Mot de l'auteur : Je n'ai à dire, si ce n'est un grand merci à vous pour votre patience et votre soutiens dans vos mp. Je suis débordée par mes études et j'ai du mal à joindre les deux bouts actuellement. C'est un miracle que j'ai trouvé un peu de temps pour ce chapitre, avant de partir pour 4 semaines de stages en néonat (RIP).

A tous et à toutes, je vous souhaite une excellente année 2019.

Cœur sur vous.

« The First Time»

First Kiss / Premiers Baisers

Ce qui m'a attiré chez lui ? Je ne sais pas, Blaise. Rien en fait, si je suis honnête. J'étais totalement défoncé la première fois que je l'ai vu et ça m'amusait de le provoquer et de le voir s'emmêler tout seul. J'ai continué le jeu parce que c'était drôle, c'est tout. Puis je ne sais pas, il y a un moment où ça n'en est plus devenu un jeu. Je ne sais pas quand, je ne sais pas comment, je ne sais même pas pourquoi. Tout ce que je sais, c'était que je pouvais pas l'imaginer avec quelqu'un d'autre et encore moins avec ce trou du cul de Roger. C'est égoïste, non ? Merde, Blaise, je suis sérieux alors arrête de sourire comme un crétin ! _ Marcus Flint

Samedi 23 juillet 1997

Oliver ricana lorsqu'un candidat du jeu Télévisé "Les Z'amours" se fit frapper par la pancarte de sa conjointe pour ne pas s'être souvenu du jour de leur rencontre. Mais quelle connerie... Typiquement le genre d'émission que sa mère regardait assidument mais qui n'avait pas le moindre intérêt pour lui. Cependant, il était à peine midi et lorsqu'il était chez Blaise, seul ce dernier avait droit de choisir le programme télé. C'était triste, ça. Profondément injuste aussi.

- Ce jeu est idiot, commenta-t-il à l'adresse de Blaise qui engloutissait ses nouilles chinoises sur le fauteuil d'à côté. Un truc comme ça, ça ne durera pas à la télé.

Après avoir haussé les épaules avec nonchalance, son ami déglutit en le pointant de ses baguettes.

- Hmf, à voir. Franchement. Tex est vachement cool comme gars.

Dépité, Oliver se rapprocha de la table basse pour attraper sa boite de nems.

- Le principe est stupide, argumenta-t-il en croquant dans sa nourriture. Moi j'dis que ça va souler les gens à force et que cette émission ne durera pas plus de cinq ans. Et encore, je suis sympa en donnant cinq ans...

Blaise roula des yeux et retourna trifouiller sa boite de nouilles, produisant un raclement assez peu agréable. Du coin de l'œil, Oliver le vit plonger sa main dans le récipient pour récupérer les derniers petits morceaux de carottes et de pousses de bambou. La patience de Blaise était toujours relative, surtout quand on parlait de nourriture.

- Hm. Oliver, tu es mon ami. Tu es mon frère, même... commença Blaise en posant ses baguettes avec un air sérieux qui ne lui ressemblait pas.

D'instinct, Oliver plissa les yeux, méfiant au possible.

- Tu vas me demander quoi, cette fois ?

Son ami le regarda avec un air faussement outré.

- Je n'ai pas toujours quelque chose à te demander, c'est faux !

- Blaise, intima Oliver en lui envoyant un regard entendu.

Dans l'ordre, son ami passa sa main sur son crâne rasé, soupira, jura un instant, fixa un point lointain en faisant tressauter son genoux...

- Blaise, répéta Oliver qui sentait le coup foireux arriver à mille kilomètres.

- C'est bon, c'est bon ! Alors... je vais au cinéma ce soir. Avec Pansy...

Immédiatement, un sourire ourla les lèvres d'Oliver qui allait le féliciter. Blaise lui coupa l'herbe sous les pieds.

- Et je lui ai dit que tu venais avec nous.

Le sourire mourut aussi vite qu'il était apparu et le châtain resta muet un instant, la bouche ouverte comme une carpe hors de l'eau.

- Tu lui as dis quoi ?

- J'ai paniqué ! s'écria Blaise en se levant d'un bon.

Il se mit à faire les cent pas devant lui, ses mains triturant mécaniquement ses poches, le col de sa chemise tachée, son lobe d'oreille, puis à nouveau ses poches... Autant de tocs nerveux incontrôlables qu'Oliver connaissait depuis trop longtemps : Blaise était totalement paniqué. Et curieusement, le fait que ça ait un lien avec Pansy était tout simplement amusant au possible...

- Mais pourquoi tu lui as dis que je venais ? essaya de comprendre Oliver.

- Mais parce que c'est un film d'horreur ! répondit Blaise comme si c'était l'évidence-même. Et que je déteste ça !

Oliver se pencha en avant, les coudes sur les genoux et le visage dans les mains. Il respira profondément pour calmer son calme. A quel moment les bonnes fées qui s'étaient penché sur son berceau l'avaient maudis en l'enchainant à Blaise ? Et dire qu'à quelques contractions près, leurs mères ne se seraient jamais rencontrée... Le jeune homme se pinça l'arrête du nez en reprenant calmement :

- Soit. Mais pourquoi tu as accepté d'y aller, dans ce cas ?

- Mais parce qu'elle adore ce type de film !

- Mais tu n'aimes pas ça !

- MAIS JE SAIS ! hurla Blaise en agitant ses bras. Mais elle était là, adorable, avec ses fossettes et j'ai dit oui... Ne me laisse pas tomber, je te jure que j'ai besoin de toi !

Oliver se renfonça dans le fauteuil, passant la main dans ses cheveux. Lui aussi détestait les films d'horreurs. Il avait gardé un trop mauvais souvenir de L'Exorciste quand il avait tenté de le regarder avec Blaise en pleine nuit. Stupidité d'adolescents... En relevant les yeux, il remarqua que Blaise le fixait avec un air abattu. Chaque cellule de son visage le suppliait littéralement, ce qui était pire que lorsque il le harcelait verbalement. Après un soupir défait, Oliver capitula. Saleté de faux-frère.

- Je ne tiendrais pas la chandelle, avertit-il en pointant un doigt menaçant sur Blaise qui s'assit sur la table basse, face à lui.

- Je te jure que je te demande pas ça ! fit ce dernier en levant les mains devant lui. Tu viens mais t'as qu'à... te mettre derrière nous.

Oliver roula des yeux immédiatement. L'idée était déjà stupide, mais il fallait croire que son ami avait un don pour baisser un peu plus le niveau à chaque fois...

- Et si j'ai peur, tu passes la main entre les sièges et tu me serre la main, d'accord ? continua Blaise.

- C'est ridicule, on n'a plus quatre ans ! s'offusqua Oliver. Tu peux tenir la main de Pansy, ça lui fera plus plaisir qu'à moi...

- Oliver, on s'est tenu la main quand on a regardé L'Exorciste ! rappela Blaise le plus sérieusement du monde. C'était un magnifique élan de solidarité !

Et VLAN. Se servir des dossiers les plus sensibles était la spécialité de son ami lorsqu'il souhaitait le convaincre d'entrer dans ses magouilles. C'était bas, ça.

- C'était surtout humiliant, et on s'est juré que ça ne quitterai pas ta chambre ! Si j'apprends que tu l'a raconté à quelqu'un, je te tue !

- Oliver, si tu était dans ma situation, je le ferais pour toi...

- La question ne se pose pas ! explosa finalement Oliver en se levant vivement.

Peu habitué à ses coups de sang, Blaise eut un mouvement de recul et se ratatina sur la table basse.

- Je ne te l'aurais jamais demandé car moi au moins, je suis assez intelligent pour ne pas aller voir ce genre de film ! Tu sais que si je viens je vais aussi flipper ma race ! Et c'est quoi d'ailleurs, que je sois au moins briefé ?

- "Cube", articula sommairement Blaise, ébahi de l'élan d'Oliver. Des gens enfermés dans une sorte de Rubik's Cube géant et qui doivent traverser des salles piégées pour survivre et s'échapper. Pansy dit qu'il a l'air bien...

Un instant pensif, Oliver finit par se rasseoir, blasé d'avance. Sa colère était en partie calmée.

- Ça a pas l'aire horrible...

Blaise se tritura un instant les doigts, les yeux baissés comme un enfant pris en faute. A cet instant, peu importe leur dix-neuf ans, ils se sentaient plus ridicules que jamais.

- C'est sensé être de la science-fiction horrifique..., murmura Blaise, peu convaincu.

- On va flipper nos races, c'est ça ?

- Probablement...

Après un nouveau soupir, Oliver passa à nouveau ses mains sur son visage, blasé et épuisé. Lui qui pensait avoir un week-end paisible avant de reprendre le travail, c'était tout simplement impossible. Comme si aucune semaine ne pouvait être simple, normale... C'était trop demander ! Blaise finit par lui piquer un nem avant de reprendre sa place, et Oliver continua de manger en regardant Tex faire l'imbécile sans réellement le voir.

- Putain..., gémit-il. Et il fallait que tu tombes amoureux d'elle... Mec, tu te rend compte qu'à elle seule, Pansy a plus de couilles que nous deux ?

Un sourire tendre illumina le visage de Blaise qui essuya sa bouche d'un revers de manche.

- Oui... c'est pour ça que je l'aime...

oOo

Dimanche 24 juillet 1997

Il était dix-neuf heures moins le quart. La rue grouillait de touristes et d'étudiants qui flânaient, se promenant en profitant des températures douces et du soleil encore présent. Oliver observait Blaise réajuster sa chemise pour la septième fois dans le reflet du panneau d'affichage. Comme convenu, Oliver avait acheté son billet en avance et se tenait en retrait. Blaise avait insisté pour qu'il s'habille de manière classe et décontractée, avec une casquette à la mode ; ce à quoi Oliver avait répondu qu'il refusait de ressembler à un œuf à la coque. Sur certaines personnes qu'il connaissait, les casquettes allaient bien. Mais pas à lui. Ça lui donnait l'air d'un de ces crétins qui essayaient de ressembler aux racailles : aucun style, et un profond air de contrefaçon ridicule. A la limite, une fois il avait mis un chapeau de cow-boy à paillettes dans une boite gay, mais c'était la seule exception...

Ses mains fouillèrent sa veste à la recherche de son paquet de cigarette tandis qu'il observait Blaise feuilleter la revue du cinéma, adossé contre un des piliers du cinéma. Les deux jeunes hommes portaient des jeans et une chemise, grenat pour Oliver, bleue pâle pour Blaise. Les habits étaient à Blaise, aussi Oliver nageait un peu dans le haut, ce qui renforçait le côté "décontract". Oliver percha une cigarette à ses lèvres et l'alluma en continuant de scruter la foule. Pansy n'allait pas tarder, aussi Oliver se demanda comment pouvait être le film... Si horrible que ça pour que Blaise ai besoin de lui ? En même temps, ils ne leur en fallait pas beaucoup à tous les deux... Blaise avait la phobie de n'importe quel insectes, et Oliver paniquait à la vue des porcs et des rats. La glorieuse équipe...

A mesure que l'heure approchait, Oliver regarda plusieurs fois Blaise passer la main sur son crâne. Le geste amusait Oliver car dans une certaine mesure, Blaise ne s'était toujours pas fait à s'être rasé de près, mais c'était indéniablement ce qui lui allait le mieux. Une fois, Blaise s'était fait des rastas quand ils étaient en primaire. Mais suite à une épidémie de poux, sa mère avait choisis une solution radicale en le rasant. Oliver se rappelait son sourire satisfait lorsqu'elle avait déclaré que son petit avait retrouvé "sa splendeur naturelle" - même s'il savait bien qu'en temps que maniaque de la propreté, elle trouvait les rastas de son fils trop peu hygiéniques. Mais il fallait reconnaitre que curieusement, Blaise avait toujours plus d'allure le crâne à l'air. Ses pommettes et sa mâchoire ressortaient mieux et lui donnaient un petit air snob et précieux qui allait bien au personnage.

A dix-neuf heures cinq précisément, Pansy traversa la foule de son pas particuliers pour rejoindre l'entrée du cinéma. Sa manière de marcher laissait penser qu'elle possédait le monde, comme une conquérante, mais l'ironie voulait qu'elle lorsqu'elle était près de Blaise, elle semblait juste plus fragile. Presque plus humaine. Son expression froide et hautaine laissait alors place à un sourire timide et ses yeux brillaient. Oliver l'avait souvent remarqué, et c'était de plus en plus flagrant à mesure qu'il la connaissait. Il fallait avoir une sacré couche de cataracte pour ne pas voir qu'ils crevaient d'amour l'un pour l'autre même s'ils se tournaient autour de manière désespérante depuis plus d'un an.

Oliver regarda Blaise se pencher pour lui faire la bise, presque pudiquement. Ils semblèrent discuter un instant, puis Blaise fit un grand signe à Oliver. Pansy se tourna vers lui et le jeune homme ne manqua pas le sourire forcé qu'elle lui adressa. C'était évident qu'elle pensait être seule pour être avec Blaise, et Oliver ne pouvait pas vraiment l'en blâmer. Tenir la chandelle devant un film d'horreur ne le rendait pas particulièrement heureux. Les quarante francs qu'il avait dépensé pour sa place lui restaient en travers de la gorge...

Blaise indiqua l'entrée d'un mouvement de tête et Oliver lui désigna sa cigarette. Les deux tourtereaux entrèrent le temps qu'Oliver termine aussi sa clope. Pas de gachis pour ça au moins. Comme un condamné prêt à subir le supplice de la chaise électrique, Oliver savoura sa dernière bouffée lentement avant de jeter son mégot par terre et de l'écraser sous sa semelle, prêt à entrer à son tour. Le vigile contrôla son billet et le déchira avant de le lui rendre. Comme prévu, Oliver suivit le tracé de moquette rouge jusqu'à la salle indiquée et chercha le crâne rasé de Blaise dans la rangée de gradins. S'excusant à chaque fois qu'il passait devant quelqu'un, il grognait mentalement contre les crétins incapables de se mettre en ligne. Il fallait toujours qu'il y ai un imbécile pour bloquer le passage alors qu'il avait au moins trois ou quatre sièges vides à côté !

Enfin parvenu au siège tant convoité - au milieu, mais pas trop non plus -, il se laissa tomber derrière Blaise, légèrement en décalé. Se mettre dans son alignement lui aurait donné tout le champs de vision sur eux, ce qui, en plus d'être gênant pour tout le monde, l'aurait empêché de rentabiliser son billet. Tant qu'à faire, Oliver comptait profiter au maximum du film - du moins, le plus possible tant qu'il ne flippait pas trop.

Tandis que Blaise discutait à voix basse avec Pansy devant les publicités stupides qui défilaient, Oliver tira un sachet des sachets de bonbons qu'il avait planqué dans les poches de son jeans. Ces saletés coutaient beaucoup trop cher au cinémas, alors Oliver avait naturellement acheté un gros paquet qu'il avait distribué dans les quatre poches de son jeans. C'était ça, le vrai génie. Le bruit sembla attirer Blaise car il tourna son visage vers lui.

- Mais non... tu m'en passes ? chuchota Blaise, le regard brillant d'envie.

- Même pas en rêves, répliqua Oliver avec un sourire sadique, ravi d'avoir enfin une occasion de laisser s'exprimer sa rancune.

Ce fut au tour de Pansy de tourner son minois vers lui, totalement incrédule.

- Fais pas ta salope, Oliver... supplia Blaise.

Pour pousser le vice jusqu'au bout, Oliver porta un bonbon à sa bouche et le savoura lentement, appréciant le regard meurtrier de Blaise. La vengeance était un plat qui se savourait avec lenteur.

- Mais, commença Oliver en se penchant en avant, comme tu es un brave homme exemplaire, tu pourrais aller en acheter pour Pansy, je suis sûr que ça lui ferais plaisir, glissa-t-il avec un petit air satisfait.

- Connasse, grogna Blaise.

Oliver le regarda se retourner puis pencher sa tête pour parler avec Pansy. Après un court instant, il ricana quand son ami se leva, le porte-monnaie à la main en s'excusant pour quitter le rang, attirant le mécontentement des spectateurs. Enfin seuls, Oliver se pencha à nouveau en avant, attrapant le siège de sa main.

- Je voulais te dire que je suis désolé, mais Blaise a insisté pour que je viennes. C'était pas du tout prévu, je te le jure, chuchota-t-il à l'adresse de Pansy.

La jeune femme tourna la tête vers lui et fit mine de soupirer, les yeux levés au ciel.

- Je sais, Oliver. Il a fait la même la chose à l'autre gars. J'ai essayé de lui dire que c'était une idée stupide mais tu le connais, il n'a pas voulu m'écouter, déballa Pansy, les lèvres pincées.

- Quoi ? s'exclama-t-il avant de se ressaisir.

Les neurones d'Oliver s'activèrent tous en même temps, tellement à la limite de la surchauffe qu'il ne remarqua pas la lumière baisser encore jusqu'à ce que les partenaires du films soient annoncés. Ses doigts se crispèrent sur le siège vide de Blaise alors qu'il se rapprochait encore plus de Pansy.

- Pansy, quel autre gars ? chuchota-t-il prestement, priant pour que son intuition soit fausse.

La brunette le regarda comme s'il était un demeuré.

- Ben l'autre gars qui était à la soirée avec toi. Son collègue, tu sais ? Celui avec les dents de travers qui nous a aidé à ranger.

Oliver eut soudain l'atroce impression que le sol se dérobait sous ses pieds.

- Oh putain de merde... murmura-t-il en se laissant retomber sur son siège.

Sur l'écran, les premières images s'affichèrent enfin, marquant le début du film. Son envie de s'enfuir le plus vite possible était contrebalancée par la peur de déranger les autres gens s'il devait partir tout de suite. D'habitude, il se mettait toujours en fin de rangées de manière à pouvoir bouger sans gêner les gens. Blaise l'avait coincé en lui demandant de se mettre derrière lui, au milieu. Des gens à droite, des gens à gauche. Oliver était cerné. Foutue manies qui lui pourrissaient la vie...

Le film débuta sur l'image d'un œil gris et Oliver se glaça aussitôt. Pas à cause de l'image, même si elle était en soit dérangeante. Mais à cause de la musique. La bande son était terrible, angoissante. Elle résonnait, puissante, dans la salle de cinéma qui était d'un coup devenue silencieuse. Oliver se ratatina sur son siège, sentant déjà son cœur battre à plein régime dans sa poitrine. D'un coup, il s'arrêta de manger, sentant venir le moment où quelque chose de sûrement dégueulasse allait survenir et lui donner envie de vomir - ou de s'étouffer avec un bonbon, comme lorsqu'il avait regardé "L'Exorciste". Le personnage chauve tournait sur lui-même, découvrant la pièce étrange où il était et d'instinct, Oliver détourna le regard de façon à ne voir le film que du coins de l'œil.

Des jurons étouffés le dérangèrent et il remarqua que Blaise repassait devant lui, se laissant tomber sans grâce sur le siège. Le boucan qu'il produisit en essayant d'ouvrir son sachet de bonbons amusa Oliver assez qu'il se détende et ramène son attention sur le film. Le personnage tournait une sorte de manivelle... Oliver eut un violent sursaut sur son siège en sentant une main se poser sur sa cuisse, un cri coincé dans la gorge lorsqu'il reconnu la mâchoire caractéristique de Marcus Flint qui était assis à un siège d'écart de lui. "Putain de merde mais qu'est-ce qu'il fout là ? Quand est-ce qu'il est arrivé ? Pourquoi je ne l'ai pas vu avant ?" Ses pensées s'affolèrent dans sa tête, mais le bruit de la porte s'ouvrant dans le film lui fit ramener son attention vers celui-ci.

Au bout d'une minute et demi de film, il transpirait déjà abondamment, son esprit n'arrivant pas à assimiler les informations en même temps. Une partie criait : "Non, le Chauve, regarde pas la-dedans, tu vas crever c'est obligé !" et l'autre répétait en boucle "Pourquoi Marcus est à côté de moi ? Putain Blaise je vais te crever !".

Malgré lui, son visage était rivé les yeux grands ouvert sur l'écran où l'homme reculait, laissant la trappe se refermer. Deux minutes du film. Il flippait déjà sa race, au point qu'il sentit à peine Marcus se rapprocher de lui.

- Hey, salut, murmura ce dernier, mais Oliver était obnubilé par le film.

- Salut.

Le Chauve ouvrit plutôt la trappe en dessous de lui. Bon sang, il allait crever, c'était sûr ! Mais tué par quoi ? Un monstre ? Un esprit vengeur ? Oliver était littéralement accroché à son siège, perdu dans le film, partagé entre l'envie de ne pas regarder et la curiosité maladive de savoir ce qui allait se passer. La bande son faisait battre son sang à fond dans tête, comme s'il vivait le film. La trappe du dessous s'ouvrit avec un bruit qui lui colla la chair de poule et il passa sa langue sur ses lèvres. Sa jambe gauche tremblait, il était mort de trouille. Il sentit à peine la main de Blaise se faufiler entre les sièges, par l'arrière, mais il la saisit immédiatement. A la manière dont ils serraient tous les deux comme des malades, Oliver en déduisit que Blaise avait au moins autant peur que lui.

La trappe dévoila une pièce rouge sang. C'était dans celle-là que le Chauve allait mourir, c'était obligé ! Rouge c'était... morbide. Un piège, il allait mourir, Oliver en était persuadé ! La main de Blaise lui broyait les doigts mais il ne réussi pas à se dégager. Il était dans le film...

- Vous foutez quoi ? chuchota Marcus en fronçant les sourcils à la vue de leurs mains enlacées.

- Solidarité masculine, répondit simplement Oliver.

Le chauve laissa la trappe se refermer, laissant Oliver soupirer de soulagement. Il se tendit à nouveau lorsqu'il tenta une autre trappe. Cette fois, Oliver n'avait plus trop peur. C'était la troisième trappe, le bruit lui était familier à présent.

- Je suis content de te voir, fit Marcus en se penchant vers lui pour parler à voix basse.

Mais un bruit bizarre se faisait entendre. C'était quoi, ça ? D'où provenait le bruit du film ? Un genre de minotaure qui allait bouffer le Chauve ? Tant que ça n'étais pas un cochon, Oliver n'aurait pas peur. En théorie.

- Ne mets pas ta tête dedans... grogna Oliver en cachant à moitié ses yeux avec ses doigts, de manière à ne voir qu'une petite partie de l'écran.

Le Chauve allait mourir, il le sentait !

- C'est bon, il est entré dans la pièce rouge, fit Marcus. Il est encore en vie.

- J'ai pas besoin d'un commentateur, s'offusqua Oliver.

- T'es sûr ? Parce que t'as l'air de flipper ta race, assura l'autre.

- Va te faire foutre !

Le bruit de la trappe se refermant ramena l'attention d'Oliver sur l'écran. Il pouvait sentir la tension dans chacun de ses membres et savoir Marcus à côté de lui n'arrangeait pas les choses.

- Je n'ai pas peur, mentit-il en reposant sa main de manière à voir la totalité de l'écran.

Le Chauve avança d'un pas tandis que la jambe d'Oliver tremblait de plus belle. Puis il y eut le bruit métallique et l'arrêt du son un instant. Oliver faillit en sursauter mais la main de Blaise s'étant à nouveau refermée sur ses doigts le fit à la place retenir sa respiration. "C'était quoi, ça ?". Le plan revenant brutalement sur le Chauve fit haleter Oliver sur son siège. Son visage était barré de lignes rouges horizontales. Un couinement pitoyable coincé dans la gorge, Oliver regarda le sang se mettre à couler des coupures avec l'expression horrifiée d'un lapin pris dans les phares d'une voiture. "Non, c'est pas ce que tu crois... il a pas été coupé en rondelles..." Le premier morceau du corps se détachant le fit sursauter et fermer les yeux tandis qu'un geignement d'agonie franchissait ses lèvres. "Il a été coupé en rondelles putain de merde ! Putain de merde !" En l'espace de trois minutes de film, il avait gagné trois mois de cauchemars intensifs.

A présent, Blaise lui broyait tellement la main qu'il ne sentait plus le sang y circuler. Les yeux obstinément fermés, la seule chose qui le fit réagir fut la main qu'il sentit au niveau de son aine.

Ça, ça n'était pas la main de Blaise. Tandis que le film continuait, il ouvrit un œil aussi timide que choqué sur Marcus qui était assit paisiblement à côté de lui, fixant calmement l'écran. Rien dans son attitude ne laissait supposer qu'il le tripotait sous sa veste posée négligemment sur l'accoudoir et qui cachait leur mains.

- T'es en train de me caresser, là ? chuchota Oliver d'une voix blanche.

Il allait vraiment falloir que ce type aille se faire soigner, là !

- Pas du tout.

Oliver vérifia autour de lui que personne ne les regardait. Les gens étaient obsédés par le film. Bande de dégénérés ! Sa main passa sous la veste pour pincer celle de Marcus, lequel eut une grimace peu amène sans pour autant tourner le regard de l'écran. Comment pouvait-il regarder ce film normalement ? C'était un robot ? Un Terminator ?

- Ah ouais ? siffla Oliver en se penchant vers lui. Et ta main près de mon chibre c'est pour me dire bonjour ?

La vitesse à laquelle Marcus se pencha à son tour sur lui le fit reculer rapidement, tandis que les yeux sombres le fixaient avec un air difficile à déterminer. Comme s'il était à la fois agacé et amusé. Un sourire narquois dévoila deux dents de travers qu'Oliver ne put s'empêcher de fixer avec une fascination malsaine.

- C'est pas ton chibre que je cherche, c'est ta cuisse, répondit simplement Marcus en fixant ses lèvres à son tour.

Oliver sentit ses joues chauffer sans qu'il ne puisse savoir si c'était de honte ou de colère.

- T'es en train de me caresser dans un cinéma, avec plein de gens autour de nous, grogna-t-il entre ses dents. Devant un film où un mec vient de se faire mettre en petit morceaux avec sa chairs et ses organes qui se détachent lentement les uns des autres ? Mais t'es un gros malade..., conclut-il en essayant d'éloigner la main intruse.

Quelque chose pétilla dans les yeux de Marcus et Oliver sentit qu'il allait regretter la suite quand il se pencha à son oreille et lui murmura :

- Ce que je vois surtout, c'est que depuis ma main est là, ta jambe a arrêté de trembler, susurra Marcus.

Oliver en oublia un instant de respirer avant de se ressaisir.

- N'importe quoi. C'est faux, fit-il en chassant la main de Marcus puis en croisant ses bras sur son torse dans une attitude protectrice.

Le brun ne sembla pas se décourager puisque son bras atterrit sur le dossier d'Oliver, faisant grincer des dents ce dernier.

- Tu sais que c'est vrai, ricana Marcus tant en passant un bras derrière son siège.

Le geste troubla Oliver au-delà des mots. Il ne pensait quand même pas l'emballer devant un film d'horreur ?

- Qui te dis que ce n'est pas la main de Blaise ? le défia Oliver, désireux d'avoir le dernier mot.

- Blaise a lâché ta main, je crois bien...

Effectivement, Oliver regarda la main qui tenait auparavant la sienne faire une tentative foireuse d'étirement afin de passer son bras derrière Pansy. Oliver roula des yeux tandis que la jeune femme se blottissait dans ses bras. Plus tard, tandis qu'un des personnages se faisait asperger le visage à l'acide, Oliver regardait entre ses doigts Blaise rouler le patin du siècle à Pansy, comme si de rien n'était. Le reste du film se passa sans qu'Oliver ni Marcus n'échangent aucune parole, même si ce dernier n'avait pas enlevé son bras du dossier d'Oliver.

oOo

- Je crève la dalle ! s'exclama Blaise en ouvrant sa braguette devant l'urinoir.

- Tu as toujours faim de toute façon, bougonna Oliver en l'imitant à ses côtés.

La séance de cinéma venait juste de se terminer et Oliver avait marché mécaniquement vers les toilettes, accompagné de Blaise. Le film l'avait remué au plus profond de son être - dans tous les sens du terme. La seule chose qui lui venait à l'esprit à la fin du visionnage était :"POURQUOI ? POURQUOI LE FILM ? C'ÉTAIT QUOI LE TRIP DU RÉALISATEUR ?".

- Il n'était pas si terrifiant que ça, en fait, commenta Blaise.

- Vas dire ça à ma main. Tu me l'a tellement broyée que je crois que je vais avoir un bleu !

- Je peux te retourner le compliment, s'offusqua Blaise. Mais j'avoue qu'il y avait deux-trois passages un peu flippants...

- Deux-trois ? s'écria Oliver en refermant sa braguette après avoir tiré la chasse. Tu te fous de moi ? Je vais faire des cauchemars du mec qui finit en rondelles. En plus j'ai rien compris à la fin, il est super perturbant ce film...

Son ami haussa les épaules en murmurant qu'il n'en avait vu que la moitié, occupé comme il était avec Pansy... Ce qui rappela à Oliver pourquoi il voulait le voir en privé. D'une force dont il ne soupçonnait pas l'existence jusqu'ici, il attrapa son ami par le col de sa chemise et approcha son visage du sien, un air furieux sur le visage. Comme chaque fois qu'il savait qu'il avait fait une bêtise, Blaise rentra sa tête entre ses épaules avec un sourire se voulant innocent.

- Comment as-tu pu oser inviter Marcus aussi ? siffla Oliver.

- Marcus ? fit Blaise en haussant les épaules. Curieux hasard...

- Blaise, menaça Oliver en serrant la mâchoire. Pansy m'a tout dit. Comment tu as pu faire ça ? Je t'ai dis que je ne voulais plus le voir !

- J'étais pas sûr que tu accepterai ! se défendit Blaise. C'était une garantie. Quoi, tu ne me crois pas ?

- Autant que je crois au Père Noël ! cracha Oliver en le lâchant. Je vais rentrer chez moi, je suis du matin demain. Je bosse, moi.

Tout en se lavant les mains à son tour, Blaise grommela que lui aussi avait un travail, bien plus physique que le sien d'ailleurs ! En trainant les pieds et en s'échangeant des coups de poings dans les côtes, ils rejoignirent Pansy et Marcus qui les attendaient devant le cinéma. Les deux discutaient tranquillement tandis que Marcus fumait, négligemment appuyé contre un pilier. Sentir l'odeur familière du tabac donna aussitôt envie à Oliver l'envie de l'imiter, aussi il fouilla les poches de son pantalon pour tirer son paquet de cigarette, le temps que Blaise et Pansy débattent du reste de la soirée.

Personnellement, Oliver s'en battait royalement. Il allait rentrer chez lui tranquillement et passer le reste de la soirée en compagnie de son chat, à essayer de ne pas flipper quand la tarée du dessus écouterait ses musiques sataniques. Enfin, c'était son projet jusqu'à ce que :

- J'ai une faim de loup, s'exclama Blaise. Un petit restau ça vous dit ?

Pansy ouvrit de grands yeux surpris tandis qu'Oliver commençait à ouvrir la bouche pour refuser. Ce fut cependant Marcus qui fut plus rapide.

- Eh bien je pense que nous avons eut une soirée riche en émotion et... (Marcus tressauta un instant et Oliver hallucina en voyant que son pied était écrasé -ou plutôt broyé - par celui de Blaise qui arborait toujours son sourire Colgate) ce serait avec plaisir que j'accepte, pour ma part. Du moins... termina Marcus en dégageant son pied.

La déception qui traversa le regard de Pansy peina vraiment Oliver tandis que Blaise resplendissait.

- Fabuleux ! s'écria-t-il. Oliver va rester en plus, vu que nous rentrons ensemble. N'est-ce pas ?

- Évidement, répondit ce dernier avec un sourire crispé. Je peux te parler une minute ?

- Non, j'ai vraiment faim ! Il y a un restaurant sympa, plus loin ! Suivez-moi.

Et sans laisser le temps à personne de suggérer une idée, il s'élança en tirant Pansy par le bras, laquelle se retourna brièvement en leur adressant une mine désolée. Oliver balaya l'air de la main, se disant qu'en matière de bouffe au moins, il pouvait faire confiance à Blaise.

oOo

Ne. Plus. Jamais. Faire. Confiance. A. Blaise.

- Très bien, vous voulez que je répète les règles une dernière fois, alors ? leur demanda le gars louche tandis qu'Oliver lui tendait son billet à contre- cœur.

Vingt francs de plus, envolés à tous jamais dans la main crasseuse, de ce gars crasseux - Stan Rocade, si Oliver avait tout suivit - qui lui rendit un sourire semblable à celui de Jack Torrance dans Shining.

- Non, c'est bon, répondit Blaise en attrapant Oliver par la cou et en l'entrainant avec lui dans le bus à moitié délabré le temps que Pansy et Marcus paient leur entrée.

Tandis qu'Oliver marchait automatiquement vers le fond du bus, son cerveau passa en revue les derniers évènements de la soirée afin de savoir précisément là où tout avait commencé à merder. Tout d'abord, ils n'avaient pas trouvé de restaurant car ni Blaise ni Pansy n'avaient trouvé leur bonheur, et qu'Oliver s'était décidé à bouder sa malchance en choisissant de ne tout simplement plus parler et de suivre comme un mouton. C'était donc Marcus qui avait tranché en leur imposant sèchement d'aller manger au premier kebab qu'ils trouveraient - "Bordel vous me cassez les couilles ! Il va plus rien y avoir d'ouvert et j'ai faim donc ce sera kebab sinon je me casse, compris ?" le tout associé avec un visage qui aurait rendu aimable un gardien de prison à côté. Donc personne n'avait répliqué et tandis qu'Oliver questionnait le restaurateur sur son récent contrôle sanitaire - ce n'était pas sa faute, à sa décharge, la viande ne tournait plus sur la broche quand ils étaient arrivés ! - Pansy discutait vivement avec Blaise d'un plan qu'elle avait pour terminer la soirée en beauté.

Plan qu'Oliver n'avait pas écouté le moindre du monde, occupé qu'il était à vérifier que le cuisinier ait bien mis ses gants avant de tripoter leurs sandwichs. Il se mit donc à dire oui quand on lui demanda s'il voulait rentrer. Mais ce qu'il n'avait pas compris en fait, c'était qu'ils rentraient pour prendre la voiture - le scooter pour Marcus - pour aller ailleurs, ce qu'Olivier ne réalisa enfin qu'une fois qu'ils furent dans la voiture et qu'il demanda, la bouche pleine de pain au fromage grillé, pourquoi ils prenaient la rocade dans le mauvais sens.

Et c'était ainsi que, Marcus, Blaise et Pansy, armé de leurs kebabs suspects avaient entrainé Oliver et son pauvre panini à deux francs cinquante pour aller visiter un circuit de l'horreur à huit kilomètres de la ville.

- Désolé mais c'est un truc à deux et je pouvais pas le faire seul, se justifia Blaise en coinçant Oliver contre la fenêtre crasseuse du bus.

- Un circuit de l'horreur... répéta Oliver. Mais t'es complètement malade !

- Pansy adore ça, et autant j'ai pu supporter le film, ça je suis pas sûr, continua Blaise en lui tendant un dépliant miteux qui avait surement déjà servi.

Avec un regard assassin, Oliver lui arracha le prospectus des mains et se mit à le regarder sous la lumière jaune glauque pendue au plafond.

- "Bienvenu dans la foret modite d'Az..." Y a une faute d'orthographe dès la première phrase, Blaise ! T'es sûr que c'est un truc officiel ? Ils ont pas l'air d'avoir une licence, si il faut ce sont de dangereux psychopathes qui enlèvent des jeunes pendant la nuit. Ils vont vendre nos organes, Blaise...

Son ami lui tapota l'épaule, mais son visage n'incita pas Oliver à se calmer.

- Maman a toujours dis de ne jamais s'arrêter à la première faute. Lis la suite. Pour voir... ajouta son ami.

Dépité, Oliver pris sur lui en lisant la suite, sa voix perdant d'intensité au fil des mots.

"Bienvenue dans la forêt modite d'Azkaban où le bus va vous conduir prochainement. C'est un lieu sombre dans lequel vous devrer visité l'ancien asile du même nom. On raconte qu'un savent fou aurait fait des expériences sur des malades, dissociant leurs corp de leurs âmes. Si les esprits vous le permette, vous devrez aider les lieutenant chargés de l'enquête a retrouver le corps du savant fou, Gellert Grindelwald.

Par équipe de deux, vous exploreré les salles armés uniquement d'une lampe torche et d'un lieutenant de police qui vous aidera à mener l'enquête.

Frissons, peures, vous allez frôler la mort - ou peut-être même mourir sans réussir l'enquête. Render-vous à la sorti.

Bonne chance."

Et rajouté en dessous, au stylo bille :

*Attention aux trous. Pas de remboursement en cas de blessures.

- Blaise, se mit à gémir Oliver. C'est bourré de fautes, on peut pas faire confiance à gens-là. En plus ils ont demandé que du liquide...

- Pansy les connait, je lui fais confiance, répondit son ami alors que Marcus et Pansy les rejoignait.

- Prêts pour le grand frisson ? leur demande Pansy avec un sourire resplendissant.

Avec une furieuse envie de crier "NON !", Oliver remarqua alors la fameuse étincelle dans le regard de Blaise. Celle qu'il n'avait que pour Pansy. Et il se dit alors que si Pansy les connaissait, il pouvait essayer de lui faire confiance. Et d'aller faire le circuit de l'horreur. Au pire, la voiture de Blaise était juste sur le parking de la station essence. On les retrouverait vite.

- Alors, galérien, lança Marcus en prenant place devant lui, légèrement de travers pour le regarder. On a peur des fous ?

Ce fut peut-être par orgueil, ou pour prouver son courage, mais Oliver bomba le torse.

- Pas du tout. Et je ferais gagner mon équipe, tenta-t-il.

- Parfait ! Pansy et moi sommes ensemble, annonça Blaise.

Et Oliver lui broya le pied sans ménagement.

oOo

- Tu... es fan de Scorpion, alors ? lança Marcus au bout d'un moment.

Sa remarque surprit Oliver un instant.

- Oui, j'aime beaucoup.

- Et tu danse très bien dessus, rigola son camarade, le faisant se stopper en plein milieu du trottoir à moitié défoncé.

- Je quoi ? s'écria Oliver.

Marcus s'était arrêté aussi, les bras écartés et avec un sourire qu'Oliver aurait voulu arracher de sale gueule.

- Tu as dansé sur la table quand tu étais bourré la semaine dernière. Here I am, Rock you like a hurricane, chantonna Marcus en bougeant ses hanches comme un danseur de salsa version porno et Oliver serra les poings en sentant le rouge lui monter au nez.

Mais il se contenta de fermer les yeux et de s'imaginer lui coller un poing dans le visage. Puis finalement, il se dit que les rêves c'était bien, mais autant aller au bout, alors il banda son poing et le laisser fuser droit vers les dent blanches de Marcus. Sa tentative tomba minablement à l'eau quand Marcus lui attrapa simplement, tragiquement et horriblement le poignet, avec une facilité déconcertante qui donna à Oliver une furieuse envie de meurtre.

- Je crois qu'on est arrivé, signala Marcus en lui lâchant le poignet.

Oliver se tourna vers l'immense bâtiment gris au bout de la route. Le bus les avait déposés à l'entrée d'un vieux domaine désaffecté bordé de grillages. Ils avaient alors longé un chemin goudronneux à l'aide de la lampe torche qu'on leur avait fournie et qu'Oliver mettait un point d'honneur à serrer entre ses mains comme si sa vie en dépendait. Selon le plan de parcours qu'on leur avait donné, ils étaient sensés arriver devant l'entrée de ce qui se faisait nommer "L'ancien asile d'Azkaban". L'immense bâtiment avait plusieurs fenêtres caillassées, et une pancarte avec le nom avait été grossièrement installé sur le balcon au-dessus de l'entrée. Dans l'obscurité autour, l'endroit semblait horrible, crade et Oliver n'avait aucune envie de mettre les pieds dedans.

- Je me demande par où Blaise et Pansy sont allés, commença Marcus en s'approchant de la vieille porte, à la recherche d'une ouverture.

Oliver fit un tour sur lui même, essayant de camoufler son malaise en cherchant comment entrer.

- Leur itinéraire indiquait une cave. Il doit y avoir un autre accès derrière ce bâtiment. On doit pouvoir se retrouver à un moment...

- C'est pas bête, souleva Marcus.

Il posa sa main sur la poignée au moment où Oliver sursauta après avoir balayé le chemin de sa lampe. Il était sûr d'avoir vu du mouvement. Les yeux fixés sur un point qu'il essayait de distinguer, il lança derrière lui :

- Il doit y avoir une clé, quelque part. A mon avis, ça serait trop simple que ça s'ouvre...

Comme pour le contredire, un cliquetis métallique se fit entendre dans son dos.

- Ça s'est ouvert... constata Marcus.

- C'est quoi cette merde ? s'intrigua Oliver en se tournant finalement vers lui, pensant qu'il plaisantait.

Mais la porte était bel et bien ouverte, et Marcus la poussa totalement en passant un pied dedans. Oliver ne le suivit pas de suite, ses yeux étant occupés à évaluer la taille de la toile d'araignée sur l'encadrement de la porte alors qu'il sentait sa tête rentrer entre ses épaules.

- J'aime pas cet endroit...

Devant lui, Marcus eut un sourire plein de dent avant de rentrer dans le hall, obligeant Oliver à le suivre malgré lui. Même si ça lui faisait de la peine de le reconnaitre, il ne voulait pas rester seul. Chaque bruit suspect le faisait sursauter et mine de rien, la présence de Marcus avait un petit quelques chose de réconfortant. Peut-être était-ce à cause de ses larges épaules et de sa carrure solide. Au cinéma, Oliver avait pu voir qu'il était sacrément musclé des bras, comme s'il faisait de la musculation. Intérieurement, Oliver se disait qu'il ferait un bon rempart, voir un excellent garde du corps. C'était même seule personne capable de les protéger tous les deux si la mise en scène était vraiment un moyen de les enlever pour voler leurs organes... Alors Oliver le suivit comme son ombre, mettant un point d'honneur à le guider avec la lampe, explorant les lieux comme un aventurier.

Quand finalement il fut habitué à l'obscurité, la crasse et son fameux mantra "C'est une mise en scène, c'est une mise en scène", ils se trouvèrent bloqué dans un cul de sac, sans même avoir pu réaliser comment ils s'étaient trouvés là. Il était tout simplement perdu dans ses pensées pour avoir réfléchit à l'itinéraire, ses pas suivant automatiquement ceux de Marcus.

- C'est peut-être pas le bon passage, réfléchit Marcus.

- On ne devait pas avoir un guide ? se rappela alors Oliver en balayant à nouveau l'intersection de sa lampe.

- Stop ! s'écria Marcus.

Il n'en fallu pas plus à Oliver pour se statufier, son corps se raidissant automatiquement, tel un instinct primitif.

- Repasse la lampe la-haut.

- Tu veux pas qu'on s'en aille ? demanda plutôt Oliver.

Car sérieusement, il n'avait pas envie de continuer. Il n'avait même pas eu envie de venir faire un circuit d'horreur miteux et mal organisé. Il était fatigué, et les plans de Blaise commençaient à réellement lui taper sur les nerfs.

- Tu veux partir ? demanda Marcus en levant un de ses épais sourcils.

- J'ai pas envie d'être ici. Viens, on s'en va.

- T'as peur ?

Oliver hésita un instant avant de répondre, puis décida qu'il était fatigué et qu'il voulait juste s'en aller. Blaise s'en remettrait.

- Franchement je ne voulais pas venir ici. C'est pas le genre d'activité que j'aime. J'aime pas me faire peur, osa-t-il ajouter.

Et alors qu'il s'attendait à ce que Marcus se moque de lui et lui dise qu'il n'était qu'un trouillard, le jeune homme glissa simplement une de ses mains dans sa poche, l'autre gargouillant distraitement sa barbichette.

- Je te trouve quand même courageux. Ton problème c'est que tu ne sais pas dire non. Mais je ne te jette pas la pierre, je commence à connaître Blaise et ses techniques de persuasion... Mais bon, je voulais pas venir non plus alors on peut retourner aux voitures.

Les yeux grands ouvert, Oliver le regarda faire demi-jour avec sa nonchalance bien caractéristique, et Oliver le suivit bêtement, se demandant comment les choses pouvaient lui glisser dessus sans sembler réellement l'atteindre.

- Je te propose qu'on voit avec le gars du bus, continua Marcus en sortant par la vieille porte. Je suis pas sûr qu'il nous ramènera gentiment vers le parking. Il nous faudra attendre Pansy et Blaise.

- Ça me va tant que je ne dois plus avoir de contact de type physique avec lui... grommella Oliver en accélérant pour marcher à sa hauteur.

Marcus se tourna vers lui, un sourcil levé.

- Comment ça ? C'est pas un canon de beauté mais t'es vache quand même.

Oliver ouvrit de grand yeux offusqué en s'arrêtant de marcher. Marcus l'imita, perplexe.

- Mais c'est pas une question de physique ! Tu as vu l'état de ses mains ? Et de ses ongles noirs ? Et l'odeur ? Il n'a pas dû prendre de douche depuis un sacre moment !

Et alors qu'il pensait que Marcus s'était vexé, Oliver le vit tout simplement éclater de rire.

- Sérieusement ? C'est ça qui te dérange chez ce gars ?

- Mais enfin ! s'exclama Oliver sans réfléchir. J'ai pas l'impression d'être compliqué ! Tout ce que je demande c'est un minimum d'hygiène et de propreté !

- Je prend deux douches par jours et je me lave les dents après chaque repas' répondit Marcus avec un clin d'œil appuyé.

- ... Hein ? fut la chose la plus intelligente et intelligible qu'Oliver fut capable de prononcer, tant la remarque de Marcus était inattendue.

Avant qu'il n'ait le temps de réfléchir à quoi répondre, Marcus le tirait par la manche sur le chemin pour reprendre leur route.

- Allez-y on avance, cet endroit me rassure pas vraiment.

Et pour la deuxième fois de la soirée, Oliver le suivit attentivement jusqu'au bus, dans le chemin inverse de celui qu'ils avaient parcouru juste avant.

oOo

- Je n'y crois pas ! s'exclama Oliver en tapant sur ses cuisses.

- Mais si je te jure, repondit Marcus en levant son index. C'est comme ça qu'on s'est vu la première fois. Et je m'étais dis que ça promettait vachement sur le reste du séjour...

- C'est à la fois tellement énorme et en même tant tellement posssible, rit Oliver en passant ses bras derrière sa nuque, le nez vers les étoiles.

Leur retour au bus était tel que Marcus l'avait prédit, le chauffeur bizarre aux allures de ramoneurs leur avait dit qu'ils ne rentreraient qu'une fois que Blaise et Pansy seraient revenus, aussi Marcus et Oliver s'était installés à côté, dans un endroit où l'herbe n'était pas trop sale. S'en était suivi un silence pitoyable avant que Marcus ne demande à Oliver comment il avaient rencontré Blaise. A partir de ça, s'en était suivit une discussion ou plusieurs sujets de conversations à dîner défilés, puis Marcus avait raconté comment il avait rencontré Blaise sur son lieu de travail quand ce dernier lui avait demandé de l'aide pour tuer une araignée minuscule dans la cuisine du centre de loisir.

Le temps passant, Oliver sentait la fatigue le gagner, alors il s'était allongé, imité par Marcus. Il se surpris même à penser que la soirée n'était pas désagréable que ça après tout. Il ne pensait plus au film archi perturbant, ni à la maison, ni a la broche qui ne tournait plus au restaurant kebab et qui devait être fleurie de salmonelle. Peut être que c'était parce qu'il était la seule personne avec lui pour tuer le temps, mais Oliver commençait à trouver Marcus plutôt sympathique. C'était un gars simple, qui ne se posait pas réellement de questions et prenait la vie comme elle venait. Et il aimait Socrpion, Nirvana et reconnaissait que Leornado Di Caprio était un excellent acteur, en plus d'être incroyablement sexy.

- C'est fou comme s'éloigner juste de 15 kilomètres permet d'avoir un ciel plus dégagé qu'en ville, commenta Marcus après un instant de silence appréciable.

- Oui c'est vrai. On voit un peu mieux les étoiles. Je crois que c'est la grande ours là non ? fit Oliver en tendant le doigt vers le ciel.

- Oui c'est ça. Et plus bas, vers la, il y a Cassiopée.

Les yeux louchant sur les billes du ciel, Oliver secoua la tête.

- Je la connais pas celle la.

- Alors regarde vers la, expliqua Marcus en désignant un amoncèlement d'étoiles. Tu vois l'espèce de W ici ? C'est Cassiopée.

- Non je la vois pas, rigola Oliver, totalement perdu. Mais celle qui je connais c'est les trois alignées. Mais je connais pas leur nom.

Un bruissement dans l'herbe l'informa que Marcus s'était rapproché avant que son bras passe dans son champs de vision pour désigner une autre partie du ciel.

- Orion ?

- Quoi c'est ça Orion ? s'exclama Oliver.

L'autre le regarda avec un sourire amusé.

- Ben oui pourquoi ?

Oliver haussa les épaules, un peu déçu.

- Je sais pas, on m'avait vendu ça comme étant plus épique. Orion ça en jette comme nom. Donc trois petites étoiles...

- Si tu veux monter d'un niveau après, je peux te montrer les signes astrologiques, proposa Marcus et bon dieu, Oliver finit par se dire qu'en plus de ça il était vachement cultivé.

Et peut être était-ce un numéro de charme ringard, ou une réelle passion, ou encore que Marcus parlait beaucoup trop, mais toujours est-il que quand les lèvres de Marcus se posèrent sur les siennes, Oliver trouva que même si c'était d'un cliché absurde, c'était toujours beaucoup plus intéressant que de chercher un W dans le ciel.

Et ce fut même par curiosité qu'il repondit malgré lui au baiser.

Mais ça, ce n'était que sa version des faits.