-Réveille-toi. Allez, debout !

L'autre marmonna, encore à moitié endormi. Il jeta un rapide coup d'œil à son radioréveil, qui n'affichait que six heures treize du matin. Seulement ? Il tourna la tête dans la direction opposée en le regardant préparer leurs sacs et leurs armes.

-T'as pas vu l'heure ? Pourquoi t'es si pressé ? On est rentré super tard, hier, j'suis crevé…

-Rectification : « tu » es rentré tard, la nuit dernière. Et vu le nombre de bouteilles vides par terre à l'arrière de la caisse, tu as du passer une nuit assez… Bon, bref. Donc ?

-Donc quoi ?

-Comment s'appelle l'heureuse élue, cette fois-ci ? Qui a eu l'immense honneur de croiser ta route par une nuit si arrosée ?

-Haaaan, t'es sérieux, là ?

Il lui répondit quand même, sentant son regard insistant et moqueur le fixer.

-Bon, d'accord. Je crois que c'était… Stacy… Ou peut-être Andy, je sais plus trop.

L'autre esquissa un sourire amusé et secoua la tête tout en attrapant sa veste déposée sur le rebord d'une chaise.

-C'est bien toi, tout ça…Allez, Don Juan, traîne pas. Je t'attends dans la voiture, t'as dix minutes pour te préparer et… Pour effacer les traces de la nuit dernière…

-Mmmmmmmh... J'veux pas y aller sans raison valable.

-On ira manger un truc, si tu veux.

-Ok, je viens, dit-il en imaginant un monceau de nourriture à portée de main.

Avant que Sam ne sorte de la chambre du motel, Dean s'écria

-Hey, tu sais ce qu'il te dit, le Don Juan ? Qu'il veut un double Cheeseburger et que c'est toi qui payes !

. . . . . . . .

Elle émergea doucement en tâtant l'autre côté du lit, qui demeurait froid. Après s'être redressée, elle devina une douce odeur de café frais provenant d'une des pièces voisines. Elle se leva et poussa la porte entrouverte, et entra dans la cuisine, où l'attendait quelqu'un qui sourit en la voyant.

-Hey. T'es debout depuis longtemps ?

-A peu près une heure. J'avais un chapitre à clore, au risque de me faire arracher les yeux par mon éditeur.

-Editrice, reprit-elle en insistant sur la dernière syllabe.

-Oui, bon, Gina est mon ex-femme, et également mon éditrice depuis des années, mais elle n'est rien de plus, tu le sais bien. Tu la connais comme moi, mais mon histoire avec elle fait partie du passé depuis…

-Je te faisait marcher, Rick. J'adore te voir tourner en rond comme ça, tu sais. Oh, merci, dit-elle et se saisissant du mug qu'il lui tendait.

-Oui, mais je me fais avoir à chaque fois. Honte à moi. Ma femme essaye de me piéger en insinuant que j'ai encore quelque chose à voir avec l'ancienne… Franchement, t'as pas honte ?

-Mmm. Non, pas le moins du monde… Sinon, t'avais une autre raison, pour te lever aux aurores ?

-Ouais, Ryan a appelé. Il a dit que c'était important, et je veux bien le croire. Il y a eu un charmant petit meurtre, comme on les aime… Et devine lequel ?

-C'est encore cette maudite affaire, je me trompe ?

-« Maudite » ? Géniale, tu veux dire ! C'est l'enquête du siècle, et c'est juste super cool !

-Castle, je ne crois pas que le terme « génial » soit très approprié, au vu des circonstances… Je me trompe ? Des cadavres en feu accroché au plafond, je ne vois pas ce qu'il y a de très réjouissant à cela…

Depuis quelques semaines, Kate et son équipe enquêtaient sur de mystérieux meurtres dont le coupable avait pour habitude de faire tenir ses victimes (par on ne sait quel moyen) contre un plafond, face contre terre, avant de les enflammer joyeusement.

-Et de toutes façons, pourquoi cette affaire t'intéresse-t-elle autant, dis-moi ?

-Je te parie que c'est un complot… Un complot d'aliens terroristes qui ont comme but d'éliminer le président, dit-il à voix basse.

-Mais, oui, et je te parie que le petit chaperon rouge est de mèche avec eux. Allez, Inspecteur Derrick, dépêche-toi, on va être en retard, répondit-elle en croquant dans un toast.

-Derrick… Comme Derrick Storm, mon personnage ? Bon, ok, j'arrête et on y va.

-Oui, les enfants, dépêchez-vous, dit une femme à la chevelure rousse en faisant son entrée dans la pièce.

-Bonjour Martha, dit Kate en souriant. Vous allez bien ?

-Merveilleusement, ma chère Katherine. Je suis sur le point de donner un cours à mes élèves de l'école d'art dramatique dans… (elle regarda sa montre) Dans exactement vingt-trois minutes.

-Parfait, mère, fit Castle. Du moment que toi et tes élèves évitez de décorer mon appartement comme la dernière fois…

-Ne fait pas ton rabat-joie, Richard… C'était simplement pour vivre pleinement ce moment…

-Je ne sais combien de fois tu me l'as répété… Au fait, où est Alexis ? Je ne l'ai pas vue, ce matin…

-Elle travaille, Richard, tu le sais très bien…

-Oui, mais quand même… Après tout ce qu'elle a appris durant ses années d'Université à Columbia, je ne sais pas si travailler à la morgue avec Lanie est le meilleur choix du monde…

-Elle a simplement aimé son stage là-bas, il y a quelques années, tu ne peux pas le lui reprocher. Au contraire, tu dois te montrer compréhensif avec elle, être fier de ce qu'elle fait aujourd'hui, parce que c'est ce qu'elle a choisi.

-Je le suis, évidemment. C'est juste que… Avant, je travaillais avec ma femme. Maintenant, ma fille nous a rejoints. Alors je ne peux m'empêcher de penser… Que feras-tu, toi ?

-Il n'y a aucune chance pour que je me mette à enquêter à mon tour, où à disséquer des corps, très peu pour moi… Ça, c'est votre travail, les enfants…

. . . . . . . .

-Bon, on fait quoi, assis dans un resto pareil à sept heures du mat', dis-moi ?

-Pour qui est le double Cheeseburger avec supplément de sauce chili ?

Dean esquissa un sourire charmeur à la serveuse, qui rougit légèrement.

-Pour moi, ma belle. Merci, poursuivit-il en lui glissant un billet en guise de pourboire.

Elle déposa le plateau et retourna en cuisine sans dire un mot, un sourire au coin des lèvres et mains tremblantes.

-T'en as pas marre de draguer toutes les filles de cette planète ? Et puis, c'est quoi, cette manie, de prendre un truc pareil au petit-déjeuner ?

Au lieu de lui répondre, il croqua à pleines dents dans son repas en le regardant comme si de rien n'était. Il avala et reposa sa question

-Bon, Sammy, qu'est-ce qu'on fout là ?

Il soupira et sorti de l'intérieur de son manteau un journal.

-Il y a une semaine, voilà ce qu'il s'est passé. C'était déjà le cas il y a quinze jours, et comme toutes les autres fois. Comme à Lawrence. Tu me suis ?

Dean regarda le journal abîmé et fronça les sourcils.

-C'est pas possible, j'ai déjà buté ce salopard il y a quelques années.

-Oui, mais qui te dit que quelqu'un n'a pas repris le flambeau derrière lui ? Réfléchis un peu, Dean. C'est exactement la même mise en scène. Les victimes au plafond, les flammes, les…

-Ouais, merci, je sais. Bon, où se trouve ce truc, alors ?

-Hum… A New-York.

-N… New-York ? Trop bien, ça fait un bail que je voulais y aller, et…

Il stoppa net, et reprit, avec moins d'enjeu dans la voix

-Et… Comment va-t-on s'y rendre, monsieur le génie ?

-Bah…

-Ah, non, il est hors de question que je remette les pieds dans un avion, tu m'entends, Sam ?

-On a pas trop le choix, tu sais. C'est le moyen le plus rapide. Il faut à tout prix arrêter ça, et tu le sais comme moi.

L'aîné soupira.

-T'es vraiment un enfoiré, tu sais, ça ? C'est qu'à onze heures en bagnole.

-Tu me le répète assez souvent, je crois. Bon, finis ton truc et on y va. On a plusieurs heures de voiture avant d'arriver à l'aéroport.

-Et en plus, tu veux que je laisse ma voiture là-bas ? T'es chiant, hein…

-Bon, c'est d'accord, t'as gagné. On prend Baby* et on se casse de ce bled paumé.

-Je savais que je te ferais changer d'avis… Et sinon, à quels flics aurons-nous à faire, cette fois-ci, dis-moi ?

-Mh… Attends, il y a un site spécial sur les lieutenants de la criminelle, c'est bien la première fois que je vois ça, et… Oh, la vache…

-Quoi ?

-Il ont été classé comme les « meilleurs enquêteurs que les Etats-Unis ait jamais connu »…

-Passe-moi ton ordi, Sam… Alors, des enquêtes, des listes, des photos, des… Oh putain…

-Qu'est-ce qu'il y a ?

Dean fit pivoter l'ordinateur vers son frère et s'exclama

-Tu n'avais pas dit qu'il s'y trouvait la flic la plus sexy de tous les temps… Regarde-moi ça… « Katherine Beckett, l'une des plus jeunes entrée à la crim' ». Celle-là, il faut que je…

-Bon, je crois que j'ai compris, mais ça va pas vraiment être possible… T'as pas lu jusqu'au bout, sinon tu saurais qu'elle est mariée depuis plus d'un an et demi…

-Ok, fit Dean, en se calmant. Et qui l'heureux élu ?

-Il s'agit de… Oh, c'est pas vrai, je le crois pas… Cette flic est mariée à Richard Castle !

-Qui ça ?

Sam soupira, comme si ce son frère venait de dire était ridicule de sa part.

-Enfin, Dean, Richard Castle, quand même ! Un des écrivains les plus célèbres, auteur de thrillers policiers, le « maître du macabre » et tu dis ne pas le connaître ?

-Nope. Je lis pas ce genre de trucs ridicules, figure-toi. Mais on va aller là-bas parce que je meurs d'envie de rencontrer cette splendide femme…

-Ouais, bon, te réjouis pas trop vite, Dean. Tu sais très bien que ce ne sont pas des petites vacances amicales à l'étranger, reprit l'autre, le regard fixe.

Dean retrouva son sérieux à son tour et hocha la tête.

-Parfait. Attrape ton ordi, Sammy, parce qu'on s'en va pour la grande ville de New-York…

. . . . . . . . .

-Salut, Lanie, fit Kate en téléphonant à la légiste. J'imagine que c'est encore un de ces meurtres bizarres, je me trompe ?

-Non, Beckett, tu as entièrement raison. On l'a retrouvée dans le même état que celle de la semaine dernière. Mais je n'arrive toujours pas à comprendre le lien entre toutes ces victimes…

-Nous non plus, mais on continue de creuser. Je te laisse, on a du nouveau.

-Je t'envoie un message s'il y a quoi que ce soit.

L'enquêtrice raccrocha et se tourna vers Esposito, le regard interrogateur.

-Bon, alors ?

-Alors, on a son identité elle s'appelait Elsa McMurry, trente-sept ans, elle vivait dans le Queens. Mariée, deux enfants, employée dans une société d'écologie.

-Elle avait un casier ?

-Juste une insulte à agent en 97. Mais c'était la « femme parfaite », d'après son mari et ses collègues de travail.

-Ok, toi et Ryan, continuez de chercher, Castle et moi, on s'occupe de sa famille.

-Ca roule.

Beckett se leva de son bureau et rejoignit l'écrivain devant le grand tableau comblé d'images sordides et d'indices aussi inutiles les uns que les autres, et soupira.

-Cette affaire commence sérieusement à me taper sur les nerfs. On est dessus depuis quoi… Trois mois ? Et rien. On ne connait pas le rapprochement entre ces hommes et ces femmes, on ignore qui a commis ces meurtres, et surtout, on a aucun mobile valable.

-Je suis persuadé qu'il y a un truc derrière tout ça, fit l'écrivain.

-Mais, je sais, des complots, la Mafia, la CIA, et autres trucs délirants… Arrête de rêver, on est dans la vraie vie, Castle… Les aliens, Bigfoot, les fées et toutes ces choses n'existent que dans les films et les romans…

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*(Avis aux CastleAdicts) Pour ceux qui l'ignorent, Baby est le nom que Dean a octroyé à sa voiture. Voilà voilà.