Bonjour à toutes et à tous !
Pardon pour ce long silence, j'ai été très prise par les cours, les partiels, les projets d'avenir, les fêtes de Noël, la famille, les amis… La vie, en somme.
Plutôt que de vous assommer de justifications et d'excuses, je vous laisse savourer le chapitre 27 de Casting Moonshadows. Bonne lecture !
Disclaimer : Pas à moi. Le monde d'Harry Potter appartient à J.K. Rowling.
Merci à tous pour les adorables reviews que vous m'avez laissées sur le dernier chapitre. Bienvenue dans la troisième année des Maraudeurs !
Night time sharpens, heightens each sensation.
Darkness stirs and wakes imagination.
Silently the senses abandon their defences.
La nuit accentue, amplifie chaque sensation.
L'obscurité mouvante réveille l'imagination.
Sans un bruit, les sens laissent tomber leurs défenses.
("Music of the Night", dans Le Fantôme de l'Opéra)
SIRIUS
Sirius savait qu'il aurait dû s'attendre à ce que Kreattur parle à sa mère de son séjour chez James. Pourtant, une petite partie de lui avait espéré ne pas être devenu un étranger au sein de sa propre famille au point de ne pas même être obéi par les elfes de maison. C'était peut-être cela, davantage que la punition qui en résulta, qui lui fit le plus mal.
Quand sa famille fut de retour, il le sut aussitôt. Le cri aigu de sa mère se fit entendre dans toute la maison à l'instant précis où elle enjamba le pare-feu de la cheminée du salon.
« Kreattur ! »
Le cri fut suivi par les couinements pleurnichards de Kreattur qui se précipitait dans le salon, et bien que Sirius soit resté dans sa chambre, il imaginait très bien l'elfe de maison se courber tellement bas devant sa mère que son nez pointu frôlait le tapis.
« Oui, Maîtresse ? »
« Apporte-nous du thé sur-le-champ, elfe ! »
« Oui, Maîtresse. »
« Et coince-toi les oreilles dans la porte du four pour te punir d'avoir mis si longtemps à me répondre ! »
« Oui, Maîtresse. Maîtresse, le jeune maître ingrat à l'étage… »
Après cela, Sirius enfouit sa tête sous son oreiller et arrêta d'écouter. Il savait ce qui allait suivre : les accusations, les cris, la punition.
Une heure s'était écoulée, une heure du genre de punition que seul pouvait dispenser un elfe de maison sur les ordres de sa maîtresse. Les elfes utilisaient leur magie pour infliger la douleur des coups de fouet à un enfant sans laisser aucune marque sur son dos. Bien que Sirius fût habitué à la sensation, ça ne l'empêchait pas d'avoir mal à chaque fois.
Il s'agenouilla sur le sol de la cuisine, hoquetant et criant tandis que les lanières invisibles lacéraient son dos. Même si c'était un autre elfe de maison qui infligeait la punition, Sirius pouvait entendre Kreattur rire dans un coin de la pièce, ses oreilles de chauve-souris toujours fumantes après leur passage dans la porte du four. À cet instant précis, il haïssait l'elfe avec plus de force que tout ce qu'il avait haï auparavant dans sa vie. Il se promit, si jamais l'elfe lui revenait en héritage, de faire de sa vie un enfer.
C'est presque avec joie qu'il vit son châtiment prendre fin et qu'il fut brutalement conduit à la cave, sanglotant et hoquetant, où on l'enferma. Mais ce sentiment s'évapora dès qu'il se rendit compte que toutes les bougies cachées par Regulus avaient été utilisées et que son frère n'avait pas eu l'occasion d'en dissimuler d'autres.
La douleur, qui ne durait que le temps de la punition, avait reflué, aussi ne pouvait-elle pas distraire Sirius du fait qu'il était seul dans les ténèbres humides et putréfiées. Sirius tenta de combattre la vague de panique qui enflait dans sa poitrine. Il se détestait pour sa peur du noir. C'était une peur d'enfant, à la fois stupide et irrationnelle, mais une peur malgré tout. Il progressa à tâtons vers un tonneau de vin qui se trouvait au milieu de la pièce et s'assit dessus, ramenant ses jambes contre sa poitrine et les entourant de ses bras.
Les yeux, voilà ce qu'il redoutait le plus. L'idée de ces yeux dans le noir. Des yeux capables de le voir, guettant le moindre de ses gestes tandis que lui-même en était réduit à une cécité et une vulnérabilité totales. Il aurait juré pouvoir les sentir fixés sur lui en ce moment même, sondant sa capacité à les voir et l'étendue de son impuissance. Il tenta de leur retourner un regard plein de défi pour montrer qu'il n'avait pas peur, mais il ne savait absolument pas où regarder. Il imagina les propriétaires des yeux qui s'approchaient subrepticement, plus près, plus près, plus près…
« Sirius ! »
Sirius poussa un cri de peur et dégringola de son tonneau.
« Sirius ? C'est moi ! Regulus ! »
Sirius tourna son visage aveugle vers l'endroit d'où provenait la voix. Il parvenait à peine à distinguer le maigre rai de lumière qui filtrait sous la porte.
« R-R-Reg ? »
« Oui, c'est moi. Elle était tellement furieuse qu'elle a oublié de jeter le sort de Silence. Je suis désolé de ne pas avoir pu te donner plus de bougies. »
Sirius, le cœur battant, se rapprocha de la porte. Le son de la voix de son frère faisait reculer un peu les yeux scrutateurs. Il se mit à genoux et essaya de regarder sous la porte.
« Reg ? »
« Oui. Je te l'ai déjà dit, c'est moi. »
« Pas de bougies ? »
« Comment je pourrais t'en donner ? La porte est fermée à clef. »
« Oui. » Sirius pressa son visage plus près de la précieuse lumière qui filtrait sous la porte. « Reg ? »
« Quoi ? »
« Combien de temps je vais rester ici ? »
« Je sais pas, Sirius. Elle était vraiment hors d'elle. Elle ne te laissera probablement pas sortir avant la rentrée. »
« Mais c'est dans une semaine ! »
« Je sais. Je suis désolé. Je t'avais bien dit de ne pas la chercher, pourtant. Je le fais toujours et tu n'écoutes jamais, crétin de Gryffondor. »
« Une semaine ! »
Il y eut un bref silence de l'autre côté de la porte, et puis : « Il faut que j'y aille maintenant. Si Maman ou l'un des elfes me trouve ici, je vais le payer cher. »
« Non, attends ! Reg ! »
« Je ne peux pas ! Tu sais que je ne peux pas. »
« Mais — »
« Pardon, Sirius. »
Regulus se releva maladroitement et s'éloigna, et Sirius entendit le bruit ses pas se perdre dans l'escalier qui remontait à la cuisine. Sirius se détourna lentement de la lumière qui filtrait sous la porte et regarda autour de lui avec appréhension : les créatures aux yeux scrutateurs, il le savait, recommençaient à avancer. Sa respiration se fit haletante et erratique tandis qu'elles approchaient. Plus près, plus près, plus près…
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Sirius ne se rappelait rien de plus merveilleux que la vue du Poudlard Express arrêté le long du quai neuf trois-quarts. La grosse locomotive rouge représentait la liberté, symbole à la fois de son retour dans le seul endroit qu'il considérait comme son foyer et de ses retrouvailles avec les seules personnes, mis à part Regulus, qu'il ait jamais vraiment aimées. Cela en avait valu la peine, ne cessait-il de se répéter. Cette dernière semaine cauchemardesque valait bien les trois semaines idylliques chez les Potter.
Sa mère était tellement en colère qu'elle refusa de lui adresser la parole, pas même pour lui dire au revoir ou le menacer de représailles en cas de mauvais comportement. Un peu à l'écart de sa famille, Sirius regarda Regulus étouffé par l'affection maternelle, visiblement mal à l'aise à côté de sa malle neuve et agrippant la cage de son tout nouveau hibou. Sirius se répéta qu'il n'était pas jaloux qu'on ne lui ait pas donné d'animal de compagnie. C'était sa faute, et pas celle de Regulus, si sa famille le détestait.
« Sirius ? »
Sirius sursauta quand une main se posa sur son épaule et se retourna brusquement. Remus le regarda avec inquiétude. « Tout va bien ? Tu es tout pâle. »
« Ça va », répondit Sirius sans même avoir à feindre son sourire. Il sentit son humeur s'alléger à la vue de son ami. Remus avait un peu grandi pendant l'été, mais pas autant que Sirius et James qui avaient tous les deux poussé comme des tiges. Ses cheveux étaient un peu plus longs qu'avant. Les boucles fauves lui tombaient dans les yeux, le forçant à les remettre en place d'un mouvement de tête assez canin. Cela fit sourire Sirius. Avant cet été, Remus ne se serait jamais permis de laisser échapper un quelconque indice sur sa nature de loup-garou sans se crisper automatiquement, horrifié. Visiblement, les Anders lui faisaient du bien.
« Je suis vraiment content qu'on y retourne », dit Remus en s'asseyant sur sa malle. Il était pâle et avait les yeux cernés. Sirius se souvint que la pleine lune aurait lieu le lendemain. « Vous m'avez manqué », ajouta Remus, l'air un peu embarrassé par cette remarque.
« Tu m'as manqué aussi », répondit Sirius, dont le cœur eut un soubresaut heureux quand il vit le visage de Remus s'éclairer en retour.
« On monte ? » demanda Remus.
« J'attends juste mon frère », dit Sirius en indiquant sa famille de la main. Sa mère l'aperçut et ses yeux se posèrent sur Remus. Un parfait rictus de Sang-Pur étira ses traits et elle leur tourna délibérément le dos. Remus était horrifié.
« Qu'est-ce que j'ai fait ? » demanda-t-il, son visage adoptant soudain une expression de culpabilité.
Sirius soupira et ébouriffa affectueusement les cheveux de son ami. « Tu n'as rien fait, Moony. Promis. Aie un peu confiance en toi. C'est juste le rictus officiel des Black, inventé et utilisé par ma famille depuis des générations à chaque fois qu'ils sont obligés de regarder des Gryffondor. »
« Elle te regarde comme ça ? » Remus regarda Sirius, de plus en plus alarmé.
Sirius sentit quelque chose se serrer en lui en voyant l'inquiétude dans les yeux de Remus. « Ne t'en fais pas, Rem. Je ne vais plus la voir pendant longtemps. »
Remus ouvrit la bouche pour parler, mais Regulus se libéra enfin des griffes de sa mère et se dirigea vers Sirius. « Maman t'interdit formellement de me corrompre », dit-il en levant les yeux au ciel. « Elle dit que si je finis à Gryffondor, tu le paieras très cher. »
Sirius sourit et fit un geste assez grossier en direction de sa mère, de dos, qui s'éloignait. « Si tu finis à Gryffondor, je considérerai ma corruption réussie », dit-il avec un clin d'œil à son petit frère.
« Je ne veux pas être à Gryffondor », dit Regulus. « Ça a l'air douloureux. »
« Mais non ! » dit Sirius d'un ton léger. « Voici Remus. Remus, je te présente mon frère, Regulus. »
Remus se leva et tendit sa main au jeune garçon. Regulus la serra timidement. « Ne t'en fais pas si tu es envoyé à Serpentard », le rassura Remus. « Tous ceux qui y vont ne sont pas mauvais, qu'importe ce qu'en disent ton frère ou James. »
Sirius grogna. « Tu accordes trop de crédit aux gens, Moony. »
« Slughorn était à Serpentard », fit remarquer Remus tandis qu'ils se dirigeaient vers le train, traînant leurs malles derrière eux.
« C'est bien ce que je dis » lâcha Sirius, hissant sa malle sur le marchepied du train et se baissant pour aider Regulus avec la sienne.
« Il n'est pas mauvais, Sirius », insista Remus d'un air réprobateur. « Ambitieux, mais pas mauvais. Tu ne l'aimes pas juste parce que Rogue est son chouchou. »
« Exactement ! » dit Sirius, comme si Remus venait de lui donner raison.
Remus soupira et rendit les armes, se mettant en quête d'un compartiment.
« Hé, les gars ! » appela une voix familière un peu plus loin dans le couloir. « Ici. »
Avec un sourire, Sirius s'élança vers le compartiment en question en tirant sa malle derrière lui, suivi de Remus et de Regulus.
« James ! » Il coinça la tête de son ami sous son bras et frotta son poing dans les cheveux noirs en bataille.
« Argg ! Sirius, lâche-moi ! » cria la voix étouffée de James, essayant vainement de frapper Sirius.
« Sirius, laisse ce pauvre garçon tranquille », dit Remus en les rejoignant, levant les yeux au ciel à la vue de l'expression triomphante de Sirius. « Ne fais pas attention à eux, Regulus. On s'y habitue à la longue. Entre. Voici Peter Pettigrow, et celui qui suffoque et vire au pourpre à cause des tendances homicides de ton frère est James Potter. »
Regulus contourna à son tour les deux garçons qui se battaient devant l'entrée du compartiment et sourit à Peter. « Bonjour. »
« Oh, trop mignon ! » s'exclama James qui parvint enfin à se libérer, se laissa tomber sur le siège en face de Regulus et posa ses pieds sur les genoux de Peter. « Regardez, c'est Sirius en modèle réduit. »
« Il a un nom, Sirius », fit remarquer Remus.
« Oui, c'est Mini-Siri ! »
Sirius sourit largement tandis que son frère rougissait. Il éprouva une vague de reconnaissance pour ses amis, qui traitaient son frère avec gentillesse tout en sachant qu'il finirait probablement à Serpentard. Il n'avait jamais douté de Remus, mais n'était pas sûr de la manière dont James réagirait.
« Alors… Pas trop peur du Calamar Géant ? » demanda Peter à Regulus, virant les pieds de James de ses genoux.
« Euh… Je devrais ? »
« Oh que oui », déclara James solennellement. « On m'a dit que trois première année n'ont pas survécu à la traversée du lac l'année dernière ».
« Quoi ? »
« Yep », dit Sirius avec un hochement de tête. « Une minute, ils ramaient joyeusement dans leur barque ; la suivante, ils nourrissaient le Calamar. »
« C'est vrai ? » Les yeux de Regulus se tournèrent vers Remus, au grand amusement de Sirius. Apparemment, son petit frère avait déjà deviné que Remus était le plus fiable des Maraudeurs.
« Ne les écoute pas », dit Remus d'un ton rassurant. « Le Calamar repêche presque toujours ceux qui tombent dans le lac. »
« Remus, tu gâches toujours mon plaisir », se plaignit Sirius en s'asseyant nonchalamment entre Remus et son frère.
« Tu es dur, aussi. »
« C'est pour ça que les petits frères sont faits. »
« Comment ça, ''presque toujours'' ? » demanda Regulus à Remus, visiblement peu enclin à changer de sujet avant d'être certain qu'il ne finirait pas en soupe de poisson.
« De temps en temps, ils nagent jusqu'à la terre ferme tout seuls », le rassura Remus. Il se leva pour pousser sa malle sous son siège et chancela légèrement avant de se rasseoir à côté de Sirius.
« Tout va bien, Moony ? » demanda Peter.
« Oui, c'est juste une fin de grippe », dit Remus en indiquant brièvement Regulus du regard. Peter parlait souvent sans penser aux conséquences.
« Oh », dit Peter, la compréhension se lisant soudain sur son visage. « cette grippe-là. »
« Bref », enchaîna rapidement James pour éviter une situation potentiellement dangereuse, « Sirius et moi nous sommes entraînés au Quidditch pendant les vacances. On va passer les sélections pour intégrer l'équipe de Gryffondor. »
« Je ne pense pas avoir le niveau », dit Peter d'un ton lugubre. « Vous vous rappelez la fois où je me suis écrasé en première année ? »
« Ouais, tu volais tellement mal que ça ne pouvait être décrit que comme pathologique, Pete », approuva Sirius en souriant à ce souvenir.
« Je ne l'ai pas vu à temps pour m'arrêter, c'est tout. »
« Peter, c'était Poudlard. Un château de cinq milliards de tonnes de pierre massive. » Malgré ses mots, James ne pouvait se retenir de sourire.
« J'avais les yeux fermés pour oublier que je ne touchais pas le sol. »
« Idiot. »
Sirius ouvrit la bouche pour renchérir quand il sentit un poids sur son épaule. Il jeta un regard de côté et sentit des cheveux fauves lui caresser la joue. Les yeux de Remus étaient fermés, ses lèvres légèrement entrouvertes dans son sommeil. Sirius capta une trace de l'odeur de chocolat-et-feuilles-d'automne dont il avait souvenir depuis la fois où il avait tenu Remus dans ses bras à l'infirmerie. Sa poitrine fut envahie d'un sentiment de protection.
« Je me demande toujours comment il fait ça », dit James, regardant Remus avec intérêt.
« Quoi ? » demanda Peter.
« Tu sais bien », dit James. « S'endormir n'importe où, comme il fait toujours. Une minute il nous fait la leçon sur les moyens efficaces de passer inaperçu, et tout à coup, boum ! Il dort comme une souche. »
« Il fait ça souvent ? » demanda Regulus. Cependant, quand il tourna les yeux vers Reg, Sirius remarqua que c'était lui et non Remus que son petit frère regardait avec curiosité. Pendant un moment, Sirius se sentit un peu perdu, avant de se rappeler que le contact physique était très rare chez les Black. Cela devait avoir l'air bizarre de voir son grand frère aussi à l'aise alors que son ami endormi était recroquevillé contre son épaule. Il se serait décalé sous l'effet de la gêne s'il n'avait craint de déranger Remus.
« Remus est souvent malade », dit-il à son frère, sur la défensive. « Il a besoin de dormir de temps en temps. »
« C'est vrai qu'il n'a pas l'air bien », concéda Remus en étudiant le visage pâle de Remus endormi. Son regard retourna à Sirius. « C'est bon. Je sais que tu n'y peux rien : tu es un Gryffondor. »
James et Peter eurent l'air étonnés par le commentaire, mais Sirius se détendit et sourit à Regulus. Il comprenait ce que Regulus était vraiment en train de lui dire. Je ne te blâme pas d'avoir perdu les manières froides des Black. Je ne te déteste pas parce que tu es un Gryffondor.
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Sirius ne fut pas vraiment surpris lorsque le Choixpeau proclama « Serpentard ! » quelques instants après qu'on l'eut posé sur la tête de son frère. Dès qu'on lui retira le Choixpeau, Regulus chercha Sirius des yeux, un air désolé sur le visage. Sirius lui adressa un sourire rassurant, prenant soin de cacher le fait que son cœur sombrait dans sa poitrine. Il espérait contre tout espoir que les Serpentard ne corrompraient pas son frère, tout en sachant que Regulus faisait partie de la catégorie des suiveurs — un peu comme Peter. Il les aimait tous les deux, mais il n'était pas sûr qu'ils soient capables de résister à la pression que représentait l'opinion de leurs pairs. Peter avait eu la chance d'être envoyé à Gryffondor grâce à sa bravoure un peu à part, mais Regulus était en danger. Sirius se demandait combien de temps s'écoulerait avant que son frère ne lui tourne le dos comme le reste de sa famille.
Il sentit une main serrer son bras et se tourna vers le visage inquiet de James. « Tout ira bien pour lui, Sirius. On ne lui fera pas de mauvais tour. »
« Ce n'est pas ça, James », dit Sirius. « C'est juste que… Je pense que les Serpentard vont le changer. »
« Aie confiance en lui. C'est ton frère — Sirius en modèle réduit. »
« Tu ne comprends pas ! » fit Sirius. « Il me ressemble, mais il n'est pas moi. J'ai peur pour lui. »
« Tout ira bien pour lui », insista James.
Sirius détourna le regard, et des yeux ambrés rencontrèrent les siens de l'autre côté de la table. Il y lut de la compréhension et de la compassion. Remus connaissait les cruautés du monde. Il n'avait aucune illusion sur la famille ou la loyauté. Remus comprenait, et savait qu'on n'avait parfois pas d'autre choix que d'accepter les fardeaux que le monde choisissait de nous faire porter et de continuer.
Cette compréhension était presque plus douloureuse que les tentatives naïves de James pour le réconforter.
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« Hé, Moony », lança James plus tard dans la soirée, alors que les quatre amis défaisaient leurs malles dans leur dortoir. « Devine ce que j'ai trouvé dans la bibliothèque Potter la semaine dernière ? »
Remus, occupé à ranger du chocolat dans sa table de nuit, leva les yeux. « Quoi ? Et ne me dis pas que tu étais en train de chercher une lecture divertissante parce que je ne te croirai pas. »
James sourit et sortit deux livres de sa malle. Il traversa la chambre d'un pas léger et se jeta sur le lit de Remus. « Non », confirma-t-il. « Il pleuvait dehors et la bibliothèque est la pièce la plus grande de la maison. Il fallait que je peaufine mes talents sur un balai. »
« Tu volais dans la bibliothèque ! » s'exclama Remus, choqué. « C'est horrible, James ! »
« Ouais, c'était aussi l'avis de Maman », fit James, l'air maussade. « Mais avant de me faire attraper, je flânais dans l'aile des Créatures Magiques et j'ai repéré quelques livres sur les loups-garous que tu n'avais pas et qui n'étaient pas à la bibliothèque de l'école. Je te les ai apportés pour que tu puisses les lire, si tu veux. »
Sirius sourit en voyant le visage de Remus s'éclairer tandis qu'il prenait les livres. « Oh, James… Merci ! »
« Ils sont vieux », dit James. « C'est probablement pour ça que tu n'as pas pu les acheter. Et puis ils sont plutôt sympas envers les loups-garous, ce qui explique sûrement pourquoi ils ne sont pas à la bibliothèque. »
Sirius grimaça à cette réflexion et vint rejoindre ses amis sur le lit de Remus. Peter chipa une Chocogrenouille dans le tiroir de la table de nuit resté ouvert et s'assit à côté de Sirius. Remus était si absorbé par l'un des livres qu'il ne s'en aperçut même pas.
« Alors, qu'est-ce que ça dit ? » demanda Sirius avec curiosité, se penchant pour essayer de déchiffrer à l'envers la page que Remus était en train de lire.
« C'est brillant. » Remus tourna la page. « Ce chapitre explore la psychologie des loups-garous beaucoup plus en détails que tous les autres livres que je connais. La plupart se concentrent sur les implications physiques de la lycanthropie. » Il s'interrompit pour poursuivre sa lecture. « Écoutez ça : Un loup-garou ne prendra pour cible naturelle que des êtres humains. Les animaux sont à l'abri de toute attaque de loup-garou, sauf en cas de provocation ; il peut même arriver que le loup-garou accepte leur compagnie. Une étude menée par Oswen Debonair en 1643 montre que la compagnie d'un animal pourrait même aider un loup-garou à supporter sa douloureuse transformation, quoique la plupart des études à ce sujet soient peu concluantes du fait de la réticence des animaux à côtoyer dans un espace confiné une créature qui apparaît si manifestement comme un puissant prédateur. »
« On pourrait t'acheter un chien », dit Sirius, inspiré par la lecture de Remus. « Pour te tenir compagnie et t'empêcher de te blesser comme tu le fais ! »
Remus soupira et secoua la tête. « Tu m'as écouté ou pas ? Un chien aurait peur de moi. Comme tous les animaux. Jamais je ne ferais ça, obliger un animal à se tapir dans un coin pendant que je fais les cent pas en hurlant à m'en rendre fou. »
Sirius grimaça. « Mais il faut bien qu'on fasse quelque chose pour t'aider ! »
« Vous le faites déjà ! » dit Remus. « Tous les trois. » Il hésita un instant, puis se pencha sur sa propre malle et en sortit l'un de ses livres sur les loups-garous. Il le feuilleta pendant quelques secondes, et la tension dans les épaules du jeune garçon n'échappa pas à Sirius. « Écoutez ça : Même sous sa forme humaine, une partie de l'esprit conservera toujours des traits canins. Il n'est pas rare pour un loup-garou de former une ''meute'' avec les humains qui lui sont le plus cher. »
Un long silence s'installa entre les quatre garçons et Remus baissa les yeux vers ses genoux, les joues rouges d'humiliation. Sirius sentit un sourire s'épanouir petit à petit sur son visage. « Nous sommes ta meute ? » Sa voix se fêla de manière embarrassante.
« Je suis désolé », marmonna Remus sans relever les yeux. « Je n'y peux rien. C'est l'influence de Moony. »
« Désolé ? » répéta James. « Pourquoi ? C'est génial ! On n'est pas simplement les Maraudeurs, on est aussi la meute d'un loup-garou. On est les amis les plus géniaux de tous les temps ! Rien ne nous séparera jamais. »
Remus releva les yeux, incrédule. « Ça ne te gêne pas ? »
« Pourquoi veux-tu que ça nous gêne ? » demanda Peter en passant un bras autour des épaules de Remus. Sirius ressentit un étrange pincement au cœur en voyant que ce n'était pas lui dont le bras enlaçait ainsi Remus. N'était-ce pas son rôle, de tenir Remus dans ses bras ? Tout en ayant cette pensée, il savait qu'il était ridicule. Les autres avaient tout autant le droit que lui de témoigner leur affection.
« Je pensais que ça vous ferait peut-être bizarre », expliqua Remus. « C'est un peu animal, de faire partie d'une meute. Je croyais que ça vous ferait peur. »
« Eh bien », dit Sirius en posant une main sur son genou, « tu croyais mal. On trouve ça génial. »
Remus sourit, de ce même sourire qu'il leur avait offert à la bibliothèque un an plus tôt, quand ils lui avaient dit qu'ils étaient ses amis. Contrairement à la plupart de ses sourires, celui-ci illuminait son visage tout entier, remplissant ses yeux et chassant pour une fraction de seconde les ombres qui y rôdaient sans cesse.
« Merci » fut tout ce qu'il dit. Mais c'était suffisant.
Rooooh, Sirius commence à être jaloux, c'est mignon :3 N'hésitez pas à me donner votre avis sur ce chapitre dans les reviews !
À bientôt pour la suite :)