Histoire : Une Touche de Couleur dans le Gris

Livre 1 : Nuancer le noir.

Date : 5 juillet 2020

Bêta : Elda

Fandom: D Gray Man

Avertissement : Non, je ne possède pas D Gray Man et je ne fais aucun profit avec cette histoire.

Résumé : Après s'être réveillée au XIXème siècle, Ennaël prend le nom d'Eve, devient la dame de compagnie de Tricia Kamelott et prend la décision de faire son propre avis sur les personag ... personnes de ce nouveau monde malgré sa connaissance du manga. Elle prend peu à peu conscience de la différence sociale des femmes à cette époque et commence à avoir peur pour l'avenir surtout quand débarquent petit à petit Road, les jumeaux, Allen, Tyki, Le comte, Lulubell et Skin Bolic.

En essayant de fuir le Comte, Eve rencontre Victor Hugo qui lui passe un tas d'informations sur la guerre sainte avant de mourir. Eve se découvre un étrange talent pour les instruments de musique et se demande avec horreur si elle ne serait pas le 14ème. Cela n'aide pas que le comte ait découvert ses talents et semble s'intéresser de plus en plus à elle.

Elle se dispute ensuite avec Tyki qui manque de la tuer avec ses pouvoirs Noah, commence une correspondance avec Conan Doyles et re-manque de mourir de la tuberculose. Suite à cette épreuve, Eve semble vraiment s'être intégré à la dynamique familiale… tellement que quelque mois plus tard, elle apprends le même jour qu'elle s'est fait adopté par le Duc Campbell (le Comte) et qu'elle va épouser Tyki. Eve a vraiment envie de s'immoler par magie. A oui parce qu'elle a découvert qu'elle pouvait faire de la magie entre temps. Meh.

Et au dernier chapitre : Eve reste habiter au manoir Campbell avec sa "soeur" et son "père" pour se préparer à son mariage avec Tyki.


Je suis comme Eve: j'en ai tellement marre de ce mariage, j'aime pas çaaaaa X(
Voilà pourquoi je l'ai torché en deux chapitres de 9K. Meh. En tout cas, c'est enfin finis, yeah !

(Psssssss, on est presque à 200 reviews... vous savez ce que ça veut dire hu ? ;)

Bonne lecture :D


Dimanche 1er Mai 1887 : Jour du mariage

Même si le mariage était le principal sujet de mes jours au manoir, d'une certaine façon, je me trouvais tout de même surprise lorsqu'il arriva enfin. Pour ma défense, cela ressemblait plus à un lointain objectif qu'un événement imminent et la routine de leçons quotidiennes n'avait pas aidé cette impression. Mais ce qui devait arriver arriva et deux jours avant la cérémonie proprement dite: tout se mit en branle.

La réalité de la chose m'apparut sûrement lorsque le Comte annula une de mes leçons de l'après-midi pour que nous allions à l'église où se tiendrait le marriage. C'était la plus grande et la mieux décorée de la région et même si ce n'était pas celle de Londres où nous allions généralement, elle était tout de même impressionnante… plus encore par la croix de l'Ordre Noir trônant fièrement au dessous des vitraux. C'est bizarre mais je m'étais tellement habituée à vivre avec les Noah que j'en oubliais le fait que j'étais dans une histoire et voir la croix m'avait fait l'effet d'un coup de poing.

Au moins, j'avais la réponse que je m'étais posée il y a plus de deux ans maintenant : Oui, les Noah faisaient totalement exprès d'aller dans des églises contrôlées par l'Ordre Noir. J'avais vu d'autres lieux de cultes depuis cette première fois et beaucoup avaient la simple croix traditionnel au lieux de celle de l'Ordre, il y avait donc bien une différence.

Mais quoi qu'il en soit, Adam m'avait montré les lieux et expliqué la cérémonie en détail. Le prêtre qui allait nous marier, un vieil homme bedonnant avec un sourire gentil, m'avait dit ce que je devais faire et ne pas faire le jour J et c'était la tête pleine de consignes que j'étais retournée au manoir tout ça pour découvrir que Tricia arriverait le lendemain midi pour m'aider à me préparer. La nouvelle n'avait pas aidé mon moral et si Lulu le chat n'avait pas choisi mes genoux pour ronronner ce soir-là dans le petit salon, j'aurais sûrement passé la nuit à pratiquer la magie dans l'optique de comater le lendemain.

Tricia n'était pas très… heureuse avec moi. Ma petite vengeance avec les jumeaux s'était avérée être un peu plus dommageable que prévu. D'après Tyki, qui était en effet venu passer la nuit au manoir Campbell, Tricia avait littéralement hurlé lorsqu'elle avait vu Jasdevit. D'ordinaire si calme, son cri avait retentit dans tout le manoir Kamelott, ramenant fissa Sheryl et les serviteurs. Tricia avait alors forcé les jumeaux à se laver le visage tout ça pour découvrir que certains de leurs maquillages étaient en réalité des tatouages.

Elle s'était évanouie aussi sec.

"Ne lui envoie plus ce genre de surprise." M'avait fait promettre Tyki avant de partir. "Je ne suis pas sûr qu'elle puisse le supporter et je n'ai vraiment pas envie de m'occuper de Sheryl… Même pour une vengeance, c'est trop." Avait-il dit dramatiquement et j'avais violemment roulé les yeux à ses mots. Avec ses conneries, je finissais mariée à 21 ans, une conséquence qui durait toute une vie ici alors s'occuper un peu de son frère, ce n'était vraiment pas comparable. Heureusement, je savais que c'était une tentative d'humour pour détendre l'atmosphère entre nous mais j'étais encore trop mal à l'aise et c'était avec un geste timide de la main que je l'avais laissé partir.

Tout ça pour dire que c'était le ventre noué que je descendais au petit-déjeuner le lendemain de la visite à l'Église. Malgré mes petites vengeances, je n'avais pas envie de me disputer avec Tricia… j'aimais notre amitié et je voulais qu'elle redevienne comme avant. Il fallait l'avouer: j'avais peur de la confrontation.
Ce fut donc une agréable surprise lorsque le Comte m'annonça que je n'avais plus de leçon d'étiquette et qu'il aimerait me montrer quelque chose.

Le suivant curieusement après le repas, je souris un peu lorsque nous arrivions dans son étude : une belle pièce chaleureuse bien différente du bureau de Sheryl.
"Tenez." Sourit-il en me tendant un livre qu'il avait récupéré de son tiroir. "Je pense que c'est tout à fait en accord avec vos idées tout en donnant d'autres points de vues."

"Cassandra de Florence Nightingale ?" Je lisais surprise avant de relever la tête vers lui. "Florence Nightingale n'était-elle pas une infirmière ?" Je demandais, l'information sortant de mes lèvres sans trop que je me souvienne où je l'avais entendu. "Je ne savais pas qu'elle avait écrit un roman, je n'en ai jamais entendu parlé." Et c'était réellement curieux car au cours des deux dernières années, Tyki avait pris l'habitude de ramener au manoir les dernier best-seller pour que nous puissions en discuter.

"Elle ne l'a jamais publié, vous comprendrez pourquoi en le lisant, mais elle m'a donné un exemplaire dû à notre vieille amitié et le livre m'a fait penser à vous lorsque je l'ai relu récemment." Sourit-il gentiment avant que ses lèvres ne prennent une courbure plus hésitante. "Peut-être cela aidera-t-il avec des affaires plus personnelle également."

Oh.

Il parlait de Tricia.

Évidemment, il était au courant de nos querelles… les lettres, les jumeaux et les récits de Tyki n'avaient pas vraiment caché notre dispute. Ca me faisait chaud au coeur qu'il essaie de réparer notre amitié et je ne pouvais m'empêcher de lui faire un sourire rayonnant en réponse.

"Aussi, je voulais vous offrir votre cadeau de mariage." Dit-il joyeusement, toute atmosphère solennelle disparut, en prenant ma main pour déposer une grosse clef en laiton sur ma paume. "J'ai transféré à votre nom une charmante petite maison en France qui, je pense, vous plairait." Gazouilla-t-il et ce fut avec un petit tapotement sur l'épaule et un sourire rayonnant qu'il accepta mes remerciement gênés. "Pourquoi ne profiterez-vous pas du reste de la matinée pour lire un peu ? Les prochains jours vont être mouvementés, j'en ai peur." Ajouta-t-il alors qu'il s'asseyait à son bureau pour travailler et que je m'installais dans un des fauteuils confortables à côté de la cheminée.

Et il n'avait que trop raison malheureusement… J'en étais à peine à la moitié du livre et… Oui, d'ailleurs à propos du livre, je comprenais pourquoi elle ne l'avait jamais publié, ses visions sur la place de la femme était profondément avangardiste et mettaient en péril la place de l'homme. C'était étrange de se dire qu'Adam était ami avec une femme comme ça et qu'il avait trouvé ses idées assez pertinentes pour lire, y réfléchir et me donner son livre. C'est comme s'il me disait, d'une certaine façon, que je n'étais pas seule dans mes pensées, que je n'étais pas en tord avec Tricia. Peut-être que je lisais trop dans son geste, mais j'avais tout à coup l'impression d'avoir trouvé une épaule sur laquelle m'appuyer. Même avec Tyki je n'osais pas trop discuter de mes visions révolutionnaires, non pas parce qu'il ne les accepterait pas mais plutôt parce qu'il y était plutôt indifférent et que je ne voulais pas l'ennuyer.

Euh, bref, tout ça pour dire que j'en étais à peine à la moitié du livre lorsque Mahulda (mon ombre inévitable ce dernier mois) était venu nous prévenir que la famille Kamelott était arrivée au manoir. Respirant un grand coup, je fermais le livre et quittais l'étude réconfortante d'Adam pour me diriger à sa suite en bas. Nous étions à peine arrivés dans le hall que la famille Kamelott au grand complet se déversait par les portes, Adam les accueillant avec un grand sourire alors que j'imitais ma grande soeur et restait silencieusement derrière lui.

"Eve." Salua Tyki nonchalamment avant qu'un regard désapprobateur de Sheryl le transperce et qu'il me fasse un baise main en roulant des yeux.

Souriant légèrement à ses idioties, je dus me battre pour le garder sur mes lèvres lorsque Tricia s'approcha de moi, Sheryl déjà profondément engagé dans une conversation avec Adam, les salutations d'usages passés.

"Eve !" Cria Road en se jetant sur moi avant que sa mère ne puisse ouvrir les lèvres. "Tu m'as manqué ! Ça fait si longtemps !"

"Je suis heureuse de te voir aussi, Road." Je souris en serrant la jeune fille en retour. Et c'était vrai. Road avait autant été une constante que Tricia ces deux dernières années et contrairement à Tyki qui aimait partir du manoir pendant de longue période, je n'avais jamais quitté Road trop longtemps. En fait, avec toutes les siestes de Tricia, je me demandais même si Road n'était pas la personne avec qui j'avais passé le plus de temps…

"Bonjour Eve." Parla enfin Tricia d'une voix neutre et je rendais sa salutation sur le même ton, mes doigts s'enfonçant légèrement dans les épaules de Road. "Allons dans le petit salon, nous avons beaucoup de choses dont nous devons discuter." Ajouta-t-elle en s'y dirigeant, Lucie, Road et moi lui emboitant le pas. Ce qui suivit fut une très longue discussion, à peine interrompu par un repas léger directement pris sur place, à propos du mariage. Le ton était soutenu et terriblement neutre des deux côtés comme si nous avions peur de relancer la petite guerre intervenue dans nos lettres. Ce fut difficile cependant.

Terriblement difficile.

Bien sûr, il y avait certaines choses sans grande importance comme par exemple le choix des dames d'honneur. Je n'avais vraiment personne à qui proposer, il m'était donc bien égale de savoir que ma première dame d'honneur serait Lucie puis ma seconde Tricia et enfin quatre autres jeunes filles de la noblesse que je n'avais même jamais rencontré. Tricia était embêtée car d'ordinaire des femmes mariés (comme elle) ou veuve (comme Lucie) ne devraient pas être demoiselles d'honneur mais outre le fait que je ne connaissais personne, quiconque d'autres auraient remarqué à ma manière d'agir qu'il y avait un problème avec la soi-disante fille cadette du Duc Campbell. Tricia avait donc décidé de faire une petite entorse aux règles pour prendre en main mon mariage et s'assurer qu'il se passe, autrement, dans de bonnes conditions. Toutes ces choses que j'aurais dû faire en temps que mariée comme les invitations, le choix des robes des demoiselles d'honneur, la planification de la réception avaient été organisés par ses soins et il ne restait maintenant plus qu'à trier les cadeaux de mariages, vérifier mes connaissances des nobles devant venir et s'assurer que je n'avais pas oublié une des nombreuses traditions que je devrais suivre à la lettre.

Les gants blanc enrubannés que j'étais censée envoyer à chaque demoiselle d'honneur la veille du mariage étaient déjà emballés et prêt à partir, la bague était elle aussi entre les mains de Lucie et les cadeaux pour les invités étaient soigneusement en attente dans une boîte.
Les problèmes étaient arrivés lorsqu'on avait commencé à revoir le déroulement de la cérémonie en tant que tel. Le "Je le veux" était attendu et même si ce n'était pas vrai, je m'étais résolue à le dire il y a plus d'un mois maintenant. Non, c'était la seconde partie du contrat oral que j'avais du mal à avaler.

Il semblerait qu'à cette époque, la mariée se devait de répondre à la seconde question du prêtre avec "je promets honneur et obéissance à mon mari"
Autant dire que ça m'avait aussitôt mis un mauvais goût dans la bouche. Surtout lorsque Tricia s'était mise à m'expliquer ce que cela voulait dire pour elle avec une ferveur et un ton de voix qui sous-entendait qu'elle citait directement quelqu'un : "Ces mots constituent une part essentielle du devoir matrimonial. Après tout, l'amour de l'homme est l'autorité et celui de la femme est l'obéissance." Disait-elle et il me fallut toute ma maîtrise de soi pour ne pas relancer une dispute. A la place, je la laissais continuer sur sa lancée sans rien dire, préférant boire mon thé en silence. Ce n'était que des mots, je pouvais les dire. Je n'étais même pas croyante, ce n'est pas comme si ce mariage avait une valeur pour moi alors autant faire ce qu'ils voulaient pour qu'ils me laissent tranquille ensuite. Ça ne servait à rien de se disputer avec ma "famille" tout cela pour avoir la fierté de ne pas avoir dit trois mots.

Mais tout de même…

Serrant la mâchoire, je restais passive le reste du sermon, faisant mentalement une liste de tout ce que je ne voulais vraiment pas faire et que je ferais tout de même parce que l'alternative n'était pas jouasse.
Honnêtement, c'était un petit prix pour ce que j'obtenais et évitais en retour…

Et j'avais essayé, je jure que j'avais essayé ! Mais j'avais beau me remettre en question, me mettre à la place de Tricia, imaginer sa vie, son éducation, les traditions, sa religion… je ne pouvais simplement pas comprendre comment on pouvait défendre cette différence de droits entre des êtres humains simplement à cause de différences physique à la naissance.

"Des questions ?" Demanda finalement Tricia et je clignais des yeux, hochant négativement la tête.

"C'était très clair, merci." Je répondis platement et Tricia sembla hésiter une seconde mais finalement elle ne dit rien et nous partions chacune de notre côté.

"Eeeeve." Chantonna Road curieusement, ses petits doigts s'enroulant autour de mon bras alors que je me dirigeais dans ma chambre. "Mère et toi vous êtes disputés ?"

Lui jetant un regard, je soupirais. "Pas vraiment, nous avons juste des avis très... différents sur le mariage."

"Encore ? Mais ça fait plus d'un mois ! D'ordinaire tu laisse tomber bien plus vite." S'étonna Road et elle n'avait pas tord. A chaque fois que nous avions eu un différent avec Tricia ces dernières années, il n'avait même pas eu le temps de durer la conversation ou au pire la journée que je laissais aller et passais à autre chose. Principalement, c'était par ce que nos disputes étaient toujours sur des questions difficiles comme le devoir de la femme ou l'éducation des enfants et que je ne voulais pas imposer mes vues de femme du XXIème siècle. C'était moi la folle avec les opinions dérangeantes et Tricia était déjà bien gentille de les écouter et même parfois d'y réfléchir. Alors généralement je glissais juste un mot ou deux de temps en temps, essayant de provoquer ses pensées et laissais couler aussitôt un désaccord à l'horizon.

Mais là… "Le problème c'est que c'est différent cette fois, ses décisions ont impacté directement ma vie." Je dis tristement et Road me demanda alors pourquoi je n'étais pas plus en colère contre Sheryl ou le Duc qui avaient pourtant eu le dernier mot dans mon adoption et mon marriage. "Je n'attendais rien d'eux. Mais Tricia me connait, elle est comme ma grande soeur, je lui ai confié plus de secrets et sentiments qu'à quiconque d'autre." J'expliquais. "Je suppose que je suis déçue… j'aurais voulu qu'elle me soutienne dans mes choix au lieu de balayer toutes mes craintes de la main et faire 'ce qui est le mieux pour moi'."

"Tu devrais lui dire, tu sais." Répondit Road après quelques secondes de réflexions. "C'est toujours toi qui dit que la communication est la clef d'une bonne relation. Je ne penses pas que mère ait réalisé en quoi elle t'a blessé. C'est le rêve de toutes les filles de se marier à un bon parti et tu es passée de bourgeoise à fille de Duc, c'est presque un miracle. De son point de vue, tu fais enfant gâté."

"Je… n'y avais pas pensé comme ça." Je répondis en regardant Road avec de grand yeux. "Être sa dame de compagnie était parfait pour moi, je n'ai jamais voulu me marier."

"Je sais." Répondit Road en haussant les épaules. "Mais il faut que tu admettes que tu fais figure d'exception. Penses-y d'accord ? Ce serait triste que vous restiez fâchés."


Les mots de Road accompagnèrent mes pensées tout le lendemain à travers les derniers préparatifs frénétique du mariage. Ils tournèrent en boucle dans ma tête la nuit d'après également. Mais il faut dire, même sans mon désaccord avec Tricia, je doutes que j'aurais pu bien dormir. On était la veille de mon mariage après tout et je me sentais indubitablement très très seule. Le manoir Campbell était encore plus à la campagne que celui des Kamelott et pas un seul bruit perçait le silence de la nuit, le rendant encore plus oppressant. D'ordinaire, il ne me fallait que quelques secondes pour m'endormir et je n'avais pas le temps d'avoir peur. Mais de temps en temps, l'insomnie venait me chatouiller les pieds et me tenait éveillée à tourner et retourner dans mon lit.

C'était sans surprise qu'elle était venue me visiter ce soir.

Sans surprise, certes, mais très agaçant. La journée du lendemain serait longue et sans nul doute, éprouvante mentalement et physiquement. Donc j'avais besoin de ce sommeil. Mais évidemment plus on y pense, plus on devient anxieux et plus on est anxieux, moins on y arrive. C'était donc avec une grimace rageuse que je repoussais mes couvertures hors de moi, attrapais une robe de chambre et filais pieds nus dans le couloir avec toute la furtivité dont j'étais capable. Ça ne devait pas être extraordinaire avec les Noahs mais heureusement pour moi, la majorité d'entre eux étaient dans l'autre aile du manoir. Seul Adam, Lucie et moi avions une chambre dans l'aile familiale et Merlin, ça aurait dû me mettre la puce à l'oreille sur mon nouveau statut lorsque j'étais arrivée ici la première fois. Wow, j'avais l'impression que la vente aux enchère était il y a un siècle… En même temps, ce n'était pas éton-...

"Eve ?" Un murmure pourtant bien audible dans le couloir vide et je tournais la tête pour voir Adam dans l'encadrement de la porte de sa chambre.

"Je n'arrives pas à dormir." Je répondis aussitôt, me sentant tout à coup coupable sans trop que je ne sache pourquoi. Merlin, j'avais l'impression d'être à nouveau une enfant, perdue comme je l'étais, en chemise de nuit, pieds nus et prise sur le fait.

"Ce n'est pas étonnant." Souris Adam et je lui rendais son sourire sans y penser. "Pourquoi n'irions nous pas prendre un chocolat chaud au salon ?" Proposa-t-il et je le suivis aussitôt. Je n'avais pas eu d'autre idée que de m'occuper l'esprit lorsque j'étais sortie de ma chambre et… je ne voulais pas être seule ce soir. D'ordinaire, la solitude ne m'ennuyait pas tant temps que j'avais mes livres mais ce soir… Autant dire que je n'allais pas cracher sur la compagnie d'Adam… même si ce n'était pas le père avec qui je voudrais vraiment être à quelques heures de mon mariage.

Il n'empêche, même si ce n'était pas mon Papa, il se conduisit très certainement comme tel ce soir-là. Il fit tous les efforts du monde pour me mettre à l'aise, m'étouffant sous les couvertures pelucheuses et les coussins douillets (à tel point que je me demandais si Road ou les jumeaux lui avait parlé de l'épisode du fort de couverture) et m'abreuvant d'un chocolat chaud trop sucré et d'histoires fantastiques. C'était incroyablement réconfortant et j'oubliais rapidement mes soucis alors que toute mon attention se concentrait sur le mystère du trésor de barbe rouge qu'il me contait. A un moment, Lulu le chat nous rejoint même, se glissant à travers l'interstice de la porte avant de venir se lover entre mes bras, m'amenant à la caresser mécaniquement, les paupières lourdes.


Tout cela dû aider à me détendre d'une façon où d'une autre parce que ce fut la main de Road sur mon épaule qui me réveilla le lendemain matin. J'étais toujours allongée dans le salon et Adam ronflait doucement dans le siège en face de moi, Lulu roulée en boule sur ses genoux. Je me sentais étonnamment bien reposée et calme et je louais Adam de m'avoir accordé ces quelques instants, surtout lorsque tout partit sur les chapeaux de roues une minute après mon réveil.

Moi qui pensait en avoir finit de toutes les préparations la veille, j'étais loin du compte… réveillée à 6h10 (10 parce que Tricia ne pouvait me trouver dans ma chambre et avait parcouru tout le manoir à bout de nerf avant que Road me trouve dans le salon) Il fallut deux heures de préparations intense, à me laisser baigner (à mon grand dégoût), coiffer et maquiller par Mahulda et une petite équipe de choc de femmes de chambre avant que Tricia accepte que j'enfile ma robe et ses trop nombreux jupons. Lorsque je fus enfin habillée à la convenance de la Marquise, il était pratiquement 9h et je ne rêvais que d'arracher mon corset trop serré et vomir sur les jolies chaussures de Tricia.

Heureusement, je me retiens, les mots de Road de l'avant-veille tournant et retournant dans ma tête… A tel point que je risquais un retard sur le planning trop serré de Tricia pour la retenir seule dans la salle et lui déverser ce que j'avais sur le coeur.

"Ho, Eve…" Murmura-t-elle, ce mur de froideur et de politesse que nous avions monté entre nous s'effondrant tout à coup alors qu'elle étendait ses bras pour m'enlacer dans un de ses rares élan physique. "Je ne pensais pas… je sais que tu avais dit que… mais je croyais… Je ne veux que ton bonheur, tu sais ? Et je suis sûre que Tyki peut t'apporter ça." Dit-elle avant de s'excuser profusément.

Ce n'était pas l'acquiescement indivisible que j'avais espéré mais c'était toujours bien mieux que ce que je redoutais. Tricia ne comprenait pas mes souhaits mais elle avait fait tout ça pour moi et lorsqu'elle avait compris que ça m'avait blessé elle avait été assez bonne pour s'excuser.

Tout à coup, je m'effondrais dans ses bras, laissant reposer sur ses épaules mon poid déjà supérieur au sien plus celui bien trop lourd des multiples jupons et robes. C'était seulement par pur volonté de ma part que je n'éclatais pas en sanglot et seulement parce que je n'avais pas envie de repasser par une heure de maquillage intensif. J'étais incroyablement soulagée et toute petitesse m'avait quitté, laissant seulement une profonde lassitude. J'en avais déjà marre de ce mariage et il n'avait même pas réellement commencé. Mais bon, ce n'est pas en me cachant sous les couverture qu'il disparaîtrait alors…

"Je ne voudrais pas planter Tyki devant l'autel, allons-y." Je répondis finalement en lâchant Tricia avec une assurance que je ne ressentais pas tout à fait.

Un mariage au XIXème siècle, noble qui plus est, c'était toute une histoire. Cela commençait par un petit-déjeuner traditionnel avec la famille et les amis proches. Ce qui ici signifiait toute la famille Kamelott, toute la famille Belle et les deux membres restant des Campbell. A cela s'ajoutaient bien entendu les autres demoiselles d'honneur (que j'avais donc rencontré pour la première fois) ainsi que les garçons d'honneur (et vu le sourire fixe de Tyki, il les connaissait déjà et n'était pas heureux du choix des son frangin.)

A un moment, Adam nous appela tous joyeusement dans le salon où un matériel de photographie professionnel était installé et un photographe, peut-être du même cabinet où Tyki, Allen et moi étions allés deux ans plus tôt, prit une photo de famille.
Évidemment, Tyki et moi étions assis au centre, Adam assis à ma gauche, Road sur ses genoux et Lulubell debout derrière lui avec un air sévère. De l'autre côté de Tyki, Tricia était assise, rayonnante, Sheryl debout derrière elle avec une main sur son épaule et les jumeaux debout derrière nous, l'air étrangement sérieux.
D'une certaine manière, c'était la seule chose que j'avais attendu de la journée. Je n'avais pas beaucoup de photos de ces deux années au manoir, à peine assez pour se rendre compte de la véritable poussée de croissance de Road et des jumeaux et ce serait la première de toute la famille ensemble. Moi comprise. Et il faut le dire, ça faisait tout de même un petit quelque chose au cœur de se sentir intégrée.

Toute l'affaire était une bonne mise en bouche de la véritable galère qu'allait être la journée. Pas encore trop guindée du fait du faible nombres de personne en dehors de la famille mais très occupée malgré tout et lorsqu'on en arrivait à la seconde tradition, les carrosses pour se rendre à l'église, j'avais déjà envie de partir me cacher à la bibliothèque. Je n'avais pas encore pu parler à Tyki (lui aussi autant occupé que moi) mais vu le nombre de fois où j'avais vu son regard dévier vers la fenêtre, je ne devais pas être la seule a avoir des envies de liberté.

Pour les carrosses, il y avait un ordre très particulier qu'il fallait ab-so-lu-ment respecter et je me retrouvais à attendre patiemment à côté d'Adam que tout le monde rentre dans le sien avant d'embarquer dans le dernier avec mon "père". Peut-être sentant mon état de nerf, Adam fut rapide à lancer un sujet de conversation très, très loin du mariage (Les traditions espagnoles si vous deviez savoir…) et c'est plus ou moins détendue que j'arrivais à l'église.

"Prête ?" Sourit Adam alors que le fiacre s'arrêtait lentement en face des marches vidées. Seuls les demoiselles et garçon d'honneur étaient là, Sheryl extrêmement rigide à côté de Lucie (obligés d'être ensemble en temps que premier garçon et dame d'honneur) alors que Tricia parlait joyeusement au second garçon d'honneur. Un peu de jalousie ? Ou de possessivité connaissant Sheryl...

"Non." Je répondis honnêtement en me retenant de passer une main dans ma coiffure trop serrée. Semblant perdu à ma réponse trop honnête, Adam prit tout à coup un air inquiet avant de se pencher légèrement en avant et d'ouvrir les lèvres. "Mais ça va aller, ce n'est qu'un bout de papier." Je le coupais, essayant clairement de me convaincre moi-même. "Ça ne va rien changer."

Adam avait l'air un peu douteux mais il ne dit rien, me tapotant simplement l'épaule en réconfort alors qu'un serviteur venait ouvrir la porte du fiacre. Descendant d'abord, Adam étendit sa main pour m'aider puis me tendit son bras. Hésitant une seconde, j'entremêlais finalement le mien au sien et lui rendait un sourire reconnaissant. Il avait fait tellement, tellement pour moi ces derniers mois (et je repoussais loin de moi l'idée que c'était en fait terrifiant, pourquoi faisait-il ça ?!) que je ne savais pas comment le remercier. Mais… je pouvais déjà commencer par utiliser toutes ces leçons épuisantes à leur juste valeur et faire en sorte que ce mariage se passe le mieux possible.

Résolue, je grimpais lentement les marches de l'église, infiniment heureuse d'avoir empêché Tricia de me donner plus que des talons plats, et arrivais finalement à la porte. Devant nous, les garçons et demoiselles d'honneur se positionnèrent en couple, Sheryl et Lucie juste devant nous et la porte de l'église s'ouvrit. Par delà les épaules je pouvais voir le public se lever et oh Merlin il y avait tellement de monde. J'allais tellement me ramasser dans l'allée, c'était obligé, je pensais en serrant plus fermement le bras d'Adam. En silence, la petite procession atteint l'hôtel, chaque couple se séparèrent pour que les hommes aillent d'un côté et les femmes de l'autre. Déjà à l'autel, je croisais enfin le regard de Tyki et baissait la tête, gênée. On avait pas vraiment pu parler depuis mon anniversaire, étant bien trop occupés tous les deux et ça faisait vraiment bizarre de le retrouver enfin là.

Arrivée devant le prêtre, je me positionnais à gauche comme on l'avait répété, Adam se plaçant un peu derrière moi à côté de Lucie et…. j'attendis. Je n'ai aucune idée de si c'était normal ou pas mais la cérémonie était extrêmement longue. Je savais qu'en soit elle n'avait pas pu durer bien plus d'une heure mais rester debout, engoncée dans six couches de jupons à écouter une messe à moitié en latin sans rien faire d'autres que de faire semblant d'écouter : c'était long.

J'en étais à secouer légèrement ma jambe droite sous ma jupe pour essayer d'en enlever la raideur lorsqu'enfin, enfin, la partie la plus importante, et le moment annonçant ma délivrance prochaine arriva. Laissant Lucie enlever mes gants et Adam prendre mes mains pour les glisser entre les doigts de Tyki, j'arrivais à peine à cacher mon dégoût. C'était clairement une façon de dire "je vous donne ma fille, elle est désormais sous votre autorité." C'était comme la vente d'un objet.

Respirant profondément, sachant que le pire moment n'allait pas tarder, celui où littéralement cette fois, j'étais censée jurer obéissance, je levais les yeux pour croiser ceux de Tyki. Le Noah du Plaisir avait l'air un peu fatigué et surtout étrangement… appréhensif ? Levant un sourcil en une demande muette, Tyki pinça légèrement les lèvres avant de jeter un regard rapide au prêtre. Confuse, il ne me fallut pourtant pas longtemps pour comprendre son problème lorsque le prêtre énonça la prochaine phrase:

"Lord Thibert Tikyano Mikk…" Commença-t-il mais ma tête s'était déjà tournée aussitôt vers Tyki qui avait fermé les paupières avec un air de souffrance clairement visible sur son visage. Oh Merlin, Thibert ? Thibert ?! J'étais infiniment heureuse d'avoir encore mon voile sur le visage. Ca ne cachait pas mon sourire trop large de Tyki mais le reste de l'assemblé devait surement être trop loin pour le discerner. "..consentez-vous à prendre devant Dieu, Lady Evelyne Harmonie Campbell pour épouse ?"

Evelyne Harmonie ?

"...Je le veux." énonça distinctement Tyki après une petite pause.

Me retenant de me retourner pour regarder Adam et lui demander pourquoi il avait cru jugé bon de modifier mon nom (quoi que si j'en jugeais par celui de Tyki… ou même des jumeaux… Oh, Merlin, est-ce que Road aussi avait un nom "noble" dont je n'étais pas au courant ?!) je restais les yeux fixés sur le menton de Tyki, ayant peur de me mettre à rire si je le regardais dans les yeux.

Thibert.

Pfff…

"...ano Mikk pour époux ?" Demanda le prêtre mais j'étais toujours en train de me moquer des noms et il fallut que Tyki me presse la main pour que j'énonce un "Je le veux." attif.

Tyki se tourna alors vers moi, sa main gauche tenant toujours ma main droite alors qu'il cherchait les alliances avec son autre main dans sa poche de poitrine. Gêné par les fleurs et sa main prise il mit quelques secondes à trouver l'enveloppe, son visage pâlissant tellement que je cru même à un moment qu'il l'avait perdu. Honnêtement, j'étais prête à éclater rire ici et maintenant, toute l'affaire cérémonial jurant sacrément avec le ridicule de l'instant. Mais non, heureusement pour la dignité familiale, Tyki extirpa finalement le papier argenté soigneusement plié contenant les alliances et le donna au prêtre. L'homme en sortie les bagues, les bénies puis en donna une à Tyki.

C'était bien une bague "infidèle" en or, comme il me l'avait proposé, et un ruban blanc soigneusement attaché à l'arrière l'empêchait de se défaire en morceaux. Ça aurait été drôle si elle s'était effritée entre les doigts de Tyki lorsqu'il avait essayé de me la mettre au doigt mais non, le ruban tint et bientôt il la glissait à sa place sur mon annulaire en prononçant ses voeux.

"Je jure de t'honorer et de te soutenir" Dit-il distinctement tout en tirant le ruban, le détachant de la bague. Voilà, maintenant si on tentait d'enlever la bague il y avait toutes les chances qu'elle se délite et il faudrait alors résoudre le casse-tête pour la remettre.

Prenant la seconde alliance, je la glissais sur l'annulaire de Tyki, avalant difficilement avant de dire les mots que je redoutais, ceux qui scellerait toute l'affaire: "Je jure de t'honorer et t'obéir"

Et voilà, c'était fini.

Ou presque.

"Je vous déclare mari et femme. Vous pouvez embrasser la mariée." Dit alors le prêtre et je levais la tête pour regarder Tyki avec de grand yeux. J'avais… oubliée cette partie.

Vu la tête de mon nouveau mari, lui aussi n'y avait pas pensé.

Lentement, il leva la main droite vers mon visage, enlevant mon voile, ses yeux pleins d'excuses et je n'eus qu'une seconde pour penser. Lâchant ses doigts toujours entrelacés aux miens, je levais les deux mains pour prendre son visage en coupe et l'amener à mon niveau… avant de l'embrasser. Derrière moi, l'assemblée émit un son choqué à mon initiative et j'étais à peu près sûre que j'avais entendu Road siffler et Jasdero glapir. Mais aussi rapidement que c'était arrivé, c'était fini et après avoir cligné des yeux quelques fois, clairement surpris, Tyki fit un sourire amusé et me tendit son bras.

"Ça n'aurait pas été si horrible de le faire en vrai, si ?" Murmura-t-il à mon oreille avec un petit rire alors que je prenais son bras avec un sourire satisfait. Non seulement je n'avais pas attendu passivement de me faire embrasser comme l'ordre du prêtre le sous-entendait mais en plus… je ne l'avais pas vraiment embrassé.

Je vous avais dit que j'avais fait du théâtre ? Hé bien, à un des spectacles, mon personnage devait en embrasser un autre. Jamais cru qu'un baisé de théâtre me servirait à nouveau mais... la vie réserve toujours des surprises. Il avait suffit que je glisse rapidement un pouce entre nos lèvres et que je l'enlève tout aussi vite une fois le baiser fini et c'était passé comme une lettre à la poste.

Après cela, il ne restait plus qu'à signer le registre de mariage (et il y eut juste un peu de panique lorsque je me rendis compte que je n'avais aucune idée de comment écrire "Evelyne Harmonie Campbell". A la Française? à l'Anglaise ? est-ce qu'il y avait une vieille écriture que je ne connaissais pas ? Au final, je me dis qu'avec le pouvoir d'Adam ou de Sheryl, on pourrait toujours le modifier plus tard si je me trompais… c'est leur faute aussi, ils auraient pu me dire qu'ils avaient changé mon nom !) sortir sous les pétales de fleurs, distribuer les fanions aux invités, sourire beaucoup, papoter un peu (même si Adam faisait la majorité de la conversation) puis enfin, enfin ! Prendre une pause dans un fiacre qui nous ramenait au manoir.

Cette fois, j'étais seule avec Tyki, le reste de la famille et des invités dans d'autres fiacres. C'était pas… beaucoup mieux qu'avant cependant. Malgré les petits quack pendant la cérémonie, il y avait toujours trop de bagage entre nous pour que nous puissions parler comme d'ordinaire.

"Alors..." Je marmonnais après quelques minutes de silence pesant avant de lui jeter un regard sournois. "Thibert ?"

"Evelyne ?" Contra-il en levant un sourcil et je grommelais des choses pas très gentilles dans ma barbe en posant ma tête contre la vitre. Je ne savais pas quoi dire d'autre et malgré que je le vois ouvrir les lèvres à plusieurs reprises du coin de l'oeil, lui non plus ne dit rien de plus et nous arrivions bientôt au manoir Campbell.


Le reste de l'après-midi fut encore une fois une farandole d'événements tous plus épuisant les uns que les autres. Alors que nous aurions normalement dû partir en lune de miel en milieu d'après-midi après un déjeuner tardif, Sheryl et Tricia n'avait pas pu laisser passer l'occasion bien trop belle du mariage d'une Duchesse et l'avait fait durer jusque dans la soirée. En effet, malgré son manque d'activité dans la haute société, Adam était très largement respecté pour son titre, sa proximité à la couronne et ses affaires miraculeusement florissante (je ne doutais pas qu'une batterie d'Akuma l'aidait de ce côté-là.) Il n'était donc pas étonnant que l'entièreté du gratin de Grande-Bretagne et même d'Europe était là pour entretenir leurs connexions.

Et donc, tour à tour dans la soirée j'avais été présentée à des centaines de nobles de tout rang, à quelques princes et princesses d'ici et d'ailleurs, à des politiques salivant voir même des artistes adorés et encore d'autres figures proéminentes de la société. J'en était à un point tel que malgré mes petits talons confortable, j'avais envie de les jeter dans un coin et m'écrouler sur mon lit. Ma tête tournait de toutes ces nouvelles connaissances et je savais d'avance que je ne me souviendrais de rien de pertinent le lendemain.

Essayant de garder l'ennui de mon visage, j'hochais avec un petit sourire faux à ce que disait un vieux Monsieur rondouillard qui, vu son uniforme, devait être un militaire de haut rang. Je n'avais pas quitté Tyki de la soirée, accrochée à son bras comme une bernacle à son rocher, ayant trop peur de le lâcher et de me retrouver dans cette foule de fausse politesse. Heureusement, pour une fois les très faibles attente envers les femmes jouaient en ma faveur et j'avais simplement pu rester là et faire jolie pendant que le pauvre Tyki s'escrimait à n'insulter personne, Sheryl soufflant dans son cou, prêt à sauter au moindres faux pas.

Malheureusement, j'avais très, très envie d'aller aux toilettes.

Pas très glamour de dire ça, mais je n'avais pas vraiment eu le temps depuis mon réveil et il commençait à se faire tard… Heureusement que j'avais insisté pour une robe bien plus simple que celles que Tricia me proposait ou alors j'aurais eu besoin d'aide pour y aller. Parlez-moi d'un moment gênant… Essayant d'effacer l'image de mon esprit, je regardais discrètement autour de moi, essayant de trouver un moyen de m'échapper d'ici. Malheureusement, j'étais littéralement la reine de la soirée et je ne voyais pas comment m'éloigner sans que l'on me remarque. Surtout lorsque je voyais des dizaines de regards fixés sur Tyki et moi, ressemblant à des chien prêt à se jeter sur nous dès que nous aurions fini notre conversation actuelle. Je commençais à désespérer, me retenant de croiser les jambes sous ma robe lorsque j'eus une idée. Non loin de nous, un jeune serveur flânait, un plateau de petit four à la main et je ne tardais pas à croiser son regard, ou plutôt son oeil parce que le second était caché derrière une touffe de cheveux brun sale certainement pas réglementaire. Lui faisant un petit signe discret, il trottina vers nous, me tendant son plateau en baissant légèrement la tête en respect. Faisant grand cas d'enlever mon gant pour prendre un petit four, ma main accidentellement buta dans le plateau, envoyant les gâteaux voler sur le costume de Tyki et le bas de ma robe.

"Oh, excusez-moi, je suis tellement maladroite !" Je m'écriais faussement, faisant sursauter tout les membres de notre petit groupe. Sheryl plissa les yeux dans ma direction et je fis semblant de ne pas voir le regard plat de Lulubell. J'espérais, au moins, que ce n'était pas aussi évident pour les humains du groupe.

"Ho non Duchesse Campbell, je vous pris de m'excuser, je…" Commença à dire le pauvre serveur et oups, je n'avais pas du tout pensé à lui avec mon grand plan, il faudrait que je fasse attention à ce qu'il ne soit pas renvoyé.

"Non c'est moi, je n'avais pas…!" Je continuais frénétiquement avant que Tyki pose son autre main sur mon bras comme pour me calmer.

"Ce n'est rien qu'un peu d'eau ne fera pas partir, ne vous inquiétez pas. Si vous voulez bien nous excuser messieurs…" Sourit Tyki avant de me guider vers une des petite porte de la salle de bal. N'hésitant qu'une seconde, je fis signe au serveur de nous suivre, ne voulant pas qu'il se fasse maltraiter pour son "erreur" pendant notre absence et bientôt nous étions dans un petit couloir privé, loin des foules.

"J'ai cru que ça ne finirais jamais ! Merci Eve." Souffla Tyki, ses doigt déboutonnant légèrement sa veste et tirant sur son col pour respirer un peu. "Tu t'améliore en tout cas, c'était encore plus efficace comme excuse que l'évanouissement." Me taquina-t-il avant de se retourner et de voir le serveur derrière nous. Le voyant se raidir aussitôt et switcher à nouveau dans son mode "noble" je m'empressais de marcher vers le serveur avec un sourire contrit.

"Je suis vraiment désolée pour ça, mais il fallait que je sorte de là. Je promets que ça n'aura pas d'incidence sur votre travail." J'assurais et le serveur cligna de l'oeil, surpris, son plateau toujours dans les mains.

"Euh, bien sûr Duchesse Campbell…. merci ?" Dit-il mais avant que lui ou moi puissions dire quoi que ce soit de plus, Tyki se tenait à mes côtés, la main sur mon épaule.

"Merci pour votre aide, vous pouvez revenir dans la salle de bal maintenant." Dit Tyki avec un sourire mais il avait l'air un peu tendu et ses mots ne sonnaient certainement pas comme une suggestion. Le serveur sembla hésiter une seconde, son regard volant sur les nombreuses toile de maître dans le couloir avant de s'incliner et de faire demi-tour prestement. Ouch, j'aurais vraiment dû réfléchir avant de faire ça, je ne voudrais pas être à sa place… Mais en attendant…

"Tu n'es pas jaloux, tout de même ?" Je demandais, incrédule, en enlevant la main de Tyki de mon épaule.

"Bien sûr que non." Dit-il en roulant les yeux avant de fouiller dans sa veste et d'en sortir une cigarette. "Ce n'est pas un serviteur d'Adam."

"Vraiment ? Tu crois qu'il a profité du mariage pour quoi ? Voler des choses ?" Je demandais tout en prenant la cigarette des mains de Tyki avant qu'il ne puisse l'allumer. "Sheryl va être intenable si tu sens la cigarette en revenant." Je lui fis remarquer en la rangeant dans sa veste.

"On part demain matin de toute façon, il ne s'en souviendra pas lorsqu'on reviendra." Répondit Tyki en haussant les épaules mais il ne ressortit tout de même pas la cigarette. "Et peut-être, c'est sûr qu'il y a de belles choses à voler ici et avec tous les serviteurs temporaires ce ne serait pas étonnant qu'il ait pu s'y glisser." Ne pouvant que supposer, nous laissions tous les deux tomber le sujet et on se séparait là, argumentant les tâches sur ma robe pour enfin aller aux toilettes en paix.


Après notre pause malheureusement trop courte, le reste de la soirée passa dans un flou total. Je ne sais pas combien de fois j'avais dû trinquer tout au long de la soirée et même si je ne prenais qu'une gorgée à chaque fois, n'étant pas fan du champagne, ça devait tout de même faire pas mal de verres et je me sentais un peu pompette. La découpe du gâteau et la danse passa dans un flou, une honte parce que j'avais attendu toute la soirée de pouvoir le goûter. Je n'étais pas déçue d'oublier la partie danse cependant. Même s'il était un peu dommage de gâcher autant de leçons, j'étais à peu près sûre d'avoir écraser les pieds de mon nouveau beau-frère et je préférais pouvoir plaider ne rien savoir si cela revenait sur le tapis plus tard. Au moins, après avoir dansé avec Adam, Tyki et Sheryl, Tricia semblait être satisfaite de ma participation et elle me fit "discrètement" sortir de la salle, Lucie sur nos talons. Discrètement, parce qu'au moment où les filles m'encadrèrent pour me faire sortir, j'eus soudain l'impression que tous les yeux se plantaient dans ma tête et que les conversations cessèrent. Ça ne durait qu'une seconde cependant et puis la porte se ferma derrière moi et on entendit les conversations reprendre.

Regardant confusément par dessus mon épaule, je suivais Tricia mécaniquement jusque dans ma chambre où Mahulda et les même femmes de chambres que ce matin m'attendaient. Alors que Lucie et Tricia s'installaient dans un petit salon, la Marquise ayant l'air fatigué, je laissais les serviteurs m'aider à enlever la robe. Après un bain relaxant, j'enfilais une toute nouvelle chemise de nuit qui ressemblait plus à une vraie robe qu'un pyjama avec à quel point elle était brodée de perles et de dentelles et je rejoints Lucie et Tricia. Mahulda se mit alors à me coiffer malgré mes tentatives pour qu'elle me laisse faire et Tricia commença à déblatérer un tas de métaphore qu'il me fallut bien trop longtemps pour comprendre.

Lorsque je le fis cependant, je dus retenir ma mâchoire de tomber au sol parce que… Est-ce que Tricia me parlait de sexe ?! Oui, oui, c'était bien ça et alors seulement je compris pourquoi tout le monde m'avait regardé en partant ou pourquoi les deux femmes étaient encore là et je devais porter cette chemise de nuit ridicule : C'était la nuit de noce.

Pardonnez-moi de ne pas avoir fait le rapprochement avant mais au bon vieux XIXème siècle, surtout dans ma famille non-religieuse, le sexe n'était pas tabou et ce n'était pas quelque chose qu'on parlait à demi-mot et qu'on réservait pour la nuit de noce.

Sauf qu'ici, oui.

La nuit de noce, c'était quelque chose de très important. Techniquement, ce serait la première fois des deux époux (même si dans notre cas… hum hum) et c'était une manière de formellement conclure le contrat marital. J'avais même lu qu'encore avant, les parents pouvaient assister à la nuit de noce pour vérifier que le mariage était bien consommé. Et rien ne serait-ce que de penser à la possibilité que… Urgh.

Et alors que je me disais que non, on avait bien tout mis au claire avec Tyki, je n'avais pas besoin de m'en faire… Il n'empêche que l'excitation de Tricia était contagieuse et qu'elle se mua automatiquement en stresse chez moi. A tel point que lorsque Tricia eût fini de me dire tout ses conseils (très mauvais au passage, pour la plupart, ce n'était absolument pas rassurant malgré ses meilleurs efforts, extrêmement vague et la moitié des informations étaient fausses.) et que Lucie m'ait serré maladroitement ses bras, j'étais une véritable boule de nerf et je n'aspirais qu'à me cacher dans la bibliothèque. Malheureusement, mes deux chiens de garde ne me laissèrent aucune chance et bientôt, on frappait à la porte. Évidemment, c'était Tyki et les deux femmes s'esquivèrent dans le couloir avec un dernier sourire encourageant de la part de Tricia.

Merlin, c'était bizarre.

Tous les deux debouts face à face, on essaya bien de lancer une conversation mais sans grand succès. Au final, on en retourna au problème actuel.

"C'est gênant… Je pourrais toujours utiliser mes pouvoirs pour aller dans ma chambre mais…" Murmura finalement Tyki et il n'avait pas besoin de continuer. Même moi avec mes sens humain je pouvais pourtant clairement entendre les murmures dans le couloir.

"Ça va, tu peux dormir ici, ce n'est pas grave. On a déjà fait des pyjama party avec Road et les jumeaux, ce n'est pas bien différent." Je souris faiblement avant d'aller m'installer au lit. Sauf que si, c'était très différent. Déjà, il n'y avait pas trois enfants excités avec nous et de deux, nous n'étions pas mariés avant ça. Et j'avais beau essayer de me convaincre du contraire, c'était super étrange.

Me repliant du côté droit, priant pour que je ne me retrouve pas au milieu du lit le matin comme j'en avais l'habitude, je sentis Tyki s'installer de l'autre côté sans un mot. Vraiment sans un mot. Je ne sais pas combien de temps on resta comme ça, immobiles comme des planches de bois, clairement éveillés mais n'osant pas parler. J'avais l'impression que mon cerveau hurlait dans ma tête et mon coeur battait tellement fort sous le stress que je n'avais aucun doute que les sens surhumain de Tyki puisse l'entendre. C'en était encore plus terrifiant. Le sentant bouger légèrement, je me pressais encore un peu plus contre le bord, ayant peur de l'effleurer et provoquer… quoi ? L'apocalypse ? Comme si c'était si drama… Ho Merlin il bougeait ! Zut, je devais…

BOOM

M'étant encore plus rapprochée du bord, je n'avais pas pris en compte les draps de soie trop glissant et j'avais fini par m'écraser par terre avec un grand bruit, laissant échapper un son trop aigu lorsque la couverture vint s'échouer au dessus de moi, l'ayant arracher en essayant de me retenir de tomber.

Oh non. Je voulais mourir.

Zyeutant tristement l'espace trop petit pour que je puisse rouler sous le lit et faire comme si rien n'était arrivé, je restais prostrée sur le sol, la couverture couvrant mes joues rouges… ou en tout cas jusqu'à ce que Tyki la soulève, sa tête dépassant légèrement du dessus du lit.

"...Eve ?" Demanda-t-il et lorsque je grognais sans prendre la peine de bouger il demanda, l'air un peu inquiet: "Tu vas bien ?"

"Merveilleusement bien, Thibert." Je répondis légèrement, essayant désespérément de changer de sujet.

Heureusement, cela fonctionna. Et peut-être même trop bien, parce que j'avais à peine laissé son nom détesté passer mes lèvres qu'il laissait tomber la couverture sur mon visage… et me lançait un oreiller en plus pour faire bonne mesure.

"Hey !?" Je criais outrée, lui relançant la couverture à l'aveugle pour que je puisse me relever, attrapant l'oreiller au passage. Et c'est comme cela qu'on se retrouva à genoux sur le lit a faire une bataille d'oreiller à notre nuit de noce.

Hey, c'était tout de même une activité physique, non ?

Et lorsqu'on s'affala finalement sur le lit, épuisés de la journée mais se tenant les côtes de rire, je sus que le mur de gêne que nous avions construit entre nous était enfin brisé.


Ouuuh, comme j'ai galéré à l'écrire ce chapitre, il était aussi plaisant à écrire que d'enlever une bande de cire X( Je sais pas pourquoi j'ai autant galéré mais j'aime pas du tout le produit finis et c'est surement un de ceux qui va bien changer à la réécriture... si j'ai pas trop la flemme.

Allez, le prochain chapitre devrait être plus sympa ! :D Je vais même essayer de glisser un blandin dedans mais pas de promesses... Bon allez, j'ai un chapitre de UAPV à écrire... et surtout une fin a trouver -_-' Vivement que ça se finisse...
Pensez aux reviews et à la revoyure !