27 décembre 2019 : Envie de poster un petit bonus entre les fêtes. Celui-ci se passe autour du début du chapitre 18 – allers-retours en train de Draco pour aller voir Harry en novembre/décembre –, c'est tout court, et ce n'est pas moi qui l'ai écrit ^^

Soyez bienveillant-e-s dans vos retours : c'est la première fanfic de mon homme, Monsieur Lockless. On vous met donc un avertissement pour style littéraire et emploi du subjonctif.

Meilleurs voeux d'avance et bonne lecture !


BO : I will follow – U2


NOVEMBRE


Dès la veille au soir, il avait choisi la chanson à mettre sur ses oreilles pour faire le trajet de chez lui jusqu'au train qui le conduirait à Harry. Il avait choisi méticuleusement, mais aussi avec le panache des décisions spontanées, une chanson qu'il aimait, bien sûr, mais qui n'étant attachée à aucun autre souvenir, serait désormais tout entière mêlée à l'excitation et au bonheur de ce voyage. À tort, peut-être, il craignait d'une superposition d'atmosphères un affaiblissement du plaisir. Tel titre un peu niais, dont il aurait d'ailleurs eu un peu honte devant Harry, lui avait traversé l'esprit comme à chaque fois qu'il cherchait un accompagnement musical, mais il avait été disqualifié d'office, trop lié à un morceau d'après-midi d'hiver où le soleil et la neige rivalisaient d'éclat derrière sa fenêtre (était-il au collège ou au lycée ?). Il fallait non seulement que la chanson soit un peu inattendue, mais qu'il puisse, un jour ou l'autre, peut-être assez vite, la faire écouter à Harry en lui racontant son voyage, et ce deuxième critère rendait le choix plus délicat. Comment peut-on porter un T-shirt de métal après dix-sept ans ? Harry avait l'air d'avoir des goûts plus intelligents que les siens, et en parlait d'un air de tranquille certitude ; mais Draco n'avait rien dans son I-pod qui s'approchât d'un rock un peu méchant, ni même d'une expérience musicale plus audacieuse qu'un carré bien propret couplet-refrain.

Ça… ça, ça ira… un groupe à ses débuts, l'énergie de la jeunesse, il ne pourra pas trop cracher dessus… c'est lui qui me bassine avec les années 70… C'est un bon compromis. D'ailleurs c'est mon voyage.

Il n'oublia pas que c'était son voyage, que c'était lui seul qui sortirait à 5h20 du matin dans des rues quasi-désertes, loin encore du lever du jour, où il ne croiserait que des sorties de boîtes, un mec ou deux bourrés et les tout premiers éboueurs chargés de ramasser les tonnes de gobelets vides que le vendredi soir aurait laissé traîner sur les pelouses. C'est à lui seul que la ville s'offrirait, la ville indolente qu'il imaginerait parcourue, quelques heures plus tard, par des filles, des garçons, des familles, entrant et sortant des boutiques, piétinant sur les trottoirs et les places. Comment ne pas aimer se lever à l'aube un samedi matin ? Il en avait manqué beaucoup, des samedis matins, pour cause de discussions tardives (mais il aimait aussi les discussions tardives), de zonage idiot sur internet, de paresse pure et simple. Il était heureux des centaines de kilomètres qui le séparaient de Harry, car ces kilomètres l'obligeaient à prendre le premier train s'il voulait vraiment profiter du week-end ; et le premier train était avant six heures. Il se réjouissait d'avance de renouveler chaque semaine – si les choses continuaient de bien se passer – ce trajet matinal, qui serait un aspect de son bonheur, contenu pour toujours dans cette chanson.

L'I-pod prêt à l'emploi enroulé dans la poche de son manteau, son manteau sur la chaise, Draco se coucha – après minuit. Le fait d'avoir à se lever tôt, que ce soit pour un rendez-vous attendu ou redouté, l'empêchait toujours de dormir. Cette nuit-là, il voulait déjà que ce soit l'heure de se lever, mais il savait le regret qu'il éprouverait s'il faisait une nuit blanche. Il serait trop épuisé pour profiter du trajet.

Son sommeil fut court et compact ; quand le réveil sonna, il le détesta ; ses membres étaient engourdis ; mais bien vite la perspective de sa journée fit la lumière en lui. Il mangea sans faim quatre biscuits aux céréales, prit une douche – indispensable pour profiter pleinement de l'aube à venir, s'engonça dans ses habits d'hiver et sortit dans l'air vif. Les roulettes de sa valise occupaient seules l'espace sonore de la rue, basse continue sur laquelle venaient glisser les nappes de quelques rares voitures ; mais Draco n'entendit rien de cette musique expérimentale.