Chapitre 1 : Que ?

Marinette avait les yeux perdus dans le vague. Son regard était posé sur une nuque que frôlaient de temps à autre quelques mèches blondes. Ce manège hypnotique l'empêchait de se concentrer, si bien qu'elle faillit tomber de sa chaise quand une voix l'interpella :

-Mlle Dupain-Cheng ! Auriez-vous l'obligeance de revenir parmi nous ?

Rouge pivoine, la jeune fille bredouilla des excuses. La plupart des regards étaient tournés vers elle. Malgré tout, certains de ses camarades ne s'étaient pas retournés. Alya, sa meilleure amie, ainsi que Nino et Adrien qui continuaient d'être dans sa classe depuis qu'ils étaient entrés au lycée étaient restés tournés vers le tableau. Habitués depuis longtemps aux rêveries de la jeune fille, ils n'y prêtaient plus tellement attention. Ce que les deux garçons ne savaient pas, contrairement à Alya, était la cause de ces rêveries.

Cette cause était... Adrien. Oh, Adrien, son si adorable, magnifique, exceptionnel Adrien ! Elle était amoureuse de lui depuis si longtemps que ce sentiment faisait partie intégrante d'elle. Elle pensa à ses yeux si verts, de cette magnifique couleur émeraude qui la clouait sur place dès qu'il la regardait, ses lèvres si fines qu'elle avait envie d'embrasser dès qu'il se mettait à lui parler, ses...

Ça y était, elle était repartie dans ses fantasmes. Sans le formidable coup de coude qu'elle reçut dans les côtes, elle aurait été bonne pour une autre remarque de sa professeure qui commençait à perdre patience.

Cela faisait trois ans qu'ils étaient au lycée, en terminale donc, et leur classe ne comptait que deux ou trois élèves de plus que durant leurs années de collège. Dans l'ensemble, ils étaient toujours avec les mêmes personnes : Chloé, la fille du maire, insupportable peste prétentieuse, Sabrina son chien à tout faire, Rose une adorable petite blonde et Juleka, son amie gothique aux cheveux violets, Max un petit gars noir aux lunettes d'intello, Nathaniel le dessinateur roux amoureux de Marinette, Kim l'ami sportif de Chloé, aussi arrogant qu'elle, Alix, jeune fille aux cheveux roses, Mylène adorable fille ronde aux cheveux bouclés et Ivan, un grand gaillard au cœur d'or.

Cette situation assez particulière était dû à Gabriel Agreste, le père d'Adrien, qui avait usé de sa renommée pour demander à ce que les amis de son fils restent avec lui. Ne voulant pas que plus d'élèves soient en contact avec Adrien, de crainte que certains ne soient dangereux, il avait préféré faire cette demande pour sa sécurité. Marinette n'en était que plus redevables à son idole... Elle avait la possibilité de voir son Adrien tous les jours !

Adrien, de son côté, rêvassait également. Dans son esprit tournoyait une jeune fille brune aux yeux bleus, vêtue d'une combinaison rouge et noire. Son rire le poursuivait sans relâche. Et son sourire le figeait sur place. S'il n'avait pas encore subi de remarque, c'était parce qu'il faisait semblant d'écrire. Il aurait bien pu éclairer Marinette sur la marche à suivre pour ne pas se faire prendre, mais il était tellement obnubilé par sa chère Lady qu'il n'avait même pas remarqué les trois interruptions du cours dû à sa chère camarade de derrière.

Quand la tortur...le cours fut terminé, le brouhaha que faisaient les chaises, les discussions et les affaires que l'on range commença, les deux amis bondirent de leur chaise pour se précipiter vers la sortie, ce qui aboutit, tout naturellement, à une collision.

Grâce aux réflexes d'Adrien, Marinette ne se retrouva pas les quatre fers en l'air, mais maintenue fermement contre le torse de son cher et tendre. Le rouge lui monta aux joues. La main d'Adrien était pressée contre sa fine taille et le reste de son corps collé à lui. Elle pouvait sentir le parfum qui émanait du jeune homme et cru défaillir.

Adrien, quant à lui, était surpris par ce contact qui lui paraissait si familier. Ce corps contre le sien, cette taille sous ses doigts, tout lui rappelait...Ladybug. Mais il savait déjà que les deux jeunes filles avaient de nombreux points communs, tels que leur taille, leurs yeux et leurs cheveux. Mais ce qui les différenciaient était indubitablement leur caractère. Timide et réservé pour Marinette, et un tempérament de feu pour sa Lady.

Malgré le fait qu'il sache que ce n'était pas Ladybug qu'il tenait dans ses bras, il ne put s'empêcher d'être troublé par ce contact. Il sentait les formes de la jeune fille contre son corps et les yeux bleus tournés vers lui étaient envoûtants. Il avait toujours trouvé Marinette attirante. Ainsi, depuis des années, son cœur balançait entre sa douce camarade de classe et sa Ladybug.

Le petit cri de surprise qu'avait poussé Marinette quand ils s'étaient rentrés dedans était si adorable qu'Adrien s'était senti fondre. Malheureusement, il allait devoir la relâcher avant que cette situation ne devienne suspecte d'un point de vue extérieur.

Poussant mentalement un soupir de regret, il libéra la taille de Marinette qui s'empressa de reculer.

-Désolée, je..je ne t'avais pas vu, enfin si mais je m'attendais pas à ce que tu arrives aussi vite... Pas que tu marches lentement, hein ! T'es pas un vieux non plus mais t'es tellement...bon bref, bredouilla la jeune styliste.

Adrien éclata de rire en lui certifiant que ce n'était rien. Morte de honte, Marinette aurait bien voulu disparaître sous terre.

Le jeune homme trouvait au contraire sa façon de s'exprimer, en sa présence, particulièrement craquante. Il avait eu un aperçu de son caractère quand il l'avait abordée en tant que Chat Noir et avait été agréablement surpris de découvrir qu'elle était capable de s'exprimer sans s'emmêler les pinceaux. Ah...cette Marinette, alors !

-Tu viens Marinette ? J'ai tellement faim que je crois que je pourrais te dévorer, donc si tu permets, je préférerais éviter de sombrer dans le cannibalisme en dévorant ma meilleure amie !

Remerciant les cieux de lui avoir donné une amie aussi géniale, Marinette sauta sur l'occasion que venait de lui offrir Alya pour se sortir de cette situation extrêmement gênante. Après un dernier sourire d'excuse à l'intention d'Adrien, elle emboîta le pas de son amie.

-Merci, tu viens de me sauver la vie ! murmura-t-elle à l'oreille de la jeune reporter.

-De rien ma belle ! gloussa Alya.

Elles s'installèrent ensuite sur un banc et déballèrent leur repas. Les deux jeunes filles avaient toujours jugé préférable de se préparer leur repas elles-mêmes, ne pouvant jamais savoir avec certitude ce qui se trouvait dans la bouillie qu'on leur servait au réfectoire. Et puis, il fallait bien l'avouer, c'était aussi pour pouvoir observer Adrien, dont le père lui avait formellement interdit de manger au self, de crainte qu'il ne s'y empoisonne. Légèrement paranoïaque depuis la mort de la mère d'Adrien, il n'avait autorisé son fils à suivre des cours en dehors de chez lui qu'à certaines conditions.

-Alors, c'était comment ? demanda soudain Alya.

-Comment quoi ?

-Et ben, de se retrouver collée à ton prince, gloussa Alya, taquine.

Marinette rougit. Elle sentait toujours les mains d'Adrien sur son corps. Pourtant, un sentiment de familiarité s'en dégageait. Étrangement, cela la troublait plus qu'elle ne voulait se l'avouer.

-C'était juste... Whaaaaaa, sourit Marinette. Mais très gênant aussi ! Je pari qu'il a été dégoûté et qu'il me prend pour une folle parce que je lui suis rentrée dedans ! Et moi qui le traite de vieux après, non mais qu'est ce qui va pas chez moi...

La jeune fille gémit et se prit la tête dans les mains. Alya rit et lui tapota gentiment l'épaule.

-Mais t'inquiète pas Marinette, il doit avoir l'habitude maintenant !

-C'était censé me rassurer ? désespéra son amie.

Alya rigola, faisant tressauter ses boucles châtaines.

-Je ne pense pas qu'il ait été dégoûté choupette ! Si tu avais vu la manière dont il te regardait... Ohhh, trop romantique... soupira la jeune journaliste.

Marinette releva la tête, surprise.

-Comment ça il me regardait ? Enfin, j'ai bien vu qu'il me regardait, mais comment... ?

-Comme si tu étais la princesse qu'il était venu secourir, pour la libérer des griffes de l'affreuse sorcière du cours de maths ! s'écria Alya en mimant un combat contre un adversaire imaginaire.

Marinette éclata de rire. Alya n'avait pas changé ! Toujours aussi créative et indomptable. Marinette porta une fourchette de riz à sa bouche. Elle avait de la chance d'avoir une amie aussi fantastique.

-Tu sais, j'ai drôlement de la chance de t'avoir comme amie, tu sais ?

-Oh mais oui, je le sais, car sans mes talents de supra détective, tu ne saurais jamais comment faire pour te pointer au même endroit que ton Adrien comme par magie ! Répliqua la jeune fille, espiègle.

-Chut ! Pas aussi fort ! Chuchota Marinette, aussi rouge qu'une pivoine.

Non loin de là, Adrien mangeait distraitement son repas. Il n'écoutait pas un mot de ce que Nino était en train de lui raconter. Il était bien trop captivé par le manège de Marinette et Alya qui semblait s'amuser comme des folles. Depuis qu'il avait tenu Marinette dans ses bras, une sensation étrange ne le quittait plus. Comme s'il était passé à côté de quelque chose qu'il aurait pourtant dû voir.

-Eh, mec, tu m'écoutes ? demanda soudain Nino en agitant une main devant le visage de son ami.

Adrien sursauta et secoua la tête pour se vider l'esprit.

-Ah, heu non, désole, s'excusa Adrien contrit.

-Nan, c'est pas grave, je comprends mec, je comprends...Soupira Nino en levant les mains comme pour empêcher son ami de répliquer.

-Tu comprends quoi ? demanda Adrien, perplexe.

-Et bien, faut reconnaître que c'est vrai, elles sont plutôt canons les filles, surtout Alya, mais bon, je suppose que toi t'es plus à fond sur Marinette, après tout, j'étais amoureux d'elle au collège, donc je comprends parfaitement !

Pour l'une des rares fois de sa vie, Nino vit Adrien s'empourprer. Ce dernier ne savait plus quoi dire. Décidément, il n'était pas discret... Il toussota, mal à l'aise.

-Mais... je les regardait p...

-Arrête mec ! J'ai bien vu comment tu les regardais ! On peut en parler si tu veux ! Dit Nino en souriant d'un air gourmand.

-HEIN !?

-Marinette est pas mal du tout, c'est vrai. Elle est encore plus canon qu'au collège, t'as vu ses formes !? Elle a pris de la poitrine, mais Alya a un plus beau...

-Arrête ! S'écria Adrien, écarlate. Arrête, s'il te plait.

Devant les supplications de son ami, Nino fut pris d'un fou rire. Adrien leva les yeux au ciel. Il venait de comprendre que son ami se fichait ouvertement de lui. Il sourit. Il n'empêche que le jeune DJ n'avait pas tout à fait tort. Tandis qu'Alya avait déjà des formes bien marquées au collège, celles de Marinette n'étaient apparues que plus tard, et il n'avait pas manqué de le remarquer... Il observa la jeune fille qui mangeait, souriant à ce que débitait Alya. Son visage avait perdu les rondeurs de l'enfance pour laisser place à de délicates pommettes, une bouche rose et un visage à l'ovale parfait. Son regard descendit le long de sa nuque et glissa sur sa poitrine qu'il trouvait parfaite. Ni trop généreuse, ni trop petite. Parfaite... Ensuite, sa fine taille, ses hanches qui s'étaient légèrement arrondies au fil des années...Venaient enfin ses longues jambes parfaitement galbées. Adrien se demanda si elle faisait du sport pour avoir un corps aussi parfait...

-Et ça y est, il est reparti...murmura Nino à l'oreille de son ami, goguenard.

Adrien sursauta de plus belle.

-C'est bon, tu as gagné, soupira-t-il vaincu. Oui, je trouve Marinette canon et oui, Alya n'est pas mal non plus.

-Ah ba voilà quand tu veux ! rit Nino. D'ailleurs, je crois qu'elles ont capté quelque chose parce qu'elles nous fixent, là...

Adrien se retourna pour voir qu'effectivement, les deux jeunes filles les regardaient d'un air étrange. Le regard du jeune homme revint se fixer sur Marinette. Ses immenses yeux bleus ourlés de cils noirs outrageusement longs étaient braqués sur lui. Sa bouche était légèrement entrouverte et s'il n'avait pas été aussi loin, Adrien aurait sans doute dû lutter pour ne pas goûter à ces lèvres qui semblaient le narguer.

Le cœur de Marinette rata un battement quand son regard se plongea dans celui d'Adrien. Si vert ! Une couleur si extraordinaire qu'elle n'en semblait pas naturelle. Elle crut voir le regard du jeune homme glisser sur ses lèvres, mais la distance lui fit craindre un effet de son imagination. Réel ou non, ce geste fit s'empourprer les joues de la jeune fille. Elle baissa les yeux sur son déjeuner, étrangement engourdie. Quand elle osa regarder de nouveau en direction du jeune homme elle vit avec stupéfaction qu'il la fixait toujours. Comme attirée par son regard, elle se perdit au fond de ses prunelles.

Les deux jeunes gens restèrent ainsi plongés dans le regard l'un de l'autre durant ce qui leur sembla des heures. Ils ne parvenaient pas à détacher leurs regards. La sonnerie qui marquait la fin des cours de 11 :30 retentit, les arrachant de leur contemplation. Gênés, ils baissèrent la tête sur leurs déjeuners à peine entamés.

De leur côté, Nino et Alya avaient échangé des regards de connivence face au comportement de leurs deux amis. Depuis le temps qu'ils se tournaient autour sans rien dire ! Et puis, il fallait reconnaître qu'ils allaient plutôt bien ensemble...

…O…

De retour chez elle, ses parents étant partis quelques jours chez ses grands-parents, Marinette se précipita dans sa chambre et déposa son sac sur son lit. Tikki sortit alors de la poche de devant et vola vers la fenêtre où l'attendaient quelques cookies. Marinette se laissa tomber sur le canapé qui faisait face à cette dernière et s'allongea en travers. La tête pendant dans le vide, elle se mit à rêvasser.

La chambre de la jeune styliste n'avait guère beaucoup changé, hormis les poster d'Adrien qui avaient miraculeusement disparus. La jeune fille avait jugé préférable de retirer toutes les marques de son amour au cas où l'amour en question débarquerait sans prévenir. Et puis, comme son cœur penchait également en faveur de Chat Noir, elle avait trouvé trop injuste de faire de sa chambre un temple uniquement dédié à Adrien.

Marinette soupira, se releva, puis monta les marches qui menaient jusqu'à la mezzanine où se trouvait son lit, et pris son pyjama. Une fois sortie de sa chambre, elle pénétra dans la salle de bain et se mit à réfléchir sous l'eau chaude. Cet échange de regard avec Adrien l'avait troublée plus qu'elle ne l'aurait cru possible. Elle se mordit la lèvre inférieure en pensant au jeune homme. Il était devenu si beau ! Sa mâchoire s'était affermie, son corps s'était élargi et sa musculature était devenu nettement plus marquée. Le visage du jeune homme, tout en restant fin et délicat, avait perdu de ses rondeurs pour devenir celui du jeune top model qu'il était aujourd'hui, c'est-à-dire celui d'un dieu parmi les hommes. Chaque fois qu'elle entendait le nom d'Apollon, c'était le visage d'Adrien qui venait se loger derrière ses paupières. Elle rit doucement. Adrien n'avait rien d'un Apollon. Ce dieu était bien trop prétentieux... Chat Noir, en revanche...

Une fois séchée, elle revêtit son pyjama -qui était en réalité un débardeur et un short- et remonta dans sa chambre. Prenant son calepin à dessin, elle remonta sur la mezzanine pour dessiner sur son lit. Elle plongea dans son imagination et tenta de crée mentalement une nouvelle robe.

Alors qu'elle commençait à crayonner, un fracas assourdissant la fit sursauter. Sous son regard horrifié, des sortes de pinces venaient de fracasser la fenêtre et se dirigeaient en rampant vers elle. Affolée, elle voulut se transformer, puis se rendit compte que Tikki était en bas, inatteignable. Marinette recula et se colla contre le mur. Les pinces, qui ressemblaient étonnement à des pinces servant à ramasser les déchets, continuaient d'avancer vers elle à toute vitesse. Elles finirent par l'atteindre et s'enroulèrent autour de sa fine taille, emprisonnant aussi bien son bras gauche que son bras droit. Gesticulant pour essayer de s'en débarrasser, Marinette ne réussit qu'à rendre ses assaillantes folles de rages. Les pinces se resserrèrent autour de sa taille, lui arrachant une plainte de douleur. Puis soudain, les tenailles la tirèrent en avant, la soulevèrent, se rapprochant dangereusement de la fenêtre. Marinette poussa un cri quand elle se retrouva dehors suspendu dans le vide par les pinces. Ces dernières la tirèrent vers le haut, jusque sur le toit.

Un drôle de personnage l'y attendait. Ses cheveux étaient faits d'herbe et une casquette retombait sur son visage. Il était vêtu d'une salopette faite de feuilles qui n'était pas sans rappeler celle... oui. Celle du gardien du parc. Marinette regarda avec horreur l'Akumatisé la tirer vers lui. Quand elle ne fut plus qu'à quelques centimètres de l'homme, il lui déclara d'une voix narquoise :

-J'ai entendu dire que ce cher Chat Noir avait un faible pour toi... Comme je ne pouvais pas m'en prendre à Ladybug, j'ai reporté mon choix sur toi beauté.

Marinette écarquilla les yeux. Chat Noir ? Un faible pour elle, mais... Elle n'eut pas le temps de finir sa pensée. Elle se retrouva projetée contre un des murets qui entouraient le toit. Les pinces se plantèrent dans la pierre, la maintenant prisonnière. Elle baissa les yeux et regarda les tiges argentées comprimer le fin coton de son débardeur blanc. Elle rougit. Elle se trouvait dans une position assez... comment dire ? Suggestive. Vêtue seulement de son pyjama, attachée à un muret. Super. Elle qui pensait finir tranquillement la journée à dessiner de nouveaux modèles... Mais ce n'était pas le pire. Non ! Le pire était que Chat noir avait besoin de son aide pour désakumatiser cet homme et elle seule était capable de libérer le papillon de son mauvais sort. La jeune fille sentit des larmes de rages pointer leur nez. Elle les refoula, honteuse de s'être ainsi laissée aller. Elle était Ladybug, non d'une coccinelle !

…O…

Alors que Chat Noir sautait de toit en toit en profitant de ce bref instant de liberté, loin de sa prison familiale, il avait aperçu l'Akumatisé. Il l'avait immédiatement pris en chasse. Quand l'autre s'était rendu compte qu'il était suivi, il avait projeté ses tenailles vers le héros. Celui-ci les avait détournées à l'aide de son bâton, tout en sautant de côté pour éviter une nouvelle vague de mâchoires tranchantes. Les lames avaient détruit la devanture d'un magasin et sous la violence du choc, le sol avait tremblé. Il avait par la suite tenté d'atteindre l'Akumatisé, mais il était inapprochable ; les pinces qu'il utilisait semblaient avoir une vie propre et déjouaient toutes les attaques de Chat Noir. Ce dernier avait fini par se mettre à l'écart pour chercher une solution.

-Donne-moi ton Miraculous, Chat Noir, avait alors ricané son ennemi. Ta Lady ne semble pas être disponible...

Chat Noir avait, bien évidemment (qu'est-ce qu'il croyait cet affreux ? Qu'il allait lui donner son Miraculous sans rechigner ?) refusé cette offre fort sympathique.

-Bien, je vois que je vais devoir passer au plan B, avait alors rétorqué l'autre avec un sourire glacial, laissant Chat Noir perplexe.

La victime du Papillon avait alors sauté du toit et disparu aux yeux de Chat Noir qui le cherchait depuis cet instant, parcourant anxieusement les rues de Paris.

Qu'avait donc voulu dire ce tordu ? De quel plan B parlait-il ?

Le jeune héros commençait à s'impatienter. Cela devait bien faire dix minutes qu'il était sur la piste de l'homme aux pinces, mais il restait bredouille. Le jeune homme décida de poursuivre sa traque depuis les toits, espérant que la hauteur lui serait d'une aide précieuse.

Chat Noir se percha sur une cheminée et tendit l'oreille. Pas de bruit qui sortent de l'ordinaire. Seul lui venait le vacarme provenant des automobiles, les discutions des passants... Si ! Là ! Un cri ! Un cri qu'il lui sembla familier... Il se précipita vers la source du son. Quand il vit la direction qu'il prenait, une sourde inquiétude lui tordit le ventre. Plus il approchait de sa destination, plus un doute sombre prenait forme dans son esprit. Quand il aperçut la boulangerie des Dupain-Cheng, son corps fut parcouru d'un frisson. Il accéléra, le cœur battant.

Quand il fut suffisamment proche, il découvrit avec horreur le trou qui avait remplacé la fenêtre de la chambre de Marinette.

Il se précipita à l'intérieur et découvrit le calepin que la jeune fille avait laissé tomber, ouvert sur le sol et son crayon qui avait roulé contre le mur. Une rage sourde lui fit perdre momentanément la raison. Il venait de comprendre de quoi parlait l'Akumatisé. Un autre cri se fit entendre, provenant d'un toit non loin de là.

Chat Noir se précipita au dehors et à la rechercher de la source du bruit.

Quand il découvrit la scène qui s'offrait à ses yeux, il frémit de rage. L'Akumatisé se tenait dos à lui, mais il entendait clairement son rire tandis qu'il faisait siffler ses pinces. Celles-ci venaient enserrer la gorge de Marinette, clouée au muret par quelques autres tenailles. Une marque rouge s'étalait sur sa joue, révélant l'emplacement où l'Akumatisé venait de la gifler. Cela expliquait le cri que Chat Noir avait entendu quelques instants plus tôt.

Le jeune justicier regardait son amie, assise contre le mur, maintenue au sol. Il aurait pu s'attarder sur le fait qu'elle semblait être en pyjama, mais comme cela ne le troublait absolument pas, il préféra se concentrer sur son ennemi plutôt que sur la tenue légère de son amie.

Marinette rougit. Elle n'avait pas manqué de remarquer le regard de son partenaire qui s'était attardé sur sa tenue, démentant les pensées que le héros en question avait eu quelques instants plus tôt.

Elle avala sa salive avec difficulté. La pince qui lui enserrait la gorge menaçait de l'étouffer. Elle ressentait encore la brûlure de la gifle que l'Akumatisé lui avait infligé plus tôt, espérant manifestement que son cri attire Chat Noir. Cela avait malheureusement fonctionné.

Impuissante, elle regarda son partenaire s'avancer prudemment de l'Akumatisé. Ses gestes étaient si gracieux que Marinette faillit se laisser hypnotiser. Leur ennemi avait visiblement le même problème. Marinette n'avait jamais vraiment fait attention à l'effet que produisait Chat Noir sur leurs opposants et elle eut la surprise de découvrir qu'il usait de ses charmes félins contre l'adversaire.

Quand il fut assez proche de l'Akumatisé, Chat Noir put avancer suffisamment son bâton pour faire tomber la casquette de l'affreux. Il se doutait que l'Akuma se trouvait à l'intérieur. D'un geste vif, il agrandit son arme qui vint percuter le couvre-chef. Son doute fut confirmé quand l'une des pinces siffla, libérant la gorge de Marinette qui hoqueta à la recherche d'air. La tenaille se précipita vers la casquette et la maintint hors de portée du jeune héros.

Chat Noir feula. Tant que son ennemi retenait Marinette, ce dernier ne pourrait pas énormément bouger. Malheureusement, l'Akumatisé ne manquait pas de ressources, et de nouvelles armes apparurent dans ses mains. De nouvelles pinces se mirent à siffler vers le jeune héros. Il les évita difficilement. L'une d'elle lui effleura le bras, lui arrachant un grondement sourd. Chat Noir bondit sur l'une des pinces qui fusait vers lui et profitant de cet appuie, se propulsa vers la casquette. Agrandissant son bâton, il la manqua de peu. Soufflant sous l'effort, il roula sur le sol pour échapper à une nouvelle vague de tenailles. Celles-ci pleuvaient sur lui telle des flèches, puis s'enfonçaient dans le toit créant d'innombrables cratères qui ébranlaient tout le bâtiment sous ses pieds.

Se jetant derrière un des pots de fleurs encore debout qui ornaient l'un des côtés du toit, il se mit à réfléchir. Il ne parviendrait jamais à approcher la casquette sans user de la ruse. Lançant un coup d'il dans la direction de son ennemi, il vit avec effrois trois pinces foncer vers sa position. Il se redressa rapidement. Son regard se posa sur l'une des plantes à laquelle était adossé un paquet de terreau. Une idée lui vint alors à l'esprit. Plongeant la main à travers le plastique, il referma son poing sur la terre fraîche qui s'y trouvait. Il fit ensuite volte-face et, se propulsant à l'aide de son bâton télescopique, il réussit à s'approcher assez de son adversaire pour lui envoyer le terreau à la figure.

Aveuglé, ce dernier hurla, tandis que le jeune héros parvenait à arracher la casquette à l'emprise de la mâchoire de métal la plus proche, une demi seconde avant qu'une des pinces ne se referme sur lui. Il se réceptionna en roulant sur le sol et se retrouva nez à nez avec Marinette qui l'observa avec de grands yeux. Le jeune homme lui offrit un clin d'oeil canaille qui fit monter le rouge aux joues de la jeune fille, puis se retourna et fit face à l'opposant.

Les yeux de l'Akumatisé, qui était parvenu à retirer la terre qui lui obscurcissait la vue, s'agrandirent d'horreur quand il vit la main griffue de Chat Noir s'approcher de la casquette. D'un geste, il arracha Marinette du mur et l'attira à lui. Une pince menaçante apparut autour de son cou et Marinette dégluti.

-Lâche-la, grinça Chat Noir.

-Tu sais ce que je veux, répliqua l'Akumatisé. Au fait, je m'appelle Jean Jacques, reprit-il après une seconde de silence.

Sous l'effet de la surprise, Chat Noir éclata de rire, ce qui mit Jean Jacques dans une rage noire, détournant son attention de Marinette. Cette dernière, sentant la pression se relâcher, en profita pour se libérer et couru attraper la main secourable que lui tendait Chat Noir. Il tira son amie derrière son dos. Maintenant qu'elle était libre, il n'avait plus qu'à invoquer son Cat-aclysme et à détruire cette fichue casquette. Et c'est ce qu'il fit.

Quand l'Akuma fut libéré, Marinette se jeta sur lui et l'enferma sous un pot de fleur renversé. Libéré du maléfice, le gardien du parc s'effondra au sol, retrouvant son apparence normale.

-Que fais-tu ? Demanda Chat Noir à son amie.

-J'ai piégé l'Akuma pour que Ladybug puisse le désakumatisé expliqua-t-elle. Ça évitera qu'il ne se duplique.

Chat Noir la regarda, admiratif. Il n'aurait jamais pensé à faire une chose pareille, il devait bien l'avouer. Il offrit un sourire malicieux à son amie puis se tourna vers le gardien du parc qui tentait de reprendre ses esprits. Le jeune homme le prit par le col et s'empressa de le descendre dans la rue. Puis il remonta chercher Marinette.

Quand il la vit assise au sol, près du pot de fleur renversé, il frémit. Elle était si belle...et si peu couverte. Il se racla la gorge et s'approcha de la jeune fille qui avait tourné son magnifique regard bleu vers lui.

-Je te ramène chez toi, Princesse ?

-Avec plaisir, sourit-elle.

Acceptant la main qu'il lui tendait, elle se retrouva serré contre lui. Un instant elle revit la même scène, mais cette fois ce n'était plus Chat Noir qui la tenait, mais Adrien. Un frisson la parcouru quand ce même sentiment de familiarité qui l'avait saisi quelques heures plus tôt refit surface.

Chat Noir, lui, prit ce frisson pour une réaction au froid ambiant. Il la prit dans ses bras et la transporta prudemment jusque sur le toit de son immeuble. Puis, soulevant la trappe qui permettait d'accéder au toit-terrasse depuis la chambre de Marinette, il la descendit délicatement au sol. Cette dernière croisa les bras sur sa poitrine, par pudeur. Elle s'était aperçue que Chat Noir avait remarqué que le tissu était légèrement transparent...

-Je... désolé pour l'état de ta fenêtre Princesse, s'excusa le jeune homme après y avoir jeter un rapide coup d'il. Je n'ai pas le pouvoir de tout remettre à sa place comme ma Lady...

-Ce n'est rien, et puis, je sûre que Ladybug ne va pas tarder. Elle pourra toujours utiliser son Miraculous Ladybug pour tout arranger. Tu ferais mieux d'aller l'attendre sur le toit, lui rappela la jeune fille, je suis sûre qu'elle ne tardera pas.

-Tu as sans doute raison, murmura Chat Noir songeur, tu es sûre que tout ira bien ?

-Mais oui, ne t'en fait pas va ! lui assura Marinette avec un sourire, j'ai vu pire.

Chat Noir leva un sourcil interrogateur et Marinette, se rendant compte de la gaffe qu'elle venait de faire, s'empressa de se justifier.

-Enfin, tu sais bien, quand j'ai été emmenée par le Dessinateur...

Voyant que Chat Noir restait septique, elle bailla légèrement, lui signifiant qu'elle désirait aller se coucher... ou plutôt elle désirait qu'il s'en aille pour qu'elle puisse aller purifier cet Akuma. Quoique, elle aurait bien aimé qu'il reste un peu...

-Bonne soirée Princesse, murmura Chat Noir ayant reçu son message, en déposant un baiser sur la joue de la jeune fille.

Cette dernière resta figée par la surprise tandis que son héros s'empressait de remonter sur le toit, refermant la trappe derrière lui.

La jeune fille posa une main sur sa joue tandis que ses joues se teintaient de rouge. Chat Noir... venait de l'embrasser ? Elle secoua la tête pour reprendre ses esprits. Elle devait vite s'occuper de cet Akuma avant qu'il ne face qu'autres victimes. Elle se précipita vers l'escalier et fut percutée par une petite créature rouge.

-Marinette ! couina Tikki, j'ai eu si peur ! Je n'aurais jamais dû être séparée de toi !

- Ne t'en fais pas Tikki, je vais bien, la rassura gentiment Marinette en la serrant contre elle malgré l'urgence de la situation. Par contre, il faut vite que je m'occupe de ce fichu Akuma. Tu pourrais me transformer ?

Retrouvant sa petite mine sérieuse, Tikki acquiesça et la jeune fille passa de Marinette à Ladybug en quelques secondes.

A l'aide de son yoyo, elle sortit par la fenêtre, mais pris garde de s'éloigner du toit voisin, où avait eu lieu le combat, pour emprunter un autre chemin. Chat Noir aurait eu tôt fait de se douter de quelque chose si elle avait débarqué de chez elle.

Quand elle atterrie sur le toit, à côté de Chat Noir, celui-ci leva un sourcil interrogateur.

-Tu arrives avec un petit temps de retard ma Lady...

-Oui, excuse-moi. C'est juste que... l'Akumatisé m'avait blessée, j'ai donc dû attendre que mon kwami reprenne des forces, se justifia-t-elle rapidement, tout en ressentant un léger pincement au coeur à l'idée de mentir à son partenaire.

L'expression de Chat Noir changea du tout au tout, l'inquiétude remplaça alors l'agacement sur son visage. Il s'approcha prudemment de la jeune fille, puis posa une main sur son épaule pour la regarder dans les yeux.

-Tout va bien ?

-Oui, oui, rien de très grave, s'empressa de le rassurer l'héroïne. Mais, qu'as-tu fais de l'Akuma ?

-Oh ! Il est là, dit son coéquipier en revenant au sujet qui les préoccupait malgré l'anxiété qui ne quittait pas ses belles prunelles vertes.

Il lui désigna le pot de fleur, les traits toujours tendus. Immédiatement, la jeune fille le renversa et captura le papillon dans son yoyo. Elle le purifia, puis utilisant son Miraculous Ladybug, elle répara tous les dégâts qu'avaient causés les combats. Le toit retrouva une allure normale et les pots de fleurs se redressèrent comme par magie. Le sac de terreau retrouva l'apparence qu'il avait avant que Chat Noir ne l'éventre.

-Bye bye petit papillon, chantonna LadyBug en libérant le petit insecte redevenu blanc.

Les deux compagnons observèrent la petite créature s'envoler au-dessus des ruelles de Paris, retournant sans doute dans l'antre du Papillon...

-Comment marche ton Miraculous Ladybug ? la questionna soudain Chat Noir. Habituellement tu utilises l'objet de ton Lucky Charm pour ça...

La surprise laissa un instant Ladybug silencieuse.

-Oh... Et bien, en réalité, je n'en ai pas besoin, mon Miraculous Ladybug fait seulement disparaître l'objet que j'ai créé comme il fait disparaître les dégâts des combats. C'est un peu confus, mais dans l'ensemble, mon Miraculous Ladybug est un sort à part. Je pourrais l'utiliser sans avoir eu recourt au Lucky Charm auparavant, par exemple. Pourquoi cette question ?

-Non, pour savoir. Tes dons me laissent parfois perplexe, répondit malicieusement son camarade en lui adressant un sourire malicieux. Et puis il faut avouer que comme j'en pince pour toi, j'aime bien apprendre à mieux te connaître...

Ladybug leva les yeux au ciel devant le jeu de mot de son coéquipier. Cette fâcheuse habitude ne lui passerait-elle donc jamais ?

Puis réalisant soudain quelque chose, elle se mit à observer attentivement Chat Noir. Il n'avait fait aucune allusion à elle sous forme de Marinette. Étrange. Elle décida donc de poser la question qui lui brûlait les lèvres :

-Mais... Sinon, tout s'est bien passé ?

Chat Noir tourna un visage surpris vers elle. Ses yeux verts étincelèrent de malice quand il comprit.

-Oui pourquoi ? J'ai battu cet Akumatisé à moi seul et alors ? Demanda-t-il en s'approchant d'elle, un sourire narquois sur les lèvres. Doutes-tu à ce point de mes capacités ?

Il n'était plus qu'à quelques centimètres d'elle quand elle décida de pousser son interrogatoire plus loin.

-Tu n'as... rien d'autre à me dire ?

-Pourquoi ça ma Lady ? Serait-on jalouse ? susurra-t-il à son oreille.

La jeune fille tressaillit en sentant son souffle chaud contre son oreille. Chat Noir recula et l'examina d'un air canaille.

-C'est bon ! Capitula l'héroïne. J'ai cru voir Marinette en arrivant, alors je me suis dit... Se justifia l'héroïne en rougissant.

-Tu t'es dit quoi ma Lady ? Demanda Chat Noir en s'approchant encore plus près un demi-sourire inimitable au coin des lèvres.

La jeune fille ouvrit la bouche pour lui envoyer une réplique bien sentie, espérant faire disparaître cette expression suffisante particulièrement agaçante de son visage, quand le bip de la bague de son partenaire la coupa dans son élan.

-Oups ! Je dois y aller ma Lady, une autre fois peut-être ! dit-il en lui offrant ce petit sourire arrogant qui avait le don de la faire sortir de ses gonds.

Alors qu'elle le suivait des yeux, bondissant d'immeubles en immeubles, elle ne put s'empêcher de soupirer.

-Oui... une autre fois peut-être... murmura Ladybug, le souvenir des lèvres de son compagnon sur elle déversant un feu brûlant dans ses veines.