Note : Salut tout le monde ! Dernier chapitre de cette fic, qui, pour rappel, était une demande de mon amie et auteure Nalou, dont je vous recommande chaudement les écrits (Cherik Cherik Cherik. Je vous recommande le reste aussi hein, mais c'était pour rappeler qu'elle écrit aussi sur du Cherik). Pour la petite histoire, sur les prompts donnés, j'ai choisi celui qui me paraissait être jouable en un OS, MAIS JE SUIS FAIBLE FACE AU POUVOIR DU CHERIK ET JSUIS PAS VENUE ICI POUR SOUFFRIR OKAY ?! Bref. Sept chapitres donc.
À nouveau, merci à toutes celles et ceux qui ont reviewé et continuons d'écrire des commentaires pour encourager les auteur-es que nous aimons et soutenons. Un merci tout particulier aux guests : Cordelia et Titou douh !
Rating : le rating des chapitre est T, mais celui-ci est M.
Bêta : Maya Holmes, je te kiiiiiiiiiffe, reviens vite T_T !
Épilogue
Face à face
"Oui," murmure Charles.
Ce n'est pas un refus, ils se comprennent, Erik ne pensait pas que cela serait si facile. Il veut continuer à l'embrasser, mais il veut surtout que ça ne s'arrête jamais, alors, non, il se retient, encore un peu. Ils doivent se trouver un endroit où manger et ensuite… ensuite, ils verront. Erik tend sa main et le plus délicatement possible, entoure de ses doigts ceux gantés de Charles. Il vérifie d'un regard timide si ça lui va ; Charles recule presque automatiquement, mais Erik n'a pas le temps de trouver ça douloureux, puisqu'il voit que Charles a ôté son gant, pour reprendre sa main, peau contre peau. Elle est chaude tandis que celle d'Erik est froide, une énième preuve de ce qui les différencie. Ce n'est pas grave, à eux deux, le contact sera tiède.
Ils avancent sans hâte, à cause de la neige et grâce au plaisir d'être l'un avec l'autre. Ils s'arrêtent sur une avenue, devant un restaurant dont ils regardent à peine la carte avant d'entrer. La décoration Second Empire n'est pas du goût d'Erik, les murs sont trop rouges et les dorures trop présentes. On les place au fond d'une des salles à la hauteur sous plafond impressionnante. Leur table est ronde, les fauteuils confortables, la nappe blanche. Les jambes d'Erik, toujours aussi grandes, ne savent pas où se mettre. Lorsqu'elles s'étirent, elles touchent celles de Charles. Il ne les bouge pas.
Les joues de Charles sont encore un tout petit peu rouges à cause du changement de température. Il porte un de ces pulls dont Erik aimerait bien connaître la marque, parce que ça l'étonne qu'on produise encore des vêtements de ce goût-là. À moins que Charles ne s'habille en friperie, ce qui expliquerait cette mode d'une autre époque… Théorie bien sûr totalement impossible, connaissant Charles, sa maniaquerie des choses de qualité et son compte en banque.
Il n'a pas la même posture que lorsqu'ils se sont vus dans le café à Cambridge, le jour des adieux. Il semble débarrassé d'un poids et que la réalisation de cette libération l'épuise énormément. Quels que soient les sentiments qui traversent Charles Xavier, Erik ne peut pas s'empêcher de le trouver d'une beauté hors norme.
Le serveur les salue en allemand et leur tend les menus. Les yeux de Charles se fixent l'espace d'un instant sur ses lèvres et Erik comprend que Charles ne parle pas très bien la langue.
"Je vais traduire," explique-t-il en se penchant vers Charles, assis face à lui.
Ils n'utilisent qu'un seul menu, le doigt d'Erik suit les plats qu'il traduit en anglais et Charles l'aide à trouver les bons mots, quand Erik a un doute.
"Est-ce que tu manges de la viande ?" demande-t-il à Charles qui acquiesce. "Le serveur te recommande le veau."
Charles ne répond pas tout de suite et commande finalement le poisson. Erik, le seul plat végétarien. Une fois le serveur parti, Charles se penche à nouveau par-dessus la table et demande :
"Tu ne manges pas de viande ?"
"Non."
Erik les sert en eau. Il connaît la réaction habituelle des gens qui ne peuvent jamais s'empêcher de commenter la vie des autres. Lorsqu'on apprend qu'il est végétarien, on sourit, on lui dit que ce n'est pas bon pour la santé, on lui dit que c'est féminin. À Charles, il explique la vraie raison :
"Quand j'avais seize ans, on a visité le Denkmal für die ermordeten Juden Europas, le Mémorial de l'Holocauste, à Berlin, avec ma famille. Il y avait des photos des camps. Evidemment, j'ai toujours su ce qu'il s'est passé pendant la Shoah, mais de voir ces hommes, avec un numéro tatoué… je me rappellerai toujours, le mot abattoir est arrivé comme un flash. J'ai pensé à ces animaux qu'on tatoue, qu'on entasse et qu'on tue. Une fois que le parallèle était fait dans ma tête, je n'ai plus jamais mangé de viande."
Erik ne sait pas quelle est la réaction de Charles à ces mots, parce qu'il ne le regarde pas. Il ne regarde rien de précis, d'ailleurs. Ses couverts. Son verre d'eau.
"Est-ce que ta famille a été beaucoup touchée, pendant la guerre ?"
"Oui, du côté maternel comme paternel. Mes cousines étaient avec nous pendant la visite. Ce jour-là, on s'est demandé si on était nés il y a 80 ans, lesquels d'entre nous s'en seraient sortis."
Le verre d'eau n'a pas bougé, Erik le sait parce qu'il ne l'a pas quitté des yeux. Lorsqu'enfin il trouve la force de relever la tête pour regarder Charles, il se force à sourire, rendu amer par ses propres mots.
"Tu dois trouver ça bizarre."
"Non," répond Charles, la voix sûre et compatissante à la fois.
"Je n'ai jamais raconté ça avant toi. Les gens se foutent de moi quand je dis que je suis végétarien, bien que ça devienne la mode… Enfin, pas autant que la soudaine allergie de tout le monde au gluten…"
Charles sourit poliment. Erik sourit aussi. C'est incroyable leur capacité à se montrer leurs blessures les moins cicatrisées et à les panser mutuellement, sans le moindre effort. Il tend sa main et attrape à nouveau celle de Charles, c'est tellement nouveau, pourquoi s'en empêcherait-il ?
"Ça te va ?" demande-t-il en scrutant la réaction de Charles pour vérifier qu'il lui répond honnêtement.
Charles acquiesce. Il parle beaucoup moins maintenant qu'ils ne se disputent plus. C'est infiniment plus reposant, ça, Erik ne va pas dire le contraire, mais il aimerait savoir ce que Charles ressent.
"Ça va ?" la question n'est pas la même et Charles remarque la nuance, il se tend un peu sur sa chaise.
"Oui, c'est juste… je ne réalise pas encore, je crois."
"Qu'on ne se soit pas crié dessus depuis vingt minutes ?" plaisante Erik sans grand effort.
"Que tu veuilles me tenir la main."
"Tu dis ça, par rapport à Emma ? Je veux dire…" balbutie Erik, mal à l'aise d'utiliser des mots qui d'habitude ne le concernent pas.
"Pas seulement," répond Charles, assez compréhensif pour ne pas le forcer à finir sa phrase.
"Tu n'as jamais répondu à mon message d'ailleurs…"
"Celui où tu me demandais si j'étais gay ?"
Erik hoche la tête. Charles a un demi-sourire. Il observe leurs mains jointes, caresse furtivement du pouce la peau d'Erik qui a maintenant une température équivalente à la sienne, puis répond :
"Je sais, je suis désolé. Je ne savais pas quoi te répondre."
"J'imagine que tu es bi, alors ? Puisque tu as passé une nuit avec Amy et Rose, et que tu étais avec Scott…"
Les yeux de Charles s'ouvrent si grands qu'ils lui donnent un air de hibou.
"J'ai passé une nuit avec Amy et Rose, moi ? Oh ! Tu parles de la soirée d'anniversaire d'Emma ? Je n'ai pas passé la nuit avec elles, je les ai juste raccompagnées ! Elles sont… Enfin, je les ai juste raccompagnées," explique Charles, amusé du quiproquo qu'Erik ne découvre qu'à l'instant.
"Pendant tout ce temps j'ai cru que tu étais un playboy et en fait, tu es vraiment gay ?"
Charles grimace légèrement. Le serveur arrive, dépose les plats et repart. Ils le remarquent à peine.
"Je ne sais pas… Les femmes me plaisent, mais pas toutes et c'est pareil pour les hommes, sauf que je n'ai pas envie d'avoir de relation physique avec des femmes… Si tu as vraiment besoin d'une réponse, alors, peut-être que je peux dire que je me considère comme…"
"Non," l'interrompt Erik en resserrant sa main autour de celle de Charles. "Non, pardon, je n'ai pas pas besoin que tu mettes de mot dessus. Ça ne change rien. De mon côté, tu sais que j'ai eu des aventures avec des femmes. Seulement des femmes," insiste-t-il en regardant Charles droit dans les yeux.
Si on couche ensemble ce soir, ou plus tard, tu devras m'apprendre, essaye-t-il de lui faire comprendre silencieusement mais Charles ne soutient pas son regard. Il attrape sa fourchette et commence à manger après avoir lâché la main d'Erik qui en fait de même.
"Tu as cru que j'allais me foutre de toi, si tu me disais que tu étais gay ?"
"Un peu. La question est arrivée tellement abruptement, je l'ai perçue soit comme un intérêt de ta part, soit comme une espèce de… peur. Et la seconde option m'a paru plus probable."
"Charles," appelle-t-il, la voix honteuse. "Je suis désolé, je suis agressif sans m'en rendre compte, parfois."
"Je sais."
Il sourit doucement, Erik trouve que c'est la plus belle des réponses. Ils continuent de manger et s'empêchent de parler, sinon, ils ne finiront jamais leur assiette.
À la fin du repas, ils partagent l'addition d'un commun accord. Erik parle quelques minutes avec le serveur, bien qu'il semble extrêmement pressé de sortir du restaurant. Une fois dehors, Charles comprend pourquoi. Erik entoure un de ses grands bras autour de ses épaules et le serre contre lui, comme si le pauvre homme était en manque. Charles ne peut pas se moquer de lui, il ressent la même chose. Il se presse contre son corps, les yeux si proches de son écharpe qui, il n'arrive pas à se retirer cette pensée de la tête, a la même nuance de bleu.
"Tu restes combien de temps à Vienne ?"
"Encore quatre jours. Et toi ?"
"Deux semaines."
C'est presque imperceptible la façon dont ils s'accrochent un peu plus à l'autre. Ils marchent sans but précis pendant quelques minutes, avant qu'Erik ne s'arrête avec l'air d'un homme qui réalise qu'il a oublié quelque chose de primordial. Il prend Charles par la main et l'entraîne à l'intérieur de la pharmacie devant laquelle il s'est stoppé net. Charles est prêt à lui demander ce qu'ils font là mais il a bien vite la réponse : Erik s'est posté devant les quelques packs de préservatifs. Il ne semble absolument pas gêné de la chose tandis que Charles, lui, ne sait pas où se mettre. Il faudrait déjà qu'il respire pour ne pas que le rouge lui envahisse encore plus les joues et qu'il réalise qu'il n'y a aucune honte à acheter des capotes, quand on a vingt-quatre ans. C'est néanmoins plus facile à dire qu'à faire, alors il se concentre sur l'attitude d'Erik, bien loin d'être ostentatoire, mais simplement à l'aise avec ce qu'il est en train de faire. Il tourne d'ailleurs un des packagings colorés vers Charles pour lui demander son avis et Charles, mature ou presque, acquiesce rapidement pour que l'histoire se règle en quelques secondes. Il ne regarde personne dans les yeux, laisse Erik payer et retrouve un port de tête normal une fois qu'ils sont revenus sur le trottoir. Erik n'a rien remarqué, Charles en est sûr. Ça lui permet de réfléchir à son attitude ridicule pour un sujet qui ne l'est pas : Erik a eu la présence d'esprit de prévoir. Charles n'est pas de ceux-là qui minimisent les risques à avoir des relations non protégées et pourtant, il n'y avait même pas pensé. Il se sent assez minable.
"Où est-ce que tu dors ?" se renseigne Erik.
"À l'Altstadt Hôtel."
Respire, Charles, et prononce les mots qui bouillonnent en toi depuis vos retrouvailles.
"Est-ce que tu veux venir ?"
"Oui," murmure Erik après quelques secondes de silence nécessaire.
Avec la neige et le verglas, ça devient plus compliqué de marcher en se tenant collés l'un à l'autre. Ils recommencent donc à se tenir par la main, c'est tout aussi agréable. Lorsqu'ils arrivent à l'hôtel, ils ont le bout de leur nez rouge, quelques flocons dans les cheveux. Charles a envie de passer sa main dans ceux courts et cuivrés d'Erik. Lorsqu'ils seront dans sa chambre, il le fera.
Il récupère sa clé, remercie l'hôtesse charmante qui lui demande si son séjour se passe bien puis guide Erik jusqu'à l'ascenseur, à travers les couloirs, pour atteindre sa porte. Il referme derrière eux et laisse Erik découvrir la chambre, les murs d'un vert pâle, les épais rideaux aux motifs floraux, d'un vert sapin, les meubles imposants et le lit aux draps blancs, un peu plus loin. Erik ôte son grand manteau, l'accroche sur la patère près de la porte et Charles ne tient plus. Il lève sa main, la passe dans les cheveux courts d'Erik et retire la neige qui commençait à fondre. Erik le laisse faire, souriant, confiant. Une fois débarrassé de son écharpe, il s'approche d'un pas et se penche pour embrasser Charles sur les lèvres, chaudement, mais sans la langue. Charles sent son coeur tourner sur lui-même. Le baiser fini, il prend Erik par la main et le conduit jusqu'au petit salon où ils s'installent sur le canapé.
"Je ne veux pas qu'on en parle et en même temps, je veux que le sujet soit clos. C'est toi qui a rompu avec Scott ?" demande Erik, une petite point de colère au fond de ses yeux d'acier.
"C'était d'un commun accord."
"Combien de temps êtes-vous restés ensemble ?"
"Trois mois, plus ou moins…"
"Est-ce que tu l'as aimé ?"
"Non," répond Charles en fronçant des sourcils, amusé par cette idée incongrue.
"Est-ce que tu as déjà été amoureux ?"
Bien sûr, veut répondre Charles, parce qu'à son âge on a forcément aimé, pas vrai ? Charles se pose lui-même la question mais la réponse est confuse. Entre ce qu'on est censé vivre dans sa vie, ce qu'on croit vivre et ce qu'on vit vraiment, il y a parfois un monde. Le monde de Charles, lui, n'a apparemment jamais connu l'amour.
"Je ne sais pas…"
"Tu le saurais, si c'était le cas."
Habituellement, Charles n'est pas un grand adepte des phrases péremptoires mais Erik ne semble pas l'avoir dite par supériorité déplacée.
"Tu étais amoureux d'Emma ?"
"Oui," avoue-t-il sans fard.
Ils n'enchaînent pas tout de suite, le silence est un peu gênant. Charles réfléchit encore à la question d'Erik et a la confirmation qu'il n'a jamais dit Je t'aime à quelqu'un et qu'il l'a très rarement pensé. Et plus il fouille dans sa mémoire, plus il réalise que c'est aux côtés du nom d'Erik que ces quelques mots ont germé, sans être encore assez mûrs pour être sortis au grand jour.
"Est-ce que tu pensais réellement à moi ?" demande Erik.
"Tous les jours," confirme Charles. "Et tu m'as manqué tous les jours."
Comme une nécessité, c'est Charles qui se penche cette fois et embrasse Erik. Il glisse à nouveau ses mains dans ses cheveux, sur ses joues, sur sa nuque, comme s'il ne pouvait pas faire confiance à ses lèvres et qu'il avait besoin de ses doigts et de sa paume pour s'accrocher à une vérité qui semble trop belle pour ne pas lui échapper. Erik se plie à son rythme, à son envie. Il gémit à peine et le son est charmant. Charles n'a aucune idée de ce qu'il va se passer ce soir, mais il est prêt. Erik semble le comprendre puisqu'il se lève, prend Charles par les mains et le mène jusqu'au lit où il le fait s'asseoir. Il se met à genoux devant lui, touche le pull de Charles et demande :
"Je peux ?"
Il y a trop de lumière pour que Charles accepte. C'est terriblement intimidant de se déshabiller devant quelqu'un et pour cela il faut blâmer la publicité et les films, qui produisent depuis des dizaines d'années des images aseptisées de corps blancs, mais pas trop, fins mais pas trop, musclés mais pas trop, avec des poils, mais pas trop. Il se lève rapidement pour éteindre les plafonniers et ne laisser que les deux lampes de chevet de part et d'autre du lit. Elles sont plus fortes qu'il ne l'imaginait, ce n'est pas grave, il prend sur lui, sinon ils se retrouveront totalement dans le noir ce qui ne serait pas pratique.
Erik ne laisse absolument rien paraître sur ce qu'il en pense. Une fois que Charles a repris place face à lui, il se met à le déshabiller comme prévu. D'abord son pull, ça provoque de l'électricité statique qui fait dresser ses cheveux. Il passe ensuite aux chaussures de Charles, ce que lui ne trouve pas logique et en même temps, il en est reconnaissant, car il est plus facile de dévoiler des chaussettes plutôt que son torse (trop blanc, pas assez fin, pas assez musclé et avec des poils). Sauf que ça ne fait gagner que quelques secondes, voilà déjà que les mains d'Erik se posent sur les boutons de la chemise grise et les ôte un à un.
"Pardon, j'ai les mains froides," s'excuse Erik quand son épiderme frôle celui de Charles.
"Non, c'est bon," ment-il, puisque ça n'a pas beaucoup d'importance.
Ils rient tout bas, un peu mal à l'aise. Une fois la chemise entièrement déboutonnée, Erik joint ses mains à sa bouche et souffle pour les réchauffer. Il les frotte rapidement l'une contre l'autre puis revient ôter le tissu de trop. Charles rentre son ventre par réflexe. Erik pose la chemise sur le lit à côté d'eux, puis revient passer sa main sur le torse de Charles, sur son pectoral droit. Le souffle de Charles se fait plus lent, plus profond. C'est assez perturbant d'être torse nu, tout en vérité et en défaut, face à un homme qui symbolise l'idée que vous vous faites de la perfection.
"Ça va ?" demande Erik avec un sourire.
"Oui…"
"À quoi tu penses ?"
À une phrase qui a renvoyé à Charles tous les doutes qui ont pu le concerner un jour. Mais il ne l'avoue pas encore et secoue la tête avec un de ces sourires qui veut dire À rien d'important.
"Dis-moi, Charles," l'invite Erik, avec beaucoup de tendresse, toujours à genoux face à lui.
Charles maintient son rictus avec l'intime conviction que cela peut servir de bouclier. Il laisse ses mains sur ses propres cuisses, fermées en deux poings qu'il ne serre pas. Sa voix est faible quand il explique enfin :
"Je pense à un message que tu as écrit sur un des post-it, au tout début. Où tu parlais de Raven. Où tu nous comparais."
De toutes les réactions auxquelles Charles s'attendait, celle d'Erik est entièrement inédite. Pas de rire, pas de haussement d'épaule. Ses sourcils se froncent. Il ne sait pas de quoi Charles parle. Il a oublié.
"Je pense que les mots étaient : En parlant de perfection, ta soeur est magnifique.
Ça doit être bizarre, pour tes parents, que l'enfant qu'ils ont adopté soit plus beau que leur enfant naturel."
Il a dit Je pense, mais il aurait pu dire Je sais, car on n'oublie pas ces choses-là, on ne peut pas les inventer non plus. Erik arrête de toucher Charles, passe une main devant sa bouche, pince sa lèvre (comme une punition, peut-être, du moins, Charles ose espérer que ce soit un peu le cas), puis frotte ses paumes sur ses cuisses. Il respire fort par le nez, secoue la tête et semble vouloir maîtriser une colère qui s'éveille en lui.
"Je suis désolé, Charles. Je suis sincèrement désolé. Ça n'a rien à voir, Raven et toi. Elle est belle, oui, mais elle n'est pas… toi."
"Ne t'en fais pas, Erik, je sais très bien qu'elle est plus belle que moi," le rassure Charles, habitué et peu convaincu par la défense d'Erik.
"Non," grogne-t-il en retour.
Il se lève et prend le visage de Charles entre ses mains. Il ne cligne pas des yeux alors qu'il le scrute, avec l'attention d'un archéologue qui voit se dévoiler devant lui un trésor qu'il pensait trouver des centaines de kilomètres plus loin.
"C'est pour ça que tu as éteint la lumière ?"
C'est évident, non ? Ils ne se sont jamais déshabillés face à l'autre avant, il faudrait avoir un égo assez développé pour pouvoir se mettre à nu avec audace. Et puis, Charles se connaît, ce n'est pas parce qu'il ne s'estime pas faire partie des canons de beauté qu'il ne s'observe pas souvent dans la glace lorsqu'il sort de la douche.
"Ok," conclut Erik, lorsqu'il comprend que le silence de Charles vaut pour un oui. "Dis-moi ce que tu n'aimes pas chez toi."
"Pardon ? Est-ce que tu ne devrais pas plutôt me dire ce que toi tu aimes chez moi ?" demande Charles avec un rire léger.
"Allez, dis-moi."
Charles souffle tout bas. Il baisse la tête, sa nuque le tire à force de regarder Erik au-dessus de lui. Il commence son inspection par le visage, en toute logique.
"Mon nez."
Il sent une pression sur ses épaules et agit avant même de comprendre pleinement ce qu'il se passe. Erik le force à s'allonger sur le lit. Il laisse ses bras le long de son corps lorsqu'Erik se met à quatre pattes au-dessus de lui pour embrasser le bout de son nez, après l'avoir observé. Charles cligne des yeux alors que son coeur accélère sa course habituelle.
"Mes taches de rousseur."
"Où ?" demande Erik, confus.
"Là," explique-t-il en touchant légèrement ses épaules.
Erik se penche pour mieux voir et Charles, lui, discerne un demi-sourire sur ce beau visage. Les lèvres d'Erik embrassent son épaule droite de trois baisers longs.
"Mon ventre," murmure Charles, bien conscient qu'ainsi, Erik va se rapprocher de son entrejambe.
Et c'est précisément ce qu'il se passe. Il ondule le long de son corps, s'allonge presque sur ses jambes alors qu'il s'abaisse et embrasse chaudement à côté de son nombril. Charles rentre son ventre et tente de bouger le moins possible alors que tous ses sens le poussent à prendre une grande inspiration.
"Mes cuisses," conclue-t-il, à bout de souffle.
Erik se redresse. Ses mains déboutonnent le pantalon de Charles et le tire hors de ses jambes, avec ses chaussettes, méticuleux. Il revient à ses côtés et passe ses deux mains sur ses cuisses, sans aucune timidité. On dirait qu'il essaye de se convaincre lui-même que c'est réel. Ils se regardent et Charles penche la tête sur le côté. Erik comprend qu'il a fini.
"Bien," dit-il avant de revenir à quatre pattes au-dessus de lui, pour que leur visage soit l'un en face de l'autre. "Le compte-rendu de mon inspection est le suivant : tu es délicieux, Charles."
Il ne sourit pas, non, c'est avec un sérieux implacable qu'il a sorti ce mot et Charles réagit de la seule manière possible : il explose d'un rire franc.
"Quoi ?" demande Erik, piqué au vif.
"C'est juste que… c'est la première fois qu'on me dit ça !" arrive à expliquer Charles en gloussant.
"J'espère bien," réplique Erik avant de l'embrasser de force, jusqu'à l'empêcher de continuer de rire.
Charles le laisse faire et se contient, jusqu'à ce que le mot Délicieux ne l'amuse plus et lui laisse au contraire un sentiment très agréable, stable. Erik l'a dit d'une manière si sincère, sans chercher à utiliser des mots ou une expression commune lorsqu'on juge la beauté. À bien y réfléchir, tout le monde emploie le mot Magnifique pour qualifier Raven. C'est vrai, mais ce n'est pas totalement vrai. En outre, Charles se dit que les gens ne font que commenter son physique (irréprochable) sans même connaître sa personnalité (unique) et sa force (exemplaire). Ce soir, Erik a utilisé le mot Délicieux, après avoir laissé ses lèvres embrasser la peau de Charles. Alors, non ce n'est pas un mot commun, mais, et Erik a raison là-dessus, l'important est qu'on ne lui avait jamais dit avant. Et quelle première fois.
Ils gardent leurs yeux fermés durant le baiser. Les mains de Charles sont partout sur son torse, dans son dos. Il appuie de plus en plus, jusqu'à ce qu'il se mette à lui retirer son pull puis son tee-shirt. Une fois torse nu, Erik remarque les yeux curieux de Charles. Il décide d'inverser la situation en s'allongeant et en l'entrainant par-dessus lui. Ils sourient sous l'effort avant que Charles n'ose s'asseoir à califourchon sur lui pour avoir la distance nécessaire pour découvrir le corps d'Erik. Ça le gène, il a peur que Charles sente son érection et le prenne comme une pression, alors il bouge un peu pour que le contact soit moins flagrant. Charles ne semble même pas s'en rendre compte. Ses yeux incroyablement bleus examinent le torse d'Erik, le bout de ses doigts glissant à peine sur les clavicules, ses côtes visibles, avant de faire des petits cercles près de son nombril, là où Erik l'a embrassé. Ses mains à lui sont posées sur les cuisses de Charles, que ses pouces caressent inconsciemment.
"Charles, je te l'ai dit tout à l'heure… Je n'ai jamais… Avec un homme, je veux dire," commence Erik, en réalisant avec stupeur qu'il a vraiment du mal à parler de sexe.
Charles arrête sa main et relève simplement les yeux vers ceux d'Erik.
"Comment ça ?"
"Je n'ai jamais couché avec un homme. Je préfère que tu le saches," explique-t-il, un peu gêné.
"Vraiment jamais ?"
"C'est un problème ?" grimace-t-il.
Il ne s'attendait pas à ce que Charles le lui reproche, ça l'énerve un tout petit peu…
"Non ! Non c'est juste que…" bredouille Charles en baissant les yeux, soudain très concentré à dessiner le contour d'une côte d'Erik qui attend une explication… qui arrive toute seule.
"Toi non plus ?"
Charles se recule, mais Erik ne le laissera pas s'enfuir - pour aller où, d'ailleurs, se cacher sous le lit ? Dans la salle de bain ? Sortir en boxer dans le couloir ? Ça serait grotesque. Il l'attrape par le poignet et le force à rester assis sur le lit, à côté de lui.
"Je sais, je sais c'est ridicule, j'ai bientôt vingt-quatre ans et…"
"Charles…" appelle Erik pour le calmer et surtout pour l'empêcher de dire d'autres conneries. "Arrête d'être aussi dur avec toi-même. Pourquoi tu fais ça ?"
Charles tourne la tête vers lui pour affronter son regard et pince presque imperceptiblement ses lèvres pendant quelques secondes avant de répondre dans un souffle :
"Je n'en sais rien."
Peut-être qu'Erik a la réponse, finalement. Charles est tellement brillant dans tout : les études, les relations sociales, il vient d'une famille très riche et a un avenir absolument radieux qui s'étale devant lui avec tapis rouge et tutti quanti. Ça doit être déstabilisant d'être novice dans quelque chose, il ne doit plus savoir que c'est normal de, eh bien, ne pas tout savoir. Et ça doit être épuisant de toujours se sentir obligé d'être le meilleur dans tout. Ça, Charles ne lui a pas dit, mais Erik l'imagine très bien. Ils en parleront. Plus tard.
"C'est pas grave. On va y aller à notre rythme. Ok ?"
"Ok," répond Charles avec un sourire.
Ils se rallongent en même temps et se glissent sous la couette après qu'Erik ait retiré son pantalon. Charles entraperçoit ses jambes, ce qui suffit à lui donner l'impression qu'elles sont immenses. Erik est plus fin qu'il ne l'imaginait, c'est un peu intimidant. Lorsqu'ils se collent l'un à l'autre, certaines parties de leur corps sont fraiches, d'autres très chaudes, l'effet est étrange. Charles remarque tout ça, car tout est intense ce soir, tout comme il ne peut pas passer à côté du fait que le cou d'Erik rougit au même moment où ses pupilles se dilatent, ni la façon qu'il a de garder encore sa bouche ouverte après leurs baisers.
Il laisse ses mains caresser le dos et les bras d'Erik, parfois en y plaquant toute sa paume, parfois en laissant un doigt dessiner le contour d'un muscle. Il leur faut plusieurs minutes à s'embrasser avant d'oser rapprocher leurs bassins et de faire toucher leurs membres, malgré tout pudiquement cachés derrière une dernière barrière de tissu. Charles a déjà touché Scott, plusieurs fois, le contact n'est pas entièrement nouveau, néanmoins il en reste plus fort. C'est parce qu'il s'agit d'Erik et quand il s'agit d'Erik, tout devient beaucoup plus que la nature l'avait initialement conçu.
Charles sourit à sa propre pensée. Il s'excuse mentalement auprès de ce qui est responsable de leur existence à tous les deux, et à tout le reste, mais Erik hyperbolise tout ce qui est déjà beau de base et euphémise tout ce qui n'a pas lieu d'être. C'est comme si Erik n'avait aucun maître, aucune obligation à laquelle se plier et Charles trouve ça fou. Il descend ses mains petit à petit afin que ses doigts touchent enfin le boxer pour se glisser en-dessous. L'élastique presse sa peau sensible et l'oblige un peu plus à toucher les fesses d'Erik, chaudes, indéniablement.
"Je peux… ?" halète-t-il et Erik gémit ou grogne, le son n'est pas clair.
"Oui, ne me demande pas l'autorisation pour tout, Charles…"
"Je veux faire ça bien."
"Tu réfléchis trop."
"Mais…"
Il n'a pas le temps de finir sa phrase que déjà Erik l'embrasse tout en indécence et en langue. C'est manifestement un baiser qu'il étire dans le temps pour empêcher Charles de parler, chose qu'il accepte sans trop de difficultés. Il pose ses deux mains sur les fesses d'Erik et le tient pour le faire onduler contre lui, deux minutes à peine, avant qu'ils ne retirent le dernier vêtement. Le premier contact, peau contre peau, leur coupe la respiration une seconde.
Erik ne bouge plus, les lèvres entrouvertes, le visage légèrement baissé, bien qu'ils ne puissent pas voir ce qu'il se passe sous l'épaisse couverture. C'est la première fois que ça lui arrive, se rappelle Charles, qui imagine très bien combien lui serait confus s'il devait se retrouver nu contre une femme. Il patiente, en profite pour reprendre son souffle et caresse du bout des doigts le dos d'Erik, pour lui laisser le temps de s'habituer.
"J'ai oublié le lubrifiant dans mon manteau," remarque Erik de sa voix rauque.
"Ah, tu veux… ? Ce soir ?" demande, approximativement, Charles.
"Non mais ça sera plus pratique pour se caresser Tu ne crois pas ?"
"Si, oui, bien sûr."
Il arrête ses effleurements et se recule légèrement pour laisser Erik partir chercher le lubrifiant dans l'entrée, sauf qu'Erik ne bouge pas.
"Qu'est-ce qu'il se passe ?" s'inquiète Charles.
"C'est à moi d'aller le chercher ?"
"Il fait froid en dehors du lit…" explique Charles, assez flemmard, il faut bien l'avouer.
"J'ai une peau moi aussi, je n'ai pas plus chaud que toi," grince Erik, pas plus courageux.
Après une grande inspiration, Charles bondit hors du lit et cours, nu, jusqu'au manteau accroché à la patère de l'entrée.
"Quelle poche ?"
"Je ne sais pas, il n'y en a pas cinquante de toute façon."
"Je ne le trouve pas, tu es sûr que tu en as acheté ?"
"Oui !"
Charles peste tout bas, tremblant exagérément alors que ses mains fouillent sans timidité jusqu'à qu'il sente quelque chose, le sorte et découvre que c'est son propre téléphone.
"Je fouillais mon manteau…"
Il entend le rire d'Erik résonner et aimerait bien le voir à ce moment précis, mais avec l'angle du couloir, ce n'est pas possible. Par réflexe (idiot et totalement ancré en lui), il vérifie s'il a reçu un message et c'est le cas, de Raven.
On peut s'appeler ?
Est-ce qu'elle a un problème ? Elle lui a envoyé vers vingt-deux heures, c'est ce soir qu'elle fêtait l'anniversaire de Hank en l'emmenant au restaurant. C'est sa petite soeur, il ne peut pas la laisser comme ça… Et en même temps, s'il s'était passé quelque chose de grave, elle l'aurait directement appelé ou lui aurait écrit dans le SMS. Alors, non, Charles ne doit pas être le grand frère à ce moment précis et il doit simplement être lui-même, le jeune homme attendu par son ami (il choisit ce mot-là pour l'instant) dans un lit chaud.
Il range son téléphone, fouille cette fois le bon manteau et tombe très vite sur le lubrifiant et les préservatifs. Il prend l'ensemble, pose la boîte bleue sur sa table de chevet et se glisse à nouveau dans le lit.
"Désolé, je dois être gelé…" commence-t-il à s'excuser, ce qui ne sert à rien puisqu'Erik grimpe sur lui, prend le lubrifiant, arrache le plastique qui s'accroche encore un peu à sa peau à cause de l'électricité statique, puis l'ouvre pour s'en verser dans la paume, avant de prendre leur membre en main et d'entamer un long mouvement. "Ok, ok…" souffle tout bas Charles, stupéfait et à la fois extrêmement excité par ce qui est en train de se passer.
Il regarde entre leur corps car Erik se tient de son bras libre pour voir ce qu'il fait lui aussi. Comme il est plus grand, il est un peu courbé, la position lui donne un côté vulnérable que Charles ne loupe pas. Il met ses mains sur son bassin et redresse à peine la tête pour embrasser son menton. Erik ne parle plus maintenant, il semble très concentré, comme s'il avait une mission à remplir. Charles le laisse faire, parce qu'il se rappelle de la première fois qu'il a touché et a été touché par un homme, il se souvient de l'envie si forte de vouloir tout tenter et en même temps la sensation abyssale que plus rien ne sera comme avant, une fois qu'il aura passé le cap. Et puis, plus le temps avance et moins il pense : il ressent. La main d'Erik qui les tient, l'un contre l'autre, qui va et vient, qui accélère parfois avant de reprendre un rythme très lent. Et Charles sourit malgré lui lorsqu'Erik gémit enfin.
Il n'y a aucun point de comparaison possible avec ce qu'il est en train de vivre en ce moment précis. Comment les sensations peuvent paraître à la fois naturelles et surréalistes, il n'en a aucune idée. Erik n'aurait pas pu prendre directement en main le sexe de Charles, il a fallu qu'il tienne le sien aussi, pour se raccrocher (plus ou moins littéralement) à quelque chose qu'il connait déjà. Ça ne l'aide pas à réaliser. Parfois, la sensation de la peau contre la peau, des doigts qui glissent grâce au lubrifiant, tout ça se confond, si bien qu'il ne distingue plus son propre corps de celui de Charles. L'espace de quelques secondes. Mais quand l'amour s'en mêle, les secondes s'apparentent à des vies entières. Oui, il pense à l'amour à ce moment précis parce que c'est ce qu'il y en a entre eux. Ce n'est peut-être pas celui qui s'écrit avec un grand A, il est trop tôt pour le dire.
Quoi que.
Erik ouvre les yeux et fait face à ceux qui le contemplent déjà. Charles parait si paisible, ça doit être parce qu'il a déjà fait ça et Erik le jalouse un peu avant de réaliser ce qui est en train de se passer : c'est lui, maintenant, qui n'a plus confiance en lui et c'est Charles qui le rassure. Il lève d'ailleurs une main et vient caresser la joue d'Erik et son menton. Il sourit, tendrement et Erik comprend l'invitation à baisser le visage et à se laisser embrasser. De sa main libre, Charles rejoint celle sur leur sexe et entame un nouveau rythme, une autre façon de bouger son poignet et de les caresser. Erik ne met plus de force dans ses mouvements, il se laisse guider. C'est plus agréable qu'il ne le pensait et une partie de lui se demande si c'est parce que c'est sa première nuit avec un homme, ou si c'est le rythme qui s'installe entre eux. Ça aussi, c'est trop tôt pour le dire. Erik n'imagine pas leur relation s'arrêter de si tôt, de toute façon. Ils auront les années à venir pour s'équilibrer.
Parce que la main de Charles masse ses fesses, Erik comprend qu'il peut bouger sur eux. Ses mouvements de bassin sont encore timides, ce n'est pas parce que c'est bon qu'il se sent encore totalement désinhibé. À certains moments, sans raison, il prend totalement conscience qu'il est avec un homme, dans un lit, à quelques instants de jouir ; ça lui fait ouvrir les yeux et regarder autour d'eux à la recherche d'une porte, une fenêtre, n'importe quel détail architectural qui lui confirme qu'il peut sortir d'ici.
Bien sûr qu'il le peut. Il ne le fait pas. Ce n'est pas parce que Charles le retient, c'est parce qu'Erik n'en a pas réellement envie. D'ailleurs, Charles pourrait encore plus le tenir. Oui, Erik aimerait ça. Il le regarde, recule sa main et très lentement s'allonge à nouveau à ses côtés. Charles comprend la demande muette et vient contre lui. Il prend le membre d'Erik en main et reprend ses caresses. Ils s'embrassent à peine alors qu'ils se regardent, sans oser cligner des yeux. Charles est bien plus beau que d'habitude et Erik pense que ce n'est pas qu'une question d'hormones. Il a l'air si fort, si tranquille comme s'il était parfaitement conscient que tout ce qu'il s'est passé entre eux les a amenés à ce point précis. C'est peut-être le cas. Erik ne cherche plus la logique dans sa relation avec Charles Xavier depuis bien longtemps.
Il garde ses yeux ouverts lorsqu'il pose à son tour sa main sur le sexe de Charles, sans le sien comme excuse. C'est infiniment plus étrange, il estime mettre assez longtemps avant d'être totalement à l'aise avec le fait de toucher un autre homme. Car il a peur de mal faire ou pire, de faire mal, bien que Charles n'en donne pas l'impression. Il continue de le regarder de ces incroyables yeux bleus, de l'embrasser et même, de gémir.
C'est lui qui accélère ses mouvements et Erik l'imite. Les muscles de Charles se tendent, il le sent contre lui. Il a l'impression qu'il ne peut pas jouir tout de suite, ce qui n'est pas une raison pour ne pas faire jouir Charles. Il fixe son visage, sa bouche dont dépassent des dents qui pressent une lèvre déjà rouge. Charles ferme les yeux, tente de garder sa tête droite mais il la repose souvent contre l'épaule d'Erik qui en profite pour embrasser sa tempe, lorsque ça arrive. Et puis sans un souffle plus fort qu'un autre, Charles arrête sa main qui le caresse et Erik le sent venir contre sa cuisse. Il ne quitte pas immédiatement son membre, il ne sait pas si Charles le préférerait ou non, alors il tente de le lire sur son visage, sauf qu'avec l'angle c'est impossible. Quand il retire enfin sa main pour se mettre à se toucher lui-même, il gémit tout bas et embrasse le front de Charles, comme une demande de lui présenter ses lèvres. Par un miracle somme toute post-orgasmique, son amant comprend puisqu'il relève la tête et sans ouvrir les yeux, donne à Erik le baiser qu'il attendait. Celui qui veut dire Merci et À toi, tout à la fois. Erik l'embrasse plus fort encore, approfondit le baiser et gémit contre ses lèvres alors qu'il jouit à son tour dans sa main, à peine entourée par celle de Charles.
Ils ouvrent les yeux et se regardent, le souffle court et c'est Charles qui a la première réaction, la plus belle, parce qu'il sourit. Et Erik sourit aussi.
Il est compliqué de réaliser qu'on est réveillé. Passer d'un état d'inconscience à un état de pleine (globalement) conscience, a toujours fasciné Charles. Sans raison, il ressent petit à petit la douceur des draps sur sa peau, il ouvre les yeux et reconnaît la chambre de l'hôtel et sans avoir besoin de tourner la tête, il sent, à sa droite, Erik, endormi. Charles tend la main vers sa table de chevet pour attraper son téléphone et fronce les sourcils quand ses doigts tapent contre une boîte en carton. Il tourne la tête et voit le paquet de préservatifs, encore fermé. Il se tourne infiniment lentement et sort du lit, bien décidé à aller chercher son téléphone sans réveiller Erik. Il fait l'aller-retour rapidement, se glisse à nouveau sur la couverture et vérifie qu'Erik lui tourne effectivement le dos, pour ne pas que la lumière de l'écran le gêne. Même si les rideaux sont fermés, ils ne sont pas dans l'obscurité profonde. Charles sent, sans pouvoir expliquer pourquoi, que la neige a envahi la ville.
Bonjour Raven, désolé de ne pas t'avoir répondu hier. Comment vas-tu ? lui répond-il enfin.
Ça va
Hier au resto Hank m'a dit qu'il était amoureux de moi
Pas qu'il voulait sortir avec moi
Direct amoureux de moi
Charles sourit si fort que ça réveille tout son visage encore un peu endormi.
Comment as-tu réagi ?
Je lui ai demandé du temps
On doit se voir aujourd'hui
D'accord.
Quelques secondes passent avant que Raven ne rajoute :
Merci de ne pas t'en être mêlé Charles
Et presque une minute les sépare de sa conclusion :
Je suis tellement heureuse qu'il me l'ait enfin dit
Charles sourit encore plus, alors qu'il pensait que c'était impossible. Il pose le téléphone sur le meuble à sa gauche et sent qu'Erik se retourne au même instant. Ils se regardent et sourient doucement.
"Je t'ai réveillé ?"
Erik secoue la tête avant de venir se serrer contre lui, sa bouche déjà occupée à poser quelques baisers sur la constellation de taches de rousseur de son épaule.
"Je pense qu'il a neigé toute la nuit et que nous allons devoir passer la journée à l'hôtel."
"Tu veux aller voir ?" demande Erik, d'une voix encore rocailleuse.
Charles acquiesce et se lève. Il ouvre les premiers rideaux épais, laisse sur place la deuxième rangée de rideaux blancs puis passe à l'autre fenêtre où cette fois, il glisse sa main à travers les rideaux à peine opaques pour vérifier le paysage. Tout est si blanc qu'on dirait que plus jamais la nuit ne pourra toucher Vienne. On ne discerne presque plus la différence entre la route, la rue et le petit parc face à l'hôtel. Le calme est sidérant.
Charles revient s'allonger dans le lit et cette fois Erik le prend contre lui.
"Alors ?"
"Je te confirme qu'il a continué de neiger. Je ne pourrai jamais me rendre à mes conférences."
"Je ne pourrai jamais aller à mon stage non plus, alors."
"Nous passerons donc la journée ici," dit Charles sur un ton entre la question et la confirmation.
"Ça me parait inévitable," commente Erik, faussement déçu.
Ils s'embrassent doucement avant que Charles ne soit repris par cette détestable habitude qui est de trop réfléchir.
"Et qu'est-ce qu'il se passera, quand je rentrerai à Cambridge et toi à Berlin ?"
Erik réfléchit, ses doigts passant entre les boucles de Charles, indomptées comme chaque matin.
"On continuera à s'envoyer des emails et à jouer aux Échecs. Et dans quatre mois, tu viendras me chercher à l'aéroport et quand je te verrai m'attendre, avec un panneau que tu auras fait avec mon prénom (avec un coeur sur le i), je ferai mine de ne pas te reconnaître, avant de venir t'embrasser."
"Devant tout le monde ?" sourit Charles, taquin.
"Devant les quelques personnes qui sortiront de l'avion en même temps que moi, oui."
"Et devant les personnes qui seront venues les chercher."
"Non, il n'y aura que toi qui aura fait l'effort de t'être déplacé."
"Il n'y a aucun doute possible sur le fait que je sois quelqu'un d'exceptionnel, alors, c'est ce que tu es en train de me dire ?" plaisante Charles avec un énorme sourire aux lèvres.
"Aucun," répond Erik avant de l'embrasser.