Et voilà le second OS, l'inspiration est revenue haha! Alors j'ai toujours trouvé qu'il manquait une scène d'explication dans cet épisode, que le Docteur tombait amoureux de Reinette trop rapidement et que Rose ne réagissait pas assez donc voilà...
The Girl in the fireplace UA
- …incroyable.
Rose écoutait distraitement Mickey qui s'extasiait sur les trésors du Tardis. Elle aurait sans doute été amusée en d'autres circonstances, se rappelant sa propre découverte du vaisseau et de du même air émerveillé qu'elle avait dû avoir, mais elle était ailleurs aujourd'hui.
- Rose ? Tu m'écoutes ?
- Hein ?
- Je disais, est-ce qu'il y a une télé ici ?
- Evidemment. Tu as une salle de cinéma qui passe tous les films qui ont existé au bout du couloir.
Les sourcils de Mickey menacèrent de disparaître sous ses cheveux et il jeta un regard par-dessus son épaule.
- Euh…ça te dérange si je vais y jeter un œil ?
- Non ! Dit-elle un peu trop précipitamment. Tu sais quoi, je te retrouve plus tard.
Elle ne prit pas la peine d'attendre sa réponse de peur qu'il la retienne et s'enfonça dans les entrailles du TARDIS. Elle avait appris à se repérer dans le dédale de couloir depuis un moment même si ça lui arrivait de se perdre encore de temps en temps. Dans ces cas-là, elle demandait gentiment au navire de la guider.
Epuisée, elle hésita à retourner directement dans sa chambre ou à aller se faire une tasse de thé avant d'aller se coucher. Elle avait pourtant l'impression d'être trop nerveuse pour dormir maintenant. Finalement, le Tardis prit une décision pour elle en faisant clignoter les lumières du plafond vers la droite. Rose sourit et posa sa main contre le mur.
- Merci, souffla-t-elle, t'es la meilleure.
A vrai dire, son lien avec le vaisseau semblait s'être développé et accentué depuis les évènements de la Game Station. Elle n'avait pratiquement aucun souvenir de ce jour-là, du moins pas après avoir ouvert le cœur du Tardis. Les seules choses qu'elle savait, c'était ce que le Docteur lui avait raconté, c'est-à-dire pas grand-chose. Elle-même n'aimait pas y penser. C'était le jour où elle avait « perdu » son premier Docteur, celui avec la veste en cuir et les grandes oreilles, et il lui manquait toujours malgré le fait qu'elle aimait autant le Docteur dans sa nouvelle régénération. Ça lui avait pris du temps pour comprendre qu'ils étaient le même homme mais aujourd'hui l'idée lui paraissait totalement naturelle.
Finalement ses pas la guidèrent en direction de la bibliothèque. Surprise, elle se demanda une seconde pourquoi est-ce que le TARDIS l'avait amené ici jusqu'à ce qu'elle repère le Docteur. Il était assis sur le canapé, les coudes sur les genoux et lisait vraisemblablement une lettre. Rose sut immédiatement que c'était celle de Reinette, alias Madame de Pompadour. Elle sentit son estomac se nouer en voyant l'expression sur son visage, celle qui lui rappelait qu'il était un extraterrestre de plus de 900 ans qui avait perdu tellement dans sa vie. Elle hésita dans l'encadrement de la porte. S'il avait envie de la voir, il viendrait directement, c'était comme ça qu'il fonctionnait. Pourtant, il devait bien y avoir une raison au fait que le TARDIS l'ai guidée ici.
- Tu vas rester là longtemps ?
Rose sursauta et rougit, même si elle ne savait pas vraiment pourquoi elle devrait être mal à l'aise de s'être fait prendre.
- Désolé, balbutia-t-elle. Je…je vais retourner…
- Rose…
Elle se figea, incapable de détourner le regard.
- Viens là, souffla-t-il.
Il se décala sur le canapé pour lui faire de la place et elle vint s'assoir à côté de lui, les jambes repliées. Avant sa régénération, ils passaient souvent leur soirée ici, l'un contre l'autre à lire des classiques. Elle avait appris à redécouvrir Shakespeare avec lui. Quand il avait changé, il avait fallu un peu de temps pour que leur routine reprenne mais tout était ensuite revenu à la normal.
- Mickey est bien installé ?
- Ouais, sa chambre est sympa. Il a aussi trouvé la salle de jeux vidéo. Ça va être impossible de l'en faire sortir…
- Je n'en doute pas. Il va bien ? L'aventure d'aujourd'hui a été un peu rude, surtout pour un premier voyage.
- Oui je pense, il en faut plus à Mickey pour perdre ses moyens.
Le Docteur retint un haussement de sourcil dubitatif à cette affirmation.
- Et toi ? Tu vas bien ?
- Evidemment… Manquer de se faire tuer en sauvant l'histoire ? La routine ! C'est à toi que je devrais poser la question.
- Moi ? Dit-il, surpris.
- Ne fais pas ça…
- Faire quoi ?
Rose se tourna vers lui, fatiguée.
- Ça ! Prétendre que tu vas bien, me mentir, alors que je sais que ce n'est pas le cas.
- Je vais toujours bien…
- C'est faux, Docteur.
- Et comment est-ce que tu peux en être si sûre ?
- Parce que je te connais, dit-elle naturellement.
Il la regarda longuement en silence. Elle avait changé. La jeune fille humaine de dix-neuf ans qu'il avait pris avec lui au travers du temps et de l'espace n'était plus la même, elle était devenue forte. Elle avait grandi. Pourtant, il savait aussi qu'elle restait jeune. Elle n'avait pas idée des choses qu'il avait vues, des choses qu'il avait faites, et c'était mieux ainsi. Il ne voulait pas qu'elle le voit tel qu'il était vraiment un vieil homme brisé et meurtri par le temps.
- Sincèrement, Rose, ça va. Tu devrais aller te reposer.
Elle soupira, sachant qu'elle n'obtiendrait rien de plus.
- Très bien…tu sais où me trouver si tu as besoin de moi.
- Toujours, sourit-il.
Rose lui rendit son sourire, celui qu'elle faisait si souvent, avec sa langue entre ses dents, puis elle se leva et quitta la pièce. Elle hésita à retourner dans sa chambre directement, peut-être qu'une tasse de thé ne serait pas de trop après la journée éprouvante.
Cependant, elle n'avait pas été la seule à avoir eu cette idée puisqu'elle retrouva Mickey assis autour de la table. Il avait une tasse entre les mains et releva la tête en l'entendant arriver. Rose devait avouer qu'elle n'était pas encore habituée à le voir sur le Tardis. Ça avait toujours été juste elle et le Docteur, ensemble, et le fait qu'une troisième personne soit désormais avec eux la perturbait encore. Elle n'avait d'ailleurs pas réussi à cacher son exaspération quand Sarah Jane avait approuvé l'idée de prendre Mickey à bord mais elle n'avait rien dit. Après tout, elle n'en avait aucun droit, si Mickey voulait voir les étoiles, qui était-elle pour lui refuser ?
- Tu vas bien ?
- Hein ? Oh oui… souffla-t-elle. Tu n'es plus dans la salle multimédia ?
- Non, j'ai voulu explorer encore un peu mais j'ai atterri ici sans trop savoir comment…
Rose sourit.
- Elle change les pièces de place, parfois, expliqua-t-elle.
- Elle ?
- Le Tardis. Elle est… vivante en quelque sorte.
- Tu rigoles ?
- Je sais que ça peut paraître étrange mais crois-moi, elle l'est.
Mickey cligna des yeux et regarda les murs avec un nouvel intérêt tandis que Rose ouvrit un placard au hasard pour trouver de quoi faire un thé. Elle hésita une seconde à lui parler aussi des capacités télépathiques du Tardis mais s'abstint en se souvenant de sa propre réaction à l'idée qu'on ait pu entrer dans sa tête sans sa permission. Maintenant, sa méfiance initiale lui semblait disproportionnée. Surprise, elle se demanda quand est-ce que tout cela était devenu normal dans sa vie. Les voyages, le Docteur, les monstres…
- Rose ?
- Hum ?
- Est-ce que…est-ce que tu es sûre que ça va ? Je veux dire avec ce qui s'est passé aujourd'hui…
- Aujourd'hui ?
- On a failli mourir !
Rose revint s'assoir lentement en face de lui, nerveuse.
- Mickey, je sais que ça peut…être déroutant au début. Mais ce n'est pas la première fois et ça ne sera pas la dernière.
- Tu veux dire que c'est ça ta vie ? Courir avec lui et te mettre en danger ?
- Ce n'est pas…
- Il te met en danger ! Insista-t-il.
Rose secoua la tête immédiatement, sur la défensive.
- C'est faux…
- Il est parti en nous laissant dans un vaisseau spatial, trois mille ans dans le futur, et sans aucun moyen possible pour rentrer Rose !
- Tu ne comprends pas…
- Non, toi ouvre les yeux ! Pourquoi…pourquoi tu ne le vois pas ?
- Je ne suis pas idiote, murmura-t-elle. Evidemment que j'ai remarqué ce qu'il s'est passé aujourd'hui. Mais c'est comme ça qu'il fonctionne, Mick. Il sauve les gens.
- Ah ouais ? Et toi ? Et nous ?
- Il est revenu… argua-t-elle piteusement.
- C'était un coup de chance !
Elle voyait bien qu'il avait raison d'une certaine façon, et que ça l'énervait qu'elle ne le reconnaisse pas. Pourtant, elle ne comprenait pas comment les autres ne pouvaient pas voir le Docteur comme elle le voyait. Sarah Jane avait su, elle le savait. Certaines choses valent d'avoir le cœur brisé. Le Docteur était l'une de ses choses.
- Rose… Qu'est-ce qu'il te faut ? Après Sarah Jane, après Madame de Pompadour ?
- Tu ne comprends pas, répéta-t-elle.
Mickey parut exaspéré.
- Vas-y alors, répliqua-t-il en croisant les bras, renversé contre le dossier de sa chaise. Explique-moi, je t'écoute.
- Quoi ?
- Tu n'arrêtes pas dire que je ne comprends, donc je veux que tu m'expliques. Pourquoi est-ce que tu le défends malgré tout ?
- Parce que…parce que voyager avec le Docteur c'est…c'est quelque chose d'indescriptible, balbutia-t-elle, frustrée de ne pas pouvoir exprimer ce qu'elle ressentait. Il te fait sentir spéciale. Tu vois des choses que personne d'autre ne verra, ne peut même pas imaginer ! Il…il est seul, Mickey. Il a besoin d'avoir quelqu'un à ses côtés.
- Toi ?
Rose émit un rire étranglé.
- Après ce que tu as vu aujourd'hui tu poses la question ? Non, pas moi.
- Mais…
- Je ne lui en veux pas, Mickey. Elle était la maîtresse du roi de France, belle, intelligente. Je suis une fille qui vendait des vêtements dans une boutique de Londres… Je pense que le choix est assez évident.
- Non, dit-il. Tu es plus que ça. Pour moi, tu es plus que ça.
Rose sourit, détournant les yeux. Elle n'avait pas réalisé à quel point elle avait eu besoin d'entendre ces mots, là, tout de suite.
Une boule de culpabilité lui coupa le souffle. Mickey Smith avait toujours été son meilleur ami, il avait été son petit copain, elle l'aimait…ou du moins elle l'avait aimé de cette façon, elle ne savait plus trop elle-même. Dans tous les cas, il avait toujours été là quand elle en avait eu besoin. Qu'est-ce qu'il avait bien pu penser, lui, quand elle l'avait abandonné pour fuir avec un étranger dans une boîte bleue ?
- Merci, souffla-t-elle. Je sais…je sais que j'ai été horrible avec toi et je suis tellement désolé…
- Hé, Rose, coupa-t-il en lui prenant la main par-dessus la table. Tu n'as pas besoin…
- Si justement. Tu es exceptionnel et je ne t'ai jamais remercié pour tout ce que tu as fait pour moi, donc merci, Mick, vraiment !
Mickey compris sa détresse seulement en voyant ses yeux se remplir de larmes. D'un bond, il se leva de sa chaise et contourna la table pour venir se planter à côté d'elle.
- Rose…
- Je ne suis pas assez spéciale pour lui ni assez bien pour toi, murmura-t-elle, le regard dans le vague. Je ne vous mérite pas, ni l'un ni l'autre.
- Ne dis pas ça… C'est lui qui est un idiot s'il ne voit pas à quel point tu es géniale.
Cependant, il vit clairement qu'elle ne le croyait pas. Une vague de colère le balaya devant ce fait. Pourquoi ne se rendait-elle pas compte que c'était la faute du Docteur et de son complexe de dieu solitaire ?
- Tu l'aimes pas vrai ?
- Mickey…
- Ce n'est pas la peine de dire non tu sais…
- Je…
Elle le regarda avec regret, l'air désolé.
- C'est bon, Rose, assura-t-il plus sèchement qu'il ne l'aurait voulu. Tu l'aimes plus que moi, je comprends.
- Non !
Elle porta une main tremblante contre sa joue, bouleversée. Il savait qu'il n'aurait pas dû lui balancer ça au visage mais après tout lui aussi souffrait. Pour une fois, il ne voulait pas juste être Mickey l'Idiot, le chien en étain qu'on laissait derrière. Elle avait attendu cinq heures et demi pour le Docteur ? Il aurait voulu lui dire que lui avait attendu un an qu'elle revienne, accusé par la police d'être responsable de sa disparition sans savoir quand ou même si elle serait de retour.
Mais Rose garda le silence, incapable de trouver quelque chose à dire. Brusquement, elle se leva à son tour et essuya ses larmes d'un revers de la main.
- Je…je vais aller dormir. On se voit demain, Mickey.
- Rose !
- Bonne nuit…
Elle avait déjà disparu dans le couloir avant même qu'il ait pu esquisser un geste pour la retenir. Mickey soupira. Décidément, cette journée continuait à être épouvantable. D'abord des droïdes d'horlogerie qui manquent de le tuer, puis être coincé sur un vaisseau spatial et enfin se disputer avec sa petite amie -ou ex petite amie pour être plus juste- oui vraiment tout était parfait, pensa-t-il avec ironie.
- Ah tiens Mickey ! Lança soudain une voix.
Le Docteur venait de rentrer dans la cuisine, l'air fatigué malgré sa voix enjouée qui sonnait faux, même à ses oreilles.
- Docteur…dit-il lentement.
- Tu n'es pas dans la salle multimédia ?
- Je voulais juste une tasse de thé…
- Oh !
Les yeux du Docteur passèrent sur la tasse que Rose avait laissé sur la table, à moitié pleine, et il haussa un sourcil.
- Où est Rose ?
- Elle était fatiguée, répondit-il avec brusquerie, l'image de la jeune fille en larmes toujours en tête.
- Fatiguée ?
- C'est ça.
- Tu es sûr que tout va bien, Rickey ?
- C'est Mickey !
Le Docteur haussa les épaules.
- Oui bien sûr… Euh, je vais aller la voir avant qu'elle ne s'endorme…
- Non ! Cria Mickey, lui bloquant le passage. Je veux dire…je pense qu'elle veut être seule pour le moment.
- Pourquoi ?
Mickey faillit éclater de rire tellement la question lui paraissait absurde. Parfois, il pouvait presque oublié que le Docteur n'était pas humain mais c'est quand il agissait comme ça qu'il s'en souvenait très bien. Il ne savait rien des émotions humaines.
Il aurait aimé lui dire un peu mesquinement que s'il ne voyait pas pourquoi Rose ne voulait pas être dérangée maintenant, c'est parce qu'il ne la connaissait pas réellement, contrairement à lui, mais il se retint.
- Elle est un peu bouleversée à cause d'aujourd'hui…
- Mais…elle a dit qu'elle allait bien…protesta-t-il. Tout à l'heure, elle a dit que…
- Rose savait que vous n'alliez pas bien, vous pensez vraiment qu'elle allait en rajouter avec ce qu'elle ressentait ?
- Et qu'est-ce qu'elle ressent ?
- A votre avis ! Pour quelqu'un censé être plus intelligent que tout le monde, vous êtes assez lent parfois ! Vous voulez la voir maintenant hein ? Ce n'était pas l'impression que j'ai eu pendant cinq heures et demi alors qu'elle était morte d'inquiétude !
Le Docteur le fusilla du regard.
- Je ne vais pas parler de ça avec toi ce soir, Mickey, dit-il d'une voix glaciale, celle qui pouvait faire en sorte que des armées entières le craignait au travers des galaxies, du temps et de l'espace. A demain.
- Docteur…
Mais il se contenta de lui tourner le dos et de quitter la cuisine aussi vite qu'il était venu. Mickey resta figé une seconde, le cœur tambourinant à toute vitesse. Il ne l'avouerait pour rien au monde mais il avait eu peur. C'était dans ce genre de moment qu'il comprenait pourquoi il ne pouvait pas rivaliser avec le Docteur malgré tous ses efforts.
La porte de Rose avait été customisé par le Tardis pratiquement dès son arrivée. D'une couleur rose clair, il y avait une rose rouge peinte délicatement au milieu avec son prénom écrit en Gallifrayen juste en dessous. La première fois que Rose lui avait demandé ce que ça voulait dire, il avait hésité une seconde, les souvenirs de sa planète disparue et de son peuple en tête. Pourtant, elle avait juste gardé le silence, attendant qu'il soit prêt à lui en parler. Après sa régénération, une nouvelle inscription dans sa langue maternelle s'était gravée : Bad Wolf. Evidemment. Le Tardis voulait lui montrer à quel point sa précieuse fille était courageuse, qu'elle l'avait sauvé alors qu'il l'avait renvoyé chez elle. Il faisait encore des rêves de Rose, nimbée de lumière dorée, qui passait les portes avec un pouvoir digne d'une déesse du temps. Elle avait réduit les Daleks en poussière d'un simple mouvement de main. Il l'avait embrassé ce jour-là, même s'il elle ne s'en souvenait pas et que lui-même refusait d'y penser. Il tentait de se persuader qu'il l'avait fait parce qu'elle allait mourir autrement, qu'il devait la sauver à tout prix…
- Docteur ?
Il sursauta. Elle venait d'ouvrir la porte brusquement, visiblement surprise de le trouver sur le seuil à une heure pareil, bien qu'il ne dorme pas autant que les humains.
- Je… J'ai vu une ombre sous la porte, je pensais que c'était Mickey… Qu'est-ce que tu fais là ?
Le Docteur essaya de ne pas se focaliser sur le fait qu'elle s'attendait à voir Mickey l'Idiot en pleine nuit dans sa chambre et se balança d'avant en arrière pour se donner une contenance.
- Oh je passais juste par ici, tu sais, histoire de me…balader.
- Balader ? Répéta-t-elle, sceptique.
- Ouais…et je voulais…je voulais te parler. Voir si tu allais bien.
Rose sourit avec timidité, ce qui ne lui ressemblait pas.
- Je t'ai déjà dit que ça allait, souffla-t-elle. Juste fatiguée.
- Bien sûr…je vais te laisser dormir.
Il fit volte-face précipitamment avant qu'elle ne le retienne par le poignet et le tire dans sa chambre par la main.
- Viens deux minutes.
- Rose…
- C'est bon, je peux t'écouter. Je suis là, je te l'ai dit.
Le Docteur eut la gorge nouée. Ne comprenait-elle pas que c'était à lui d'être là pour elle après tout ce qu'ils avaient traversé, surtout aujourd'hui ?
En silence, ils s'assirent tous les deux sur le lit. Ce n'était pas la première fois qu'il venait dans sa chambre, loin de là. Il avait même déjà passé des nuits dans son lit après des aventures difficiles, que ça soit dans sa neuvième ou dixième incarnation, car elle faisait parfois des cauchemars. Il s'allongeait alors à côté d'elle sans la toucher, la rassurant juste par sa présence. Il était toujours parti quand elle se réveillait le matin.
- Docteur ?
- Quoi ?
- Tu vas juste me fixer comme ça ou… ?
- Désolé, s'excusa-t-il sans trop savoir de quoi exactement.
- C'est bon… Tu voulais me parler ?
- Hum, c'est juste un truc que Mickey a dit et…
- Tu as eu une discussion avec Mickey ? Coupa-t-elle.
Rose ne pensait pas qu'il lui dirait ça un jour. Soudain elle se rappela de leur conversation tout à l'heure dans la cuisine et se crispa, une crampe à l'estomac.
- Qu'est-ce qu'il t'a raconté ?
- Rose… murmura-t-il. Pourquoi tu ne m'as pas dit que… que…
- Que quoi ?
- Pourquoi tu ne m'as pas dit ce que tu ressentais à propos d'aujourd'hui ?
- Je ne…
- Non. Ne me mens pas, je te connais, tu te rappelles ?
Elle leva les yeux au ciel, en colère qu'il ose utiliser ses propres mots contre elle de cette façon.
- J'étais juste un peu bouleversée, c'est tout, mais je ne voulais pas t'embêter avec ça alors que…commença-t-elle, le souffle court. Alors que tu venais d'avoir le cœur brisé. Ou les cœurs brisés en fait…
Sa tentative d'humour tomba à plat. Le Docteur avait l'air mortellement sérieux en cet instant et elle détourna le regard, tremblante.
- Je n'avais pas le cœur brisé.
- Arrête, tu l'aimais.
Elle ne mentionna pas le nom de Reinette mais il comprit.
- Je ne…
- Comment est-ce que tu aurais pu ne pas tomber amoureux d'elle ? Elle était incroyable, ambitieuse, presque reine de France, courtisane cultivée…Elle voulait voir les étoiles...
- Rose, tu ne comprends pas !
- Bien sûr que si, tu es comme ça. Tu sauves les gens, pas vrai ? Elle te connaissait depuis son enfance, l'ange solitaire.
- Ce n'était pas comme ça. Tu es importante pour moi.
- Pas besoin de…
- Je ne l'aimais pas ! Cria-t-il brusquement. Qu'est-ce que je dois dire pour te convaincre ?
Rose sursauta et les larmes lui montèrent aux yeux. Elle eut l'impression qu'un barrage venait de céder dans sa poitrine, que la tension de la journée lui revenait en pleine face. Elle se sentait mal, tellement mal, après sa conversation avec Mickey et la réalisation qu'elle l'avait fait souffrir sans jamais y penser ni regarder en arrière. Sa mère n'avait pas cessé de lui dire qu'elle ne pouvait pas juste s'enfuir avec un étranger dans une boîte bleu, mais elle ne l'avait pas écouté. Elle ne voulait pas. Cette vie, si loin de son quotidien à Londres, c'était comme un rêve éveillé. Autant dire qu'aujourd'hui le réveil avait été brutal.
- Me convaincre ? Dit-elle d'une voix étranglée. Tu m'as laissé dernière ! Tu m'as abandonné !
- C'est faux…
- Tu m'as promis ce soir-là avec Sarah Jane que je n'étais pas comme les autres et que tu ne me laisserais pas. Tu me l'avais promis. Il t'a fallu deux jours pour rompre ta promesse !
- Mais tu es différente…
- Non ! Non, je ne le suis pas et c'est bon, ce n'est pas grave. Je comprends maintenant, tu as eu d'autres compagnons, tu en auras d'autres. Tu m'oublieras.
- Pas toi, Rose.
- Arrête de répéter ça, c'est cruel, chuchota-t-elle.
Le Docteur se sentit tellement frustré car pour une fois il n'avait pas les mots pour s'exprimer, ce qui est un comble pour lui.
- Je ne la connaissais même pas…
- Mais tu as voulu la suivre quand même parce qu'elle t'intriguait, tu ressentais le frisson de l'aventure…elle était fascinante.
- Peut-être, consentit-il.
- Crois-moi Docteur, je connais ce sentiment.
- Ce n'est pas la même chose que toi et moi…
Visiblement, elle ne le croyait pas car elle haussa les épaules.
- Qu'est-ce que tu veux faire, Rose ? Demanda-t-il, fatiguée.
- Rien…je ne sais pas… Peut-être rentrer à la maison, tu sais pour quelques jours…
Il n'aurait pas pu décrire la panique qui le saisit à ces mots, ceux qu'il redoutait depuis qu'elle voyageait avec lui. Il savait qu'un jour elle se rendrait compte qu'il n'était pas celui qu'elle croyait, pourtant ça ne rendait pas cela moins douloureux.
Rose fixait obstinément ses mains sur ses genoux qui jouaient avec un coin de sa couette, incapable de soutenir son regard.
- Tu sais pourquoi j'ai demandé à Mickey de venir, pourquoi j'ai couru après Sarah-Jane et Reinette ? Demanda-t-il finalement.
- Non…
- Parce que tu me fais peur Rose Tyler.
Elle releva la tête d'un coup, les sourcils froncés.
- Quoi ?
- Tu me fais peur, répéta-t-il. Après la Guerre du Temps je pensais ne plus avoir de compagnon, j'étais résigné à être seul. Je ne méritais pas l'amour ou l'amitié à nouveau. Et puis un jour j'ai croisé une jeune fille dans un sous-sol, j'ai pris sa main comme ça, ajouta-t-il en entremêlant leurs mains ensemble tandis qu'elle rougissait, et j'ai dit « cours ». Elle était incroyable, courageuse, curieuse, d'une gentillesse rare… Prêtre à absorber le vortex du temps pour me sauver. Elle m'a fait redécouvrir l'univers.
- Docteur…
- J'ai eu peur, Rose. Quand j'ai revu Sarah-Jane qui avait vieillit et après la vie de Reinette s'écouler en quelques heures alors qu'elles m'avaient toutes les deux attendu pendant des années, ça m'a rappelé…ça m'a rappelé à quel point la vie humaine est courte. Je ne mentais pas ce soir-là, tu es différente mais ça ne change pas le fait qu'un jour tu me quitteras. Peut-être que ça sera parce que tu en as assez et que tu voudras fonder une famille, peut-être que tu seras blessée, peut-être que tu ne voudras plus courir avec moi…
- Non je…
- Laisse-moi finir, dit-il doucement. Reinette était une femme remarquable, c'est vrai. Mais Rose, je suis revenu. Et je reviendrais toujours pour toi. Tu penses que tu es remplaçable, moins bien qu'elle ? Oh allez ! Tu as fait face à des créatures horribles sans trembler, tu as fait des plans au moins une dizaine de fois pour nous sortir de prison… Tu restes avec moi quand j'en ai besoin. Alors non, Rose Tyler, je ne mens pas quand je dis que je ne l'aimais pas ni quand j'ai peur de te perdre.
A ce stade, Rose pleurait. Elle avait toujours trouvé les filles dans les films ridicules quand elles pleuraient pour des déclarations, sauf que là c'était le Docteur. Le Docteur qui ne parlait pas de ses sentiments, évitait tout ce qui touchait de près ou du loin au domestique. Elle doutait même actuellement qu'il lui ait dit tout ça.
Sans réfléchir, elle se jeta dans ses bras, le serrant contre elle. Il ne lui fallut pas une seconde pour l'imiter et la tirer pratiquement sur ses genoux, son souffle caressant son cou. Ils avaient eu beaucoup de câlin de réconciliation ou de retrouvailles mais celui-ci était spécial. Le Docteur ne la lâcha pas.
- Rose Tyler…murmura-t-il.
Elle aimait quand il prononçait son prénom sur ce ton particulier qui lui rappelait son premier Docteur et qui lui était tellement propre aussi.
- Je ne te quitterais jamais, assura-t-elle tout bas. Je le promets.
- Je sais…
- Et…je…
Les mots se coincèrent dans sa gorge. Elle voulait lui dire depuis longtemps, elle voulait qu'il sache à quel point elle…elle l'aimait. Néanmoins le dire à voix haute serait briser cette barrière entre eux qu'ils avaient instauré, franchir la ligne. Le Docteur parut comprendre car il se recula légèrement avant de prendre son visage en coupe entre ces mains.
- Je le sais aussi…
Rose sourit à travers ses larmes, épuisée. Il n'essaya pas de lui dire également, sachant que ce n'était pas le moment, pas comme ça.
Sans un mot de plus, ils s'allongèrent ensemble, blottis l'un contre l'autre et elle dériva dans le sommeil assez vite.
Le lendemain matin, il n'était plus là, mais ce n'était pas grave parce qu'elle savait…
J'espère que vous avez aimé! :)
