Il flottait. Il semblait flotter dans un océan de coton. Non. De nuage. Mais pourtant, il ne reconnaissait pas l'endroit...

-...dreel... Gadreel...

Gadreel. C'était son nom et quelqu'un l'appelait. Qui était ce quelqu'un? Ou étaient-ils tous les deux? Et par son père, comment était-il encore en vie?

-... t'ai sauvé Gadreel...

Gadreel sursauta alors que la voix retentissait clairement dans son esprit. Elle lui était étrangement familière. Pourtant, il n'était pas sûr de l'avoir déjà entendue...

Lorsque ses idées se firent finalement plus claires, il se redressa dans son lit. Un lit. Une couette moelleuse et blanche. Pas un nuage. Il regarda autour de lui. Il était dans une chambre entièrement blanche, aux murs blancs, pratiquement sans aucun meuble. A part le joli lit de bois ou il se trouvait dans sa couette blanche, il n'y avait qu'une table et une chaise du même bois que le lit. Il se tourna vers l'homme qui occupait cette chaise et qui le regardait avec un sourire. Un homme qu'il n'avait jamais vu, aux yeux bruns, aux cheveux courts et bouclés, habillé d'un vieux jean et d'une chemise. Devant lui, sur la petite table, trônait une bouteille et un verre de whisky. Et cet homme, aussi petit et banal semblait-il, exhalait pourtant une sorte de puissance hors du commun...

-...Père?

-Bonjour Gadreel.

Gadreel frissonna. Il avait failli. Il avait échoué, et il avait une nouvelle fois causé plus de mal que de bien. Comment était-il ici? Pourquoi? Il eût un soudain sursaut en pensant à son frère. Il l'avait sacrifié en même temps que lui. Si il vivait, comment pourrait-il se le pardonner?

Dieu, cependant, tempéra son jugement d'un geste.

-Du calme, Gadreel. Ton frère est avec toi. Encore affaibli, comme toi, mais avec toi...

Gadreel fronça les sourcils un instant et ferma les yeux. Oui. Son père avait raison, il sentait encore la faible résonance de la grâce de son frère en lui... Il l'interrogea légèrement, et fut surpris de sentir qu'il ne lui en voulait pas. Mais il avait tout de même perdu...

-Père, pardonnez-moi. Cette fois encore, j'ai fait une erreur et j'ai causé de la souffrance et des morts...

Chuck prit une gorgée de son verre de whisky.

-Allons, Gadreel, nous savons tous les deux qu'il s'agissait, et s'agit encore, d'une guerre. Il n'y a pas de guerre sans blessures et sans morts. Des morts injustes et douloureuses, certes, mais c'est pour cela que vous êtes des combattants. Et heureusement, il y a aussi toujours des survivants. Les Winchester et toi êtes de ceux-la...

-Mais pourquoi!? Vous savez que je ne le mérite pas...

Dieu sourit.

-Vraiment Gadreel? Tu as certes fait des erreurs ces derniers temps, mais ne t'es tu pas sacrifié pour les racheter et mener le bon camp à la victoire? Par ailleurs, crois-tu réellement que je ne connais pas la vérité sur ce qui s'est passé autrefois?

Gadreel frissonna. Autrefois...

-Père?

-Je suis sincèrement désolé de t'avoir laissé si longtemps croupir dans ce cachot, et souffrir sous la torture de ceux qui devraient t'aimer, mais c'était malheureusement nécessaire... Ce qui s'est produit ces derniers temps devait arriver, et tu devais arrêter Métatron, c'était le seul moyen d'amener ce qui va se passer maintenant. Pardonne moi également de ne pas t'avoir ramené tout de suite, mais les conditions n'étaient pas idéales...

-Maintenant? Mais...

Gadreel eût l'impression de s'évanouir de nouveau et s'interrompit lorsqu'il s'aperçut que son corps commençait à disparaître. Il cria.

-Père, attendez! Ou êtes-vous!? Nous avons besoin de vous!

Mais Dieu ne répondit pas à sa question.

-Je ne suis jamais bien loin. Je surveille et j'observe comment mes enfants grandissent. Au revoir Gadreel. Toi et ton frère êtes toujours des anges, mais vous allez devoir vous reposer en tant qu'humains quelques temps...

Gadreel poussa un nouveau cri en voyant son père s'éloigner de lui, même si il savait que c'était en réalité lui qui disparaissait. Et alors qu'il tendait la main vers Dieu pour tenter de le retenir, il disparu complètement. Lorsqu'il revint à lui, il était étendu dans une ruelle, entre deux poubelles...

Vêtu d'un jean, d'un T-shirt crasseux et d'un pull à capuche, Gadreel ressemblait à un SDF, ce qu'il était à cent pour cent. Il tenta de se relever, et gémit de dépit en s'apercevant qu'il était trop faible. Le sang de son vaisseau commençait à tâcher son T-shirt, et le creux dans son ventre était presque insoutenable. C'était cela la faim? Ses yeux se fermaient tout seul et il n'arrivait pas à réfléchir. C'était cela la fatigue..?

Il était incapable de bouger, et il ne put que s'évanouir, épuisé...