« Et pourquoi je ne pourrais pas porter mon costume de Kamala ? La cape, au moins !
— Je t'ai déjà expliqué pourquoi, Alma. Ce n'est ni une fête d'anniversaire, ni le carnaval. Il faut être bien habillé, c'est la tradition.
— C'est avec cette robe que je vais avoir l'air déguisée, bouda la petite fille.
— Je te rappelle que c'est toi qui l'a choisie, rétorqua son père. Et que tu la trouvais "trop belle" quand on l'a achetée.
— Elle est belle, c'est vrai, soupira Alma. Mais je ne vais jamais pouvoir danser avec ça, je ressemble à une poupée dedans ! Papa, s'il te plaît... »
L'enfant leva des yeux implorants vers son père. Voyant Steve prêt à hausser le ton, Tony s'empressa d'intervenir.
« Écoute, Alma, voilà ce que je te propose : tu portes ta robe pour la cérémonie et les photos, et tu te changes pour la fête. Qu'en penses-tu ?
— C'est une idée géniale, Tony ! Euh... Papa, tu es d'accord ? demanda-t-elle d'un ton plein d'espoir.
— Uniquement si tu ne te lances pas dans des concours de grimaces avec Angie pendant la cérémonie, répondit Steve.
— Promis ! Je vais être très sage, tu verras, tu seras fier de moi.
— Je le suis déjà, Alma, sourit son père avant de regarder sa montre. Allez, il va être l'heure de partir pour l'aéroport si on ne veut pas rater l'arrivée d'oncle Buck. Va chercher ta robe, tu te changeras à l'hôtel.
— Tout de suite, Papa. Je me dépêche ! »
Alma se mit à courir vers sa chambre. Steve soupira et Tony eut une petite grimace.
« J'espère ne pas avoir trop empiété sur ton autorité parentale.
— Ne t'inquiète pas, c'est un bon compromis que tu as proposé. Et je te rappelle que, dans quelques heures, tu seras légalement investi de l'autorité parentale, sourit Steve. À moins que tu ne changes d'avis ? fit-il, l'air faussement détaché.
— Je n'ai pas encore dit "oui", c'est vrai, ironisa le milliardaire. Viens là, imbécile. »
Steve ne se fit pas prier et inclina la tête vers Tony. Réfrénant son envie de plaquer Steve contre le mur, Tony déposa de légers baisers, bouche entrouverte, sur les paupières, sur le nez, sur le menton de Steve, évitant soigneusement les lèvres de l'infirmier qui grogna « Tony ! ». Ravi, l'ingénieur passa doucement le bout de la langue sur la lèvre inférieure de Steve avant de l'embrasser chastement, bouche fermée.
« Tu joues avec ta santé, Tony, tu le sais ? siffla Steve d'une voix menaçante.
— Je croyais que tu devais partir pour l'aéroport ? le taquina Tony.
— On a encore un peu de temps », souffla Steve.
Finalement, ce fut Tony qui se retrouva plaqué au mur - ce qui lui rappela brièvement ce qui s'était passé dans la réserve de Bucky, deux ans plus tôt, même si, cette fois, il ne repoussa pas le grand blond - et qui accepta avec enthousiasme le baiser passionné de Steve. Quand Steve recula, non sans avoir gentiment mordillé la lèvre inférieure de Tony, il tenta de le retenir mais Steve eut un sourire ironique.
« Il faut que j'aille à l'aéroport, tu te rappelles ? Et Alma ne devrait pas tarder, conclut-il en lui pinçant les fesses.
— Allumeur !
— C'est toi qui dis ça ?! rit Steve. Ne t'inquiète pas, Tony, lui souffla-t-il à l'oreille, nous reprendrons notre "conversation" cette nuit.
— Paroles, paroles... si ça se trouve, on sera tous les deux trop crevés pour ça.
— Tu veux parier ? », rétorqua Steve avec un clin d'œil. Reprenant son sérieux, il se dirigea vers une commode dont il sortit une large enveloppe qu'il remit à Tony. « Attends que je sois parti pour l'ouvrir. Ce n'est pas grand chose, mais je tenais à ce que tu l'aies avant que nous-
— C'est bon, papa, j'ai tout ! annonça triomphalement Alma en tendant un sac devant elle. On peut aller chercher oncle Buck.
— On y va. Tony, on se retrouve tout à l'heure.
— Ne sois pas en retard.
— Aucun risque », sourit Steve avant de l'embrasser chastement et de disparaître avec Alma.
Resté seul, Tony s'étira et alla s'installer dans sa chambre. Assis sur son lit king sizz, il ouvrit délicatement l'enveloppe et sourit à son contenu. Il savait que Steve avait repris ses crayons mais, jusqu'à présent, l'infirmier avait, gentiment mais fermement, refusé de lui montrer ses derniers dessins. Qu'il ait décidé de les partager avec lui aujourd'hui était significatif.
Le premier dessin le représentait dans son atelier, vêtu d'un vieux jean taché et déchiré et d'un débardeur qui avait dû être blanc dans une autre vie, un fer à souder à la main. Son expression concentrée et sereine l'amusa. Quand il travaillait sur un projet, il réussissait à faire abstraction de tout ce qui ne concernait pas directement ses travaux, pas étonnant qu'il n'ait pas prêté attention à ce que faisait Steve. L'infirmier avait exprimé l'envie de le regarder travailler, lui assurant qu'il se ferait le plus discret possible. Tellement discret que Tony ne l'avait pas vu sortir ses crayons et commencer à le croquer. Il étudia plus attentivement le dessin et fut frappé par le soin apporté aux détails. Ses épaules paraissaient luisantes de sueur, une tache de graisse maculait sa joue pendant qu'une mèche indisciplinée semblait sur le point de lui tomber devant les yeux. Steve avait proposé de lui couper les cheveux mais Tony avait décliné, arguant que la coupe boyscout ne convenait pas à son genre de beauté.
Mettant la feuille de côté, il découvrit le deuxième dessin et siffla de surprise. Steve l'avait dessiné pendant qu'il dormait. Allongé sur le côté gauche, une main sous l'oreiller, Tony pouvait pratiquement se voir respirer calmement. Cette image détendue l'étonnait, lui qui, après s'être si souvent réveillé d'un cauchemar, avait préféré se rendre dans son atelier plutôt que de chercher un sommeil qui le fuyait. À ce propos, il se demanda si Steve avait souffert d'insomnies pour le regarder ainsi dormir. Plus probablement, l'infirmier avait dû saisir l'instant alors qu'il se préparait à partir assurer sa garde à l'hôpital. Il se promit quand même de lui poser la question, il n'aimait pas l'idée que Steve se présente à son travail sans avoir eu son content de sommeil.
Le dernier dessin était un fusain et Tony fut heureux d'être seul pour le découvrir, tant il était sûr qu'il devait arborer un sourire idiot en cet instant. Cette fois, Steve l'avait représenté en compagnie d'Alma. L'adulte et la petite fille étaient assis sur le vieux canapé des Rogers, dans l'appartement de l'avenue St Nicholas. Tony lisait une histoire à l'enfant blottie contre lui et Steve avait capturé le moment où Tony répondait à une question d'Alma. Il y avait tant d'humour et de tendresse dans leurs sourires que Tony sourit et traça du doigt le petit visage de papier de l'enfant. Il se rappelait très bien cette soirée : venu dîner chez les Rogers, il avait dû changer de chemise après qu'Alma avait accidentellement renversé son verre de lait. Steve lui avait prêté une chemise bleue bien trop large pour lui, ce qui avait beaucoup amusé l'enfant.
Alma avait été ravie de le revoir. Tony s'était préparé à subir un déluge de questions, sur sa soudaine absence, sur son retour tout aussi soudain, mais la petite avait juste déclaré : « je suis bien contente que tu ne sois pas parti à New Haven, Tony. Et mon papa aussi, il est content. Il était triste, tu sais ? Moi aussi, j'étais triste, je croyais que vous étiez fâchés. Une fois, je suis restée fâchée au moins un mois avec Emma Robertson, mais finalement c'était trop nul d'être fâchées, alors on s'est fait un bisou et on ne s'est plus disputées depuis. Vous vous êtes fait un bisou, vous aussi ? » Une déclaration plutôt sobre, venant d'Alma.
Le milliardaire avait compris que Steve n'avait pas souhaité expliquer en détail les raisons de sa « disparition » à sa fille et qu'Alma avait été suffisamment clairvoyante pour ne pas presser son père de questions. Le sourire légèrement embarrassé de l'infirmier confirma ses soupçons. L'embarras de Steve faisait écho à celui de Tony. Tony Carbonell avait été le bienvenu avenue St. Nicholas, Tony Stark se sentait déplacé dans l'appartement des Rogers. Ses appréhensions étaient vite tombées. Steve l'avait accueilli comme il avait reçu Tony Carbonell, avec chaleur et simplicité.
Tony avait tenu sa promesse de venir en aide aux locataires de l'immeuble, en toute transparence, cette fois. Accompagné de Steve, il rencontra chacun des habitants de l'immeuble, leur expliqua qui il était et ce qu'il entendait faire. Des expertises médicales furent menées et leurs conclusions sans appel donnèrent les munitions nécessaires aux avocats de Tony. Asthme, eczéma, développement d'allergies, problèmes articulaires... nombreux étaient les locataires touchés par des pathologies directement liées à l'état de leur logement. Ceci, ajouté aux courriers dénonçant l'insalubrité des logements adressés à epsilon Group et restés sans réponse, produisit un effet dévastateur lors de l'audience devant le juge. Sur le conseil de ses propres avocats, Justin Hammer, furieux mais inquiet, avait préféré négocier. Non seulement les loyers n'avaient pas augmenté mais Hammer avait en plus proposé un substantiel dédommagement à chaque locataire pour les désagréments subis. À l'issue de la conciliation, et à sa grande gêne, Tony fut salué comme un héros par les habitants de St. Nicholas. Un jeune homme le baptisa même "Iron Man" pour la volonté de fer dont il avait fait preuve face à Epsilon Group. Les gens ont de ces idées.
« Bon, ben, je vais y aller, avait alors hasardé Tony, s'attendant à moitié à ce que la résolution du problème des loyers donnerait à Steve l'occasion de mettre un terme à leur relation.
— Et où croyez-vous aller, Tony ? avait rétorqué Steve en haussant un sourcil amusé. Il y a encore des gens qui veulent vous remercier, vous n'allez quand même pas vous défiler ? »
Tony suivit donc Steve chez lui, où il fut accueilli chaleureusement par Sam, Wanda, Angie et ses parents. Même Bucky le gratifia d'un « bien joué, Stark » accompagné d'un hochement de tête approbateur. Tony le regarda avec méfiance mais James se contenta de sourire avant d'aller proposer à boire aux invités. Évidemment, Wanda fondit sur lui dès qu'il fut seul.
« Je vous l'avais bien dit, Tony, dit-elle avec un sourire radieux.
— Hum ?
— Je vous avais dit que vous étiez à l'heure des choix et que vous deviez réfléchir à ce qui était important pour vous. Je suis si heureuse que vous ayez décidé de revenir vers Steve ! Les cartes me l'avaient dit, c'était écrit pour vous deux ! »
Tony avait failli s'étouffer avec le contenu de son verre. Plus tard, quand tout le monde fut parti et que Tony s'apprêtait à prendre congé, Steve lui sourit.
« Je suppose que Wanda vous a parlé choix et destin ?
— Je-
— Ne vous inquiétez pas, je ne vais pas remettre ça sur le tapis. Comme je vous l'ai dit, je n'ai pas l'intention de vous mettre la pression mais je ne veux pas non plus que vous disparaissiez de ma vie sans... sans nous avoir laissé une chance.
— Je n'allais pas-
— Vraiment ?
— D'accord ! avoua Tony. D'accord. J'ai pensé un moment que vous n'auriez peut-être plus envie de me voir maintenant que... oh et puis merde.
— Vous réfléchissez trop, Tony.
— Je sais. C'est juste que... laissez-moi du temps, Steve.
— Je vous laisse jusqu'à dimanche. J'ai prévu un poulet rôti et Alma veut voir Vaiana. Ça vous va ? », termina Steve d'un ton sans réplique.
De poulets rôtis en pizzas, de séances de cinéma en soirées télé sur le canapé, Steve lui avait effectivement laissé du temps. À aucun moment, Tony ne s'était senti piégé. Steve semblait heureux de simplement partager des moments avec lui et n'avait pas cherché à lui reparler de ce qu'il ressentait pour lui. Ils se voyaient, discutaient, dînaient, sortaient avec Alma, comme deux bons amis. Parfois, Tony avait l'impression que la « révélation » n'avait jamais eu lieu et qu'il était toujours Tony Carbonell, mécanicien fauché. Steve lui posait alors des questions sur ses travaux de recherche et l'illusion s'évanouissait. Mais l'atmosphère, détendue et amicale, ne se délitait pas. L'embarras initial de Tony s'était vite dissipé. Il était heureux de renouer sa relation avec Steve là où il l'avait laissée et il appréciait de ne pas se sentir pressé par Steve. Qu'aurait-il pu souhaiter de plus ?
Si on lui avait posé la question alors, il aurait répondu : rien, tout est parfait, merci. Si on lui avait reposé la même question quatre mois plus tard, il n'aurait pas répondu, trop inquiet à l'idée que les sentiments de Steve aient pu évoluer. L'infirmier n'avait fait aucun geste vers lui. Pire, il n'avait plus évoqué leur hypothétique relation depuis leur rencontre chez Bucky. Peut-être que, lassé de ne voir aucun signe d'encouragement de la part de Tony, Steve avait-il tourné la page ? Tony se serait donné des baffes. Il avait souhaité avoir un peu de temps pour se protéger - de quoi ? - il ne s'était pas attendu à ce que le temps passé finisse par l'inquiéter.
Steve avait noté sa fébrilité mais n'avait fait aucune remarque, augmentant encore l'anxiété du milliardaire. Un soir qu'ils riaient tous les deux devant John Oliver, Tony avait profité de ce que l'infirmier tournait la tête vers lui pour prendre son courage à deux mains et approcher doucement ses lèvres de celles de Steve, juste pour s'en trouver empêché par l'index du blond posé sur sa bouche.
« Tony, si vous n'êtes pas sûr de vous, je préfère éviter. Je ne voudrais pas que vous me reprochiez plus tard d'avoir fait pression sur vous. »
Tony s'apprêtait à rétorquer qu'il n'avait jamais été aussi sûr de vouloir quelque chose qu'à cet instant quand il nota la lueur amusée dans les yeux de Steve.
« D'accord. Bien joué, Steve, soupira-t-il. Je n'ai rien vu venir.
— Merci, fit modestement l'infirmier.
— Je suis sûr de moi, vous savez.
— C'est bien.
— Vous n'allez pas m'aider, hein ?
— Demandez et vous serez exaucé, Tony, répondit Steve, l'air de s'amuser prodigieusement.
— Très bien. Je suis amoureux de vous, mais ça, vous le saviez déjà, se lança-t-il. Cela m'effraie toujours un peu mais je ne veux plus me mentir. Je veux être avec vous, et pas seulement pour regarder le dernier Disney.
— Et ?
— Et quoi ? Steve, je-
— Vous ne m'avez rien demandé, Tony, sourit Steve.
— Putain, Steve, si vous ne m'embrassez pas maintenant, je-
— Langage, Tony, l'interrompit-il en prenant son visage entre ses mains.
— Il y a intérêt à ce que ce soit inoubliable», grommela le milliardaire.
Quand Steve le laissa de nouveau respirer et lui demanda « alors ? », il fallut à Tony toute sa mauvaise foi pour répondre :
« Un peu court pour se prononcer. »
Quand le grand blond le cloua sur le canapé, Tony fut bien obligé d'admettre que Steve lui avait offert le meilleur baiser de sa vie.
La sonnerie de l'interphone le ramena au présent et le visage souriant de Rhodes apparut sur l'écran. Il appuya sur le dispositif d'ouverture des grilles et alla accueillir son ami.
« Tu es en avance, non ?
— Je sais, mais j'ai une bonne raison. Je dois absolument te parler avant que tu te maries », dit James d'un air grave.
Son ami avait la mine des mauvais jours et Tony fronça les sourcils.
« Je t'écoute.
— Ce n'est pas facile, Tony, soupira l'autre. Je sais que j'aurais dû te dire ça bien avant mais je ne savais pas comment aborder le problème.
— Va droit au but, tu commences à m'inquiéter là, mon pote.
— D'accord. » Rhodes prit une grande inspiration et demanda, la mine toujours aussi grave :
« Tony, as-tu la moindre idée de ce qui va se passer durant ta nuit de noces, ou de la façon dont on fait les bébés ? »
Le milliardaire cligna des yeux, abasourdi. James eut un large sourire avant d'éclater de rire.
« Si tu voyais ta tête, Tony !
— Et ça te fait rire ? Mais t'as quel âge ?! »
Rhodey en avait les larmes aux yeux. Tony leva les yeux au ciel mais finit par sourire. Cet imbécile ne changerait jamais. James se calma enfin et lui demanda :
« Tout est prêt ?
— Yep. Les fleurs ont été livrées, les tables sont dressées et l'officiant sera là dans une heure.
— Et comment te sens-tu, Tony ? demanda gentiment Rhodes.
— Bien. Très bien.
— Pas trop stressé ?
— Non. Je devrais ?
— Tu fais le grand saut aujourd'hui, ce serait normal.
— Je suis sûr de ma décision, pourquoi je stresserais ? J'espère juste que Steve ne va pas changer d'avis sur le chemin de l'aéroport », ironisa-t-il.
James le dévisagea longuement avant de répondre. Il le connaissait mieux que ça.
« Steve t'aime, Tony. Il ne va pas changer d'avis, ni maintenant, ni après, mets-toi bien ça dans le crâne.
— Je sais.
— Tu en es sûr, Tony-je n'en vaux pas la peine- Stark ? Tu ne me la feras pas à moi, Tony. Tu as toujours eu du mal à croire que tu pouvais être aimé sincèrement pour ce que tu étais et cela t'a toujours amené à trouver des excuses à ceux qui te faisaient du mal. Mais Steve est quelqu'un de bien, il se fout de ta situation, de ton argent, tout ce qui l'intéresse, c'est toi. Il t'aime, il veut te rendre heureux et c'est pour ça que vous allez vous dire oui. Parce que tu en vaux foutrement la peine, mon pote. Tu vas être heureux et tu l'auras bien mérité. Et si jamais Steve n'est pas à la hauteur, j'irai lui botter le cul. Déjà que c'est à cause de lui que vous vous êtes obligés de vous marier...
— Pardon ?
— Il faut bien qu'il te sauve du déshonneur, après t'avoir compromis publiquement ! »
Le milliardaire secoua la tête quand son ami se remit à rire.
« Tu as décidé de te lancer dans l'humour sur tes vieux jours ?
— Heureusement que tes parents n'étaient plus là pour voir leur fils faire les beaux jours de TMZ ou de US Weekly ! »
Tony grimaça intérieurement. Quelques mois plus tôt, alors qu'Alma était invitée à une soirée pyjama, Steve et lui en avaient profité pour passer la nuit ensemble. L'infirmier n'était pas encore prêt à parler à sa fille de la relation qu'il entretenait avec l'ingénieur et n'avait qu'une crainte, qu'Alma les surprenne, au lit ou sur le canapé. Comme deux adolescents heureux d'avoir la maison pour eux tous seuls, Tony et Steve s'étaient donc retrouvés dans l'appartement de l'avenue St. Nicholas. Le lendemain matin, Tony s'était levé avant Steve et s'était mis en tête de préparer le petit déjeuner, uniquement vêtu de la chemise bleue de son amant. Steve l'avait rejoint dans la cuisine alors qu'il faisait cuire des œufs brouillés et... disons qu'ils ne mangèrent pas d'œufs ce matin-là. Par contre, le soir même, TMZ titrait L'Infirmier et le Milliardaire, tout sur l'amour secret de Tony Stark. Pas très original mais efficace, surtout avec les photos accompagnant l'article. Tony, dans la fameuse chemise bleue, embrassant Steve, face à la fenêtre. Les clichés, pris au téléobjectif depuis l'immeuble d'en face, étaient d'une netteté troublante. Les visiteurs de TMZ ne manquèrent ni les mains de Steve, possessivement posées sur les fesses de Tony, ni les lèvres gonflées des deux amants quand ils se séparèrent.
Ce fut panique à bord. Pendant que le nombre de commentaires postés en ligne explosait, que le téléphone n'arrêtait plus de sonner, Steve et Alma rejoignaient Tony à la Tour pour échapper à l'hystérie des reporters. Tony apprit rapidement d'où venait l'attaque. Justin, en vilain petit cafard revanchard qu'il était, avait balancé l'info à la presse de caniveau. Il avait alors juste suffi à un photographe de planquer en face de l'appartement et d'un peu de patience pour sortir le scoop de l'année, ou au moins, du mois.
Steve accepta d'emménager chez Tony, le temps que les choses se tassent, mais refusa obstinément de prendre un congé à l'hôpital. Certains journalistes n'hésitèrent pas à se faire passer pour des malades pour l'approcher et lui poser des questions. Steve ne répondit pas, appela la sécurité et s'occupa de ses patients, les vrais. Il prit son courage à deux mains pour expliquer au mieux la situation à Alma mais, quand il commença à lui parler de Tony, la petite le coupa d'un « je sais que vous êtes amoureux, je suis pas bête quand même ! Tony va devenir mon deuxième papa, alors ? Je pourrai inviter Angie au mariage ? » joyeux, avant de retourner à ses dessins. Si Steve fut soulagé, il se demanda ce que sa fille avait vu, exactement.
L'opinion se radicalisa. La famille pour chacun, collectif d'associations ouvertement homophobe et raciste, tira à boulets rouges sur SI. Comment l'Armée et l'État en général pouvaient-ils passer de si gros contrats avec une entreprise dont le principal actionnaire était un inverti notoire ? Putain, mais qui disait encore inverti en 2017 ?! s'exclama Tony. Langage, répondit Steve. Une partie de la population exprima sa désapprobation face à cette décadence de la société et alla jusqu'à souhaiter qu'Alma soit confiée aux services d'aide à l'enfance. Une autre partie vit dans l'histoire de Steve et Tony une illustration du combat des associations LGBT. Et la majorité des New-yorkais applaudit des deux mains à cette belle histoire d'amour digne des contes de fées. Steve Rogers, Cendrillon des temps modernes, enlevé par un prince charmant en Bugatti Veyron.
Justin Hammer ragea dans son coin, Tony et Steve ne se cachèrent plus et la presse passa à autre chose - Kim Kardashian attendait des triplés et Melania Trump demandait le divorce, de quoi ragoter pendant des semaines. Steve regagna l'avenue St. Nicholas et le penthouse de Tony redevint silencieux. Trop silencieux. Quand il retrouva un dessin d'Alma les représentant tous les trois, l'enfant tenant Steve et Tony par la main, il en eut assez et se précipita chez les Rogers.
« La Tour est bien calme sans vous deux, soupira Tony après avoir embrassé Steve.
— Vraiment ? Alma va être ravie d'apprendre que tu regrettes ses chorégraphies improvisées sur les titres d'Ed Sheeran ou de Sia », sourit Steve.
Tony rit en se rappelant l'air mortellement sérieux de la gamine quand elle jouait les Maddie Ziegler de poche, se contorsionnant tout en braillant let the movement be the rythm tonight, move your body! Steve appréciait moyennement les paroles mais la mine concentrée de l'enfant pendant qu'elle sautait partout dans la Tour faisait glousser Tony, même s'il se retrouvait parfois enrôlé dans la chorégraphie. Free the rage like an animal!
« Même le générique de My Little Pony me manque, je l'ai mis en bruit de fond hier, pendant que je signais les contrats envoyés par Pepper.
— C'est donc plus grave que ce que je pensais. Je te proposerais bien de venir habiter ici mais on va manquer de place pour t'installer un atelier.
— Ou vous pourriez venir vous installer à la Tour ? Définitivement ? Ou ailleurs, comme tu veux ?
— Essaies-tu de me dire quelque chose, Tony ?
— Je t'aime, Steve, se lança Tony pour éviter de changer d'avis. Je veux me réveiller à tes côtés tous les matins, me coucher avec toi chaque soir, oui, même quand tu es de garde à l'hôpital. Je veux pouvoir aller chercher Alma à l'école et l'aider à faire ses devoirs, je veux-
— Oui.
— Je veux... Attends, tu as dit quoi ?
— Oui, je veux t'épouser, Tony. À moins que j'aie mal compris et que tu voulais me demander autre chose ? »
Steve lui sourit, un grand sourire à la fois ironique et tendre, et Tony sentit tout son corps se détendre. Provisoirement.
« Je suis donc si transparent ?
— Sans me flatter, je crois pouvoir dire que je te connais bien.
— Aucune chance que je te surprenne, alors ? C'est dommage, j'avais préparé une super déclaration pour te faire ma demande...
— Tu me surprends tous les jours, sourit Steve. Tony... Je serai heureux de t'épouser mais j'y pose une condition.
— Tout ce que tu veux !
— Je veux un contrat de séparation de biens, Tony. Je ne veux pas de ton argent, je n'en ai jamais voulu et je n'en voudrai jamais, quoi qu'il puisse se passer entre nous.
— Mais si jamais je-
— Je renoncerai aussi à hériter de quoi que ce soit. Ce n'est pas négociable, Tony. »
Tony tenta de discuter mais Steve refusa d'entendre ses arguments. Il préféra alors feindre la capitulation mais, dès qu'il fut de retour chez lui, il fit en sorte de mettre discrètement Steve et Alma à l'abri du besoin. Une semaine plus tard, il se rendit chez Bucky et le mit dans la confidence.
« Je sais que j'ai promis, mais je refuse que Steve et Alma se retrouvent sans rien s'il m'arrivait quelque chose. Steve m'a déjà prévenu qu'il refuserait de toucher le moindre argent venant de moi, mais si vous intervenez, je suis sûr qu'il vous écoutera.
— Ne vous inquiétez pas, même si je dois droguer cette tête de mule pour le forcer à signer, je n'hésiterai pas.
— Merci.
— Je vous en prie. Vous avez fixé une date, pour le mariage ?
— On pensait faire ça en juin. Pourquoi, vous n'êtes pas sûr d'être là ?
— Juin, c'est très bien. Je vous noierai donc dans votre piscine en septembre, et Steve pourra toucher les fonds avant la fin de l'année. »
Tony fit semblant de trouver ça très drôle mais se promit de rester sur ses gardes et d'éviter la piscine.
Tony finissait de s'habiller - et avait réussi à échapper à Rhodey qui voulait absolument plaquer une mèche rebelle au gel - quand Wanda et Sam arrivèrent. Les deux hommes se serrèrent la main avant que la jeune femme ne prenne le milliardaire dans ses bras.
« Wanda ! Tu es superbe ! », dit-il quand elle le lâcha enfin.
Elle lui adressa un sourire éblouissant et repoussa une mèche de cheveux derrière son oreille.
« Merci, Tony.
— Tu veux t'asseoir ? Tu veux un verre d'eau, ou autre chose ? »
Wanda regarda Sam qui lui retourna son sourire.
« C'est gentil, Tony, mais je ne me sens absolument pas fatiguée. Au contraire, je me sens en pleine forme, dit-elle en passant une main sur son ventre rond. Je pourrai danser toute la nuit !
— Tu seras fatigué avant elle, Tony, approuva Sam. Elle vient de finir toute la déco de la chambre du bébé et maintenant, elle veut que nous partions marcher dans le parc Yosemite.
— Je suis enceinte, je ne suis pas malade, Sam.
— Je sais, ma belle. Mais j'aimerais bien que tu te ménages un peu, d'accord ? »
Pour toute réponse, Wanda lui sourit avant que Sam l'embrasse tendrement. Un peu embarrassé, Tony se demanda si Steve et lui arboraient aussi cet air béat un peu bébête quand ils étaient ensemble. Probablement.
« Alma est ravie que son ancienne chambre accueille bientôt votre bébé, dit-il pour rompre le silence.
— J'espère que les couleurs et la décoration lui plairont. En tout cas, la chambre est remplie d'ondes positives, c'est bon pour le bébé. »
Tony sourit en imaginant Wanda chassant de l'appartement tout ce qui pourrait freiner l'ouverture des chakras de son bébé. Elle et Sam avaient emménagé dans l'ancien logement des Rogers, le studio de Wanda étant devenu trop petit pour trois personnes. Steve, qui regrettait d'avoir à quitter son quartier, s'était senti légèrement consolé d'apprendre que Sam et Wanda reprenaient son bail.
« N'hésitez pas à vous servir si vous avez faim ou soif, je dois accueillir les autres invités.
— Ne t'inquiète pas pour nous, Tony, on fera comme chez nous ! »
Tony salua le maire, les quelques associés de SI dont Pep avait réussi à lui imposer la présence, poussa un soupir de soulagement quand l'officiant se présenta enfin, s'excusant pour s'être trompé de chemin, et accueillit Angélique et ses parents.
« Alma ne va plus tarder, elle est partie avec Steve chercher Bucky à l'aéroport, dit-il à l'enfant. Myriam, John, je suis ravi que vous soyez là aujourd'hui.
— Et voici notre star du jour ! s'exclama une voix moqueuse. Quelle élégance, Tony !
— Merci, Pepper. Je te retourne le compliment. »
Virginia portait une robe fourreau verte qui semblait cousue sur sa peau. Tony se demanda comment elle pouvait encore respirer mais la jeune femme semblait très à l'aise, radieuse même.
« Où est Happy ?
— Il gare la voiture, il arrive. Devine ?
— Quoi ? »
Pepper tendit une main où brillait un solitaire gros comme une cerise burlat.
« On s'est mariés à Vegas ! s'exclama-t-elle, les yeux brillants et les joues roses.
— Toi ?! Toi, la très carrée mademoiselle Potts, l'intraitable présidente de Stark Industries, tu t'es mariée à Vegas ?
— Et pourquoi pas ? Ce n'est pas incompatible, fit Pep en fronçant son petit nez. Oh, Tony, si tu avais vu ça ! On a même eu un prêtre habillé en Elvis qui nous a chanté Love Me Tender devant un cœur en roses rouges, c'était kitchissime à souhait et j'ai adoré. Surtout la nuit de noces au Bellagio, quand Happy s'est déguisé en-
— Seigneur ! Par pitié, épargne-moi ça, Virginia ! Je refuse de me marier avec ce genre d'images en tête !
— Ce que tu es coincé, mon pauvre Tony, je plains Steve. Où est-il d'ailleurs ?
— Il ne devrait pas tarder, il est parti accueillir Bucky et sa nouvelle compagne à l'aéroport.
— C'est vrai ? Il s'est enfin casé ? Comment est-elle ? Je veux tout savoir !
— Je ne l'ai pas encore vue, mais il paraît qu'elle est très belle. Ils se sont rencontrés au restaurant de Bucky, elle aurait adoré l'endroit et la cuisine, elle a voulu rencontrer le patron et... ils ont parlé jusqu'à tard dans la nuit et il l'a raccompagnée à son hôtel. Elle devait décoller deux jours après pour son boulot mais elle est revenue dès qu'elle a pu.
— Ça ressemble fort à un coup de foudre, sourit Virginia. Comment s'appelle l'heureuse élue ?
— Emmaniouelle, ânonna Tony, euh, Emmanuelle, elle est Française.
— Pas évident, les relations longue distance.
— En effet. Si j'ai bien compris, elle a sa propre marque de lingerie et elle est en train de monter un spectacle de cabaret burlesque ici, aux États-Unis, alors elle se déplace beaucoup, pour rencontrer des partenaires et faire passer des auditions aux comédiens. Là, elle était avec Bucky à Miami, ils reviennent juste pour le mariage.
— J'ai hâte de la rencontrer, si elle a réussi à apprivoiser le terrible James, ce doit être un sacré personnage.
— C'est ce que je me dis aussi.
— Et comment te sens-tu, Tony ?
— Pourquoi tout le monde me pose-t-il la question ?
— Tu vas te marier. Tu vas jurer fidélité, respect et assistance à Steve, tu vas t'engager à partager sa vie, dans la maladie et dans la santé, dans la richesse et dans la pauvreté - bon d'accord, pour la pauvreté, tu as le temps de voir venir - tu vas promettre de le chérir et de l'épauler au quotidien. Si tu y entends autre chose que des formules creuses, il y a de quoi se sentir raisonnablement inquiet.
— Qui te dit que je-
— Je te connais, Tony, derrière la façade du milliardaire blasé, bat un petit cœur de midinette. Tu y crois à fond et tu as raison d'y croire. Steve t'aime, Tony, tout va bien se passer.
— Vous vous êtes tous donné le mot ? Rhodey tout à l'heure, maintenant toi... Je vais bien, je sais que je fais le bon choix.
— Mais bien sûr ! Tu n'es pas inquiet, c'est pour ça que tu regardes constamment vers le portail. Il ne va pas changer d'avis, Tony, rassure-toi.
— Mais arrêtez de me materner comme ça ! Je vais bien, dans quelle langue je dois vous le dire ! »
Pepper lui sourit avant de s'avancer et de le prendre dans ses bras pour un long, un très long câlin.
« Je suis si heureuse pour toi, Tony, dit-elle en le relâchant enfin. Mais n'oublie pas notre conseil d'administration ou, lune de miel ou pas, je viens te chercher à Bali.
— On ne va pas à Bali.
— C'est vrai, Tony, tu ne m'as pas encore dit où on partait, fit une voix derrière eux.
— Si je te le disais, ce ne serait plus une surprise, Steve, répondit-il en souriant.
— Tony, t'as vu la copine d'oncle Buck ? Elle est belle, hein ? »
Bucky et son amie achevaient de gravir les marches donnant accès à la terrasse et la jeune femme sourit en entendant Alma. Elle était effectivement très belle. Blonde, les yeux verts et le sourire ravageur. Bucky la tenait par la taille et la couvait du regard.
« Tony, je te présente l'amie de Bucky, Emmaniouelle, déclara Steve en s'appliquant à prononcer correctement le prénom de la jeune femme.
— Emmanuelle, corrigea-t-elle gentiment. Je suis ravie de vous rencontrer, Tony, j'ai beaucoup entendu parler de vous. » Elle lança un regard ironique en direction de James qui haussa les épaules. Tony se doutait bien que le portrait qu'avait fait de lui Bucky à la jeune femme n'était pas exactement flatteur. « Vous formez un beau couple avec Steve, reprit-elle après un regard vers le blond.
— Merci, Emma-nu-elle. Excusez-moi, on ne s'est pas déjà rencontrés ? J'ai l'impression que votre visage m'est familier... »
Le visage de Bucky vira à l'orage, Steve se détourna pour cacher un sourire et Emmanuelle rit franchement.
« Tony, je suis flattée d'apprendre que vous avez vu mes films. Lequel avez-vous préféré ? La Kleptomane ? Le Journal de Marie ? »
La lumière se fit enfin et Tony pesta intérieurement. À sa décharge, au générique des films interdits aux moins de 18 ans dans lesquels elle apparaissait, la belle portait un pseudo. En plus, il n'en avait vu qu'un ou deux, pas plus. Bon, peut-être deux ou trois.
« Je suis navré, je ne voulais pas vous embarrasser, rougit-il.
— Il n'y a pas de quoi. Je n'ai pas honte de ce que j'ai fait, cela ne me dérange pas d'en parler et James est au courant. Il a encore un peu de mal à s'y faire mais cela viendra, dit-elle en regardant Bucky.
— Cela ne me pose aucun problème, Emmanuelle, je t'assure. Le seul problème que j'aie, c'est avec les gens qui te manquent de respect.
— Je n'avais pas l'intention de-
— Tu es adorable, James, mais je sais me défendre toute seule. Et je suis toujours heureuse de rencontrer un fan, ironisa-t-elle, surtout s'il peut m'aider à développer mon projet de cabaret itinérant. »
Cela fit sourire Tony. La jeune femme savait ce qu'elle voulait et se montrait directe, ça lui plaisait.
« Je serai ravi d'en discuter, dès que nous serons rentrés de notre lune de miel. Venez dîner avec James, vous m'exposerez votre projet.
— Vous êtes un amour, Tony. On se voit plus tard, déclara-t-elle avant de se diriger vers le jardin avec Bucky.
— Quoi ?! J'ai eu une vie avant toi, se justifia Tony devant le regard amusé de Steve. Je ne pouvais pas deviner que Bucky était tombé raide dingue d'une star du X.
— Ex star du X, corrigea Steve, elle a arrêté il y a quelques années, maintenant.
— Tu aurais peut-être pu me mettre au courant, cela m'aurait évité de mettre tout le monde mal à l'aise.
— Je crois que tu étais le seul à être gêné, rit Steve. Et James ne m'a mis au courant que tout à l'heure, à l'hôtel, je me voyais mal t'envoyer un texto pour te prévenir.
— D'accord, d'accord.
— Ne t'inquiète pas, elle semble très à l'aise avec ça. Et j'ai l'impression que Bucky aura du mal à avoir le dernier mot avec elle, sourit Steve. Tu crois que j'ai encore un peu de temps pour changer de cravate ? J'ai vu à l'hôtel que j'avais un accroc...
— Attends, je t'accompagne, tu n'es pas fichu de faire un nœud de cravate convenable. »
Ils prévinrent Rhodey qu'ils s'éclipsaient quelques minutes et gagnèrent leur chambre. Pendant que Steve retirait sa cravate, Tony alla en chercher une autre dans l'immense dressing adjacent. Quand il revint, Steve était assis sur le lit, les dessins offerts à Tony entre ses mains.
« Je n'ai pas encore eu l'occasion de te remercier, fit Tony en s'avançant. Merci, ils sont superbes.
— C'est vrai, ça te plaît ? Je me suis dit que c'était approprié, vu le dernier cadeau que tu m'avais fait, ironisa Steve.
— Laisse-moi te gâter un peu, plaida Tony. On m'a assuré que les Faber-Castell étaient ce qu'il y avait de mieux sur le marché.
— Tony, ce n'est pas parce que tu m'offres des crayons et des couleurs hors de prix que je dessinerais mieux.
— Si on reconnaît un bon artisan à ses outils, on doit reconnaître un bon artiste à ses crayons, non ?
— Très bien. Pour ton anniversaire, je casserai mon compte épargne pour t'offrir des tournevis en platine.
— Et une clef de 12 en vibranium ? sourit Tony. Steve, c'est si mal que je veuille le meilleur pour toi ? Je ne cherche pas à t'acheter, je voulais juste... Quand j'ai vu tes dessins, la première fois, j'ai trouvé que tu avais beaucoup de talent et que c'était dommage que tu aies arrêté, alors je me suis dit que peut-être-
— Que peut-être, si j'avais des crayons de luxe et la visite du célèbre galeriste Nicholas Fury, je m'y remettrais plus facilement ? »
Tony baissa la tête comme un enfant pris en faute.
« Je lui ai juste dit que tu dessinais et que ce serait bien pour toi d'avoir l'avis d'un professionnel, je n'ai jamais voulu-
— Je sais. Je ne t'en veux pas, c'est juste que je n'ai pas l'habitude d'être gâté comme ça. Ne te méprends pas, j'apprécie que tu veuilles faire ça pour moi mais tu n'as pas besoin de le faire, Tony.
— Et si je n'en ai pas besoin mais que j'en ai envie ? Je te fais juste rencontrer les bonnes personnes quand je le peux mais je te jure que je ne les influence pas. D'ailleurs, celui qui obligera Nicky à faire ce qu'il n'a pas envie de faire n'est pas encore né. Dans son domaine, c'est le meilleur, mais c'est aussi un chieur de première.
— J'ai vu ça, oui », rit Steve.
Tony lui retourna son sourire avant de lui demander :
« Steve, tu as des problèmes d'insomnie ?
— Non, je me réveille exprès pour te regarder dormir. Je plaisante, se hâta-t-il de clarifier quand Tony ouvrit la bouche. Je me suis levé une nuit pour aller prendre ma garde, je t'ai regardé et j'ai eu envie de garder un peu de ce que je voyais, alors je t'ai dessiné.
— Tu as failli me faire flipper. Je ressemble vraiment à ça quand je dors ?
— Ma présence apaisante contribue à te détendre, c'est pourquoi tu as l'air si serein, se moqua Steve.
— C'est malin... »
L'infirmier rit avant de se tourner vers la fenêtre.
« Je ne pensais pas qu'il y aurait autant de monde quand tu m'as parlé d'un mariage "intime" », dit-il calmement en regardant par la fenêtre.
Merde. Il savait qu'il aurait dû refuser quand Pepper avait voulu rajouter des invités à la liste. Il avait promis à Steve une cérémonie simple et intime, pas un barnum.
« Désolé. Je pensais vraiment qu'on serait moins nombreux mais, entre les associés de SI dont la présence était "hautement souhaitable" - dixit Pepper - et les notables venus avec épouses et/ou maîtresses, le nombre d'invités m'a échappé. Certains partiront peu de temps après la cérémonie mais si cela te dérange vraiment, on pourrait peut-être fausser compagnie à tout le monde et aller se marier à Las Vegas ? dit-il, mi ironique, mi sérieux.
— Vegas ? Tu veux vraiment qu'on échange nos vœux devant un officiant habillé en Elvis ?
— Pas vraiment, même si je connais quelqu'un qui a trouvé ça génial. Je veux juste dire que si la cérémonie te déplaît, on peut faire autrement, ou ailleurs, ou à un autre moment.
— Tu veux qu'on annule ? demanda Steve d'une voix étrangement calme. Tu as des doutes, soudainement ?
— Non ! Non, je n'ai aucun doute, moi, mais... toi, tu es sûr que tu veux... »
Qui a envie d'entendre ça, à quelques minutes de dire oui ? C'était signé, Steve allait tourner les talons et quitter le minable qu'il était.
Steve ne répondit pas pendant de longues secondes, se contentant de le dévisager. Quand il parla enfin, ce fut d'une voix calme, mais résolue.
« Tony. Ce que j'aimerais là, tout de suite, c'est te basculer sur ce lit, t'arracher ton beau costume et te faire crier mon nom si fort que nos invités sauront que ce que je veux, c'est toi. Qui sait ? Ça finirait peut-être par rentrer aussi dans ta tête, par la même occasion ? Je t'aime, je veux être avec toi et je ne vais pas changer d'avis. Je ne vais pas partir, ni maintenant, ni demain, à moins que toi tu le veuilles et que tu me le demandes. Maintenant, on peut se marier - comme tu me l'as proposé - ou reporter, voire même annuler mais, tant que tu ne m'auras pas dit que tu ne veux plus que je partage ta vie, je resterai. Suis-je bien clair ?
— Limpide, coassa Tony.
— Très bien. Tu veux toujours m'épouser ?
— Toujours, confirma Tony. Même si l'idée de basculer sur ce lit avec toi est tentante, tenta-t-il.
— Garde un peu d'énergie pour ce soir et je te ferai basculer. Et crier mon nom.
— Et pourquoi ce ne serait pas toi qui crierait le mien ?
— Pour ça, il faudrait que tu sois encore en forme pour le deuxième round, Tony. »
Le milliardaire se mit à rire pendant que Steve l'amenait à lui.
« Tu deviens présomptueux, Stevie.
— Ça s'appelle de l'expérience, Tony.
— Papa, Tony ! fit une voix derrière la porte. Virginia dit que si vous ne descendez pas tout de suite, il faudra que Tony se trouve une autre présidente et oncle Buck dit que la nuit de noces, normalement, c'est après le mariage, pas avant. Vous êtes pas déjà fatigués, hein ? Parce que moi, je veux jeter des pétales de rose, crier "vive les mariés !" et danser toute la nuit. Tu m'as promis, papa ! »
Tony et Steve se regardèrent en pouffant pendant que la petite tapait à la porte.
« On arrive tout de suite, chérie. Tony a eu du mal à nouer ma cravate mais c'est bon, on descend.
— Je vais commencer à jeter des pétales de rose sur votre chemin, alors. Dis à Tony de ne pas s'endormir avant sa nuit de noces, surtout !
— Je lui dis, Alma, sourit Steve. Tu as entendu, Tony ?
— Je vais rester éveillé, promis ! s'écria Tony en luttant contre le fou rire.
— Je crois qu'il est temps, Tony, déclara Steve en lui prenant la main. Tu es prêt ?
— Fin prêt », lui sourit Tony.
Il l'était. Enfin.
OoO
OoO
Voilà, c'est fini... Tony et Steve vont se marier et être très heureux et, c'est bien connu, les gens heureux n'ont pas d'histoire, alors je vais les laisser là.
Ah si, quand même, juste une petite note, même si je sais que peu de lectrices les lisent. ;) Cela faisait un moment que je voulais écrire une comédie romantique, avec parcours obligé - personnages sexy issus de milieux différents, secrets inavoués, obstacles, séparation avant la happy end - et j'avais très envie de le faire à la sauce MCU. Je me suis inspirée de films comme l'Arnacœur ou Vous avez un message, alors It Coat est sûrement l'histoire la plus fluffy que j'aie jamais écrite et, c'est vrai, elle n'est pas d'une originalité folle, comme certaines lectrices me l'ont reproché. ;-) Mais c'était l'histoire que j'avais envie d'écrire à ce moment-là et, globalement, je suis satisfaite du résultat.
Je remercie toutes celles qui m'ont lue et qui ont pris le temps de me laisser leur ressenti et/ou un petit mot d'encouragement. Sachant que, pour la première fois, j'ai commencé à publier une histoire alors que je n'en avais pas écrit la moitié, chaque retour m'a apporté la motivation nécessaire pour continuer à publier régulièrement. Merci encore et peut-être à bientôt, sur une autre histoire.