Notes : suite à vos superbes commentaires et une forte demande pour que j'écrive un épilogue, eh bien...
j'ai accédé à votre requête pour publier cette dernière partie. Je vous souhaite une excellente lecture !
Je voudrais remercier particulièrement et chaleureusement les anciennes et nouvelles lectrices : Alienor17, Eyota James, Guest, Nolwenn, rivruskende, Samara, Samelfique, Solwenn626,...qui ont laissé de merveilleuses reviews et certaines auxquelles je n'ai pu répondre car elles ont posté en anonyme.
Lire vos commentaires m'a procuré un tel plaisir :)
Avertissement : aucun
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Epilogue
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Ne craignez point de faire les premiers pas vers la réconciliation. Celui qui revient le premier, est, aux yeux de Dieu, le vainqueur le plus grand et le plus digne de la couronne immortelle destinée au pardon des offenses, Les maximes de l'honnête homme, Jean Baptiste Blanchard
Le vrai chemin du pardon, c'est de comprendre la faute par ses causes, Éléments de philosophie, Alain
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Ces quelques mots sont pour le sorcier la promesse d'un avenir plus radieux, comme le soleil qui se lève et qui chasse peu à peu les ténèbres. Il leur faudra du temps, beaucoup de temps, mais il ose espérer que le plus dur est derrière eux. Avec Hermione à ses côtés, et bientôt leur enfant, il se sent capable d'affronter la Terre entière. Il a passé tellement d'années à jouer un rôle, à être une autre personne. Il va enfin pouvoir être lui-même, et prouver à sa Princesse de Gryffondor que sous son apparence terrifiante il existe un homme digne d'être aimé, qu'une part de son âme est encore intacte.
Sans elle sa vie n'a aucun sens. Il ne veut pas la perdre... Jamais. Car la Lionne a su apprivoiser le Serpent.
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Poudlard, Bureau de la Directrice, Réunion de l'Ordre
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Cinq regards médusés et désapprobateurs sont braqués sur la Médicomage après sa révélation stupéfiante.
"Comment ? Cela fait cinq ans que vous savez où se trouve Rogue et vous ne l'avez jamais dénoncé ? Vous, l'une des résistantes de la première heure ? s'étrangle Kingsley.
- Alors que nos meilleurs Aurors cherchent à le débusquer depuis toutes ces années ! s'indigne également Arthur Weasley, en affichant un regard de choc total sur un visage auparavant peu expressif.
- Je comprends votre ressentiment mais je ne regrette rien, se défend l'infirmière en laissant son regard limpide glisser sur ses interlocuteurs.
- Décidément, je crois que tu as perdu la tête, ma chère..." la coupe brutalement Minerva, les narines pincées en réajustant tant bien que mal ses lunettes sur son nez.
Elle se sent à nouveau trahie par cette amie de longue date, avec qui elle a partagé de nombreux secrets. Comment a-t-elle pu lui cacher cette information capitale ? Apprendre lors du procès de Severus que celui qu'elle a haï et dénigré ces années passées ait finalement été un fidèle de l'Ordre l'a déjà profondément minée. Elle voue une profonde amertume envers Albus pour lui avoir caché ces terribles secrets, cette sinistre vérité sur le rôle réel joué par Severus. Elle a honte d'elle, terriblement. Elle est rongée de l'intérieur par le remords.
Tout ce qu'elle a pu lui jeter comme injures à la figure durant l'année où il a été nommé Directeur de Poudlard, le traitant de lâche, puis à inciter les autres membres du personnel - hormis les Carrow bien sûr - à lui battre froid, à l'ostraciser, à ne lui répondre qu'en cas de force majeure. Comment n'a-t-elle pas compris que le sorcier était incapable de tuer Albus, son mentor, à moins que ce ne fût un ordre de ce dernier ? Mais Severus paraissait si indifférent, comme détaché de tout...
Elle comprend à présent l'acharnement de Poppy à le disculper lors des séances de son procès.
Une question pressante la tire de ses pensées moroses.
"Et Miss Granger, où est-elle ? D'après les aveux de Dolohov et Yaxley, ils ont disparu en même temps, s'enquiert Arthur Weasley.
- Oui, où est Hermione ? renchérit son fils Ron. Avec lui ?
- J'avais donné ma parole de ne rien dévoiler. A présent que le Magenmagot l'a déclaré non coupable des crimes dont il était accusé, je ne vois aucune raison de ne pas vous révéler la vérité, réplique Pomfresh sur le ton de la sérénité qu'elle est loin d'éprouver...
- Rogue s'est caché comme le lâche qu'il a toujours été ! la coupe brutalement le jeune Weasley qui ne peut pardonner à l'homme d'avoir pris Hermione comme esclave, même dans le but - il doute des bonnes intentions du sorcier - de la sauver des Mangemorts.
- Vous vous trompez, ce n'est pas lui qui a refusé d'affronter les juges, c'est moi qui l'en ai dissuadé, explique Pomfresh. Et je vous interdis de le traiter de lâche après toutes les années qu'il a passées à espionner Voldemort pour le compte de l'Ordre et surtout de Dumbledore ! s'agace Poppy.
- Vous ne me lèverez pas de l'idée qu'il a joué des deux côtés durant toutes ces années en attendant de voir de quel côté la balance pencherait, assène Ron en martelant le bureau de son poing rageur.
- Les témoignages de Dumbledore et de Phinéas Black ne te suffisent plus ? intervient Neville très calmement, faisant taire momentanément les apartés effervescents.
- Peut-on réellement faire confiance à de simples portraits ? N'ont-ils pas été ensorcelés ? ricane quelques secondes plus tard le jeune Weasley.
- Non, réplique Kingsley, cela a été vérifié. Et vous oubliez les aveux des Mangemorts qui ont été arrêtés et qui ont fourni les mêmes réponses sous Véritasérum... Ce n'est pas Rogue qui a vendu Harry à Voldemort, mais Narcissa Malfoy. Tous les témoignages concordent. Sans compter la lettre qu'elle a laissée après son suicide, dans laquelle elle demande à la Communauté Magique de lui pardonner. La mère qu'elle était a préféré donner la priorité à la vie de son fils.
- S'il n'avait rien à se reprocher, pourquoi a-t-il disparu en enlevant Hermione ? insiste Ron, le ton dégoulinant de sarcasme.
Mais la Médicomage choisit de l'ignorer.
- Ce n'est pas Severus qui a enlevé Hermione, mais l'inverse. Il était mourant et elle l'a soigné avant de faire appel à mes compétences pour le sauver du venin de Nagini, développe-t-elle. Je ne crois pas qu'il méritait d'être enfermé à Azkhaban en laissant sa femme seule élever leur enfant ces dernières années. Alors qu'il est innocent, poursuit-elle sur un ton défensif.
- Sa femme ? Son enfant ? De... de qui parlez-vous ? C'est d'Hermione, hein ? s'emporte le jeune Weasley en se levant brusquement de sa chaise qu'il renverse, en affichant une expression aigre.
Des regards incrédules sont à nouveau tous dirigés vers l'infirmière qui, malgré l'animosité ambiante ose les affronter sans sourciller. Rogue a beau être reconnu innocent, le fait qu'il ait marqué Hermione du Sceau des Esclaves frappe encore les esprits. Tous connaissent le statut d'un esclave.
- Oui. Hermione et Severus sont mariés et heureux comme ils sont, en vivant retirés du monde, explique-t-elle tranquillement.
- Heureux ? Comment peut-elle être heureuse aux mains de ce... de ce... bafouille Ron, incapable de formuler correctement sa pensée.
Poppy serre les dents et se retient de répliquer vertement.
- Mais comment ont-ils pu vivre puisque tous les avoirs et les biens immobiliers de Rogue ont été bloqués et confisqués depuis que la Résistance a repris le contrôle du Ministère ? reprend posément Kingsley les sourcils froncés.
- En élaborant des potions, tout simplement, explique posément l'infirmière. Il y a un laboratoire dans leur cottage. Je leur fournissais la plupart des ingrédients et je les aidais à vendre leur production. Cela m'a été assez facile de par ma profession. La plupart des stocks de Saint Mangouste proviennent de chez eux, ainsi que ceux de... Poudlard, ajoute-t-elle en glissant un regard en coin à Minerva qui se raidit sur sa chaise, ulcérée d'avoir été ainsi mise à l'écart des agissements de son amie la plus proche.
- Bien, maintenant que vous êtes au courant, je retourne à l'infirmerie où j'ai des patients qui ont besoin de soins, conclut Poppy en se levant, ignorant délibérément le tumulte que ses informations ont provoqué.
- Madame Pomfresh, puis-vous parler en particulier ? s'enquiert Neville en posant sa main sur le bras de l'infirmière qui s'est déjà engagée dans le couloir.
Devant la détermination qu'elle lit dans le regard bleu, elle répond :
- Bien Monsieur Londubat, suivez-moi, lui enjoint-elle.
Ils s'avancent d'un pas pressé et silencieux en direction de l'infirmerie.
"Je souhaiterais rencontrer Hermione. Je voudrais lui parler... de vive voix. Pourriez-vous lui transmettre ma demande, je vous prie ? demande le jeune sorcier sur un ton implorant. Je ne lui veux aucun mal, dites-le lui, mais j'ai absolument besoin de la voir... insiste-t-il encore.
- Oui, je vais lui transmettre votre demande. Je vous donnerai sa réponse demain, déclare-t-elle gentiment en posant une main apaisante sur l'épaule du jeune homme. Vous savez, elle me demande souvent de vos nouvelles..."
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SP SP SP
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Neville vient de transplaner avec l'elfe Gandral et découvre Hermione devant une charmante maison, ancienne mais pittoresque. Elle est assise sur les marches du perron, ses bras enroulés autour de ses genoux dans un geste presque enfantin. Ses cheveux retombent librement sur ses épaules. Ses boucles folles sont toujours aussi rebelles qu'auparavant. Elle mâchouille négligemment une campanule à fleurs bleues, son regard noisette perdu vers la mer.
Un sourire chaleureux éclaire ses traits quand elle l'entend et qu'elle l'aperçoit à son tour. Une étincelle amicale brûle au fond de ses yeux ambrés et qui le bouleverse. Comme il lui a manqué !
"Mione..." appelle-t-il doucement.
Il y a si longtemps que personne ne l'a appelée par son surnom. Une émotion liée à la mémoire étreint la poitrine de la jeune femme. Un sourire sincère fleurit sur ses lèvres. Des larmes hésitantes se forment au coin de ses yeux qu'elle balaie rapidement d'un revers de sa manche. Ce n'est pas le moment de pleurer. L'heure est aux retrouvailles.
Elle n'a pas changé. Ou si peu. Plus de maturité dans ses traits. Elle est encore plus belle que dans mes souvenirs. Aucun maquillage, elle n'en a pas besoin. Lumineuse est l'adjectif qui la qualifie le mieux.
"Oh Neville ! Je suis heureuse de te voir ! s'exclame-t-elle en se relevant et en se jetant maladroitement dans les bras du sorcier qui s'ouvrent aussitôt et l'enserrent affectueusement dans une étreinte fraternelle.
- Hermione, j'ai cru que tu étais morte, j'ai tellement eu peur pour toi, souffle-t-il dans la chevelure touffue. Tu auras toujours une place spéciale dans mon cœur..." d'une voix si basse qu'elle imagine une fraction de seconde avoir rêvé les paroles.
Après quelques instants, le sorcier se recule en tenant les petites mains entre les siennes. La jeune femme en profite pour détailler le jeune homme. Il est presque aussi grand que Severus. Elle découvre une gravité qui émane de lui. La cicatrice sur sa joue est toujours là. Cela lui donne un air farouche qui lui sied plutôt bien. Il est très séduisant. Un bel homme.
"Hermione, pardonne-moi. J'aurais dû te parler lors de la soirée chez les Malfoy, et te prévenir que la Résistance allait intervenir. Je croyais que tu devais passer la nuit sur place avec... Rogue. Je voulais te sauver, comme les autres esclaves, ajoute-t-il dans un soupir sans se rendre compte qu'il broie les mains d'Hermione qui grimace imperceptiblement. A l'époque nous croyions tous qu'il était un traître, un Mangemort... Ce qu'il t'a fait... J'y pense encore... poursuit-il la voix pleine de regrets.
Elle pose un doigt sur sa bouche pour l'empêcher de poursuivre et secoue la tête, incapable de prononcer un mot durant quelques secondes. Un léger scintillement de tristesse passe dans leurs yeux. Tous deux revivent les moments difficiles passés dans la Chambre des Tortures. Elle devine la question qui brûle les lèvres de son ami.
- Il n'y a rien à regretter, crois-moi, réplique-t-elle finalement en croisant le regard bleu. Je suis heureuse, même si cela peut te sembler incroyable, assure-t-elle avec l'accent de la sincérité.
- Vraiment ? laisse-t-il échapper les yeux plissés, sans pouvoir contenir un soupçon incrédule dans sa voix.
Elle ne répond pas.
- Viens, allons nous installer à l'intérieur", enjoint-elle en s'engageant dans le hall de la maison.
Il la suit et malgré les pensées qui se bousculent dans son esprit, il admire la demeure simple mais coquette, décorée sobrement mais avec goût. Ils arrivent dans un petit salon au mobilier en merisier, là-aussi sans ostentation, seulement divers bibelots discrets. Une table ovale et ses chaises occupent le centre de la pièce.
Il en profite pour jeter un œil sur les quelques photos disposées harmonieusement de-ci de-là. Neville peut apercevoir sur l'une d'elles une Hermione un peu plus jeune, échanger les anneaux nuptiaux avec... Rogue. Ils ont l'air heureux... tous les deux. L'image bouge. Le regard qu'ils échangent est plus qu'éloquent : il y a de l'amour entre eux, c'est incontestable. Il est évident, en voyant son ventre tendu sous la robe de mariée bleu pâle qu'elle attend un enfant.
Elle était si jeune !
Sur une autre photo, la jeune fille porte un bébé aux yeux et cheveux sombres. Elle tend ses bras et Rogue se saisit en tremblant de l'enfant. Mais on a le temps de voir les onyx emplis d'humidité...
C'est la première véritable émotion que Neville ait jamais lue dans les yeux du Maître des Potions.
Il n'est pas insensible. Il a joué un rôle durant toutes ces années. Nous nous sommes tous trompés sur son compte.
"Que désires-tu boire ? propose-t-elle aimablement en interrompant le cours de ses pensées. Par un geste gracieux de la main, Hermione enjoint son ami à s'asseoir après avoir chassé un Pattenrond nonchalant de sa chaise de prédilection. Neville obtempère tandis qu'elle en fait de même.. J'ai du thé de Chine, du jus de citrouille ou encore de la Biéraubeurre que nous brassons nous-mêmes... Son goût et ses arômes se rapprochent de celle que nous buvions au Chaudron Baveur, confie-t-elle avec un sourire rêveur aux lèvres. Nous aimerions ouvrir une boutique d'apothicaire et vendre nos propres potions et onguents...
- Vous y parviendrez, j'en suis persuadé... Va pour un verre de Biéraubeurre, acquiesce le jeune sorcier de sa voix grave.
- Gandral ! appelle-t-elle.
L'elfe apparaît presque aussitôt.
- Vous désirez, Maîtresse ? s'enquiert-il en dévisageant d'une manière peu discrète le sorcier qu'il a amené. Ils reçoivent si peu de visiteurs.
- Apporte-nous de la Biéraubeurre fraîche, du jus de citrouille ainsi que des cookies, commande Hermione en sortant deux verres du buffet.
- De suite Maîtresse, répond Gandral avant de s'éclipser et de revenir peu après avec un plateau.
La jeune femme rempli un verre de Biéraubeurre pour Neville et du jus de citrouille pour elle.
- Tu sais, je sais que tu te demandes si tout va bien pour moi, attaque doucement Hermione en reprenant le fil de leur discussion. Je fais confiance à Severus, et depuis cinq ans que je vis auprès de lui, de mon propre gré, je n'ai jamais regretté mon choix. Pas une seule fois, crois-moi, insiste-t-elle sur un ton un peu fougueux. Nous nous aimons malgré les blessures du passé...
- Tu sais, j'avais bien remarqué ce... cette... attirance qu'il éprouvait pour toi", commence-t-il, légèrement mal à l'aise.
Elle apprécie l'absence de jugement dans le ton et les paroles de celui qu'elle n'a jamais cessé de considérer comme un ami malgré leur longue séparation.
Elle baisse à peine la tête puis la relève aussitôt, le regard franc.
"Moi aussi j'étais attiré par lui, même très amoureuse depuis la sixième année, et ma présence auprès de lui en tant qu'apprentie n'a fait que développer les sentiments que j'éprouvais pour lui, avoue-t-elle à mi-voix. Je l'admirais tellement !
Elle marque une pause et reprend :
- Severus a commis des actes répréhensibles, abominables, mais il a demandé mon pardon et je le lui ai accordé, reprend-elle.
Neville reste silencieux. Il a toujours admiré Hermione car elle est la personne la plus brillante, la plus courageuse et la plus altruiste qui lui a été donné de rencontrer.
- Tu sais, en enquêtant sur Rogue après votre disparition, j'ai retrouvé Magdalena.
- Ah, qu'est-elle devenue ? s'enquiert-elle sur un ton curieux en reposant son verre sur la table.
- Eh bien, elle est restée chez ses parents quelques mois puis a épousé un noble français de trente ans son aîné... Il semble qu'elle soit heureuse, ils vivent en France. Le sorcier marque une pause avant de reprendre. Tu es au courant que Ron en est à son deuxième mariage ? Les bruits courent qu'il est à nouveau sur le point de divorcer.
- Oh oui ! éclate de rire Hermione, il fait la Une de tous les journaux, entre le Quidditch et ses frasques qui m'amusent beaucoup, même si je plains ses femmes...
Elle n'est pas du tout affectée par l'évocation de son ancien ami, remarque en silence le sorcier.
Dis-moi, tu as revu... Ginny ? demande-t-elle subitement dans une tentative pour faire dévier la conversation. Je sais par Poppy qu'elle est à Sainte Mangouste dans l'aile... psychiatrique.
- Oui, je passe la voir chaque fois que je rends visite à mes parents - Hermione n'ignore pas que les parents du jeune homme ont été internés suite aux tortures infligées par Bellatrix, les frères Lestrange et Barty Croupton - mais... elle ne reconnaît personne, pas même ses parents, ni ses frères, explique-t-il avec un accent poignant dans sa voix. Elle s'est réfugiée mentalement dans un monde qui lui est propre en refusant tout ce qui peut la ramener à la réalité... Ses cheveux ont repoussé, ajoute-t-il abruptement, ne sachant que dire sans évoquer la situation pénible vécue par Ginny entre les mains de Voldemort. Elle est toujours aussi jolie... achève-t-il dans un soupir.
Mais c'est une coquille vide.
Quelques secondes s'écoulent durant lesquelles tous deux éprouvent du mal à évacuer les émotions douloureuses qui les submergent. Tant de vies, de familles perdues ou détruites en l'espace de quelques mois sous le règne du Mal. Leurs mains se joignent automatiquement par-dessus la table, chacun cherchant à procurer du réconfort corporel par ce geste rassurant.
- Mais parlons plutôt de toi. J'ai appris que tu étais le nouveau professeur de Botanique à Poudlard et que tu t'étais marié. Avec Hannah, c'est cela ? s'enquiert-elle après avoir pris une longue inspiration.
- Oui, c'est exact. Quand Thorfinn Rowle a été tué par la Résistance il y a cinq ans, elle a sombré dans une grave dépression et je l'ai soutenue. Au fil des mois notre amitié s'est muée en quelque chose de plus fort. Nous nous sommes mariés et avons une petite fille, Mary, âgée de deux ans, explique Neville en observant l'anneau argenté qui ceint l'annulaire de son amie.
- Je suis si heureuse pour toi ! Tu mérites tellement de connaître le bonheur !" s'exclame avec passion Hermione.
Ils sont tellement pris dans leurs souvenirs, leurs émotions, qu'ils n'entendent pas les petits pas qui courent sur le plancher, accompagnés par de longues enjambées.
Un regard sombre comme la nuit observe leur échange affectueux.
"Maman ! Maman ! On est là ! crie une voix enfantine, brisant l'atmosphère intime qui s'était créée.
Neville s'écarte imperceptiblement d'Hermione en relâchant lentement ses mains sous le regard scrutateur d'une longue silhouette familière qui n'a rien perdu de la proximité entre les jeunes gens.
- Bonjour Monsieur, commence poliment Neville en forçant sa voix à rester stable, alors que son regard bleu affronte les obsidiennes profondes de celui qui l'a si souvent terrorisé durant ses années d'études à Poudlard.
Il n'est plus cet adolescent facilement apeuré par son professeur intimidant, et pourtant il ne peut se défaire d'un sentiment de méfiance et d'appréhension. Il note machinalement la tenue moldue décontractée portée par Rogue, une chemise blanche avec un pantalon bleu-marine et qui lui donne une apparence moins austère malgré ses tempes légèrement grisonnantes. Certainement l'habitude prise pour se fondre dans la population non magique depuis ces dernières années.
Le Maître des Potions n'a guère changé. Mince, les traits anguleux, hormis cette cicatrice laissée par Nagini dans son cou. Il en impose toujours.
Ce dernier se contente de saluer d'un hochement de tête, en lâchant un bref "Bonjour" de sa voix traînante, mais sa posture montre qu'il reste sur la défensive. L'un de ses sourcils est en accent circonflexe. Il lâche la main de son fils qui court aussitôt vers Hermione. L'intervention de l'enfant permet de dissiper le malaise pesant qui vient de s'installer.
"Maman ! s'exclame le petit garçon en se jetant dans les bras d'Hermione, son regard focalisé sur l'homme qu'il n'a jamais vu et qui semble connaître sa maman.
- Mon petit chéri !" roucoule Hermione en prenant son enfant sur ses genoux. Elle le serre tendrement contre elle et caresse doucement les cheveux noir corbeau. Elle embrasse le bout de son nez. Son cœur se gonfle toujours avec autant d'amour en découvrant son fils. Elle sait qu'elle a fait le bon choix il y a cinq ans en jetant la Potion Abortive. Severus se montre un père attentif et prévenant depuis la naissance de l'enfant.
"Neville, je te présente Nathanaël, notre fils âgé de quatre ans", poursuit la jeune femme, avec dans la voix un fort accent de fierté.
Au bout de plusieurs secondes, l'enfant s'écarte lentement de l'enveloppe protectrice et glisse pour se retrouver debout. Il laisse une main sur la jambe de sa mère et observe avec un intérêt évident le nouveau venu qui de son côté n'est pas en reste.
Par Merlin ! Il lui ressemble trait pour trait ! Les cheveux, les yeux de jais, le teint pâle, les lèvres fines, la taille, la minceur, tout... hormis le nez bien moins crochu...
Il se dégage de ce petit être une intelligence et une assurance peu commune pour un enfant de cet âge. Mais avec des parents aussi exceptionnels, comment pourrait-il en être autrement ? Neville n'a pas le temps de s'appesantir plus loin que l'objet de ses pensées l'interpelle sur un ton empreint de curiosité :
"Et tu es qui, toi ? Je ne t'ai jamais vu ! s'étonne l'enfant en le dévisageant ouvertement.
- Je suis un... un ami de ta maman, déclare le sorcier en choisissant soigneusement ses mots. Nous étions au Collège ensemble. Je m'appelle Neville.
- Qui t'a fait cette cicatrice ? interroge avec une candeur désarmante le petit garçon en s'approchant de lui et en tendant son index en direction de sa joue.
Le temps semble s'être arrêté. Près d'eux, les regards noisette et onyx se croisent, laissant entrevoir une fugitive lueur inquiète.
- Cela s'est passé il y a cinq ans, déclare sans amertume le jeune sorcier, de la part d'un homme qui est emprisonné à Azkhaban.
- Ah, le méchant a été puni, alors ? Il ne fera plus de mal ? approuve Nathan.
- Oui, il est enfermé et ne ressortira plus, explique Neville en souriant au petit garçon qui le dévore des yeux, sous le regard attentif de ses parents.
- Si tu veux, quand je serai grand je fabriquerai une potion pour effacer ta cicatrice, déclare avec un grand sérieux l'enfant. J'aide maman et papa dans le laboratoire et ils disent que je suis très doué ! affirme-t-il avec une tranquille assurance en montrant avec fierté ses mains de potionniste.
- Je n'en doute pas", répond gentiment Neville en hochant la tête.
Ensuite l'enfant se dirige vers son père qui, comme s'il ne pesait pas plus qu'une plume, le soulève aisément et l'assied sur ses genoux. Nathan enfouit son profil contre son torse et insère sa main minuscule dans la sienne. Des mains identiques proportionnellement, aux doigts pâles, longs et fins.
"Je t'aime papa", déclare avec sérieux le petit garçon.
Sans répondre, Severus le serre plus fort contre lui en caressant ses cheveux. Nul besoin de mots, le message est passé. L'enfant sourit en jouant négligemment avec une mèche obscure.
S'il y a bien une image d'Epinal que le jeune sorcier pensait ne jamais voir, c'est bien celle de Rogue avec un bambin sur ses genoux, le visage attendri et le regard reflétant un profond amour. Il a toujours donné l'impression de détester les enfants...
"Bien, je dois vous laisser, ajoute le jeune sorcier en se levant. Je dois rejoindre ma femme et ma fille, et j'ai des tonnes de corrections qui m'attendent..."
La main de Neville se dirige vers sa poche, mettant aussitôt les sens de Severus en alerte qui repose son fils sur le sol. Il est prêt à dégainer sa baguette. Mais le jeune homme sort un parchemin avec le Sceau du Ministère de la Justice qu'il tend à Rogue.
"C'est le jugement définitif du Magenmagot qui vous reconnaît innocent des crimes dont vous étiez accusé et qui vous autorise à réintégrer la Communauté Magique, explique Neville. En tant que membre de l'Ordre, je suis habilité à vous le remettre en mains propres.
- Merci", répond enfin Severus en tendant une main tremblante sous les yeux brillants de sa jeune épouse qui essuie furtivement une larme. Elle s'approche de son époux et glisse un bras autour de sa taille.
Bien sûr, Tous deux en avaient déjà été informés par Poppy et le journal La Gazette du Sorcier, mais voir l'acte est un réel soulagement pour le couple qui s'est tenu à l'écart de leur propre communauté durant ces cinq dernières années. Ils vont pouvoir vivre normalement, comme tous les sorciers et utiliser leur magie à son plein potentiel, enfin.
"Oh merci Neville ! s'exclame Hermione en déposant un baiser sur la joue du jeune sorcier, sans tenir compte du regard suspicieux et jaloux de Severus. Tu peux revenir quand tu veux, notre maison te sera ouverte, enchaîne-t-elle volubile.
- Oui, tu peux revenir quand tu veux," répète un Nathanaël enthousiaste, inconscient du regard désapprobateur de son père.
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Ils se retrouvent seuls.
"Tu es jaloux, hein ? demande Hermione avec un petit sourire narquois sur les lèvres en notant le muscle qui tressaille sous la joue blême de son mari.
- Pas du tout, réplique de sa voix traînante le Potionniste. Mais j'apprécierais que tu fasses preuve de plus de retenue lorsqu'une personne de sexe masculin se présente dans notre maison, poursuit-il en enroulant ses bras autour de la jeune femme qu'il ramène contre lui.
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Oui, Severus est jaloux.
Dès qu'une personne du sexe opposé tourne autour d'elle, il sent cette émotion pernicieuse dérouler son serpent malfaisant et envahir ses pensées. C'est plus fort que lui. il y a un vide qui plombe soudainement son ventre. Puis une sourde colère envahit son être. Il n'est pas loin d'envoyer un Sort Cuisant à l'inconscient qui ose faire la cour à sa femme. Heureusement qu'ils vivent retirés dans leur cottage et qu'ils voient peu de monde, hormis quelques habitants du village situé à quelques kilomètres, quand ils vont faire le marché le mercredi et le dimanche matin.
Il lui arrive de douter. De laisser les démons tourmenter son esprit. De croire qu'un jour Hermione le quittera pour un homme plus jeune dont elle tombera amoureuse. Dans ces moments-là, il ne croit plus qu'elle l'aime et que cet amour puisse durer. Et cet homme, ce pourrait être Londubat...
Le jour où il a eu le courage de lui demander ce qui l'attirait en lui, elle n'avait pas hésité à lui répondre :
"Tu es l'homme le plus courageux du Monde Magique, l'un des esprits les plus brillants, un sorcier aux pouvoirs magiques hors normes, un être exceptionnel, le Maître des Potions le plus talentueux... Je t'admire et je t'aime tel que tu es, avec tes défauts et tes qualités... mais surtout tes défauts, avait-elle ajouté avec une lueur coquine au fond de ses yeux Whisky, en s'asseyant sur ses genoux et en picorant la commissure de ses lèvres. Ton air diabolique me fait fondre..."
Et il l'avait laissée prendre possession de son corps brûlant lentement, savamment. Il oublie tout entre ses mains. Tout.
La différence fondamentale entre Lily et Hermione, c'est que cette dernière lui a fait don d'un cadeau inestimable : le pardon.
Il veut se montrer digne de la confiance qu'elle lui a accordée, digne de son amour. Car Hermione l'aime, et il ne gâchera pas ce merveilleux présent. Elle a réussi à guérir toutes les plaies douloureuses qui ont empoisonné son existence depuis son enfance.
Elle lui a fait cadeau d'un enfant, de ce petit être qui lui ressemble comme deux gouttes d'eau et que tous deux aiment avec une infinie tendresse. Elle lui a permis d'être père, lui qui ne méritait pas de descendance et qui a tant manqué d'amour familial. Oh Merlin, la première fois qu'il a tenu Nathan dans ses bras, il ne l'oubliera jamais ! Toutes ses convictions ont volé en éclat au profit d'un sentiment doux et puissant, de cet amour paternel qui fait battre son cœur plus vite dès qu'il aperçoit la petite tête brune.
Et il fait en sorte que Nathan soit heureux et que le rêve d'Hermione qui semblait prémonitoire ne se réalise jamais.
Il laisse échapper un soupir dramatique dans ses boucles effrontées.
Cette sorcière et ce petit garçon le rendent faible. Mais c'est une faiblesse qui le rend paradoxalement plus fort et plus heureux.
Hermione aurait pu le laisser mourir, elle l'a soigné avec un grand dévouement. Elle aurait pu le livrer aux Aurors, elle l'a supplié - avec l'appui de Poppy - de ne pas se rendre aux autorités afin qu'il reste auprès d'elle et de leur enfant à naître. Elle aurait pu le haïr - ce ne sont pas les raisons qui manquaient - et elle lui a ouvert son cœur.
Avant elle il n'y avait que la solitude, l'amertume et la haine. Maintenant il est heureux de se coucher tous les soirs avec sa petite sorcière aux pieds froids, et de se réveiller tous les matins avec le nez planté dans un enchevêtrement de boucles séditieuses qui tentent désespérément de l'étouffer mais dont le parfum le rend toujours aussi désespérément fou d'elle.
Elle est cette petite lumière qui brille au bout du tunnel et qui vous emplit d'un espoir insensé. Celle qui vous donne envie d'avancer, de s'extirper de cette obscurité, et de vivre. Il se croyait irrécupérable et elle lui a prouvé qu'il n'en était rien. Qu'il avait droit à une vie respectable.
Il ne comprend toujours pas ce qu'elle a pu lui trouver, ce qu'elle lui trouve encore, mais par Salazar, il fait tout ce qui est en son pouvoir pour qu'elle reste auprès de lui. Lui qui n'a jamais été particulièrement démonstratif, voilà qu'il apprécie les gestes affectueux qu'elle a pour lui et qu'il lui retourne... presque toujours.
Elle est arrivée entre ses mains innocente, pure, sans qu'un autre homme n'ait posé ses mains sur elle, hormis quelques baisers maladroits. Personne ne lui a enseigné à charmer un homme. Personne ne l'a instruite dans l'art du mystère ou de la séduction. Tout à son sujet est ouvert et exposé. Elle est pathétiquement transparente. Mais c'est elle qu'il aime. Avec ses yeux larges et vulnérables et ses courbes voluptueuses.
Il connaît tout d'elle. Tous ses secrets, toutes ses aspirations, ses peurs, ses désirs, ses émotions les plus profondes.
Elle lui a redonné le goût de vivre. Les bonheurs simples qu'il n'a jamais connus, tels que voir le soleil aux lueurs changeantes se lever ou se coucher à l'horizon sur la Mer du Nord, marcher pieds nus le long de la plage en y laissant l'empreinte éphémère de ses pas, cueillir des plantes dans la lande balayée par les bourrasques de vent, se tenir par la main comme des amoureux de Peynet, se chamailler comme des adolescents afin de déterminer quel arôme convient le mieux pour une potion... enfin toutes ces petites choses de la vie qu'il pensait ne jamais connaître.
Oh, il n'est pas devenu patachon pour autant ! Difficile d'effacer d'un coup de baguette magique des années de pratique de Magie Noire. Son âme est entachée. Il le sait, Hermione aussi. Mais il se plaît à croire qu'une partie est encore non souillée. Et ce fragment d'âme appartient à cette petite sorcière coriace qui a bien voulu de lui.
Il a passé tellement d'années à se montrer froid, cruel, insensible que c'est devenu une deuxième nature. Elle est parvenue à lui faire extérioriser son côté humain. Enfin presque. Curieusement, la jeune femme aime son côté cynique.
Il sait que si un jour elle le rejette parce qu'elle n'éprouve plus rien pour lui, il n'aura aucun but dans la vie. Chaque jour passé auprès d'elle est une fleur qui s'ajoute sur le chemin caillouteux de leur vie commune et le rend plus beau. Il ne sait toujours pas pourquoi elle l'aime, mais dès que ses ambres croisent ses obsidiennes, avec cette étrange lueur incandescente, il sent son cœur qui cogne plus vite dans sa poitrine. Et des centaines de papillons se mettent à danser la sérénade dans son ventre.
Le prenant au dépourvu, Hermione chuchote contre sa poitrine :
"Sev, j'ai quelque chose à te dire..."
Son corps se raidit imperceptiblement. Elle va le quitter. C'est ça. Sûrement. Son souffle se bloque. Il attend la sentence.
"Je suis enceinte...
Elle le sent frémir. Il la serre plus fort en respirant à nouveau normalement.
- Oh mon Hermione... se contente-t-il de murmurer de sa voix de velours légèrement éraillée. Un léger sourire éclaire simultanément leurs visages.
- Maman ! Papa ! J'ai retrouvé Pattenrond !" hurle Nathanaël en tenant dans ses petits bras une boule de poils orange d'une manière peu orthodoxe.
La vie est belle. Très belle.
Aimer, ce n'est pas emprunter des routes toutes tracées et balisées. C'est avancer en funambule au-dessus de précipices et savoir qu'il y a quelqu'un au bout qui dit d'une voix douce et calme : avance, continue d'avancer, n'aie pas peur, tu vas y arriver, Se résoudre aux adieux, Philippe Besson
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Voilà, cette fois, c'est vraiment la fin de cette fanfiction. Le thème de l'esclavage n'a pas été facile à évoquer, mais vous avez réussi malgré tout à suivre et apprécier cette histoire qui ne reflète pas la réalité et ne doit pas la refléter...
Les commentaires sont toujours les bienvenus ;)