- J'aimerais te dire que c'est la dernière. Mais toute cette adrénaline, j'arrive pas à m'en passer !
- La dernière ? J'espère que tu rigoles, Emma… Tu t'ennuierais bien si tu devais rester chez toi, toute la journée sur ton canapé, surtout dans l'état dans lequel il est !
- Ouais, va falloir que j'investisse.
- Ceci dit, tu n'es jamais chez toi et ce n'est pas comme si tu emmenais régulièrement du monde…
- C'est pas comme si on avait le temps non plus.
- Être occupées quelques heures par mois, tu appelles ça être débordées ?
- Appelle ça comme tu veux, Régina, mais la vie mémère pantouflarde tricot et point de croix, c'est pas trop mon truc !
- Les relations non plus apparemment…
- Putain, j'ai tellement envie de baiser que je pourrais choper la première venue.
- La première ? Emma, choisis un peu mieux !
- C'est pas de ma faute, la seule qui m'intéresse veut pas de moi.
- Je préfère nos escapades et regarde où tu roules au lieu d'essayer d'obtenir ce que tu ne peux pas avoir.
- Putain, il roule comme de la merde ce con, allez avance connard ! On va être à la bourre à cause de toi ! Il va me rendre dingue, je vais descendre et lui faire sa fête ! TU VAS LA BOUGER TA CAISSE ?
- Je suis contente de ne pas être dans la même voiture que toi, j'aurais déjà vomi depuis longtemps !
- Si tu étais à côté de moi, c'est pas sur le volant que j'aurais les mains !
- Est-ce qu'un jour, tu vas arrêter tes insinuations ?
- Nan, je crois pas, c'est trop tentant, tu sais à quel point j'adore te mettre mal à l'aise.
- Je suis tellement habituée, je suis même certaine que j'en parviens à occulter certains mots de mon esprit, comme un philtre anti-Emma.
- Donc si je dis cul, salope, chatte, tu n'entends rien ?
- Tu m'exaspères.
- J'te rappelle que je te vois dans le rétro et que j'aime pas trop le sourire sarcastique que vous affichez sur votre si beau visage, Miss Mills !
- Regarde où tu vas au lieu de me regarder !
- Je passerai chez Ikea en sortant de tout ça pour m'acheter un canapé !
- Ta première venue est arrivée ?
- Ah ah ah ah…J'irai au « lesbea club » après avoir acheté mon canapé.
- Je vois déjà ta méthode de drague « Salut les filles, mon nouveau canapé est en cuir, ça intéresse quelqu'un ? »
- Y en aura forcément une qui dira oui !
- Maîtresse Emma arrive, attention !
- Tu dis ça parce que tu m'as jamais eue dans ton lit ! Tu sais ce que je dis… M'essayer, c'est m'adopter !
- M'essayer, c'est m'adopter… Oui, je sais.
- Va falloir qu'elle s'accroche hein parce qu'elle ressortira de chez moi en arquant !
- Et après tu te demandes pourquoi je ne veux pas coucher avec moi ?
- Moi ? Toi ?
- Je voulais dire toi…
- Donc, c'est un lapsus !
- Pourquoi il faut toujours que ce soit un lapsus et pas une erreur ?
- Parce que ton inconscient est toujours là, chérie ! Et puis tu sais ce qu'on dit des lapsus ...
- Oh non, pitié, pas ça…
- C'est comme les cunnilingus, un écart de langue et on se retrouve rapidement dans la merde !
- Bon sang, Emma…
- Putain, on va se taper le feu si ce con n'avance pas son cul ! AVANCE BORDEL !
- Emma, calme-toi, on va être à l'heure, on est parties en avance et je ne suis pas sûre que nous faire arrêter pour excès de vitesse nous aidera.
- Ouais mais ça me gonfle ! Tu passes prendre un verre ce soir ?
- Je ne sais pas encore, Ruby doit passer.
- Oh bon sang, quitte là, elle te mérite pas. Je suis sûre qu'elle n'arrive même pas à te faire jouir !
- Emma, occupe-toi de tes affaires !
- Nan mais on est amies depuis quand ? Hum ?
- La maternelle.
- Ouais, donc on a 31 ans, ça fait…
- 26 ans.
- Putain la vache ? 26 ans que je te supporte ?
- C'est plutôt moi qui te supporte !
- Bref, 26 ans et t'es pas capable de me dire si c'est un bon coup que tu te tapes ?
- Exactement.
- Prudasse.
- Va te faire voir.
- Ouhhhh Miss Mills s'énerve ?
- On arrive dans combien de temps ?
- 6 minutes. Change pas de sujet : comment baise Ruby ?
- Emmaaaaaaa !
- Ok, j'te fous la paix.
- Merci.
- Je reste persuadée qu'elle baise mal.
- Deuxième édition : tu m'exaspères.
- Sans déconner, l'autre soir, elle a pas décroché un mot, un ennui absolu ta Ruby.
- Disons quand tu es dans la pièce, on a du mal à s'exprimer.
- Dis que j'ai une grande gueule.
- Je le dis.
- Je n'ai pas une grande gueule, j'ai un débit de parole qui frise l'…
- Overdose.
- Merci.
- De rien.
- Bref, Ruby ?
- Concentre-toi au lieu de me regarder dans le rétro, tu crois que je ne te vois pas ?
- Qui ne dit rien consent…Elle baise mal.
- Merde !
- Ahhhhhhh allez ! Réveille la tigresse qu'il y a en toi !
- Combien de temps ?
- 2 minutes. Ok, bon, c'est au coin de la rue du pâté de maison suivant. T'es prête ?
- Oui.
- On fait comme d'habitude et on se rejoint au point de rendez-vous.
- Quelle heure ?
- Il est… 14h donc 16h, pas avant.
- Ok.
- Et tu me rejoins chez moi avec un bon Montbazillac !
- On verra.
- Je sais que tu viendras, tu ne résistes jamais à un bon Montbazillac !
- Quand il est déjà sur place, j'y réfléchis à deux fois, mais déjà il faut que je vienne et en plus, je dois apporter la bouteille.
- OK je ramène la bouteille et tu ramènes ton cul, deal ?
- Mh… Deal.
- Ok, dans 30 secondes on se gare. On a 5 minutes, on prend tout ce qu'on peut et on se barre.
- Ok, à tout à l'heure.
- Ouais, Force et Honneur, chérie !
- Ne m'appelle pas chérie !
- T'es vraiment prude !
- 26 ans que tu la supportes, la prude !
- À croire que j'aime ça ! Ok on y va !
Emma et Régina se garèrent l'une derrière l'autre.
Elles connaissaient par cœur leur rituel. Elles l'avaient tellement répété, elles avaient tellement repéré chaque détail qu'elles n'avaient plus à se poser de questions.
Elles étaient habillées toutes les deux avec exactement les mêmes fringues. Une combinaison noire qui recouvrait tout leur corps, amples et une paire de baskets de la même couleur.
À peine furent-elles arrêtées qu'elles mirent un masque, le même qui ressemble trait pour trait à celui que portait la coqueluche du film « Scream ». C'est Régina qui avait décidé que ce serait mieux qu'une cagoule avec laquelle on pouvait parfaitement voir leurs yeux et par conséquent, reconnaissables. Une femme les yeux émeraude et l'autre les yeux chocolat et ça ne tarderait pas de faire le tour de la presse.
Elles descendirent en même temps de leur voiture et se dirigèrent vers l'entrée du bâtiment en face d'elles sans un bruit. Elles regardèrent en une fraction de seconde le monde qui les entourait. Il y avait quelques personnes qui se baladaient mais personne ne faisait attention à leur déguisement. Puis elles se regardèrent l'une et l'autre, Emma se permit même le luxe de faire un clin d'œil et si elle avait été plus proche d'elle, elle aurait pu entendre le soupir d'exaspération de Régina.
Il était 14h00 et elles s'apprêtaient à entrer dans ce bâtiment dont les portes vitrées d'entrée s'ouvraient sur leur passage.
Elles montèrent les quelques marches puis franchirent les portes.
Cette fois, elles ne prirent pas le temps de regarder autour d'elles. Tout se passa en une fraction de seconde.
C'est un coup de feu qui alarma et réveilla le silence de la pièce. Emma tenait l'arme de la main droite et elle était dirigée vers le plafond, comme dans les vieux policiers, elles avaient trouvé ça efficace pour faire flipper un peu la galerie sans blesser personne. Toutes les personnes présente coururent dans tous les sens dans l'espoir de trouver un abri.
Et c'est une voix synthétique qui se fit entendre :
- Ceci est un braquage ! Alors on va rester bien gentil, bien mignon, on va donner tout ce qu'on peut, tout ce qu'on a, on va gentiment ouvrir tous les coffres, fermer sa gueule et touuuuuuut se passera bien !