Epilogue
– Poussez, c'est presque fini ! Je vois la tête ! encouragea le médecin penché entre les cuisses de Nymphadora.
Remus grimaça en sentant la jeune femme serrer sa main. Il ne put s'empêcher de penser que la souffrance de l'accouchement était partagée. Combien d'hommes avaient été blessé dans le processus ? Des bras cassés, des morsures, des coups. Un simple regard sur le visage déformé de douleur de celle qui s'apprêtait à donner la vie lui fit regretter d'avoir comparé leurs deux situations. Se faire broyer la main ne pouvait être comparé à ce qui était en train de se dérouler sous ses yeux. Son enfant allait naître. Dans un ultime cri de douleur, Nymphadora parvint à expulser l'enfant. Petite boule informe blanche ensanglantée et silencieuse. Il regarda le médecin la manipuler délicatement, coupant le cordon qui l'unissait encore à sa mère. Remus lâcha la main de la jeune femme. Il n'était pas d'un naturel violent mais voir l'homme assener une claque à l'enfant le révolta. Il se dirigea vers le médecin prêt à lui rendre la pareille mais il se figea brusquement. Les cris du bébé retentissants le clouaient sur place. Il était là. Son fils. La sage-femme le débarrassa du sang avant de le mettre dans les bras de sa mère.
– Comment tu veux l'appeler ? lui demanda Remus une fois que le petit monstre fut calmé.
– Remus non... je...
– On avait dit que tu choisirais, l'interrompit avec douceur le jeune homme.
– Ted comme mon père, fini par dire la jeune femme tout en berçant l'enfant.
– Teddy, chuchota doucement Remus en se penchant vers l'enfant.
– Prends-le... il est à toi, dit-elle en lui tendant, sa voix se brisant légèrement.
Remus hésita un instant. Serait-il à la hauteur ? Il était si petit, si fragile. Et s'il le faisait tomber ? Ou qu'il le serrait trop fort ? Le poids des responsabilités le fit chanceler. Il n'était plus aussi certain de parvenir à être un bon père. Il était peut-être encore trop jeune pour ça. Une petite voix dans son esprit lui chuchota que James et Lily avaient eu Harry à vingt ans à peine. Tout comme Frank et Alice et leur petit Neville. Même Marlène et Dorcas avaient adopté Mercredi un an plus tard. Il aurait lui-même bientôt trente ans. Nymphadora était bien plus jeune. Dix-huit ans à peine. Elle débutait tout juste ses études dans le but de rejoindre les forces d'élite de l'armée britannique. Il s'en était voulu de l'avoir mise dans une telle position mais elle avait insisté. Elle voulait le faire. Pour lui. Pour eux. Ce cadeau qu'elle lui faisait, il ne pouvait le refuser par peur. Il avait vu ce que la peur pouvait faire comme dégâts lorsqu'elle l'emportait sur l'amour. L'adolescent qu'il était en avait fait les frais. Cette peur, ce ne fut pas celle d'une femme face à un amour qu'elle ne comprenait pas. Walburga avait perdu tout droit sur son "fils" le jour où celui-ci avait quitté l'affreux manoir des Black. Sa peur et son intolérance n'étaient pas parvenu à les séparer. Le triomphe de leur amour ne rendit pas la trahison de leur ami moins douloureuse.
Il lui arrivait encore de s'en vouloir. Peut-être que s'il avait agi autrement... s'il avait su voir plus tôt les signes, il serait peut-être parvenu à éviter le gâchis monstrueux qui s'en était suivi. James lui répétait alors qu'il n'était pas coupable. Que la haine de celui avec qui il avait tout partagé sans aucune retenue remontait à trop loin. L'histoire était tragique. La fin l'était d'autant plus. Son père avait détruit la vie d'un homme. Son fils s'était chargé de le venger. Rien de ce qu'il aurait pu dire ou faire n'aurait fait changer d'avis le garçon. Lyall Lupin n'avait fait que son travail. Il avait enquêté. Le crime était là. Qu'il soit celui qui l'ait découvert ne changeait en aucun cas la fin. Si ça n'avait pas été lui, quelqu'un d'autre aurait découvert la vérité. Une part de Remus aurait aimé que ce soit quelqu'un d'autre. Mais il finissait toujours par s'en vouloir de désirer une telle chose. Il n'aurait pas voulu que ce cauchemar arrive à qui que ce soit d'autre. Il n'aurait pas souhaité ça, même pas à son pire ennemi. Et sans tout ça, peut-être qu'il ne serait pas là.
C'est donc en laissant le passé derrière lui qu'il prit cet enfant qui était désormais son futur dans ses bras, le berçant tendrement, se promettant de protéger Teddy. Il espérait que son fils serait épargné. Qu'il n'aurait pas à croiser la route d'un individu semblable. Il espérait que l'enfant se ferait des amis loyaux. Comme James l'avait toujours été pour lui. Il avait été celui qui avait découvert le pot aux roses. Il avait trouvé suspect l'arrivée de Walburga. C'était comme si quelqu'un lui avait dit que son déshérité de fils galochait un garçon dans le réfectoire. Elle savait où les trouver et quand les trouver. Ça avait mis la puce à l'oreille du chef des Maraudeurs. Il lui avait fallu peu de temps avant de découvrir que la rumeur sur l'homosexualité de Remus avait été révélé par la même personne qui les avait trahis une première fois quelques mois avant cela. Une trahison que Remus avait payée durement. Greyback utilisant leur petite escapade nocturne comme moyen de pression sur le garçon. La seule part de mystère qui demeurait été celle concernant le mobile. Pourquoi celui qu'ils avaient cru leurs amis les trahiraient-ils ainsi ? La réponse n'avait pas tardé.
Lorsqu'il avait rejoint les bancs de Poudlard, Peter Pettigrow n'était pas pauvre. Son père était un juge influent mais véreux. Lyall Hope, un jeune inspecteur qui venait tout juste d'obtenir sa plaque, découvrit la vérité sur les agissements douteux du juge et révéla au public les pots de vin onéreux qu'avait accepté celui-ci au cours de sa carrière. Destitué et condamné, la totalité de ses biens avaient été saisi pour dédommager les victimes de ses jugements plus que subjectifs. Dumbledore avait, dans sa grande bonté, permis à Peter de poursuivre ses études à Poudlard, lui attribuant une bourse. Remus ne savait pas depuis combien de temps exactement son ami songeait à se venger mais le transfert du fils de celui qui avait envoyé son père en prison fut décisif. Aujourd'hui Peter croupissait dans une cellule, pour complicité de viol et Remus n'en éprouvait aucune joie mais il se promit de ne plus en éprouver de la tristesse. Il posa son regard sur l'enfant, fasciné.
– Tu as pensé à qui tu voulais comme parrain ? demanda faiblement Nymphadora qui semblait lutter contre le sommeil, épuisée par les dernières heures.
– James bien sûr, répondit Remus. Qui d'autre ?
– James ? s'étonna la jeune femme. Pourquoi ? Il a choisi Sirius comme parrain pour Harry.
– Remus sera le parrain du prochain, répondit Lily qui venait de faire son entrée, suivi par James qui semblait tout aussi impatient de voir le bébé que le petit Harry qui sautait dans l'espoir de l'apercevoir.
Remus se tendit à la mention du jeune homme. Où était ce sombre imbécile. Il l'avait laissé tout seul alors que sa propre cousine accouchait. En effet, Nymphadora était la fille d'Andromeda Black. Tout comme Sirius, elle avait fui la tyrannique famille dans laquelle elle était née. Lorsque la porte s'ouvrit, ce fut pour laisser apparaitre Charlus et Dorea Potter. Les parents de James étaient venus charger de cadeaux mais nulle trace de leur "fils adoptif". Marlène et Dorcas, ainsi que Frank et Alice ne tardèrent pas, apportant dans leur sillage leurs enfant respectifs. La chambre était bondée et toujours aucune trace de Sirius. Allait-il vraiment manquer la naissance de son fils ? Des bruits de pas d'une course effrénée se firent soudainement entendre. Les yeux de tous étaient fixés sur la porte qui s'ouvrit, laissant apparaître l'invité manquant. Il était là. Remus s'approcha de lui.
– Je suis désolé, ma moto refusait de démarrer et je... dit-il avant de s'interrompre en posant les yeux sur l'enfant.
– Sirius... je te présente Teddy. Teddy... voilà ton papa, chuchota Remus en déposant délicatement l'enfant dans les bras du jeune homme qui semblait tout aussi tétanisé que lui quelques minutes plus tôt.
Sirius serra l'enfant contre lui, les larmes aux yeux, lançant un regard rempli de reconnaissance à celle sans qui tout cela n'aurait pas été possible : Nymphadora Tonks. Cette dernière avait accepté d'être leur mère porteuse. Aucun remerciement ne parviendrait jamais à exprimer leur gratitude pour le cadeau qu'elle leur avait offert.
La plus belle chose qui puisse exister au monde à leurs yeux : Teddy Lupin Black.
THE END