mèches ondulées, une fois à l'air libre, vinrent immédiatement voleter en tous sens lorsque sa silhouette vint se plier au vent nocturne, et Rey dû coincer les mèches rebelles derrière ses oreilles et dans sa cape pour éviter d'avoir à marcher à l'aveugle.

Ici encore, on s'abaissa bien bas face à elle, et elle n'y prêta pas attention. Elle respira longuement, laissa l'humidité ambiante imprégner ses poumons, alors qu'elle longeait l'enceinte pour avancer dans les plaines herbeuses l'environnant. Elle s'éloigna d'une centaine de mètres, assez pour ne pas être vue, assez pour pouvoir rejoindre la base sans risque et en peu de temps. Elle balaya les horizons du regard, avisant les éoliennes rustiques, au loin, la plaine herbeuse qui s'étalait sur des kilomètres, le bunker imprégné dans la colline, construit à même la terre. Tout était calme, silencieux, froid. Sa cape glissa de ses épaules, ses cheveux se remirent à voleter autour de son visage. Elle repassa deux mèches derrière ses oreilles avant de fermer les yeux, laissant la Force picoter jusqu'au bout de ses doigts, laissant l'élan s'installer.

Luke lui avait appris à respirer, à s'enterrer au plus profond d'elle-même, à se laisser guider par la Lumière, à ne plus sombrer dans l'Obscurité. Luke lui avait appris à marcher sur l'étroite bordure qui séparait les deux bords de son âme, entre l'envie, le pouvoir, la colère et l'amour, la déférence et l'empathie. Il lui avait montré la mesure, face à sa démesure. Il lui avait montré le contrôle, face à son instinct pur. Il n'avait jamais eu le temps, ni l'envie, de lui apprendre tout cela, de lui confier les secrets de la Force, mais ce n'était pas si grave. Leia avait comblé quelques lacunes. Elle avait appris son maniement du sabre dans les livres, et dans ses combats. Le reste était instinctif, un instinct qu'elle tentait de mesurer, de contrôler.

Elle bougea le poignet et son sabre vint à elle. La lame en sortit en un feulement robotique, et malgré ses paupières closes, Rey pouvait en percevoir le halo argenté, brillant dans le noir de cette nuit, illuminant la plaine sauvage, créant de la lumière là où seule la pénombre régnait.

Elle enchaina les positions d'attaque, de défense, ses cheveux claquant au vent, le bruit du sabre laser et de sa respiration maitrisée dans le silence du désert environnant. La sueur perla rapidement sur son front, son souffle se fit court. Elle continua, malgré tout, yeux clos, ressentant, voyant sans regarder, combattant un ennemi invisible, interne, avec une rage contenue, une mesure difficile.

La méditation. L'entrainement. Lire, lire, lire. Et, recommencer. Il n'y avait plus de Jedis pour lui enseigner, plus rien d'autres que les maigres enseignements de Luke, les quelques savoirs de Leia et les livres qu'elle avait conservé à ce sujet, et qu'elle lui avait légué. Rey avait puisé dans toutes ces connaissances sans restriction, les épuisant rapidement, et devait aujourd'hui trouver sa propre voie. C'est ce qu'avait dit Leia. Ce qu'elle s'appliquait à faire chaque jour, usant des anciens principes Jedis comme un mantra, tentant de se conformer à leur discipline et à leurs règles. « D'un ennui barbant », avait-elle pensé, à la première lecture. Une pensée qu'elle avait refoulée, depuis, et qu'elle tentait de ne plus faire ressurgir. Les mots de Luke, ses paroles défaitistes, vaines, pessimistes à l'encontre de l'Ordre et de ses agissements l'avaient atteinte, et bien qu'elle ne put y croire complétement, avaient forgés un certain scepticisme en son sein.

Mais, elle avait un don, celui de pouvoir maitriser la Force, et mis à part les Jedis – et les Siths -, qui d'autres pour lui montrer la voie, le bon usage d'un tel pouvoir ?

Elle bascula ses appuis, se baissa, sauta, fit tourner le sabre dans sa main. Son esprit aiguisé sentait tout, ressentait tout. L'air, la terre sous ses bottes, le vent frais contre son visage en sueur, le toucher de l'herbe sur sa tunique et contre ses jambes, le bruit du sabre. Elle bougeait, libre, sans attaches, tranchant l'herbe sur ses pas, attaquant et parant, reculant et tournant, agile et gracile, se sentant plus légère et libre que jamais, plus elle-même que jamais.

Ses traits s'étaient détendus, ses membres se ployaient, se déployaient sans tension. La concentration était là, comme un masque devant ses yeux clos, mais la joie, l'émotion de se sentir à sa place, là, dans l'action, un sabre dans la main, vibrant dans la Force, parvenait à créer en elle plus que de la solennité, bien plus : une certaine forme de joie, d'ivresse, qui se créa dans un sourire sur ses lèvres, puis dans un rire léger, lorsqu'elle parvint à se réceptionner après une pirouette plus difficile que les précédentes. Elle était presque une enfant. Elle était presque une adulte. Elle vibrait et sautillait et riait et exécutait. Son sabre à la lame argentée tranchait et volait, comme un prolongement de son bras, comme une entité propre. Il tranchait l'air et, bientôt, ce fut tout ce que fut capable d'entendre Rey : le bruit de la lame tranchant l'air, volant autour de son visage souriant, de sa silhouette élancée, mouvante.

La Force vibrait, et vibrait, et vibrait. Et, Rey fut bientôt incapable d'entendre autre chose qu'elle. Elle circulait dans ses veines, elle pulsait dans ses cellules, elle vivait dans les battements de son cœur. La jeune femme rit à nouveau, extatique. Et puis, l'instant s'évapora.

Le bruit d'une autre lame, d'un autre sabre que le sien la sortit de sa transe. Ses mouvements se stoppèrent, sa respiration s'accéléra. Derrière ses yeux clos, une autre lumière vint inonder le ciel et la lande. Le rouge sang vibrant, étincelant, lui fit ouvrir brutalement les yeux, et inspirer un souffle qu'elle n'avait pas eu conscience de retenir.

Elle n'était plus vraiment sur Dantooine. Le paysage qui s'étalait dans son champ de vision était tropical, arboré, et semblait chaud. Là-bas aussi, il faisait nuit. Là-bas aussi, un porteur de sabre semblait s'entrainer loin des siens.

Rey tenta de se reprendre, de fermer son visage aux émotions qui pourraient la trahir, levant à nouveau son sabre pour se protéger. Face à elle, Kylo Ren semblait bien moins surpris, le sabre baissé mais toujours actif, l'observant fixement à travers la lentille ouverte de leurs dons conjoints, de la Force.

- Bonjour, Rey.

La jeune femme déglutit, ne sachant si elle devait répondre, jouer le jeu, s'enfuir. Elle savait que le lien entre eux, instauré par Snoke, n'avait jamais été brisé. Rey l'avait volontairement interrompu sur Crait, mais avait toujours su que cela n'avait pas été suffisant pour le détruire complétement. Depuis, elle ne l'avait plus vraiment revu, et leur lien ne s'était gorgé que de sensations, de murmures, et d'émotions : elle avait senti la rage de Kylo lorsqu'il s'était battu contre Luke, son amertume en le sentant disparaitre, sa tristesse en la voyant lui fermer la porte. Elle avait entendu ses mots, ses murmures, tous ceux qu'il tentait de lui faire passer, pensant qu'elle pouvait vraiment être corrompue et se joindre à lui sans équivoque, malgré leur affrontement.

Le revoir faisait mal. Cela faisait mal au cœur, au ventre, à la tête. Cela lui rappelait le sabre laser brisé caché sous son lit, l'échec cuisant, l'espoir piétiné. Cela lui rappelait le fardeau qu'elle portait désormais sur les épaules : elle avait pensé qu'il serait l'étincelle, et elle était aujourd'hui la seule à devoir porter ce poids et ce titre. Cela lui rappelait les conversations, les sourires, les gestes. Cela lui rappelait qu'elle n'arrivait toujours pas à manipuler le temps, à voir ce qu'elle voulait voir, à toucher ce qu'elle souhaitait toucher.

Elle tenta de calmer les battements de son cœur, prenant appui sur les enseignements de Luke, respirant profondément avant de le regarder vraiment pour la première fois. Qu'avait-il de plus maintenant qu'il était le Suprême Leader du Premier Ordre ? Son visage était le même, plein d'une détermination froide, d'un calme lisse et glacé. Ses yeux brillaient encore, surtout dans la lumière de leurs deux sabres lasers, presque noirs dans la pénombre. Il n'avait toujours pas retrouvé son casque, celui qui rendait la confusion avec Dark Vador étrange, et ses cheveux étaient un peu comme les siens, voletant doucement autour de son visage trop pâle, frôlant la cicatrice qu'elle lui avait infligé lors de leur première rencontre. Il n'était pas plus effrayant, pas plus grand, pas plus imposant. Cela parvint à la rassurer quelque peu.

- Bonjour, Ben. Ou, plutôt, ne suis-je pas censée t'appeler « Suprême Leader » ? « Votre Altesse » ? « Votre Incroyable Suprématie » ?

Elle appuya sur son prénom, fit en sorte qu'il tranche, qu'il râpe et le fasse tanguer. Elle laissa sa langue claquer sur son palais, relevant légèrement la tête, ses lèvres perdant leur sourire. Son sabre se baissa en une posture plus défensive, semblable à celle qu'il adoptait, mais elle ne l'arrêta pas, toujours sur ses gardes, bien qu'elle sache pertinemment qu'il n'était pas réellement là.

Kylo Ren ne vacilla pas à cela, ni à son prénom, ni à la moquerie dont elle enroba sa rancœur. Il ne sourit pas, ne baissa pas les yeux, ses traits ne se figèrent pas de honte, de gêne, ou de colère. Il se contenta de continuer à l'observer, son regard balayant rapidement sa silhouette, avant de revenir à son visage.

- Très beau sabre. Les cristaux argentés sont très rares. Cela correspond tout à fait à ce que tu représentes, désormais.

La main de Rey se serra autour de la poignée en métal sombre de son sabre, elle ne put s'en empêcher.

- L'étincelle. La dernière des Jedis. Une espèce en voie d'extinction, dont tu es l'ultime représentante. Le fardeau de milliards d'espoirs sur tes épaules …

Il s'approcha d'un pas, et Rey leva légèrement son sabre, le halo argenté crépitant entre leurs deux corps, créant une lumière artificielle et aveuglante sur leurs visages, accentuant les cernes sous leurs yeux.

- Je n'ai pas besoin de toi pour me le rappeler.

Ses mots se hachèrent, alors que la colère venait baigner son cœur et sa raison. La lame de son sabre crépita, et Kylo eu le bon sens de reculer d'un pas, simplement pour la calmer, rangeant son propre sabre et le réinstallant sur sa hanche en signe d'apaisement. L'argent devint la seule source lumineuse de leur lien, inondant leur visage d'une lumière crue.

- Je suis désolé. Je ne voulais pas te froisser.

Oh. Cela pouvait bien être une première. Rey soupira, à la fois épuisée par ce combat mental et par l'effort physique et psychique qu'elle venait de fournir. Se battre contre Kylo Ren n'était pas ce qu'elle avait souhaité faire de cette soirée, la première depuis des jours qu'elle parvenait à s'octroyer hors de sa chambre et de la base. Elle ne souhaitait pas se battre, pas quand les combats étaient si proches. Elle ne souhaitait pas faire de leur lien une nouvelle source de conflits.

- Et, Kylo suffira. Tant que tu ne m'auras pas rejoint, il est inutile que tu m'appelles « Suprême Leader ».

Il parla sur la même intonation, avec les mêmes émotions placardées sur le visage, mais Rey parvint à sentir la pointe d'amusement qui perça son regard, et cela fut suffisant pour lui faire baisser la garde, pour lui faire sentir que l'heure n'était pas vraiment à la guerre, au combat, aux menaces. Elle baissa définitivement son sabre, un timide sourire venant percer le coin de ses lèvres.

- Tu rêves, Ben.

Encore une fois, il ne la reprit pas. Il la laissa user de ce prénom ancien, oublié, appréciant de l'entendre le dire, de voir le mot s'imprimer sur ses lèvres et de l'entendre rouler sur sa langue. Une faiblesse qu'il contrôla, qu'il figea, qu'il s'empressa de réprimer. Le sourire de Rey s'agrandit pourtant un peu plus, en sentant cette vague dans le fond de son esprit, cette espèce de fantôme d'émotion passer dans sa conscience, se tisser dans le lien qui les unissait. Elle haussa un sourcil, et le jeune homme détourna un instant les yeux.

Quelle situation incroyable … Rey ne savait si elle devait rester ou fuir, en rire ou en pleurer. Elle était l'espoir, il était celui qui allait les mener à leur perte. Elle était la Lumière, il était l'Obscurité. Elle était une inconnue, une orpheline, il était l'héritier des Skywalker. Elle n'était que Rey, et, au fond, il n'était que Ben.

Sentant une certaine mélancolie s'étirer, s'installer, la jeune femme soupira à nouveau et rétracta la lame de son sabre, notant avec un peu d'étonnement l'émotion étrange qui passa sur le visage du jeune homme avant que l'obscurité ne revienne sur eux.

Ils se firent face un moment, en silence. Rey en profita pour l'observer, lui et son environnement direct – elle ne pouvait voir que directement derrière lui, et sur ses côtés, à une distance fortement réduite -, la nuit noire à la lune unique, mais énorme, les arbres les entourant, le silence de la clairière qui l'entourait. Elle observa sa tunique noire remontée à ses coudes, ses avant-bras découverts, sûrement à cause de la chaleur, les cicatrices et les marques qui se dessinaient sur sa peau. Elle observa le tissu noir collé à sa peau. Elle observa et mit un certain temps à remonter à son visage, qu'elle distinguait moins bien, maintenant que la source lumineuse la plus éclatante avait disparue. « Heureusement », pensa-t-elle. Ses joues commençaient à brûler, l'examen lui ayant laissé un contrecoup qu'elle espéra dissimuler dans le fond de son esprit.

- Tu t'entrainais ? Le Suprême Leader a toujours besoin de s'entrainer ?

Elle combla le silence, passa son sabre d'une main à l'autre, ne souhaitant pas totalement baisser sa garde et se laisser sans défense, au cas où le lien soudain n'ait été qu'un prétexte pour autre chose. Souhaitant également cacher son trouble, l'empêcher de voir ce qu'elle pensait, ce qu'elle ressentait, l'étrange étranglement dans sa voix et le nœud qui lui barrait l'estomac.

« Ce n'est rien », se persuada-t-elle, les sens aiguisés, la méfiance de nouveau à cœur. Ses joues décolorèrent et elle fit mine de rien, reculant d'un pas, mettant de la distance, de la méfiance dans son attitude. Il lui prêta une œillade étrange, presque concernée, dont elle ne tint pas compte.

Et, il ne fit qu'hausser les épaules, laissant glisser sur lui le sarcasme. Il avança même d'un pas, voire de deux, et Rey en fut surprise, bien assez pour ne pas tenter de reculer, de se dérober à cela.

Son cœur s'accéléra, de peur, bien sûr, d'appréhension. Elle remit en pratique les enseignements de Luke, tentant de retrouver sa paix intérieure, de respirer, de ne pas paniquer. De ne pas simplement se jeter sur son sabre et faire empirer les choses. S'il l'avait voulu, Kylo aurait eu tout le temps possible pour la tuer. Il ne l'avait pas fait. Elle ne devait pas s'inquiéter de sa soudaine proximité, de son visage plus proche, de sa haute silhouette surplombant la sienne. Elle était de taille à l'affronter. Elle n'avait pas peur.

Il parvint, pourtant, à profondément l'affecter, à faire s'effondrer toutes ses certitudes et barrières, lorsqu'il leva une main et vint, de ses doigts dénués du cuir de ses gants, chasser des yeux de la jeune femme les mèches trempées de sueur qui lui collait encore au front et au visage. Rey sentit sa respiration se bloquer, et ses yeux se fermèrent un instant de trop, alors qu'affluaient images et pensées, une seconde qui s'évanouit aussi vite qu'elle était venue. Le toucher de Kylo disparu aussi rapidement et la jeune femme rouvrit les yeux pour découvrir plus d'émotions dans ses yeux marron qu'elle n'avait pu en voir depuis bien longtemps. Il semblait aussi troublé qu'elle. Il semblait avoir vu la même chose qu'elle.

- Tu as détaché tes cheveux. Ça te va bien.

Il avait parlé dans un murmure, le regard fixé sur son visage, la main baissée mais les doigts toujours tendus vers elle. Rey n'avait qu'à tendre la sienne pour toucher sa paume, elle n'avait qu'à s'avancer pour le toucher. Elle pouvait le faire, ce qu'elle venait de voir, ce qu'ils venaient de partager pouvait la pousser à le faire. Sa remarque ne fit que creuser plus de trouble, qu'instaurer plus de silence, de non-dits, de douleur. Elle repensa à leurs conversations, leurs secrets, leurs regards, leurs silences. Elle repensa à qui elle était, désormais, et ce qu'il représentait, maintenant. Elle repensa à tous les résistants qui siégeaient à quelques mètres, inconscients de sa trahison.

Elle recula.

- Il faut que je m'en aille.

Elle ne s'expliqua pas, il lui semblait qu'elle n'en avait pas besoin, qu'il comprendrait. Elle ne sut si cela fut réellement le cas, mais il recula tout de même d'un pas, ne la lâchant pas du regard.

- A bientôt, Rey de Jakku.

Il disparut dans un souffle, dans un clignement de l'œil. Essoufflée, Rey reprit conscience de son environnement, du vent froid, de la pluie qui s'était mis à tomber et la trempait maintenant jusqu'à l'os. Elle s'assura d'un coup d'œil que Kylo avait bien disparu, que toute trace de lui s'était évanoui, avant de ramasser sa cape et de retourner vers le bunker, silencieux et froid, endormi sous la colline verdoyante qui leur servait de tombeau. Son sabre à la ceinture, elle serra la cape contre elle, tremblant de froid, et peut-être aussi d'autres choses, et ses larmes ne se virent pas entre l'eau de pluie qui ruisselait sur son visage, et ses sanglots se perdirent dans les tremblements de froid de son corps endolori.

Les gardes n'y virent que du feu. Et, peut-être qu'elle-même fini par oublier que ses pleurs étaient bien réels et non pas le simple fruit de son imagination et de sa solitude.

X

Le temps jouait contre lui. Contre le Premier Ordre, contre tous leurs idéaux et leurs actions. Le temps permettait à la Résistance de panser ses plaies, de guérir, de recruter, de s'armer. Le temps leur permettait de retrouver leur audace, leur courage, de sécher leurs larmes, de guérir de leurs blessures. Le temps passait. Rey se renforçait. Ses amis devenaient plus nombreux.

Le Suprême Leader écoutait les rapports d'une oreille, laissant majoritairement le Général Hux répondre aux émissaires et leur affecter de nouvelles missions. Ce qu'avait toujours fait Snoke, et Kylo ne souhaitait pas laisser cette tradition se perdre : il avait, après tout, mieux à faire que de la politique. Pour l'instant, du moins.

Les Chevaliers de Ren entouraient la salle, immobiles, veillant sur Kylo et sur ses décisions, et cela parvenait à légèrement détendre le Jedi Noir, rendu plus anxieux par la présence du Général et de ses alliés. Leur rivalité s'était faite plus menaçante, depuis la mort de Snoke : les regards noirs s'étaient changés en menaces, les rumeurs en accusations franches. Hux avait tenté de lui mettre la mort de Snoke sur le dos, prétextant que Rey n'aurait jamais pu être assez forte pour l'assassiner. Personne n'avait eu l'idée de le rejoindre, à cette déclamation, mais les doutes s'étaient imprimés et, si Kylo avait décidé de ne pas agir, ne souhaitant pas faire de ce crétin un martyr, une partie de son Conseil semblait désormais plus réservé à son égard.

Il n'était, après tout, qu'un membre officieux de la hiérarchie, un bras droit sans pouvoirs dans l'organigramme, un maillon instable dans la bureaucratie écrasante du Premier Ordre. Comment le penser Suprême Leader, comment lui obéir, sachant que de plus méritants pouvaient prétendre au titre ?

Les Siths, les Jedis Noirs, qu'étaient-ils pour les bureaucrates et cadres du parti, à part des sources jamais taries de problèmes ? Dark Vador avait fait vaciller l'Empire à cause de ses états d'âme, le tout Conseil avait certainement peur que son petit-fils en fasse de même.

Hux mourait d'envie de le faire ployer. Ses yeux ne cachaient désormais plus rien de la rage et de la rancœur qu'il nourrissait envers lui, ses mots bourrés d'hypocrisie ne restaient courtois que dans la peur du pouvoir de Kylo et de sa propre souffrance et mort. L'homme qui s'était toujours vu prendre la suite de Snoke, le numéro deux dans la chaine de commandement, complotait contre lui, Kylo le savait bien.

Incapable de rester plus longtemps en place, Kylo se redressa, faisant stopper les conversations, et retourner vers lui les regards soucieux et figés par la peur.

- Suprême Leader ?

- Je vous laisse. Hux, occupez-vous de la paperasse.

L'homme serra les mâchoires, ravalant ses mots, sa rancœur et sa honte, baissant légèrement la tête en signe d'une soumission qui devait très certainement le faire vomir, et se retourna vers les deux émissaires alors que Kylo quittait la pièce, rapidement suivi par les Chevaliers de Ren.

Ses Chevaliers. Une poignée de padawans, formés par Luke Skywalker … Ce dernier l'avait-il seulement su ? Qu'il ne les avait pas tous tués ? Qu'il avait tout fait pour les préserver de la violence de Snoke et de la jalousie des bureaucrates du Premier Ordre, qu'il leur avait rendu leur fidélité en faisant d'eux des membres puissants et influents du parti ? Luke Skywalker avait-il seulement été au courant de tout ce qui s'était passé, cette nuit-là, dans le Temple ?

Kylo n'aimait pas y penser. Ressasser ce souvenir, en particulier, était douloureux, et inutile. Il en fut de toute façon tiré par les bruits de pas plus proches d'une de ses comparses : cachée sous son masque, sous la capuche de sa cape noire, une jeune femme se détacha bientôt du groupe pour parvenir à sa hauteur.

- Kylo, nous nous inquiétons des agissements du Général Hux. La Force est corrompue autour de lui, ses pensées ne sont orientées que vers le trône sur lequel tu es assis. Nous n'attendons que ton ordre, tu le sais bien.

Bien sûr, qu'il le savait. Lorsque Luke avait tenté de le tuer, lorsqu'il avait tenté de les prévenir, de convaincre les autres apprentis Jedis de ce qui s'était passé, eux seuls avaient acceptés d'écouter, eux seuls avaient sondés la Force et compris. Ils l'avaient aidé à s'enfuir, avaient fuis à ses côtés, rejoignant Snoke, s'affranchissant de toutes les barrières, de toutes les limites imposées par l'Ordre Jedi. Tuant tous les autres, ceux qui avaient tentés de les accuser, de les tuer aussi, lorsqu'ils avaient appris qu'il avait assassiné Luke dans sa tentative de fuite. Il n'avait fait que se défendre. Ils n'avaient fait que le défendre. Ils avaient été pourchassés pour cela.

Alnya – son nom de Chevalier, Alnya Ren – venait de la planète Naboo, et marchait à ses côtés comme si c'était elle qui portait la couronne, aussi fière que la reine des Naboos en personne, méconnaissable sous son casque noir et son uniforme sombre aux formes amples. Kylo savait que ses yeux étaient verts, que ses cheveux étaient longs et bruns. Il savait qu'elle était l'une des plus belles femmes qu'il ait pu voir, et qu'elle était d'une intelligence vive, d'une force d'esprit sans égal. Elle se pliait au Côté Obscur, indifférente aux missions, aux tortures, aux morts. Son regard brillait d'un éclat mordoré qui venait et partait avec la Force. Il lui faisait entièrement confiance.

- Pas encore. Je n'en ai pas fini avec lui.

Elle inclina la tête, et le laissa la devancer, ralentissant le pas, se mettant à nouveau au rythme de ses compagnons. Personne ne posa plus de question. Le silence, le bruit de leurs pas, furent leurs seuls guides dans la traversée des couloirs de l'ancien croiseur impérial, désormais vaisseau de guerre du Suprême Leader du Premier Ordre.

Ses appartements en vue, il ne fallut qu'un geste pour que deux Chevaliers ne viennent encadrer sa porte, les deux autres le saluant d'un signe de la tête avant de se disperser dans les couloirs attenants, mettant à bien leurs missions d'espionnage et de surveillance régulières. Une fois seul, la porte coulissante verrouillée, le jeune homme s'autorisa à souffler et força ses épaules et ses membres à se détendre, loin des complots et des intrigues, loin de son rang et du Conseil.

Il n'avait que peu dormi, la nuit dernière, majoritairement à cause du climat étouffant de la planète sur laquelle ils s'étaient posés pour se ravitailler. Il avait profité du calme, de l'absence d'autochtones et de colons pour aller s'entrainer ou, du moins, tenter de méditer un peu et réfléchir sur la suite à donner aux événements. Ses pensées avaient été balayées par Rey et leur lien, qui avaient su se manifester au pire des moments, alors qu'il songeait au vain de ses actes, à l'inefficacité des mesures qu'il avait mis en place en tant que Suprême Leader, et aux regrets de ses gestes passés.

Elle était apparue dans un halo argenté, tournoyant, combattant un ennemi invisible à l'aide de son tout nouveau sabre laser, s'amusant et apprenant de la Force et de ses capacités. L'apparition l'avait surpris, et il avait dégainé sa propre lame, ne s'attendant pas à la voir maintenant, pas quand tout semblait si perdu, si douloureux. Il l'avait trouvé belle avec ses cheveux détachés, volant librement autour de son visage aux traits plus creusés. Sauvage et libre, alors qu'elle dansait gracilement une chorégraphie improvisée, son sabre volant entre ses doigts, sans attache, évoluant avec la Force. Il avait dû cligner des yeux plusieurs fois, se reprendre pour calmer les battements affolés de son cœur. Elle l'avait enfin vu, elle l'avait enfin remarqué et, vraiment, Kylo n'était pas sûr d'avoir vu, un jour, un regard si hypnotisant et doux que le sien.

Le jeune homme se secoua, sortant de ses pensées. La fatigue venait poser son poids sur ses épaules, cela et le reste, comme toutes les charges qu'il devait maintenant porter depuis qu'il était le Suprême Leader. Toutes les charges que la majorité n'aurait jamais souhaité lui voir incomber, lui qui n'avait jamais été un membre officiel de la hiérarchie de l'Ordre. La trahison se sentait à plein nez, les complots pullulaient, et Kylo ne voyait pas comment résoudre tous les problèmes qui s'offraient à lui sans trahir tout ce qu'il était, et tout ce qu'il souhaitait être. Hux désespérait de prendre sa place. S'il trouvait un plan efficace, s'il s'alliait à des personnes assez puissantes et influentes, Kylo savait que sa vie ne durerait que peu. Il n'était donc pas temps de penser à Rey.

Et, pourtant … La jeune femme s'entrainait. Sans maitre, sans enseignement, elle persévérait tout de même. Une preuve de courage et de persévérance que ne pouvait que louer Kylo. Lui-même avait passé des années à suivre les enseignements de Luke, puis d'autres encore à écouter les préceptes de Snoke. Il en avait tiré bien des choses, utiles comme inutiles, des savoirs qu'il aurait aimé pouvoir transmettre à son tour. Qu'elle puisse espérer s'en sortir sans personne pour l'aider était courageux, bien que stupide, au sens de Kylo. Mais, elle avait montré des pouvoirs presque supérieurs aux siens, un instinct surdéveloppé face à la Force, une maitrise incroyable malgré sa quasi-inexistante formation.

Elle combattait plutôt bien. Elle savait se défendre, cela s'était vérifié face aux gardes de Snoke, qu'elle avait réussi à maitriser plus efficacement que lui. Elle pouvait rivaliser avec ses pouvoirs. Kylo en était certain : avec un bon professeur, elle parviendrait sans mal à le surpasser.

Et, contrairement à ce que l'on pouvait penser, cela ne lui paraissait pas si terrifiant que cela.

Rien, venant d'elle, ne lui paraissait insurmontable, terrifiant : elle n'était qu'une petite fille. Elle ignorait qui elle était, d'où elle venait, elle n'était ni plus jolie, ni plus intelligente que les autres. Kylo ne savait pas ce qu'il lui trouvait, vraiment.

Elle était plus forte que les autres, elle était plus sauvage, plus douce, plus empathique, plus compréhensive … Elle faisait corps avec la Force. Elle avait les plus beaux yeux de la Galaxie. Cela devait suffire.

Et puis, Rey voulait le sauver. Il pouvait le sentir : elle brûlait de le sortir des Ténèbres, de simplement pouvoir lui faire retrouver le « juste » chemin. Etait-il devenu comme sa preuve de rédemption, comme son chemin de croix vers la lumière ? Il ne le savait pas. Mais, elle s'accrochait, elle persistait, elle se faisait une place, et il ne pouvait tout simplement y croire. Pensait-elle réellement qu'elle pouvait y parvenir, ou n'était-ce là qu'une façon pour elle de tester ses limites et ses forces ? Y avait-il autre chose, une chose cachée sous le désir ardent de le voir revenir vers sa famille, le voir retrouver la lumière et la résistance ?

Qu'avait-elle à y gagner là-dedans, elle qui n'était rien et ne venait de nulle part ?

Qu'avait-il à gagner à la faire venir à lui, du Côté Obscur ? Elle ne semblait pas facilement influençable, sa corruption serait longue. Sa puissance était certaine, mais le plus simple serait de mettre fin à ses souffrances, à leur souffrance, et de simplement la tuer. Plus de péril, plus d'étincelle. Un tir de blaster suffirait. Mais, il ne pouvait s'y résoudre.

Que faisait-elle à l'heure actuelle ? Où était-elle ? Avait-elle quelqu'un pour l'aider, quelqu'un pour prendre soin d'elle, quelqu'un pour l'aimer, la chérir ? Se sentait-elle aussi seule que lui, en cet instant ?

Kylo se força à refermer cette porte, cette pièce de son esprit qui signifiait les souvenirs et les regrets. Le souvenir de son père ne cessait de revenir, il n'avait pas besoin d'y ajouter le fantôme de Rey, de ses yeux noisettes emplis d'émotions et de sa silhouette gracile, de ses cheveux bruns et de ses lèvres. Il n'avait pas besoin de cela pour le tourmenter davantage.

Il se laissa tomber au bord de son lit, se prit la tête entre les mains. La solitude était un fardeau, surtout lorsqu'elle n'était comblée que de fantômes.


Bonjour à toutes et à tous !

Voici ma première fanfiction sur l'univers Star Wars, très fortement inspirée par The Last Jedi. C'est un Reylo, en plusieurs chapitres, que j'écris en allant, donc je ne peux vous dire à l'avance combien de temps cela durera. C'est la première fois, également, que mon pairing principal n'est pas un slash, une petite révolution, quoi.

Comme je suis novice dans le fandom, je tâtonne parfois avec certains éléments, donc n'hésitez pas à me corriger ou à m'apporter des détails et précisions, si besoin. N'hésitez pas, également à me donner vos impressions !

J'attends vos avis avec grande impatience ! A très vite pour la suite ! :)

Bonne soirée !

Votre serviteur,

AMAZINGmadness.