Le voilà. Le dernier chapitre de ma fanfiction est enfin arrivé. Il est long. Le plus long de tous. J'espère que l'attente n'aura pas été trop longue pour vous. J'ai eu beaucoup de mal à écrire ce chapitre. Non seulement parce qu'il est très dur mais aussi et surtout parce qu'il marque la fin d'une histoire que j'ai été heureuse de vivre avec vous. J'espère que vous aurez pris autant de plaisir que moi à partager ces moments. D'autres arriveront bientôt.
J'ai beaucoup de gens à remercier. D'abord certaines de mes plus fidèles lectrices comme WitchSpirit qui m'a toujours mis beaucoup de baume au cœur grâce à ses reviews, MaryJanee dont les commentaires me mettaient toujours le sourire aux lèvres, Ptitepointe2, ainsi que Leslie, Wassem Assbai et Arya43 qui me suis depuis le tout début. Merci à tous et à toutes, ainsi qu'à tous les autres lecteurs et lectrices de m'avoir suivit tout au long de cette aventure. Vous m'avez été d'une grande aide dans vos commentaires qui étaient toujours justes et positifs. Il m'ont permit de me donner à fond dans ce récit pour que vous soyez pleinement satisfaits. J'espère ne pas vous décevoir ! Quoi qu'il en soit, on se retrouve en bas !
Réponse aux reviews :
WitchSpirit : Merci pour ce commentaire très touchant. Je suis ravie que le chapitre précédent t'ai plu, j'espère que ce sera le cas pour cet ultime chapitre. J'ai été sadique, c'est vrai, en vous laissant sur votre faim, mais j'avais besoin d'instaurer une sorte de suspens pour que vous ayez vraiment envie de lire la suite ! Et pour répondre à ta question, j'ai en effet lu le passage de la mort de Luicus avec la musique de Prät comme tu me l'avais conseillé : c'était bouleversant et terriblement profond. Je te remercie pour ce moment. Bonne lecture ! E.S.
Dame-Vampyria : Je te remercie beaucoup pour ta reviews. La comparaison de mon écriture avec celle de la Reine Rowling m'a profondément touché.
En ce qui concerne les fautes de frappes et de conjugaisons, il est vrai qu'en me relisant aujourd'hui, j'en trouve beaucoup et c'est très désagréable. Ma seule excuse est que je n'ai parfois que très peu temps pour me relire et il m'arrive souvent de rater des fautes assez surprenantes. J'ai eu du temps pour relire entièrement ce chapitre, j'espère que ça te plaira davantage. Bonne lecture à toi et à très vite ! E.S.
Mamy 83 : Merci beaucoup à toi aussi pour ta fidélité et pour cette reviews. Hâte-toi donc de lire la suite et fin, j'espère qu'elle te plaira. E.S.
Angie-Corleone : Chère Angie-Corleone. L'attente aura encore été un peu longue, j'en su navrée, j'espère que, là aussi, ça en aura valut la peine. E.S.
Manon : Que puis-je te dire sans rien spoiler ? Bonne lecture ! E.S.
Bonne lecture à tous.
Kiss,
Eternely Snape.
Les Méandres du Chagrin
« Et quand Dieu veut s'attacher réellement un homme, il appelle son plus fidèle écuyer, son plus sûr messager, qui est le chagrin, et lui dit : « Cours après lui, rattrape-le, ne le lâche pas d'une semelle... »
Soren Kierkegaard.
Une semaine était passée et Hermione n'avait pas un seul instant quitté l'infirmerie. Elle était restée assise auprès de Severus, incapable de bouger, les yeux fixés sur le corps immobile du Maître des Potions, les larmes roulants inlassablement sur ses joues pâles. Rien de ce qu'avait pu dire Minerva n'avait pu la décider à laisser le corps de Severus. Aucune douces paroles de Poppy n'avaient pu soulager sa peine. Aucun des silences apaisants de Luna n'avaient réussit à la consoler. D'ailleurs, Hermione n'avait pas dit un mot depuis ce jour terrible. Lorsqu'elle s'était rendue compte que son amour ne reviendrait pas, elle avait pleuré toutes les larmes de son corps, avait hurlé et s'était même évanouie. Mais après cela, elle n'avait plus dit un seul mot, s'était assise et n'avait plus fait un seul mouvement.
La nouvelle de la mort du Professeur Rogue avait rapidement fait le tour de l'école, au même titre que le désespoir de la Gryffondor. Mais rien de ce qu'avait pu dire les élèves, aucune des critiques, des méchancetés, aucun des ragots et des on-dit n'avaient fait réagir la jeune-femme. Elle était plongée dans un tel désespoir que rien ne l'atteignait. Elle restait simplement là, espérant du plus profond de son être que Severus revienne. À chaque mouvement à ses côtés, elle sursautait légèrement, caressant le fol espoir de voir Severus assit sur son lit, l'air méprisant, son visage cireux et ses yeux noirs la regardant fixement. Mais rien de ce qu'elle désirait le plus au monde ne se produisit.
Minerva, qui avait essuyé maintes questions concernant le Professeur Rogue, était maintenant accablée d'une profonde tristesse. Elle avait tellement espéré revoir Severus, espéré revoir son air narquois et sa mine renfrognée qu'elle était tombée de très haut lorsque, avec Hermione, Poppy et Pretexta, elle s'était rendue à l'évidence que le Maître des Potions ne reviendrait pas. Jamais. Son cœur était meurtrit et son esprit était un véritable champs de ruine. Jamais elle ne s'était sentie plus coupable qu'à cet instant. Coupable d'avoir été aveugle face aux sentiments qu'éprouvait Severus pour Hermione et vice versa. Coupable de n'avoir pas prédit que, même sans amour, Severus aurait été capable de donner sa vie pour sauver un élève quel qu'il soit, par principe. Coupable de n'avoir pu empêcher sa mort, coupable aussi de ne pouvoir consoler la peine de Miss Granger. Parce que Severus mort, Hermione n'était plus qu'un fantôme, elle le voyait bien. Et elle imaginait combien la souffrance d'une jeune-femme ayant déjà tout perdu pouvait être immense. Mais elle, Minerva McGonagall, Directrice de Poudlard et de Gryffondor, Professeur de Métamorphose, ne pouvait rien contre la lente agonie de son élève préférée.
Bien sûr, elle s'était confiée à Albus, lui avait dit ce qu'elle ressentait, mais la parole d'un tableau ne valait pas celle d'un homme. Et bien que le portrait d'Albus soit fidèle, il n'était pas Albus. Albus était mort, lui aussi, et jamais il ne reviendrait. Et Minerva était finalement bien seule, elle aussi. Elle avait perdu son ami et maintenant celui qu'elle considérait comme un fils malgré les nombreux désaccords qui les avait si souvent opposés. Poppy était là, évidemment, comme chacun des autres Professeurs, et elle avait encore ses précieux élèves, mais rien ne valait la présence, bien que silencieuse, de Severus Rogue. Ils avaient toujours eu des rapports privilégiés, même quand il n'était encore qu'un enfant. Plus encore quand il était arrivé comme Professeur de Potions. Sans doute s'était elle sentie l'âme d'un Ange-Gardien lorsqu'elle avait vu dans son regard combien il regrettait la mort de Lily Potter alors même que le monde Sorcier apprenait la mort du Seigneur des Ténèbres. Elle avait voulu le prendre sous son aile, le protéger, lui donner tout ce qu'il n'avait pas eu.
Maintenant, elle se rendait compte à quel point il avait été clément avec elle. Elle qui avait douté de sa loyauté après la mort de Dumbledore alors qu'auparavant, elle avait été la première à le défendre contre vents et marrées. Elle qui l'avait vilipendé, qui l'avait menacé et défié. Elle qui avait faillit à son devoir de mentor. Et il lui avait pardonné ses fautes. Sans doute était-ce parce qu'il sentait qu'auprès d'elle, il pouvait trouver une oreille attentive bien qu'il se soit rarement confié à elle depuis la fin de son procès. En fait, il ne lui avait presque rien dit lorsqu'ils s'étaient retrouvés tous les deux lors de leurs nombreuses rencontres dans le bureau directorial alors qu'ils buvaient un thé. Leurs discussions avaient toujours été plus riches en silences et en regards qu'en paroles. C'étaient sans doute les meilleures, pensa Minerva, un triste sourire aux lèvres pendant qu'elle pénétrait la Grande Salle de son pas assuré, le dos droit malgré la douleur qui lui tombait sur les épaules. Lorsqu'elle passa entre les rangées de tables, les discussions s'estompèrent et le silence se fit. Minerva s'avança vers l'estrade, contourna la table des Professeurs et prit place devant son siège, sans s'y asseoir. Elle balaya la salle de son regard vert, posa ses yeux sur chacune des tables, chacune des maisons, chacun des élèves, prit une grande inspiration et lança un regard vers les autres Professeurs.
« Bien que vous soyez déjà tous au courant de la triste nouvelle, j'attends de vous une attention sans faille, commença-t-elle d'une voix forte. Le Professeur Rogue, notre Maître des Potions, nous a quitté hier dans l'après-midi. Avant toute chose, je tiens à vous prévenir que n'importe quelle insulte que j'entendrais à son égard sera sévèrement punie. »
Elle lança un regard sévère à chacune des tables où tous les élèves se tenaient droits et silencieux. Certains étaient complètement indifférents, mais la plus grande partie de ceux qui avaient été assez intelligents pour comprendre le pourquoi du comment affichait une mine triste.
« J'ai tenu conciliabule avec le nouveau Ministre de la Magie, poursuivit la Directrice, et il a été décidé que Severus Rogue serait enterré chez lui, ici à Poudlard. Monsieur Weasley mettra tout en œuvre pour que les funérailles soient organisées dans le plus grand respect, et je compte sur la présence de chacun d'entre vous. Ceux qui ne présentent aucun respect pour Severus Rogue seront dispensés de cette « corvée ». Je n'accepterais aucun écart pendant l'hommage qui lui sera rendu. L'enterrement aura lieu après-demain à onze heures précises dans le parc. Aucun retard ne sera toléré. »
Minerva tint le silence pendant quelques minutes, balayant une fois de plus la salle de son regard froid.
« À partir de la semaine prochaine, Messieurs Limus et Alynson seront respectivement vos Professeurs de Potions et de Défense contre les Forces du Mal et pas seulement en tant que remplaçants. Il font désormais partit du corps professoral de Poudlard à temps complet. »
Il y a avait une sorte de voile dans la voix de Minerva alors qu'elle disait ces mots. Comme si tout prenait un sens réel à présent. Comme si ce discours mettait définitivement fin à la vie de Severus Rogue et cela était insupportable pour elle. Ses yeux faisaient clairement comprendre qu'elle avait envie de dire des choses sur Severus mais la barrière de ses lèvres refusait de faire sortir la moindre parole. Elle se contenta simplement de rajouter quelques mots sans grande importance, insista sur le fait qu'elle ne voulait aucun écart lors de l'enterrement de Severus et s'assit à sa place en remarquant, avec tristesse, qu'Hermione n'était pas là.
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Drago était toujours inconscient dans son lit d'hôpital. Et Narcissa continuait de veiller sur lui, ne bougeant pas. Elle se tenait debout, droite comme la justice, au chevet de son fils unique. Sa carapace de froideur était toujours en place, mais son regard paraissait lointain depuis la mort de Severus. Elle n'avait pas dit grand chose quand on lui avait apprit la mort de son ancien amant. Elle n'avait même pas rabaissé Hermione. Elle s'était contentée de la regarder d'un œil pas vraiment expressif, lui avait fait un bref signe de tête et avait rejoint sa place auprès de Drago.
Elle n'en voulait pas à Hermione Granger. Elle ne pensait pas que quoi que ce soit était sa faute. En vérité, elle se sentait même un peu triste pour cette jeune-femme. Elle imaginait la douleur qu'elle pouvait ressentir : elle la vivait en ce moment même. Mais elle, Narcissa Malfoy née Black, n'avait pas le droit de pleurer. Mais elle ne reprochait rien à Hermione. Rien n'était sa faute. Severus avait fait un choix. Pour elle. Et Hermione Granger n'était pas fautive des choix que Severus Rogue avaient fait. Le véritable coupable était Rodolphus Lestrange et il était mort. Hermione était à présent libérée. Mais à quel prix ? L'homme qu'elle aimait était mort, par sa faute pensait-elle sûrement, et le dernier pilier qui la maintenait en vie n'existait plus. Étrangement, Narcissa se trouva troublée par ce que pouvait bien éprouver cette jeune-femme qu'elle avait tant haït. Parce qu'elle n'avait plus rien et que son avenir devait lui paraître bien sombre sans la présence de parents et d'amis. Sans la présence de Severus.
Avec la plus grande discrétion, Narcissa tourna un œil vers Hermione qui, fidèle, n'avait pas bougé de la chaise sur laquelle elle prenait grand soin de veiller sur Severus. Son visage était décomposé, pâle, livide, à la limite du cadavérique. Elle qui était déjà bien mince était devenue maigre, osseuse. La semaine sans manger qu'elle avait passée commençait à lui porter préjudice. Ses yeux noisettes étaient rouges et gonflés d'avoir trop pleurés. Ses mains, posées sur celles de Severus, tremblaient. Son regard était fuyant, lointain, presque mort. Ses cheveux étaient plus broussailleux qu'à l'ordinaire. En fait, la jeune-femme que Narcissa voyait n'avait absolument plus rien de la jeune-femme qu'elle avait « connue ». Celle-là attendait, tristement, le retour de l'homme qu'elle aimait, se noyant dans un espoir vain et inutile.
Poussée par elle ne savait quel instinct, Narcissa s'avança vers Hermione, la démarche toujours aussi assurée malgré un dos plus courbé que d'ordinaire. Avec toute la discrétion dont elle était capable, Narcissa s'approcha de la jeune-femme, la respiration presque coupée, le regard rivé sur le corps inerte de Severus. Elle ne l'avait pas remarqué plus tôt, certainement parce qu'elle n'avait pas prit le temps de le regarder vraiment, mais Severus paraissait paisible, presque heureux. Sans doute souffrait-il atrocement dans cet univers terrible qui était le sien, mais il était conscient d'avoir sauvé celle qu'il aimait, c'était sans nul doute ce qui rendait son visage si serein.
« Il a l'air calme, vous ne trouvez pas ? »
Narcissa sursauta légèrement et se tourna vers Hermione. Sa voix n'avait été qu'un faible et long murmure. Une sorte de râle douloureux, comme si parler lui demandait de fournir des efforts considérables.
« En effet. »
Narcissa parla d'une voix légèrement tremblante, comme si la tristesse de la jeune-femme la touchait au plus profond de son être. Quelque chose, dans le regard d'Hermione, lui donnait envie de la réconforter, de lui dire qu'elle allait s'en sortir même si elle n'en pensait pas un traître mot.
« Ce n'est pas votre faute, » murmura-t-elle soudain.
Hermione, pour la première fois depuis la mort de Severus, détacha son regard du corps inerte et tourna la tête vers la femme Malfoy.
« Il a prit cette décision pour vous, continua Narcissa. Pour vous sauver. Et quand il a prit cette décision, même s'il l'espérait de toute son âme, il savait qu'il n'en sortirait pas vivant. Il a préféré sauver votre peau, au détriment de la sienne. Il l'a fait en son âme et conscience, sans hésiter un seul instant. Et cela, c'était simplement parce que son amour pour vous valait plus à ses yeux que sa propre vie. »
Hermione écoutait, sans ciller, l'air un peu perdu, étonnée de voir à quel point les mots de Narcissa Malfoy pouvait la toucher autrement que négativement.
« Severus a donné son âme pour sauver votre vie. Profiter de cette chance, elle ne se représentera certainement pas deux fois. Un homme qui donne autant pour une seule femme, ça n'arrive pas tous les jours croyez-moi. Un homme qui donne autant pour deux femmes, c'est du Severus tout craché. Seulement, il n'a réussi à n'en sauver qu'une sur deux et s'est tombé sur vous. Ne laissez pas son sacrifice devenir vain. »
Hermione ne répondit pas. Son cœur était bien trop serré pour qu'elle ne puisse dire un mot. Mais Narcissa Malfoy avait raison, elle le savait. Se laisser mourir serait égoïste alors que Severus était mort pour la sauver, mais imaginer une vie sans lui lui paraissait improbable. Plus elle y pensait, plus elle pleurait. Parce qu'elle était seule. Seule comme elle l'avait été à la mort de ses amis, à la mort de ses parents. Elle était seule comme elle ne l'avait sans doute jamais été, plus sans doute que la première fois. Parce qu'auparavant, il lui restait Severus. Et même s'il ne lui avait pas rendu son amour, il aurait été là. Vivant. Sans doute était-ce une chance, pour elle, que Severus Rogue soit tombé amoureux d'elle. Sans doute. Mais cela l'avait conduit à la mort. Aurait-il donné sa vie pour un élève qui n'avait aucune importance pour lui ? C'était certain. Mais pas de cette façon.
« Vous devriez sortir, conseilla Narcissa d'une voix un peu brute. Rester ici ne vous fait pas de bien et vous avez une mine affreuse. »
Le regard paniqué d'Hermione fit comprendre à Narcissa à quel point elle était effrayée de se retrouver face au monde réel. À quel point c'était dur pour elle de faire un pas hors de cette pièce, d'abandonner Severus pour la première fois depuis une semaine. À quel point elle avait peur de le laisser seul.
« Je vais veiller sur lui, déclara Narcissa avec une douceur étonnante. Vous pouvez sortir tranquille. Je veillerais sur lui le temps de votre absence. »
Hermione la regarda longuement avec un mélange de gratitude et de peur. Pas peur de Narcissa, elle savait que cette femme n'était pas du genre à faire des promesses en l'air. Peur de ce qu'elle allait faire, peur de ceux qu'elle allait voir. Elle voulait rendre visite à Minerva, mais qu'allait-elle lui dire ?
« Vous devriez y aller. »
Hermione attendit quelques minutes puis fini par se lever. Se fut très douloureux pour elle de faire bouger ses muscles après tout ce temps, mais elle réussit à sortir sans grandes difficultés. Les portes de l'infirmerie se fermèrent derrière elle comme s'il était temps pour elle d'oublier. Avec brutalité. Mais Hermione fut prise de panique. Elle ne savait où aller. Elle ne savait même pas où elle était. Elle ne reconnaissait rien autour d'elle. Ni les murs du château, ni les tableaux, ni les quelques élèves qui passaient devant elle en murmurant. Tout lui semblait flou, faux et irréel. Elle n'était pas chez elle. Elle ne l'était plus. Elle se trouvait simplement à l'endroit où elle avait tout perdu et ça lui était insupportable. Sans doute les Weasley avaient été avertit de tout ce qui s'était passé. Ils n'allaient sûrement pas tarder à arriver et elle n'était pas certaine d'avoir envie de les voir. Alors elle se mit à marcher, sans vraiment savoir où elle allait et, étrangement, après quelques minutes de marche, elle se retrouva tout naturellement devant le tableau au Serpent.
« Bonjour, Mademoiselle, » susurra le Serpent en la voyant arriver.
C'était sans doute la première chose réelle qu'elle voyait depuis plusieurs jours, depuis qu'elle était sortie de l'infirmerie. Ce Serpent faisait partie de son histoire avec Severus. Ce Serpent l'avait « aidé » à comprendre les sentiments de Severus et cela lui faisait du bien de le voir.
« Tu me laisses entrer ? » demanda Hermione sans vraiment savoir si c'était ce qu'elle voulait.
Le Serpent cessa de ronronner autour de sa pomme et fixa ses yeux jaunes sur le visage fatigué et décomposé de la jeune-femme.
« Severus n'est pas là, dit-il dans son sifflement habituel. J'imagine que tu le sais. »
Hermione fut sur le point d'éclater en sanglot, mais le Serpent semblait triste également et elle décida qu'il ne fallait pas qu'elle pleure. Pas à cet instant.
« Severus Rogue était un homme bon, dit le Serpent. Je l'ai vu à toutes les occasions. Je l'ai vu rentrer des réunions avec les Mangemorts, je l'ai vu rentrer blessé, triste, en colère. Je l'ai vu pleurer et je l'ai vu abandonner. Je l'ai aussi vu reprendre espoir, essayer de changer les choses et...je l'ai vu aimer profondément. Lily Potter d'abord, toi ensuite. Je l'ai seulement aperçu le jour où il a prit sa décision, il ne voulait pas parler de cela avec un Serpent dans un tableau, mais j'ai vu que s'il y avait eu une autre solution, il aurait tout fait pour la trouver. »
Les paroles du Serpent avait pour but d'apaiser la conscience d'Hermione et elle aurait souhaité que tous ces mots parviennent à calmer sa peine. Mais ça ne faisait qu'accroître sa douleur. Rien ne pouvait la faire se sentir mieux et jamais personne ne pourrait comprendre son désarroi.
Elle fit alors demi-tour, parce qu'elle n'était pas prête à retourner dans les appartements de l'homme qu'elle aimait. Elle n'était pas prête à ressentir la présence de Severus dans ces pièces. Elle n'était pas prête à se remémorer les souvenirs qu'ils avaient ici. Elle n'était pas prête à voir la bibliothèque, à voir la chambre, le lit, la salle de bain, le canapé et le salon. Elle n'était pas prête à revivre ce qu'ils avaient vécu, les bons comme les mauvais moments. Elle voulait seulement fuir tout cela, s'éloigner le plus vite possible de tout ce désespoir qui la tourmentait. Elle n'était pas prête. Pas prête à affronter le monde sans Severus, pas prête à se reconstruire sans Severus. Elle n'était pas prête et ne le serai sans doute jamais.
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Il neigeait. Il ne faisait pas froid. Il neigeait simplement à gros flocon. Le ciel était d'un blanc coton et le parc était couvert d'une poudre blanche immaculée. Il y avait quelque chose de pur dans ce paysage, quelque chose d'apaisant. L'enterrement de Severus allait avoir lieu le lendemain et la neige ne cessait de tomber, comme les larmes d'Hermione qui ne tarissaient pas. Depuis qu'elle était sortie de l'infirmerie, depuis qu'elle avait laissé le Serpent, elle s'était enfermée dans ses appartements vides. Drago était toujours à l'infirmerie et elle était seule. Luna avait frappé plusieurs fois à sa porte, lui demandant d'ouvrir, de lui parler, de faire un signe, mais Hermione n'avait jamais répondu. Elle était seule, et elle voulait le rester. Fred avait tenté, lui aussi, d'entrer. Mais les sors de protection qu'Hermione avait érigé étaient impénétrables. Il n'avait pas compris pourquoi elle restait cloîtrée comme cela. Sans doute personne ne lui avait dit quelle était la nature de sa relation avec Severus et c'était mieux ainsi, pensa Hermione. Ça aurait tué Fred. Même s'ils s'étaient quittés en bons termes et d'un commun accord, la jeune-femme savait que Fred l'aimait toujours. Et lui faire du mal était la dernière chose qu'elle souhaitait. C'était aussi pour ça qu'elle n'avait pas voulu lui ouvrir. En fait, elle n'avait ouvert à personne. Et beaucoup étaient venus. Neville, Dean et Seamus, même Poppy. Elle avait déposé devant la porte un plateau repas. Hermione l'avait trouvé quelques heures après et l'avait mangé sans grande conviction. Elle n'avait pas faim, mais elle n'avait pas dans l'idée de se laisser mourir. Pas encore.
Alors le temps passait, monotone et sombre. Plus Hermione « avançait », plus elle avait l'impression de s'enfoncer. Elle dormait peu, mais le peu de fois où elle réussissait à somnoler, ses nuits étaient peuplées par des cauchemars affreux et elle se réveillait en sueur, le cœur battant la chamade, l'impression de mourir à petit feu. Et le peu de fois où elle rêvait, Severus était là, auprès d'elle, vivant et heureux. Et quand elle se réveillait, elle le cherchait dans le lit, espérant que tout cela était une douce réalité. Et quand elle ne le trouvait pas, elle plongeait dans un état second, incapable de penser à autre chose qu'à Severus et à tout ce qu'ils avaient vécu ensemble. Elle ne voulait pas sombrer. Elle faisait tout pour ne pas sombrer, mais c'était tellement dur, tellement affreux d'imaginer une vie sans les personnes qu'elle aimait. Bien sûr, il y avait toujours Molly, Arthur, Fred et George. Il y avait toujours Luna et Neville. Mais ce n'était pas sa famille. Pas vraiment. Les Weasley avaient été sa famille pendant quelques mois, mais elle avait été une famille douloureuse. Le poids des morts étaient trop lourd à porter pour eux et pour Hermione. Alors elle avait fuit et elle était revenue à Poudlard. Tout était partit de là. Des Weasley et de son retour à Poudlard.
« Miss Granger ? »
La voix lointaine de Minerva McGonagall l'appela, déterminée. Hermione ne voulait pas répondre. Pas maintenant. Mais c'était Minerva et ça avait été la première personne qu'elle avait voulu voir à sa sortie de l'infirmerie. Alors lentement et avec difficulté Hermione se leva du canapé sur lequel elle passait le plus clair de son temps et se dirigea vers la porte, baguette en main. Elle enleva tous les sorts qu'elle avaient érigé et ouvrit la porte. Minerva se trouvait devant, l'air accablé mais sévère. Elle entra sans demander la permission et se planta au milieu du salon, devant la cheminée dans laquelle crépitait un feu un peu triste.
Hermione referma la porte et, le pas lent, rejoignit Minerva au milieu de la pièce. Elle l'invita à s'asseoir et la vieille femme prit place dans le fauteuil rouge et or. Il n'y eu aucune parole pendant près de dix minutes. Seulement des regards. Et Minerva essayait de faire passer tout un tas d'émotions à travers ses yeux verts. Hermione avait beaucoup de mal à supporter le regard de sa Directrice, mais elle le soutint aussi longtemps qu'elle le pût.
« Severus est mort. »
Minerva avait assené ces mots sans détour, avec force et brutalité. Hermione accusa le coup avec difficulté, déglutit et ferma les yeux un instant.
« Ce qui s'est passé entre vous ne me regarde pas, continua la vieille dame, mais j'ose à peine imaginer ce que vous pouvez vivre en cet instant. La douleur et le chagrin doivent sûrement vous broyer le cœur. Mais vous n'êtes pas seule. »
« Vous vous trompez. »
La voix d'Hermione était très faible. Quasiment inaudible. Elle avait une boule dans la gorge qui l'empêchait de dire plus qu'elle le voulait. Quelques mots simplement pouvaient franchir la barrière de ses lèvres.
« Expliquez-vous. »
« Je ne peux pas. »
Minerva considéra sa jeune élève un long moment, essayant de cerner ses pensées. Mais elle n'était pas Légilimens et Hermione était douée en ce qui concernait l'art de cacher ses émotions. Ses pensées du moins.
« La mort de Severus n'est pas votre faute, affirma Minerva. J'imagine que s'il a prit cette décision, c'était qu'il la jugeait bonne. Rodolphus Lestrange a tout fait pour vous détruire. Si vous vous laissez dépérir, vous le laissez gagner cette bataille. Et même s'il est mort, cette victoire ne sera certainement pas la votre. Vous devez reprendre le dessus, aller de l'avant et honorer la mémoire de l'homme que vous aimez. »
Mais les mots de Minerva n'atteignaient pas Hermione de la façon qu'elle souhaitait.
« Il me manque à moi aussi, déclara la Directrice avec peine. Severus était un homme bon. Torturé mais d'une générosité infaillible. Je ne sais comment s'est déroulée votre histoire, mais j'imagine que s'il a fait tout cela pour vous, c'est parce qu'il vous aimait d'un amour inconditionnel. Severus n'était pas le genre d'homme a donné son amour à n'importe qui. Il vous a fait confiance et il vous a donné ce qu'on peut avoir de plus précieux : la vie. Sans doute cela vous paraît-il dérisoire aujourd'hui, mais il s'est sacrifié pour que vous puissiez vous construire un avenir. Ne gâchez pas son sacrifice. On peut mourir d'aimer, c'est évident, et je vois combien votre détresse est grande mais Severus ne souhaiterait pas voir que son sacrifice a été vain. Il n'a été capable de ne sauver qu'une femme sur deux, sans doute est-ce tombé sur vous pour une raison. La vie nous met des obstacles sur le chemin pour faire notre force. Je sais que vous ne voulez pas de cette épreuve, mais elle se présente à vous et vous n'avez pas le choix de l'accepter. Vous devez simplement faire le bon choix. »
Hermione semblait réagir un peu mieux à ces paroles et Minerva ne voulait pas s'arrêter de parler. Elle aussi était seule et elle aussi avait besoin de se confier.
« La culpabilité que vous éprouvez peut vous détruire comme elle me détruit, poursuivit Mineva en se redressant dans son siège. Mais elle ne doit pas ruiner votre âme. Il m'a fallut beaucoup de temps pour accepter le fait que je m'étais trompée sur son compte. Severus n'était pas un assassin, pas plus qu'il n'était un monstre. Il a fait des erreurs, comme beaucoup d'entre nous, mais il a su réparer ses erreurs et trouver la force de se battre pour la Lumière dans l'Obscurité. Peu d'Hommes auraient eu le cran de faire cela. Risquer sa peau chaque jour, être aux prises de deux « maîtres ». Ce n'est pas une vie pour un homme. Severus a eu un destin brisé par l'égoïsme d'Albus Dumbledore et par la folie de Tom Jedusor. Mais il a su faire de cette épreuve une force et a sauvé, sans doute, des centaines de vies humaines. Ça, c'est ce que représente Severus Rogue aujourd'hui et vous devriez vous souvenir de cela. Faites de cette épreuve votre force. Relevez-vous et avancez. Vous avez un bel avenir devant vous même s'il vous semble bien sombre aujourd'hui. »
Hermione ne répondit pas. Elle avait baissé la tête, sentant les larmes montées à ses yeux. Et l'air contrit de Minerva ne l'aidait pas. Il n'y avait pas de pitié dans son regard seulement une profonde tristesse et un immense chagrin. Elle aimait Hermione, sincèrement, et la voir dans cet état affligeait son pauvre cœur.
« Je vous avais promis. »
Le ton d'Hermione était dur. Elle était en colère. Ses paroles étaient lourdes de sens pour Minerva et la vieille femme comprit ce qui, en plus de tout le reste, tourmentait son élève. C'était la honte de n'avoir pas su tenir une promesse qu'elle avait faite, la culpabilité d'avoir donné un espoir qui n'existait pas, la colère de n'avoir pu réussir sa mission.
« Personne ne vous en veux, Hermione. Ni moi ni Poppy ni personne d'autre. Vous avez fait ce qui vous semblait juste... »
« J'ai échoué ! »
Hermione se leva subitement, les yeux flamboyant d'une souffrance immense et d'une colère dévastatrice.
« Ce n'est pas votre faute, dit Minerva en haussant le ton mais en restant assise. Ce n'est pas votre faute si vous n'avez pas réussi à ramener Severus. Quand vous m'avez fait la promesse de le ramener, vous pensiez pouvoir le faire mais chacun d'entre nous savait que les choses pouvaient ne pas se passer comme nous le souhaitions. Vous n'avez fourni aucun faux espoir à personne. Nous étions conscients que Severus pouvait ne pas revenir. »
« Il m'a dit qu'il me suivait, murmura soudain Hermione en se rasseyant. J'avais réussi à...à battre le Monstre qui gardait son âme et il était vivant. Faible mais vivant. C'était horrible vous savez, ce qu'il y avait là-bas mais j'étais parvenue à quelque chose. Il était là, allongé par terre et...je l'ai cru mort. Il m'a pris la main et il m'a dit qu'il me suivait... Quand les effets de la Potion se sont estompés, j'ai sentit que son emprise s'affaiblissait et... »
Hermione se tut un instant, réalisant la portée de ses mots.
« Il est mort. »
Minerva leva des yeux embués de larmes vers Hermione.
« Il était faible et son emprise sur ma main s'est affaiblie. Je voulais y retourner. Monsieur Limus aurait très bien pu préparer une nouvelle Potion mais...je viens de réaliser... »
Les mots étaient durs, insupportables et Hermione se rendait compte, maintenant, que tout était bel et bien fini.
« J'ai gardé l'espoir qu'il revienne, confia-t-elle. C'est pour ça que je suis restée près de lui mais...Severus est mort. Si j'y retourne, le Monstre aura reprit sa place et il se méfiera. Il me connaît à présent et...jamais l'esprit de Severus ne me rendra son âme. Et même si c'était le cas, jamais Severus ne sera assez fort pour revenir parmi nous. L'emprise que son esprit a sur lui finira par le dévorer et il va mourir à petit feu. Jamais totalement, c'est impossible. On ne peut pas mourir dans un esprit. Il y sera enfermé éternellement. On ne peut pas l'enterrer. Pas comme ça. Son corps est mort, mais son esprit doit sans aucun doute se rendre compte de tout ce qui se passe à l'extérieur... »
« Ce n'est pas le cas. »
Minerva avait dit ses mots sans même les réfléchir et pourtant, elle en était sûre.
« Severus n'a pas conscience de ce qui se passe. Si c'était le cas, il pourrait contrôler son corps un minimum, nous faire un signe et nous savons toutes les deux que ce n'est pas le cas. L'esprit de Severus est mort quand la Potion a cessé de faire son effet. Si son esprit avait réussi à vous emprisonner, vous serez tous deux conscients du monde extérieur sans être capables de faire le moindre geste. Mais vous auriez été ensemble dans un seul esprit. Quand vous avez quitté le subconscient de Severus, quand sa main a lâché son emprise sur la votre, son esprit a réalisé que rien ni personne ne pouvait récupérer l'âme de son prisonnier. C'est donc inutile pour lui de continuer de « vivre » pour quelque chose qui n'existe plus. L'âme de Severus est perdue à jamais et son esprit est mort avec le Monstre que vous avez battu. »
Les paroles de Minerva atteignaient Hermione comme si des lames de couteaux pénétraient son corps. C'était insensé et pourtant tellement réel. Tout prenait sens maintenant et Hermione, à défaut d'aller bien, se sentait légèrement apaisée. Comme toujours, Minerva avait trouvé les mots justes.
« L'enterrement a lieu demain à 10h, expliqua Minerva. Ceux qui braveront la neige pour cet hommage seront ceux qui auront le plus grand respect pour Severus. »
Hermione hocha de la tête, la mine sombre.
« Je serai là. »
Minerva sourit doucement, se leva de son fauteuil et se dirigea vers la porte.
« Professeur ? » appela doucement Hermione.
Celle-ci se retourna, main sur la poignée.
« Merci ».
« Merci à vous, Miss Granger. »
Et sans ajouter un mot, la Directrice de Poudlard s'en alla, refermant la porte derrière elle.
xx0xx
Le lendemain matin, peu d'élèves se trouvaient dans les couloirs. Beaucoup avaient rejoint la Grande Salle très tôt le matin et, à 9h55, tous les habitants du château se dirigeaient dans le parc de Poudlard. La neige avait fondue au trois quart, mais de gros flocons continuaient toujours de tomber. Malgré cela, tous les élèves de chacune des Maisons étaient présents. Les Professeurs étaient là également. Mais ce n'était pas comme pour Dumbledore. Il n'y avaient pas de murmures, il n'y avait pas de brouhaha, seulement un silence pénible et respectueux. À la surprise générale, l'enterrement se fit aux alentours du Saule Cogneur. Minerva l'avait immobilisé le temps des funérailles et des chaises avaient été installées. Le cercueil était fait en ébène noir. Le ciel était toujours très blanc, ce qui contrastait étrangement avec la couleur sombre du tombeau de Severus Rogue. Chacun pris place sur une chaise, soigneusement emmitouflé dans des vêtements chauds. Arthur Weasley, Ministre de la Magie, se trouvait dans la foule, serrant la main de Minerva McGonagall.
Tout le monde semblait être là. Même Drago qui s'était réveillé dans la nuit et qui avait été autorisé, exceptionnellement s'il vous plaît, par Poppy Pomfresh à assister aux funérailles. Narcissa se tenait à ses côtés, l'air affligé, la carapace de froideur effritée. Dean, Seamus, Luna et Neville se tenaient dans la même rangées, aux côtés d'autres Gryffondor comme Fred et George Weasley. Hagrid, fidèle à lui-même, pleurait dans son mouchoir à pois au fond des rangées, plus grand que tous les autres. Les Professeurs se trouvaient devant, au premier rang. Le minuscule professeur Flitwick était secoué de sanglots tandis que Pomona Chourave tentait, par tous les moyens, de calmer le flot de larmes qui ne tarissaient pas de son collègue. Les Professeurs Limus et Alynson étaient côte à côte, la mine attristée. Madame Bibine et ses yeux jaunes se trouvaient en bout de rang, aux côtés de Sinistra et Trelawney. Cette dernière avait le regard fixé sur le cercueil et, inhabituellement, ne disait rien. Tout le monde était là. Tout le monde sauf Hermione Granger. Une place, celle qui se trouvait à côté de Minerva, était vide et c'était celle d'Hermione. Dix heures était passée et l'hommage funèbre n'avait toujours pas commencé. Minerva attendait. Attendait l'arrivée de celle qui devait être là.
Elle arriva dix minutes plus tard, sous l'œil attentif de toutes les personnes présentes. Mais il n'y avait toujours aucun bruit, que celui des reniflements sonores de Rubeus Hagrid. Hermione avança dans la neige et prit place au premier rang. C'est Arthur qui ouvrit la cérémonie, prononçant quelques mots sur l'homme qu'avait été Severus Rogue, sur sa bravoure et son courage. Décerné à titre posthume, Severus eut droit à l'Ordre Merlin au rang de Commandeur pour actes de bravoure exceptionnels. Personne ne comprit réellement pourquoi le Maître des Potions méritait cette médaille. Personne à part Hermione, Minerva et Arthur. Et c'était sans doute le plus bel honneur qu'on pouvait faire à Severus. Même si Hermione était persuadée que, s'il lui avait été décerné alors qu'il était encore vivant, Severus aurait refusé cet honneur. Par orgueil et par fierté. Par timidité aussi, sans doute aussi par modestie. Parce qu'il n'estimait pas que ses actes méritaient une quelconque récompense. Et ce fut au tour de Minerva qui se leva péniblement pour prononcer son discours.
« Je défie quiconque de prétendre que Severus Rogue n'était pas un homme bon, dit-elle d'un ton sévère en balayant les rangs de son regard polaire. Severus Rogue était sans doute l'homme le plus courageux d'entre nous. Il était un homme qui a fait des erreurs, mais qui n'en a pas fait ? Celui qui ose dire que son âme est pure est un menteur. Après la mort d'Albus Dumbledore, chacun d'entre nous a haït l'homme qui semblait être le responsable de sa mort. Écoutez-moi bien : jamais vous n'avez été autant protégé que lorsque Severus Rogue fut le Directeur de cette école. La façon dont Monsieur Rogue vous a protégé a été infaillible. S'il n'avait pas été là, les Carrow auraient imposé toute la haine et la violence que voulait le Seigneur des Ténèbres. Il a été faite des choses horribles, j'en ai conscience, mais les choses auraient été bien plus graves si Severus n'avait pas été de notre côté. Il a été le sauveur de cette école pendant une année entière. Il a été le protecteur de milliers de personnes pendant une année entière. Sa bravoure n'a pas été vaine, malgré les nombreuses pertes que nous avons subit. Aucune perte humaine n'est justifiable, aucun acte de cruauté ne mérite le pardon. Mais tout acte de courage fait dans le seul but d'obtenir une rédemption mérite l'absolution. Severus Rogue s'est battu toute sa vie dans l'espoir de rendre ce monde meilleur et, aujourd'hui, grâce à lui, grâce à beaucoup d'autres tombés pour la paix, nous pouvons aspirer à un avenir meilleur. Je souhaite, aujourd'hui, que chacun d'entre vous se souvienne de Severus Rogue comme d'un homme humble et courageux. Les erreurs font partit intégrantes de nos vie. C'est ce qui nous construit, ce qui nous fait grandir, qui nous forme et nous bâtit de toute notre hauteur. Souvenez-vous de cet homme afin de pouvoir vous repentir le jour où le poids de vos erreurs sera trop lourd à porter. Souvenez-vous qu'un jour, bien longtemps avant vous, un homme a fait de ses erreurs une force indéfectible. N'oubliez jamais que, où que vous soyez, qui que vous soyez, quoi que vous ayez fait, vous pouvez rendre le monde meilleur. »
Au fur et à mesure qu'elle parlait, la voix de Minerva s'était peu à peu voilée jusqu'à devenir presque inaudible. Le flot de ses paroles avait pénétré chacun des esprits qui se trouvaient devant elle. Et Hermione, qui ne pleurait pas, semblait déboussolée, totalement désorientée et désemparée. Chacun des mots de la Directrice l'avait touché au plus profond de son être. C'était sans aucun doute le plus bel hommage que Severus pouvait avoir. Elle aurait voulu dire quelques mots elle aussi, mais elle était incapable de bouger, incapable de parler, incapable même d'ouvrir la bouche. Cet enterrement était la preuve que Severus était bien mort et pourtant, elle refusait toujours de se résoudre à cette réalité effrayante.
À onze heures et demi, les élèves commencèrent à quitter le parc froid et enneigé pour regagner la chaleur du château. Le silence était toujours religieux et le respect du défunt était plus appuyé encore que précédemment. Les Professeurs s'en allèrent aussi, dans une marche cérémonieuse, certains, comme Hagrid et Flitwick, pleurants, d'autres l'air morose. Seule Hermione resta. Du moins, elle pensait être seule. S'avançant vers la tombe de Severus, elle fit apparaître une couronne, de lys et des roses blanches. Elle s'essaya au bord du cercueil, frigorifiée, tremblante, mais décidée à ne bouger de là sous aucun prétexte. Elle resta là un long moment avant d'entendre des bruits de pas étouffés par la neige qui continuait de s'accumuler. Claudicant, l'air un peu fatigué mais toujours aussi sûr de lui, Drago s'avançait vers elle, le regard triste, la mine blafarde.
« Tu vas bien ? » demanda-t-il en se dressant devant elle.
Hermione le considéra un instant avant de l'aider à s'asseoir auprès d'elle.
« Et toi ? » répliqua-t-elle en éludant la question qui lui était destinée.
« Je me remets. C'est encore un peu douloureux, mais le plus gros est passé. »
« Tu as eu de chance que Poppy te laisse sortir, sourit Hermione. En temps normal tu aurai été séquestré dans l'infirmerie avec interdiction formelle de penser à sortir. »
Drago sourit tristement, l'air abattu.
« J'imagine qu'elle va très mal pour avoir accepter que je vienne à l'enterrement. »
Le sourire d'Hermione s'effaça soudainement. Elle n'avait même pas penser à Poppy. À cause de son égoïsme, plongée dans sa propre douleur, Hermione n'avait pas pensé que Poppy Pomfresh, après elle et Minerva, devait-être celle qui ressentait le plus de tristesse. Elle avait été celle qui s'était occupée de Severus lorsqu'il était blessé. À chaque fois, elle avait été celle qui avait prit soin de lui, qui l'avait soigné et chouchouté en quelque sorte. Elle avait été plus qu'une Médicomage pour lui, elle avait été une amie, une mère. Et il avait été plus qu'un patient pour elle. Hermione n'avait pas pensé à tout cela et elle se sentait terriblement mal de n'avoir pas prit le temps de parler à Poppy.
« Je suis une égoïste. »
« Tu souffres, » contesta Drago d'un ton doux.
« Ce n'est pas une raison. »
« C'est une très bonne raison, au contraire. Ton amour pour Severus t'as fait perdre toute notion de réalité. Tu t'es enfermée dans une bulle que personne ne peut percer. Et c'est normal. L'amour que tu lui portes est inconditionnel et très douloureux. Sa mort te fais penser que tu es seule à porter le poids de la souffrance. Il est mort et tu l'aimes. Tu penses sans doute que personne dans ce château ne peut comprendre ta peine et c'est peut-être vrai, dans un sens. Personne ne peut comprendre l'amour que tu lui portes tant il est fort et absolu, par conséquent, personne ne peut comprendre à quel point ton déchirement est profond. Mais cela ne signifie pas que personne ne ressent de tristesse et d'affliction. Les personnes qui t'entourent veulent t'aider mais ne savent pas comment s'y prendre étant donné que tu ne les aide pas à réaliser combien ton chagrin est grand. Ils ne veulent pas t'abandonner, mais très peu de gens peuvent deviner que tu as aimé Severus aussi éperdument. Sauf ceux qui vous on vu ensemble. Et ce n'est le cas d'aucun d'entre nous. »
Drago se tut soudain, réalisant pleinement la portée de ses paroles.
« Tu n'es pas seule, Granger, poursuivit-il sans prendre le temps de réfléchir. Tes amis sont là et des gens comptent sur toi. Je suis là. »
Hermione tourna brusquement ses yeux noisettes vers celui qui semblait, en cet instant, être son ami.
« Les choses sont difficiles, déclara Drago. La perte d'un être aimé est sans doute l'épreuve la plus terrible à traverser, mais beaucoup de gens s'en relèvent, même si le temps ne guérit pas toutes les blessures. Tu es une femme forte et tu n'es pas seule. Laisse tes amis t'aider. Tu ne pourra pas traverser ça toute seule, c'est bien trop dur. Un amour comme le votre aurait pu réduire une ville en cendre, ne le laisse pas détruire ton cœur. »
Hermione, dont les larmes coulaient le long de ses joues creuses et pâles, renifla en baissant la tête. Les paroles de Drago la touchait, sincèrement et profondément. Il y avait une part de vérité dans tout ce qu'il disait et ce qu'il disait avait le don d'apaiser sa rancœur et son désespoir. Il avait raison : elle s'était enfermée dans son monde, ne laissant entrer personne, s'isolant complètement du reste du monde, espérant en vain le retour de l'homme qu'elle aimait. Elle voulait qu'il revienne, plus que tout au monde. Elle aurait donné sa vie pour qu'il récupère la sienne mais malheureusement, la magie n'a pas ce pouvoir. Il fallait se rendre à l'évidence. Severus Rogue était mort. Mort et enterré maintenant. Dans quelques années il ne serait plus que poussière et son nom, sans doute, serait oublié de ceux qui avaient assisté aux funérailles. Mais personne ne meurt temps qu'il continue à vivre dans le cœur de quelqu'un. Et sans doute vivrait-il éternellement dans le cœur d'Hermione Granger.
« Rentrons au château, Granger, conseilla Drago en se levant avec difficulté. Il commence à faire froid. »
Hermione ne protesta pas. Elle se leva, les yeux dans le vide, le regard lointain, la démarche peu assurée et fixa son pas à celui de Drago qui avait beaucoup de mal à marcher. Elle le reconduisit jusqu'à l'infirmerie où Narcissa l'attendait toujours, les yeux légèrement vitreux d'avoir versés quelques larmes. Elle se l'était autorisé. Pendant une fraction de seconde, alors qu'elle se trouvait seule, elle s'était autorisée à pleurer, à briser la carapace de froideur qui la caractérisait et elle avait pleuré.
« Je vous rends votre fils, Madame Malfoy. »
Hermione sourit poliment à Narcissa qui hocha de la tête en sa direction. La jeune-femme se dirigea vers la sortie, espérant ne pas tomber sur Poppy Pomfresh qui semblait ne pas se trouver là. Comme la première fois qu'elle était sortie d'ici, ses pas la guidèrent jusqu'aux appartements de Severus. Le Serpent était là, enroulé autour de sa pomme si précieuse. Il ne dit mot, il se contenta simplement d'ouvrir la porte. Hermione, les jambes tremblantes, pénétra dans le salon où rien n'avait changé.
Personne n'avait dû entrer ici depuis la mort de Severus. Par respect pour lui, pour son intimité mais aussi pour Hermione. Sans doute Minerva se doutait-elle que la jeune Gryffondor voudrait venir ici et elle avait estimé que c'était à elle de faire ce pas la première et à personne d'autre. Le regard perdu, Hermione avança dans la pièce où régnait une étrange atmosphère, comme si les meubles, les murs et tout ce qui constituait les appartements de Severus sentaient qu'il ne reviendrait plus. C'était de la Magie dans ce qu'il y avait de plus pur. Quelqu'un meurt et la partit de lui qu'il laisse là où il vit meurt avec lui. C'était comme le phénix de Dumbledore. Mais sans le chant et le cri de désespoir.
Entrant dans le bureau de Severus, Hermione remarqua qu'elle n'avait jamais vraiment prit le temps d'étudier cette pièce. Elle était grande et spacieuse. Le bureau de chêne qui trônait au milieu de la pièce prenait une grande partie de la place. Une cheminée se trouvait sur le côté droit et plusieurs cadres étaient accrochés aux murs. L'un était vide, Hermione pensa que se devait être celui d'Albus et elle espérait qu'elle ne le verrait pas apparaître subitement comme il avait l'habitude de le faire. Guidée par elle ne savait quel instinct, la Préfète-en-Chef s'avança vers le bureau, parfaitement rangé soit dit en passant, et s'assit dans le fauteuil en velours vert. Jamais Hermione n'avait vu un bureau de travail aussi bien rangé. L'encrier et la plume se trouvaient dans un coin, un tas de feuilles parfaitement classées était sur le devant du bureau. Plusieurs objets dont Hermione ne connaissait la fonction avaient chacun leur place. Trois tiroirs sur le côté droit du bureau semblaient attendre qu'on les ouvre. Ce que fit Hermione. Le premier contenait une enveloppe sur laquelle était écrit : Hermione. Cette dernière prit délicatement l'enveloppe et la posa sur la bureau, la contemplant étrangement. Voulait-elle lire ce qui se trouvait à l'intérieur ? Elle n'en était pas sûre. Elle ouvrit donc le deuxième tiroir. La même enveloppe se trouvait avec le prénom de Minerva dessus. Et le troisième contenait une enveloppe affichant le prénom de Poppy. Le cœur battant à tout rompre, Hermione considéra les trois enveloppes avec stupéfaction. Severus avait-il tout prévu au point de laisser ses dernières volontés et explications aux trois personnes qui comptaient le plus pour lui ? Cela n'étonnait Hermione qu'à moitié.
Mais pourtant, se convaincant que tout cela n'était pas vraiment une surprise, Hermione ne voulait pas lire sa lettre. Elle était terrorisée à l'idée de savoir ce qu'elle contenait. Elle ne voulait pas se plonger là-dedans. Pas tout de suite. Elle avait trop peur des répercutions, peur de ce que les mots de Severus pouvaient engendrer, peur de ce qu'elle allait ressentir après. Elle imaginait sans mal que cette lettre contenait une sorte de « déculpabilisation » à l'encontre d'Hermione. Il devait sûrement lui dire que ce n'était pas de sa faute, comme il l'avait fait dans sa première lettre, lui dire qu'il l'aimait et qu'elle devait continuer de vivre. Et elle n'était pas sûre de vouloir lire cela. Pas pour le moment en tout cas. Alors elle enfouit sa lettre dans une de ses poches, prit les deux autres et ne s'éternisa pas plus dans ces appartements où il commençait à faire terriblement froid et sombre. Hermione se précipita d'abord dans le bureau directorial. Minerva sembla parfaitement surprise et affligée lorsque sa jeune élève lui tendit l'enveloppe sur laquelle était inscrit son prénom. Elle parut vouloir dire quelque chose, mais aucun son ne sortit de sa bouche. Elle donna donc congé à Hermione d'un signe tremblant de la main. Puis Hermione retourna à l'infirmerie où elle trouva Poppy, le visage tiré par l'épuisement, dans son bureau, penché sur une pile de dossier dont elle n'avait pas l'air de s'intéresser vraiment.
« Madame Pomfresh ? »
La dite Pomfresh leva la tête en direction de la porte, l'air abattu.
« Miss Granger ? »
Sa voix n'était rien d'autre qu'un son rauque et imperceptible. Hermione entra dans la pièce, refermant la porte derrière elle et prit place sur une chaise, face à l'infirmière.
« Vous avez besoin de quelque chose ? » demanda Poppy en se souvenant de son rôle.
« Non. Je suis venue vous donner quelque chose. »
Hermione sortit l'enveloppe de sa poche et la tendit à Poppy qui s'en empara sans comprendre.
« Severus a laissé ça dans son bureau, expliqua Hermione. J'imagine qu'il souhaitait que je vous la restitue. »
Madame Pomfresh acquiesça faiblement, désemparée. La signification de cette lettre lui échappait complètement et elle semblait incapable de dire un mot.
« Vous devriez la lire, conseilla Hermione qui sentait que l'infirmière allait s'écrouler. Je pense que cela vous fera le plus grand bien. »
Ne sachant quoi dire de plus, Hermione esquissa un geste pour s'en aller, mais Poppy lui demanda de rester. Alors elles ne bougèrent pas. Poppy avait les yeux rivés sur l'enveloppe et Hermione contemplait la vieille dame d'un air attristé. Elles restèrent silencieuses suffisamment longtemps pour qu'Hermione finisse par se sentir mal à l'aise. Il y avait une espèce de lourdeur dans la pièce qui la dérangeait. C'était presque malsain et terriblement douloureux. Elle sentait tout la détresse de Poppy et ne savait pas quoi faire ou dire. Les mots lui paraissaient vides de sens et totalement incongrus et aucun geste qu'elle n'aurait pu faire aurait réussit à consoler la Médicomage.
« Il ne reviendra pas, n'est-ce pas ? » fini par souffler Poppy d'une voix éteinte.
Hermione fut prise au dépourvu et elle s'interdit de craquer. Elle avait suffisamment pleuré, elle devait être présente pour les autres maintenant.
« Il ne reviendra pas, répéta-t-elle. Il est partit et il ne reviendra pas. »
Poppy dodelinait de la tête d'un air absent comme si elle entendait à peine les réponses d'Hermione.
« Vous avez tout fait pour le sauver, » dit-elle brutalement.
« Vous aussi, Madame Pomfresh, la rassura Hermione. Vous avez fait tout ce que vous pouviez pour l'aider. Depuis toujours. »
« Je n'ai pas fait assez. »
« Vous avez fait bien plus que n'importe qui, je vous l'assure. »
Il y eu un nouveau silence.
« Je l'aimais. »
Les mots étaient sortis naturellement de la bouche de Poppy. Ça avait été comme une confidence, comme si elle révélait un secret terrible.
« Je le sais. »
Que pouvait bien dire Hermione à part ça ? Poppy avait toujours été la femme sévère, droite et juste de l'école. Peut-être parfois plus que Minerva. Jamais Hermione n'aurait pensé la voir un jour dans cet état d'accablement. Que pouvait bien t-on dire à une personne dans cet état, pensa Hermione. Elle n'en savait rien. Elle avait passé neuf jours à se complaire dans sa dépression, à ne penser qu'à elle et à ce qu'elle pouvait ressentir, elle ne savait absolument pas comment réagir dans ce genre de situation. Ça lui paraissait totalement inconnu.
« Il vous aimait beaucoup aussi, vous savez, déclara Hermione après un long moment. Il savait ce que vous faisiez pour lui. »
« Il a toujours été mon préféré, avoua Poppy. Même quand il était enfant. Il ne venait pas souvent à l'infirmerie, mais quand il venait, il me parlait. Je pense qu'il se sentait bien ici, qu'il aimait venir pour se ressourcer. Et quand il a grandit, il a continué de venir me voir et nous parlions. La vérité, c'est qu'il aimait se confier à moi. Et j'aimais l'écouter. C'était un enfant très perturbé et torturé. Il souffrait beaucoup de sa différence. C'est sans doute ce qui l'a conduit aux Ténèbres. Mais je n'ai rien vu. Et quand il est devenu Mangemort, quand il est revenu ici en tant que Professeur de Potion, j'ai continué à espérer qu'il vienne me parler de nouveau. Il avait besoin d'aide. »
Poppy s'arrêta un instant, comme pour se plonger dans ses souvenirs, puis reprit la parole.
« La première fois qu'il est revenu, il avait été blessé pendant un entraînement à ces réunions étranges. Il m'a très peu parlé ce soir là. J'ai d'abord cru qu'il m'en voulait, qu'il me tenait pour responsable d'une chose qui me dépassait. Après, j'ai pensé qu'il estimait que je n'avais pas su le protéger du monde et de la noirceur du Mal. Ensuite, j'ai compris qu'il ne pouvait plus me parler. Parce que les choses avaient changé et qu'il se considérait comme indigne de ma compassion et de mon écoute. Il se pensait indigne de moi, Poppy Pomfresh. Il pensait m'avoir déçu, avoir gâché ce que nous avions mis tant d'années à construire : la confiance que nous nous portions mutuellement. La deuxième fois qu'il est venu, il avait été torturé par Voldemort. Il ne laissait pas paraître sa douleur, mais la honte qu'il ressentait était plus forte que tout. »
« Qu'avez-vous fait ? » interrogea Hermione, le souffle coupé.
« Je l'ai pris dans mes bras, confessa Poppy en souriant légèrement. Je l'ai pris dans mes bras et je l'ai serré très fort. Je ne sais pourquoi il ne s'est pas débattu ce soir là. Peut-être était-il trop faible pour protester. Mais j'aime à croire qu'il avait apprécié ce contact mais qu'il était trop fier pour l'admettre. Il n'a pas dit un mot, il n'a pas fait un seul geste. Il s'est contenté de se reposer sur mon épaule. Il n'a pas pleuré. Severus ne pleurait devant personne. Il a simplement accepté que je sois, pour une nuit, son amie. »
Rien n'aurait put être plus déchirant pour Hermione que d'entendre cette histoire. Severus ne parlait jamais de ce genre de chose et, en vérité, elle l'imaginait très mal lui parler de Poppy Pomfresh le prenant dans ses bras après une séance de torture. Et pourtant, elle voyait très bien l'image d'un Severus dévasté par la haine et la honte se laisser aller dans les bras d'une infirmière le temps d'une soirée. Seulement pour...comprendre ce que ça faisait d'être aimé.
« Je l'ai souvent repris dans mes bras après ça. Mais jamais il n'a passé les siens autour de moi pour me serrer. Je n'en avait pas besoin et lui non plus. Il voulait simplement sentir la chaleur d'un corps contre le sien. La chaleur du corps d'une mère contre le sien. »
Hermione regarda Poppy et se demanda si Albus avait fait de même un jour. Prendre Severus dans ses bras et lui faire sentir qu'il l'aimait. Sûrement pas. Albus Dumbledore n'avait jamais éprouvé de compassion pour son « pion ». Mais qu'aurait ressentit Severus si le vieillard l'avait serré contre lui un soir où il avait été torturé ? Que se serait-il passé pour Severus si le vieille homme avait montré ne serait-ce qu'une once de douceur envers l'homme perdu et déstabilisé qu'était Severus à cet époque ? Les choses auraient été différentes, songea la jeune-femme. Sans aucun doute, tout aurait été différent.
« Il appréciait ces moments passés dans vos bras, affirma Hermione. Il était bien trop orgueilleux pour le dire à haute voix. C'est pourquoi je pense qu'il vous l'a écrit. »
Hermione désigna d'un signe de tête la lettre qui se trouvait toujours étroitement serré dans les mains de Poppy.
« Je vais vous laisser seule, maintenant, Madame Pomfresh. »
Et avant que la vieille femme n'ai eu le temps de protester, Hermione s'était enfuie du bureau et de l'infirmerie.
xx0xx
Plusieurs semaines avaient passé et le temps ne guérissait pas les plaies béantes d'Hermione. Drago essayait d'être présent pour elle, mais plus il s'approchait, plus elle s'éloignait, s'enfonçait dans une obscurité sans fond. Pendant quelques jours, elle avait eu l'air d'aller mieux, mais sa douleur avait prit le pas sur son envie de vivre et chacun des pas qu'elle faisait semblait être un supplice pour elle. Hermione Granger n'avait plus envie d'avancer. Avec personne. Fred avait réussit à la voir, mais il n'avait pas réussit à la ramener. Les ruines de son cœur l'emportait petit à petit et rien ne pouvait l'empêcher de sombrer.
Hermione passait le plus clair de son temps devant la tombe de Severus, faisant chaque jour apparaître de nouvelles fleurs afin que celles de la veille n'aient pas le temps de faner. Ne pas voir les fleurs périr, c'était comme empêcher ses souvenirs de s'évanouir dans les méandres de sa mémoire. Elle ne voulait rien oublier de Severus, c'était d'ailleurs pour cela qu'elle avait demandé à Minerva l'autorisation de dormir dans ses quartiers. Dormir était un bien grand mot, bien sûr, mais la sensation de froid qui résidait là-bas semblait la maintenir en vie. Même si ce n'était que repousser l'échéance. Ses amis ne l'abandonnaient pas, mais ils semblaient de plus en plus dépassés par le comportement de la si forte et courageuse Miss Granger.
Poppy, elle, semblait aller mieux. Minerva aussi. Pourtant, régnait dans leur cœur une absence lourde et terrifiante. La mort de Severus était encore trop fraîche pour passer pleinement à autre chose. La page ne voulait pas se tourner pour elles non plus, malgré le fait qu'elles semblaient bien moins accablées qu'Hermione. Hermione qui n'avait pas encore lut la lettre qui lui était destinée. Elle n'en avait pas plus la force que l'envie. Les soirs, elle la tenait serrée contre son cœur, comme si c'était une partie de Severus qui vivait à l'intérieur de l'enveloppe. Et ça ne faisait qu'accroître le désespoir de la jeune-femme. Elle n'était plus qu'un fantôme. Une pâle imitation de l'Hermione Granger que tout le monde connaissait. Il n'y avait plus rien d'elle en elle. Ses yeux noisettes laissaient peu à peu place à un noir profond, ses cheveux devenaient ternes, son visage était émacié par la tristesse et l'épuisement, son corps ne semblait plus n'être qu'un squelette et sa voix n'était plus qu'un râle rauque et terrifiant. Ses yeux ne reflétaient plus rien. Son âme était morte à l'intérieur d'elle. Tout était vide et sans vie. Son cœur était un champs de ruine et son esprit un véritable capharnaüm. Elle ne ressentait plus rien qu'un mélange entre la désillusion, une tristesse absolue et une haine inconsidérée. Elle s'en voulait et elle en voulait à Severus. Parce qu'il n'était pas revenu. Parce qu'il l'avait abandonné. Parce qu'il avait donné son âme en échange de sa vie à elle. Vivre avec cette culpabilité était au-dessus de ses forces. Elle ne voulait plus rien ressentir. Elle voulait s'éteindre, s'évanouir, s'enfuir, n'être plus rien qu'un grain de sable inutile dans le désert. Elle voulait être une goutte d'eau dans l'océan.
Peu de choses avaient de l'importance pour elle, aujourd'hui. C'était étrange de se dire qu'Hermione avait changé au point de ne plus vouloir se battre. Elle qui avait toujours prôné la paix et la liberté se retrouvait à simplement vouloir être seule dans un autre monde. Elle avait survécu à la perte de ses amis parce qu'elle pensait pouvoir s'appuyer sur ceux qu'elle avait. Elle avait survécu à la mort de ses parents parce qu'elle pensait pouvoir s'appuyer sur les Weasley. Et elle avait survécu à son retour à Poudlard parce que Severus y était. Elle s'était battue pour lui, pour sa rédemption et son acquittement. Et il s'était battu pour elle, pour sa vie, pour son confort. Et il était mort. Il était étrange de se dire qu'Hermione Granger, si forte et pleine d'espoir, puisse se retrouver si affaiblit et remplit de désillusion. Elle ne voyait pas d'avenir dans ce monde. Pas comme ça. Pas sans Severus avec qui elle aurait voulu faire tout un tas de projet. Elle aurait voulu continuer d'espérer que quelque chose était possible, que sa vie n'était pas totalement perdue, que son futur pourrait-être meilleur. Mais elle n'arrivait pas à voir le bout du tunnel. Tout était noir et terriblement sombre. Il n'y avait plus de lumière, ni dans ses yeux ni dans son esprit. Elle ne voyait rien d'autre que l'obscurité, une profondeur sans fin. Hermione Granger était en train de se perdre. Irrémédiablement.
xx0xx
Plusieurs mois avaient passé. L'année scolaire était finie, fort heureusement, et les choses étaient revenue à la normale. Presque. Hermione avait, malgré tout, obtenu ses ASPIC avec brio mais restait incapable de savoir ce qu'elle voulait faire ensuite. Elle avait quitté Poudlard et les atrocités qui résidaient en ce lieu. Les Weasley l'avait accueilli, une fois de plus. Les choses étaient différentes. Et ça avait été très dur pour Hermione de quitter tout ce qui lui rappelait Severus. Ses appartements avaient été vidés, ses affaires restituées à Hermione – elle avait été la seule à figurer sur son testament – et le Professeur Limus avait prit possession des quartiers de son prédécesseur. Hermione avait beaucoup pleuré ce jour là. Elle ne pourrait plus jamais entrer de nouveau dans les appartements de son amant, elle ne pourrait plus jamais sentir son odeur imprégnée dans les draps du lit, elle ne sentirait plus jamais sa présence dans tout ce qui constituait ses appartements. C'était un chapitre qui prenait fin, et elle ne l'acceptait pas. Elle ne l'accepterait jamais. Il ne lui restait plus qu'une chose : cette lettre qu'elle n'avait pas encore lu. C'était tout ce qui lui restait de Severus. Du moins, la seule chose qu'il lui avait vraiment adressé. Elle avait récupéré ses livres et la plupart de ses objets et autres affaires, mais cette lettre venait de lui. Il l'avait écrite pour elle. C'était une partie de lui.
Pourquoi elle refusait toujours de la lire ? Elle n'en savait trop rien. Les arguments qui la poussait, quelques mois plus tôt, à le faire n'étaient plus d'actualité. Du moins, pas vraiment. Elle se retrouvait seule dans la chambre que lui avait attribuée Molly et chaque soir, elle tentait d'ouvrir l'enveloppe, d'en extraire la lettre, mais elle ne pouvait s'y résoudre. Quelque chose l'empêchait de lire cette lettre et elle ne voulait pas aller à l'encontre de cette force. Alors, le plus clair de son temps, elle restait simplement allongée dans son lit, le regard vide, le corps inerte, l'air presque morte.
Les Wealsey étaient très gentils avec elle. Molly ne cessait de lui faire des plats qu'Hermione était incapable de manger. Arthur, qui avait prit un peu plus de sérieux qu'auparavant de par son poste de Ministre de la Magie, était très peu présent et lorsqu'il était à la maison, il regardait toujours Hermione avait cet air grave et cérémonieux qui disait : « Tu dois avancer. » Fred et George, par tous les moyens possibles, tentaient de la faire rire. Très peu souvent ils y arrivaient et la plupart du temps, Hermione esquissait un très faible sourire qui disait : « Je souris pour vous faire plaisir, mais vous ne me faites pas rire du tout. » Elle ne parlait que très rarement. Elle ne s'exprimait quasiment que pas des mimiques ou des gestes. Son visage lui servait à faire passer ses émotions, à faire comprendre comment elle se sentait à la minute, à la seconde où les choses se passaient. Hermione se complaisait dans un mutisme assourdissant qui rendait l'atmosphère plus pesante qu'elle ne l'était déjà.
Elle ne pleurait plus. Ou très rarement. Plus le temps passait, plus les larmes quittaient son corps. Ses yeux n'étaient plus humides ; ils étaient devenus secs. Non pas qu'elle ne voulait pas pleurer, mais elle ne pouvait pas. La boule insinuée en elle peu après la mort de Severus devenait de plus en plus imposante jusqu'à l'empêcher d'exprimer clairement sa tristesse. Elle était vidée, complètement épuisée par les nuits blanches et, rarement, cauchemardesques, qu'elle passait. Elle avait peur de dormir. Car dès lors qu'elle fermait les yeux, son visage lui apparaissait, clair et net, venait la chambouler, la rendre complètement folle. Elle entendait sa voix parfois, elle l'entendait parler, lui dire qu'il l'aimait et qu'il ne l'abandonnerait jamais. Et souvent, elle le voyait mort, agonisant, hurlant de douleur. C'était insupportable et l'idée même de revivre cela chaque nuit la rebutait. Elle ne voulait pas. Elle ne pouvait pas. C'était bien trop lourd à porter. Alors elle ne dormait plus. Elle restait simplement allongée dans son lit, le regard fixé au plafond, incapable de faire le moindre geste. Elle ne lisait plus, c'était devenu trop dur pour elle. Elle n'avait plus la force de s'évader dans un autre monde. Un monde où il ne serait pas là. Il n'était nulle part. Il n'était pas où elle était et il n'était pas non plus où elle n'était pas. Il était simplement...ailleurs.
Le jour où Hermione se décida, pour la première fois depuis longtemps, de sortir, ce fut le jour de son anniversaire. Bien qu'elle ne souhaitait pas le fêter, Molly et ses fils l'avaient traîné hors de sa chambre. Il était, selon les propres mots de la mère Weasley, « absolument hors de question que tu restes dans ta chambre le jour de ton anniversaire ! » Alors Hermione avait été littéralement jeté hors de son lit, emmenée dans le jardin où tout était déjà prêt. C'était un soir et, par chance, il faisait encore très beau. Il y avait peu de monde, mais chacune des personnes présentes réussirent à mettre un peu de baume au cœur de la jeune-femme. Minerva et Poppy avaient fait le déplacement et se trouvaient côte à côte. Hagrid était là aussi, fidèle à lui-même. Il souriait, mais une tristesse profonde marquait son visage. Et il y avait Arthur, qui avait revêtu son plus beau costume et sa plus belle robe de sorcier. C'était un petit comité. Mais un comité de luxe et Hermione se sentit un peu mieux à la vue de ses personnes venues pour elle.
« Miss Lovegood ne devrait plus tarder, annonça Minerva en prenant Hermione dans ses bras. Je lui ai donné l'autorisation de quitter le château pour ce soir. »
Hermione esquissa un sourire de remerciement et salua Madame Pomfresh qui semblait en très bonne santé.
« Bonsoir Hagrid. »
Hermione s'avança vers le géant, le pas mal assuré. Elle ne l'avait pas revu depuis qu'elle avait quitté Poudlard. Et elle ne lui avait pas parlé non plus. Aujourd'hui, elle en avait honte.
« Je suis heureux de te voir, Hermione, déclara le demi géant dans un sourire humide. Tu ne donnes plus trop de nouvelles, tu sais. »
Hermione, confuse, baissa la tête en rougissant.
« Je suis sincèrement désolée. »
Hermione prit place entre Minerva et Hagrid, face à Fred qui semblait de très bonne humeur.
« Comment allez-vous ? » lui demanda Minerva en se penchant vers elle.
Hermione tourna son regard vers la vieille femme et remarqua qu'elle paraissait terriblement fatiguée. Ses traits étaient tirés, ses yeux cernés et son visage de plus en plus ridé. Minerva McGonagall vieillissait. Cette constatation rendit Hermione très triste.
« J'imagine que Molly vous a déjà tout raconté, » répondit Hermione d'un ton un peu brute.
Minerva la regarda d'un œil étonné.
« Quelques chose vous tracasse ? »
C'était une femme très perspicace et elle avait toujours eu un don pour lire en Hermione. Et cette dernière voulait en parler, de cette lettre et du pouvoir qu'elle avait sur elle. Mais comment expliquer ça sans passer pour une folle ?
« Vous avez lu la lettre de Severus ? » interrogea Hermione.
C'était indiscret, elle le savait, mais c'était tout ce qu'elle avait trouvé.
« Oui, répondit Minerva pris au dépourvu. Oui je l'ai lu. »
Hermione réfléchit un instant, puis se lança.
« Il m'en a laissé une à moi aussi, expliqua-t-elle la voix faible. Et...j'ai comme l'impression que quelque chose m'empêche de la lire. »
« C'est peut-être le cas, assena McGonagall d'une voix assurée. Severus était quelqu'un d'intelligent. S'il estime que vous n'êtes pas prête à lire cette lettre, un sort la scelle peut-être. »
« Vous pensez qu'il a lancé un sort à la lettre pour que je ne puisse la lire que quand je serai...prête ? »
« En quelque sorte. Cela ne m'étonnerait pas de Severus. »
« Comment saurais-je quand je serais prête ? »
Minerva ne répondit pas tout de suite. Elle se contenta de mettre une bouchée de poulet dans sa bouche pour ensuite fixer un regard brillant de larmes sur Hermione.
« Vous ne le serez jamais, déclara-t-elle tristement. Le jour où vous pourrez lire cette lettre sera sans doute le jour où vous vous rendrez compte qu'il n'y aucune autre échappatoire que...l'acceptation. »
Hermione s'autorisa un instant pour songer à ce que son aînée venait de lui dire. Ce n'était pas dur. C'était inacceptable. Hermione ne voulait pas se résigner et encore moins accepter. C'était beaucoup trop douloureux pour elle d'imaginer une vie sans Severus Rogue. Et Minerva semblait le savoir. « L'acceptation ». Était-ce vraiment là le mot que la Directrice de Poudlard avait voulu utiliser ? Ou l'avait-elle employé parce qu'elle trouvait la vérité trop dure à dire ? À concevoir ? Hermione considéra la vieille dame un long moment. Avait-elle vraiment envie de comprendre à quoi était dues les larmes qui perlaient aux coins des paupières de son ancien professeur ? Elle n'en était pas sûre. Et pourtant...Pourtant elle pensait savoir pourquoi Minerva McGonagall était si abattue. Fallait-il le dire ? Ou se taire ? Le dilemme résidait dans tout ce qu'il y avait de plus commun : la peur. « L'acceptation ». L'acceptation de quoi, réellement ? Le cerveau d'Hermione semblait se mettre en route et les conclusions qu'il tirait l'effrayait.
« L'acceptation de quoi ? » interrogea Hermione, le souffle court.
« L'acceptation de tout ce que vous n'avez pas encore totalement compris. »
xx0xx
La soirée, en outre, s'était relativement bien passée. Luna était arrivée une heure après le début du repas et Hermione avait été contente de la voir. Il n'y avait pas eu de cadeaux, seulement un gâteau fait avec tout l'amour de Molly. Minerva et Hermione avait sauvé les apparences et tout s'était bien passé. Maintenant, Hermione se retrouvait dans sa chambre, pour la énième fois. Seule avec ses pensées. Seule avec la lettre de Severus serrée contre son cœur. Que devait-elle faire, c'était la question qui hantait son esprit depuis que Minerva avait glissé ses paroles à son oreille. Quelle était la solution ? Devait-elle accepter et lire la lettre ? Ou bien était-ce mieux pour elle d'oublier et d'avancer ? D'essayer d'avancer. Parce qu'elle savait pertinemment qu'elle n'arriverait jamais à oublier. Jamais à avancer. Alors sans doute Minerva avait-elle raison : elle devait accepter. Elle comprenait maintenant. Elle comprenait quelle était cette acceptation à laquelle elle devait se résigner. Et, étrangement, elle se sentait prête. Elle trouvait même cela d'une facilité déconcertante. Alors lentement, un sourire discret aux lèvres, elle se redressa sur ses oreillers, porta l'enveloppe devant ses yeux, retira le cachet et en sortit plusieurs parchemins noircis par l'encre de Severus. Elle reconnut tout de suite son écriture ronde et penchée. Malgré tout, il y avait quelque chose d'inhabituelle, quelque chose qui ne correspondait pas entièrement à l'écriture de Severus Rogue. Comme s'il avait tremblé en posant ses mots sur le papier, comme s'il avait pleuré. Hermione n'attendit pas plus longtemps et, le cœur léger, se lança dans la lecture.
Hermione,
Si tu lis ces mots, c'est que Minerva t'as parlé. C'est que Minerva t'as aidé à comprendre ce que tu devais faire. Je ne voulais pas de cela, mais si elle l'a fait, c'est qu'elle l'a jugé nécessaire. J'imagine que si tu lis ces mots, c'est aussi parce que tu as compris les choses sans vraiment t'en rendre compte. L'acceptation se fait souvent naturellement sans qu'on s'en aperçoivent. Tu es intelligente et je sais que c'est ce qui s'est passé pour toi.
Lis ces mots avec la plus grande attention, imprègne-toi de ces lignes et de ce qu'elles contiennent : ce seront les dernières.
J'ai écrit cette lettre après t'avoir adressé celle que j'espérais être la dernière. Mais, par habitude, je savais que les choses ne se passeraient pas comme je le souhaitait et j'ai préféré prévoir l'essentiel plutôt que de te laisser seule sans aucune explication. Même si je pense t'avoir dit le plus important dans ma première lettre, les choses ont changé et tout n'a pas été dit.
Si tu lis cette lettre, c'est que tu n'as pas réussi à me ramener, que je suis mort et que mon enterrement a eu lieu. Sans doute as-tu brillamment obtenu tes ASPIC et tu es, peut-être, retournée chez les Weasley. J'aurais espéré que tu ne lises jamais cette lettre, que tu décides d'oublier et d'avancer. J'aurais souhaité que tu honores mon sacrifice et que tu vives. Ton amour pour moi est profond et je le sais, mais mon sacrifice pour toi l'était d'autant plus que je voulais qu'il te fasse vivre. Est-ce que je t'en veux ? J'imagine que les choses n'auraient pas été différentes si je n'avais pu te sauver et que tu étais morte à ma place. Alors non, je ne t'en veux pas de rendre mon sacrifice inutile. Pourquoi devrais-je t'en vouloir de m'aimer ? Tu es sans doute la seule personne qui ai réussi à le faire d'une manière aussi inconditionnelle. C'est quelque chose pour laquelle je ne pourrais jamais te blâmer.
Je ne vais pas essayer de te persuader de vivre, étant moi-même mort, c'est quelque chose que je ne peux plus faire et, de toute façon, je n'ai pas tellement d'arguments. Bien que je sois sûr que des gens ont besoin de toi, je pense savoir que tu n'as pas besoin d'eux. Pas en ce moment. Tu voudrais seulement que je sois auprès de toi. Et si la seule solution pour que ce soit le cas soit que tu meurs, alors je ne peux t'en empêcher. Je n'ai plus aucun pouvoir sur toi. Toi seule peut décider de ton avenir. Et même si je souhaite plus que tout au monde te revoir, mon égoïsme ne va pas au-delà de l'importance de ta vie.
J'ai perdu un être cher moi aussi un jour et je sais combien la douleur est grande. On voudrait arrêter de vivre, arrêter de respirer, de penser, de bouger. On voudrait nous-même être mort. On souhaiterait revenir en arrière, effacer nos erreurs, les mots qu'on auraient pas dû dire, les gestes qu'on auraient pas dû faire. On pourrait tuer pour ramener l'être aimé à la vie, pour qu'il soit auprès de nous. Et, par égoïsme, on éloigne ceux qui veulent nous aider. Parce qu'on est idiot et qu'on pense être les seuls à ressentir toutes les émotions qui nous envahissent. Et c'est faux. Tout le monde a, un jour, perdu quelqu'un qu'il aimait profondément. On pense qu'on est seul, que le monde entier nous en veut. Et on voudrait pouvoir arranger les choses, effacer, oublier, passer à autre chose en un claquement de doigts. Mais rien de tout cela n'est possible et il faut simplement...accepter. Il aurait été facile pour moi de ne rien te dire, de ne pas écrire cette lettre ou, si je l'avait fait, de simplement te dire que je ne t'aimais pas, que mon amour pour toi n'avait jamais existé et que tout ce qui nous concernait n'avait été qu'un jeu pour moi. Mais cela t'aurait-il vraiment aidé ? Est-ce que ces mots t'auraient permis d'oublier et d'avancer ? Ç'aurait été chose cruelle que de faire ça et, plus encore, ça m'était impossible. Plus d'une fois l'idée m'est venue de déchirer cette lettre et de te dire les paroles que je refusaient pourtant de concéder. Je ne pouvais dire de telles choses tant mon amour pour toi est profond.
Alors maintenant quoi ? Je ne peux rien faire pour te convaincre de vivre. Dois-je donc simplement terminer cette lettre en te disant à bientôt et attendre sagement que tu me reviennes, ici bas ? Cela m'est encore plus impossible que de dire que je ne t'aime pas. Pourtant, je ne vois pas quoi faire, ni quoi dire. J'aimerais trouver les mots et les arguments qui pourraient t'aider à faire face, mais comment faire lorsque, moi-même, je n'ai su faire les bons choix pour survivre à toute cette douleur qui, aujourd'hui, t'envahit ? Qui suis-je pour te dire de vivre ? Qui suis-je pour te dire d'avancer ? Qui suis-je pour te dire d'oublier ce que nous avons vécu ? Ce n'était, après tout, que quelques mois. Que signifient donc quelques mois à coté d'une vie entière ? Sans doute pas grand chose pour quelqu'un qui ne connaît pas les sentiments. Mais cela représente énormément pour quelqu'un qui a vécu quelque chose d'aussi troublant que l'amour. Je n'ai pas le droit de te dicter ta conduite. Je n'ai pas le droit de d'obliger à continuer dans un monde où plus personne ne réside. Tu as fais preuve d'une immense force de caractère pour m'aider dans mon procès alors que tu avais perdu tout ce que tu avais. Chaque jour qui passait, je trouvais en toi le courage et l'envie de donner ce que j'avais pour aider le monde des Sorciers. Tu m'as été d'une grande aide lorsque je suis partis chasser les derniers Mangemorts qui se cachaient en Allemagne. Jamais je n'avais vu autant de bravoure et de générosité dans le cœur d'une personne à qui la vie avait tout enlevée.
Mais aujourd'hui, à mon grand dame, la vie t'as arraché bien plus que ton cœur, elle a pervertit ton âme et souillé ton esprit. Ce que tu as vécu au court de ces derniers mois, je ne l'aurait pas souhaité même à mon pire ennemi. Tu as dû te battre contre ton propre corps, contre ton propre subconscient. Tu as subit les pires tortures qu'un esprit ne devrait même pas avoir à supporter. Il est terrible de penser que nos destins se sont croisés simplement parce que nos vies ont été martyrisées par un monde cruel et sans pitié. J'aurais souhaité mieux pour toi. Pour nous. Malheureusement, le « nous » n'existe plus et le « toi » ne tient qu'à un fil. Malgré tout ce que j'ai pu en dire, tu n'as pas, toi, la chance d'avoir un Dumbledore à tes côtés. Bien que je sois persuadé que son affection n'était qu'un leurre pour m'attirer dans ses filets, il m'a permis de faire le bien. Minerva est là, bien sûr, mais elle est d'une grande maladresse en ce qui concerne le réconfort. Et derrière ses airs froids et sévères, elle est terriblement réservée. Elle est plus douée en ce qui concerne les silences. C'est parfois d'une grande aide, mais c'est souvent déroutant quand nous avons besoin d'être rassuré. Poppy est quelqu'un de très doux et d'extrêmement compréhensif. Parle-lui et elle t'écoutera. Pose-lui des questions, elle te répondra. Pleure sur son épaules, elle t'apaisera. Sa présence est consolante, mais elle a été une mère et une sœur pour moi. Elle ne saura pas répéter cela sans être confuse et meurtrit par le souvenir de l'enfant que j'ai été et de l'adulte que j'aurais dû être.
J'aimerais te dire que des gens sont là pour toi et il y en a. Minerva peut comprendre plus que quiconque la perte d'un être aimé et Poppy a perdu beaucoup plus d'enfants qu'une mère biologique ne pourrait le supporter. J'imagine que Lovegood saurait être là pour toi et Londubat, ne le répète à personne, est devenu un homme courageux et remplit de compassion. Les Weasley sont des gens très gentils. Mais aucun de ceux qui restent ne saura combler le vide qu'ont laissé ceux qui sont partit. Je sais que tu en es consciente, et cela m'attriste beaucoup. Tu mérites bien mieux que tout ce que tu as subit.
J'ai longtemps réfléchis à un solution ; celle qui pourrait te sauver. Je n'ai cessé, jour et nuit, de penser à ce qui pourrait te forcer à vivre, ce qui pourrait t'empêcher de te laisser dépérir. Mais encore une fois, je suis désolé, la solution ne viendra pas de moi. C'est terrible d'aimer autant mais de n'être capable que d'un maigre sacrifice sans pour autant être sûr qu'il ne sera pas vain. Je t'aime Hermione. L'amour que je te porte dépasse les frontières du réel. Et pourtant, ce n'est pas chimérique. C'est quelque chose de concret, de profond. Quelque chose qui a guidé mon cœur pendant plusieurs mois et qui continuera de guider mon esprit malgré ma mort et en dépit de toutes les souffrances subies. Tu as été l'ange de mes démons et tu m'as permis d'être ce que je n'aurais jamais pu être sans toi. Quelque soit la décision que tu prendra, je ne regretterais jamais le sacrifice que j'ai fait dans le seul et unique but de sauver ton esprit, ta vie. Je ne regretterais jamais, non plus, d'être tombé amoureux de toi. Je ne regretterais pas les moments passés ensemble. Je ne regretterais pas non plus les nuits dans tes bras, ni les soirées dans ma bibliothèque, ni nos promenades dans le parc au crépuscule ou a l'aube. Je ne regretterais jamais aucun des moments qui ont forgés notre amour. En revanche, je regretterais les mots affreux que j'ai pu te dire. Je regretterais les larmes que j'ai fait couler de tes yeux. Je regretterais le son de ton cœur brisé à la vu d'un homme cruel et mauvais à ton égard. Je regretterais de ne pas avoir passé assez de temps avec toi. Je regretterais de ne pas avoir vu qui tu étais avant. Je regretterais de ne pas t'avoir trouvé plus tôt. Je regretterais d'avoir été un imbécile congénital, d'avoir été celui qui, souvent, a été ton tyran, d'avoir été celui qui t'as fait souffrir, d'avoir été l'homme incapable de te sauver réellement. Mais jamais, jamais, je ne regretterais de t'avoir aimé.
Quoi qu'il en soit, je sais quelle est ta décision. L'acceptation ne fait pas partit de tes prérogatives. Tu ne veux pas de cela, pas plus que de la résignation. Tu veux simplement...être en paix. Moi, j'accepte cela et je le comprends. Plus que quiconque. La paix vient toujours lorsqu'il est temps. C'est un rendez-vous prévu d'avance. Ton heure me semble être venue. Je suis persuadée que tu en avais conscience bien avant que Minerva ne te mette la puce à l'oreille. Si elle l'a comprit, tu l'avais compris aussi sans vraiment le savoir. Minerva n'a été que déclencheur de ce qui sera à présent ta mort. Elle ne l'a pas fait de gaieté de cœur, crois-moi. Je le lui ai demandé. Dans la lettre qui lui était adressée, je lui demandait de t'aider si elle constatait que tu ne parvenais pas à accepter. J'imagine combien elle a dû me détester, mais si elle l'a fait, c'est qu'elle le jugeait nécessaire. Minerva n'agit jamais contre son gré. Il lui faut de bonnes raisons pour faire ce qu'elle fait. C'est une femme de principes. Une femme d'honneur. Si je lui avait demandé, de mon vivant, de prendre soin de toi, elle l'aurait fait avec ferveur. Mais je lui ai demandé de te libérer de ta souffrance, ce n'est pas tout à fait la même chose et, pourtant, je suis persuadé qu'elle le fera.
Que dire de plus ? J'imagine que le plus dur est fait. Les mots les plus terribles ont déjà été dit et je ne vois rien d'autre à ajouter. Je pourrais te répéter un millier de fois à quel point je t'aime, mais je pense que tu le sais. Et que je le sais aussi. Est-il nécessaire de dire quelque chose qui semble évident ? Je pense qu'il est souvent préférable de taire ce genre de chose lorsque parler est inutile.
Je te dis donc à tout de suite, Hermione. La vie que tu as menée est remplie d'exploits et tu peux partir en paix. Beaucoup de gens t'attendent ici. Je t'attends.
Aujourd'hui et pour l'éternité, je t'attends.
Aujourd'hui et pour l'éternité, je serai ton dévoué.
Aujourd'hui et pour l'éternité, je serai là.
Aujourd'hui et pour l'éternité, tu sera mienne.
Aujourd'hui et pour l'éternité, je serai tien.
Aujourd'hui et pour l'éternité, je t'aime Hermione Granger.
Severus Rogue.
Et voilà. Vous voyez ? Je ne vous avait pas mentit, c'est un chapitre très dur. Je présente mes excuses aux fans des H.E., mais je ne voyais vraiment pas d'autre issue possible pour nos deux protagonistes. J'ai longuement hésité sur le fait de faire vivre Severus, mais je dois bien vous l'avouer, j'ai un penchant pour les fins terribles et sans espoir. J'espère que vous ne m'en voulez pas trop. J'espère également que vous n'êtes pas déçus par cette fin un peu « brutale ». J'avais besoin de finir ce chapitre et cette histoire par une lettre de Severus. C'était nécessaire. Je voulais faire un prologue, mais j'ai préféré cette approche, je souhaite qu'elle ne vous laisse pas sur votre faim.
J'ai adoré écrire les scènes avec Poppy. C'est un personnage que, même s'il est peu présent, j'affectionne particulièrement. Je voulais vous la montrer sous un autre jour que dans le rôle de l'intraitable infirmière de Poudlard. Je la veux touchante et aimante. Est-ce réussit ?
Je n'ai pas souhaité faire apparaître Dumbledore dans ce chapitre pour diverses raisons. J'imagine que vous avez comprit, tout au long de vos lectures, que je porte très peu d'affection à ce personnage. Par conséquent, bien que j'aurai encore pu lui en mettre, pardonnez l'expression, plein la tronche, j'ai préféré me concentrer sur l'émotion d'Hermione plutôt que sur les états d'âme d'un vieillard.
Enfin voilà. C'est fini pour cette fois. J'espère vous retrouver très prochainement sur d'autres histoires. Si l'inspiration me viens, je promets de vous offrir encore d'autres histoires sur notre couple préféré. En attendant, prenez soin de vous, mes petites Licornes adorées. Je vous souhaite plein de bonne chose. À très bientôt.
Eternely Snape qui vous embrasse.