Chapitre Vingt-Huit : Les Petits Pas Entraînent les Grands
Partie Une : Murs blancs.
21 avril
Les murs de son salon étaient blancs.
Ses murs avaient toujours été blancs – trop blancs, d'après Drago – mais c'était seulement maintenant qu'elle y faisait attention. Ou, ce n'était pas vrai. Elle avait cessé de se voiler la face depuis suffisamment longtemps pour enfin remarquer quelque chose d'aussi banal que ses murs. Hermione regarda autour d'elle avec un mépris notable. Les murs étaient vides. Très vides. Trop vides. Elle baissa les yeux sur son mobilier. Lui aussi était anormalement vide.
Son salon était idéal pour une maison de retraite, pas pour la maison d'une personne ayant dans la vingtaine.
Hermione savait que le principal problème avec son salon, c'était ce qu'il représentait. Il n'y avait rien pour montrer qui elle était aujourd'hui, seulement qui elle avait été dans le passé. En fait, le salon ressemblait à un mélange de toutes les femmes qu'elle avait été dans sa vie : les étagères de livres pour le cerveau, un tapis bleu pourri devant la cheminée pour les cent pas, un juke-box pour la fille, les traces de crayon sur un pied de table pour la mère, la couverture sous laquelle dormait Apollon pour l'amie, la cheminée dénuée de photos pour la solitaire, et le mobilier vide pour la recluse.
Ça la représentait difficilement.
Bien sûr, elle était toujours certaines de ces choses, mais il n'y avait rien pour exprimer les nouveaux départs et les pas en avant qu'elle avait faits rien pour montrer les nouveaux amis et les nouveaux liens qu'elle avait formés. Donc, elle allait faire en sorte que cette pièce représente les changements qu'elle avait vécus.
Après tout, il y en avait beaucoup.
En toute bonne foi, le dernier propriétaire lui avait proposé de s'impliquer. Il lui avait offert de poser une nouvelle moquette et de peindre les murs d'une autre couleur, mais elle n'avait pas su verbaliser ses envies. En y repensant, Hermione se dit que peut-être n'avait-elle rien changé parce qu'elle n'avait pas voulu créer un autre désastre auquel elle aurait repensé avec regret.
Donc, elle s'était retrouvée avec des murs blancs. Elle s'était retrouvée avec une pièce ne contenant rien qui la rendît douillette et confortable – hormis le juke-box une pièce qui la laissait froide. Hermione avait entendu dire qu'une pièce était supposée dépeindre l'esprit et le 'moi' intérieur d'une personne, cette personne étant censée se sentir calme et sereine dans son espace de vie. Hermione fronça les sourcils et regarda autour d'elle, songeuse.
Peut-être que le moment était venu de changer.
Et peut-être que son salon n'était pas la seule chose à avoir besoin de changer.
Peut-être qu'elle avait besoin de changer.
Mais elle avait déjà induit tellement de changements tellement que le seul fait d'y penser lui faisait tourner la tête tellement qu'elle pouvait à peine se rappeler de la vie avant eux. Enfin, ce n'était pas vrai. Elle se souviendrait toujours. Toujours. Ces souvenirs étaient rangés dans une partie de son cerveau et ils étaient là pour lui rappeler d'où elle revenait ; un endroit où elle n'irait plus jamais.
Cela signifiait-il qu'Hermione était normale ?
Pas le moins du monde.
Mais un jour, peut-être serait-elle normale, selon le propre point de vue qu'elle avait relativement à ce mot.
Tout était question de perception. La société avait une manière de définir le mot, mais Hermione en avait une autre. Sa perception – sa perception de chaque chose – avait été déformée pendant si longtemps qu'elle avait dû redéfinir ce que le mot 'normal' voulait dire. Elle avait dû redéfinir ce que de nombreux mots voulaient dire pour elle. Et elle n'avait pas fini de tout redéfinir elle avait l'impression que ça ne serait jamais fini, mais elle ne s'en faisait pas pour ça. Redéfinir était un processus qu'elle ne prendrait pas à la légère. Elle ne se presserait pas, serait méticuleuse, et ne laisserait personne d'autre le faire à sa place.
Il y avait toujours des problèmes qu'elle devait affronter, des choses à propos desquelles elle se devait d'être honnête avec elle-même, et des tâches qu'il lui restait à accomplir. Hermione avait besoin de soin et de plus de temps pour comprendre toutes les choses qu'elle n'avait jamais vraiment prises en considération par le passé.
Mais il y avait beaucoup de choses la concernant qui n'étaient pas 'normales', en soi.
Hermione se sentait toujours mal à l'aise dans son propre corps, et elle trouvait toujours à redire dessus comme s'il ne lui allait pas. Elle avait toujours des rêves et des cauchemars et des entre-deux. Elle était toujours perturbée, avait toujours l'impression de fuir, mais pas tout le temps. Il y avait eu tant de fois dans les dernières semaines où elle aurait pu fuir mais qu'elle ne l'avait pas fait. Et, oui, quand le moment serait venu, elle se battrait, aussi.
Redécouvrir son courage la faisait se sentir plus forte. Redécouvrir ses aptitudes la faisait se sentir plus intelligente. A cause de tout ce qu'elle avait subi – et subissait toujours – elle se sentait comme une rose ayant poussé dans du béton – elle avait grandi au travers de la souffrance.
La souffrance. Il y en avait tellement eu. Il y en avait toujours. Tellement qu'elle avait l'impression de s'être noyée dedans tellement que le simple fait d'y penser lui donnait envie de pleurer. Avant de se laisser emporter par l'émotion, Hermione se rappela qu'il n'y avait pas que les souffrances physiques et émotionnelles qui s'étaient gravées au plus profond de son âme il y avait aussi eu des poussées de croissance. Elles avaient toujours été là, tapies dans un coin – ou peut-être était-ce un mélange de tout ça. Quoi qu'il en soit, au final, les poussées de croissance avaient joué un rôle énorme dans son parcours.
Elle n'avait pas encore atteint l'arrivée, mais n'était clairement plus au départ quelque part entre deux.
« Hermione ? »
Elle concentra son attention sur la cheminée d'où provenait la voix. Elle vérifia sur sa montre. Ses yeux s'écarquillèrent. Il était déjà midi. Elle avait passé les quarante dernières minutes à rêver. Apollon ronronnait paresseusement sous la couverture, et ne bougea pas quand elle s'avança vers la cheminée.
« Oui ?
- C'est Lavande, je peux entrer ?
- Bien sûr. » Elle regarda son salon vide et soupira avant de s'agenouiller devant Apollon, qui ronronna et mordilla sa main gentiment avant de la laisser le prendre dans ses bras. Hermione jeta encore une fois un coup d'œil autour d'elle avant de s'éloigner de l'âtre.
Quand Lavande s'avança dans son salon, elle salua Hermione d'un grand sourire et caressa affectueusement Apollon. Hermione offrit un sourire en retour et son chaton ronronna.
Lavande se mit immédiatement à parler : « Bon, comme Chase est chez ma mère pour la journée, j'ai décidé de m'occuper de certaines choses chez moi. Je venais juste de finir de ré-agencer la cuisine quand je me suis souvenue que tu avais dit que tu étais en congé aujourd'hui. Je me suis dit que je pourrais passer voir comment tu allais. Je ne t'ai pas vue depuis qu'on a dîné ensemble. »
Ah, la soirée où le dîner prévu pour quatre s'était transformé en dîner pour sept et un bébé. Les Finnigan avaient rejoint leur petit groupe pour dîner. Hermione se souvenait avoir été nerveuse de voir comment les ex-Gryffondor recevraient ses amis ex-Serpentard, mais Ron était arrivé, et ça avait désamorcé grandement la tension dans la pièce. Malgré tout, la première partie du repas avait été très silencieuse jusqu'à ce que Pansy ne demande où Lavande avait acheté ses chaussures.
Ça avait brisé la glace d'une manière singulière et sans pareil.
« Je vais bien. » Hermione baissa les yeux sur ses pieds, en chaussettes, et se dirigea vers le canapé.
« On devrait se refaire une soirée, un de ces quatre. C'était chouette. » Lavande la rejoignit sur le canapé avant d'ajouter : « Enfin, c'était très gênant au début, mais je mets ça sur le compte de notre passé², tu sais. » Elle tendit le bras et caressa une nouvelle fois Apollon, puis poursuivit : « Pansy Parkinson n'était pas du tout comme je m'y attendais. Pas du tout. »
Ce qui avait suivi le brisement de glace s'était illustré sous la forme d'une conversation de vingt minutes à propos de divers sujets, allant de la dernière mode de chaussures à la joliesse de Chase dans son t-shirt de Quidditch. Ce brisement de glace avait contaminé toute la pièce. Blaise et Seamus avaient échangé des haussements de sourcils en écoutant leurs femmes. Ils avaient mis en commun un vécu conjugal qui les avait réunis – 'Les femmes, on ne peut pas vivre avec, on ne peut pas vivre sans' – en dépit du fait qu'ils ne se seraient jamais adressé la parole s'il n'y avait pas eu cette soirée. Chase avait englouti les petits fours qu'Hermione lui avait préparés. Drago était resté complètement silencieux sur sa chaise à un bout de la table, et Ron avait été plutôt bavard, à gauche d'elle.
« Même Malefoy était différent de ce que je m'étais imaginé. »
Hermione se tendit légèrement à la simple mention de son nom. « Oh ?
- Oui. Il a l'air… plus âgé.
- Nous sommes tous plus âgés. »
Lavande secoua la tête. « Non, pas comme ça, expliqua-t-elle. Malefoy a l'air d'avoir vécu beaucoup plus de choses que n'importe qui d'autre de notre génération. Il a l'air sombre, un peu agité, apprêté, toujours un peu arrogant, mais globalement – eh bien il a mûri énormément depuis la guerre. »
Caressant la tête d'Apollon, Hermione répondit : « Je ne pense pas qu'il ait eu le choix. Je ne pense pas qu'aucun de nous n'ait eu le choix. » Elle voulait vraiment changer de sujet. Tout sauf Malefoy.
Lavande se tut un instant. « Eh bien, c'était intéressant de voir un autre aspect de sa personnalité après le dîner. Je suis habituée à son côté gros abruti, mais il m'a presque semblé humain. »
Hermione ne savait plus où se mettre.
Une fois le dîner terminé, ils s'étaient réunis dans son salon pour discuter. C'était presque devenu une seconde nature pour Hermione de s'asseoir à côté de Drago sur la causeuse, elle l'avait donc fait, plutôt que d'aller sur une chaise à côté de Ron. Elle n'était pas sûre de savoir pourquoi merde, elle ne s'en était même pas rendu compte pendant cinq minutes entières.
A la base, Chase jouait avec Apollon par terre, mais le bambin s'était mis à le caresser un peu trop brusquement. Apollon était parti se cacher sous le canapé pour tout le reste de la soirée, et Chase avait fini couché à l'étage, dans une des chambres. A partir de là, la tension s'était encore relâchée et tout le monde, y compris le taciturne Malefoy, avait discuté poliment.
Ron et Drago n'échangeaient pas un mot, mais ils parlaient tous deux à toutes les autres personnes à différents moments, bien entendu. Pansy et Lavande avaient sympathisé grâce à leur matérialisme décomplexé. Et Hermione avait tranquillement observé les autres, participant quand on lui posait une question.
Lavande croisa les jambes. « C'était sympa de pouvoir s'asseoir et se parler comme des adultes, sans laisser les souvenirs d'enfance planer au-dessus de nous.
- Ils planent toujours au-dessus de nous, Lavande, fit remarquer Hermione. Mais je suis contente de voir que nous sommes tous assez matures pour ne rien remettre sur le tapis.
- Malefoy et Ron se sont jeté des regards noirs toute la soirée.
- Les regards noirs, je peux tolérer. Je pensais vraiment qu'ils allaient sortir leur baguette avant la fin de la soirée. Merci Merlin pour cette petite faveur !
- Et n'oublie pas de le remercier pour le vin, aussi ! »
Oui, merci Merlin pour le vin. Il avait clairement fait son boulot en éliminant une grande partie de la tension.
Rapidement, l'ambiance avait été assez commode pour qu'Hermione relâche la tension qui habitait ses épaules. Elle n'avait pas pris une goutte de vin, mais le fait que tous les autres – sauf Drago – se soient fait plaisir l'avait fait se sentir un peu mieux. Ne pas devoir s'inquiéter d'avoir à gérer Ron et Drago s'entre-tuant l'avait tellement mise à l'aise qu'elle avait failli prendre la main de Drago, mais elle s'était ravisée. Il lui avait lancé un regard curieux. Ne pas devoir s'inquiéter de quelque sarcasme que ce soit avait tellement apaisé Hermione qu'elle avait remarqué que Drago avait inconsciemment frôlé son bras et sa jambe contre les siens plus d'une fois.
Quand Pansy lui avait demandé pourquoi ses joues étaient rouges, Hermione avait sa réponse prête. La fatigue. Et c'était le moment qu'ils avaient choisi pour aller se coucher. Dans l'ensemble, ça n'avait pas été une si mauvaise soirée.
Alors, est-ce que les choses entre elle et Drago étaient… mal ?
Soupirant, Hermione balaya cette pensée de son esprit.
« On devrait vraiment retenter l'expérience. »
Hermione sourit poliment en réponse, mais intérieurement, elle rejeta la proposition. Elle ré-essaierait l'expérience dans au moins six mois à compter de ce jour. Essayer. C'était un des mots qui étaient ré-apparus dans son vocabulaire récemment. Pourtant, elle ne comptait pas s'enflammer. Hermione avait toujours ses appréhensions, ses insécurités, et son malaise. Il y avait toujours des choses qu'elle ne voulait pas essayer, comme voler sur un balai ou goûter à la cuisine de Pansy.
Mais, pour l'instant, elle pouvait dire que ses tentatives avec Lavande avaient été un succès.
Ça avait vraiment été gênant au début, mais elles essayaient. Lavande était sincèrement plus gentille avec elle qu'elle ne l'avait été à l'école et c'était agréable de voir un nouveau visage.
« Bon, et j'étais venue te dire autre chose… oh ! » Lavande claqua des doigts. « C'est à propos de Parvati, mais attends – » Elle se mit à fouiller dans son sac à main. « J'ai quelque chose pour toi. »
Hermione ne fut pas surprise. Si Lavande avait quelque scrupule que ce soit à espionner sa supposée meilleure amie, elle s'en cachait bien. Elle était cruciale pour l'enquête, leur fournissait des bribes d'informations qui les faisaient s'approcher de plus en plus du fin mot de l'histoire. Hermione ne savait vraiment pas ce qu'ils auraient fait sans Lavande. La route aurait certainement été plus tumultueuse.
La première semaine, elle avait recopié à la main, sur un bout de parchemin arraché, l'emploi du temps du mois de Parvati. Il avait fallu une heure pour qu'Hermione et Pansy comprennent que – à cause du temps qui lui était compté – Lavande avait écrit dans un format d'agenda, donc vertical, sans faire les cases, plutôt que dans un format de liste, donc horizontal.
C'était contraire à leur plan initial, mais deux jours plus tard, Pansy avait croisé 'par hasard' Parvati au salon de la beauté sorcière. Elle avait discuté avec elle, et noté mentalement combien de fois Parvati avait posé une question sur Hermione. Pansy avait prudemment répondu aux vingt-trois questions tout en faisant en sorte d'avoir l'air désinvolte et détendue. Pour chaque question à laquelle elle avait répondu concernant Hermione, Parvati avait répondu à deux questions à propos d'elle-même.
Quand Pansy lui avait demandé quand est-ce qu'elle avait vu Ginny Weasley pour la dernière fois, elle s'était tendue avant de répondre 'Pas plus tard qu'hier, en fait'.
La deuxième semaine, Lavande les avait informés que depuis que Pansy avait parlé à Rita, la charge de travail de Parvati avait doublé et ralentissait sa progression. Parfait. Elle avait laissé traîner ses oreilles pour surprendre la conversation d'un appel entre Parvati et sa complice et en avait extorqué qu'elles avaient assez de munitions pour attaquer sans devoir mentionner Drago, mais Lavande leur rapporta que l'autre personne était vraiment insistante.
Ce qui avait confirmé ce qu'elle pensait. C'était définitivement quelque chose de personnel. Et elle se fichait de ce qu'avait pu dire Ron, ça ne pouvait êtrequeGinny.
« Aha ! Trouvé ! » déclara Lavande, triomphante. Hermione baissa les yeux et fronça les sourcils quand elle reconnut ce qu'elle tenait en main. Un magnétophone Moldu. « Le cousin de Seamus a oublié ça chez nous il y a quelques mois. Il est étudiant à l'Université, et il appelle ça son 'porte-bonheur'. Il m'a dit qu'il en avait trois, donc j'ai décidé de garder celui-là. Je ne sais pas ce que c'est ni comment ça marche, mais je le garde dans mon sac à main quand je fouine. Si la chance a été avec moi, alors elle pourra aussi être avec toi quand le temps sera venu pour toi de te confronter à Parvati.
- Merci, dit Hermione en acceptant gracieusement le cadeau. C'est une version Moldue d'Oreilles à Rallonges, à part que ça enregistre ce que les gens disent. »
Lavande fit des yeux ronds. « Oh ! »
Hermione ne dit rien d'autre, mais le rembobina un peu et appuya sur play. Sans surprise, il fonctionnait. Pas étonnant qu'il ait décrété que c'était son porte-bonheur.
Peut-être que ça pourrait être le sien, aussi.
Partie Deux : Décisions
Qu'est-ce que disait le proverbe ? La troisième fois sera la bonne ?
Oui, c'était cela.
Drago espérait que cette maxime avait de la valeur, parce qu'il n'était pas sûr de ce qu'il ferait si la rencontre avec Potter capotait encore. Le jour où la réunion avait initialement été programmée, il y avait eu une grosse rafle dans un manoir gallois. Drago ne connaissait pas la famille, mais les Aurors avaient récupéré un nombre obscène d'artefacts de Magie Noire. Il avait entendu dire que Granger avait été appelée sur place, mais elle était venue avec énormément d'assistance. Hermione était restée dans le champ de vision de Blaise toute la journée. A la deuxième tentative de rencontre, la Belette avait eu des prolongations à son entraînement et lui avait écrit quinze minutes avant le début pour l'informer du changement de projet. Drago l'avait maudit avant de rapidement changer la date, une fois encore, utilisant l'excuse d'un nombre important de dossiers à traiter.
Potter avait accepté de changer la date une nouvelle fois, à contrecœur. Pour aujourd'hui.
Si ce branleur aux taches de rousseur faisait foirer quoi que ce soit aujourd'hui, eh bien – il n'y aurait pas de force assez puissante sur Terre pour empêcher Drago de l'étrangler. L'anticipation pesait sur lui comme un nuage de pluie, le suivant n'importe où. Il ne pouvait même pas dormir sans y penser. Comme s'il n'avait pas assez de choses en tête à propos desquelles s'inquiéter et stresser comme s'il n'avait pas assez de choses pour le garder éveillé la nuit.
Qu'est-ce qu'il s'était dit, bordel ?
C'était une idée épouvantable qui le plaçait dans une pièce avec les deux personnes qu'il aimait le moins. Et il ne pouvait même pas user de la magie sur eux.
Il connaissait la réponse, et la réponse était la raison pour laquelle il avait un putain de mal de crâne depuis ce dîner mondain. C'était aussi la raison pour laquelle il évitait une certaine sorcière. Drago jura entre ses dents et se concentra pour faire semblant de travailler jusqu'à ce que Potter ne daigne arriver. Il était connu dans tout le Ministère pour son retard. Certaines choses ne changeaient jamais.
On frappa à la porte.
Drago jeta un œil à sa montre. « Entrez. »
Il vit les cheveux noirs de Potter avant de voir son visage. Drago fronça les sourcils.
Peut-être que certaines choses changeaient, finalement.
Le bas de la robe d'Auror de Potter, et ses bottes, étaient couverts de tellement de boue que Drago arracha sa baguette du tiroir du haut et murmura immédiatement quelques sorts de nettoyage avant qu'il ne puisse ramener de saleté dans son bureau. Il ne fut pas surpris que Potter ne le remercie pas, mais il fut surpris de voir son air presque inquiet.
Potter ne voulait pas être là.
Là, ça pouvait – oh. Leur dernier échange dans son bureau. La vie de Potter n'avait plus été la même depuis, et il ne tenait pas à ce que cela se répète.
« Malefoy, salua-t-il d'un ton neutre.
- Potter. » Drago replaça sa baguette dans le tiroir qu'il ferma. Nul besoin d'être tenté. « Installe-toi. » Il ne le fit pas. Non, Potter resta planté devant son bureau, les bras croisés sur son torse. Drago leva les yeux au ciel et marmonna : « Ou pas.
- De quoi est-ce qu'il faut qu'on parle concernant le procès ? »
Il ramassa sa plume et ouvrit le dossier sur son bureau. Drago ne le regardait même pas quand il demanda : « Tu es pressé au point de ne pas pouvoir t'asseoir ?
- Ron m'attend, » répondit-il avec raideur.
Drago se tut un long moment avant de mettre son plan en action : « Eh bien, il peut attendre ici. »
Les sourcils de Potter se haussèrent d'un air dubitatif : « Tu déconnes.
- J'ai l'air de déconner ? Demanda abruptement Drago. Je t'assure que voir cet idiot couvert de taches de rousseurs n'embellira clairement pas ma journée, mais je sais que ma secrétaire manque un peu de tact et ne sait pas se tenir autour de la plupart des sorciers célèbres. » Il roula des yeux quand Potter lui lança un regard noir. « Et puis, je préférerais que tu fasses ton boulot plutôt que de t'inquiéter pour Weasley. Donc, si tu veux bien, » il fit un geste en direction de la porte, « invite-le à entrer. »
Sa journée perdit toute saveur quand Weasley passa le pas de la porte. En un mois, il avait vu assez de cet idiot pour une vie entière. Ils se regardèrent silencieusement. Weasley lui offrit un signe de tête que Potter ne put voir, mais c'était loin d'être un signe d'amitié. C'était plutôt un signe qui voulait dire, 'Finissons-en avec ça'.
Drago ne pouvait être plus d'accord.
Weasley prit place à gauche de Potter. Cependant, plutôt que de s'adosser et se détendre pendant que Drago se mettait au travail, ce bougre d'idiot s'assit rigidement, dans une posture hostile. Drago pâlit quand Weasley ouvrit la bouche. Était-il sérieusement assez stupide pour se lancer directement dans ce genre de discussion sans préambule ? « Eh bien - »
Apparemment, oui.
« A moins que tu n'aies envie de t'étouffer avec ta stupidité, je te conseille de garder le silence pendant toute la durée de cette réunion, fit Drago d'un ton sec avant d'ajouter après coup : Mieux encore, ne dis rien, du tout. » Il jeta à Weasley un regard appuyé. Il connaissait Potter et il savait qu'il allait devoir attendre que ce soit lui qui amène le sujet sur le tapis, ça ne pourrait se faire autrement.
La première réaction de la Belette avait été de se renfrogner, mais la seconde fut d'argumenter : « Mais -
- Silence, siffla Drago.
- Je -, tenta encore Weasley.
- Tu es sourd ou juste bête ? Je t'ai dit de te taire.
- Ne lui parle pas comme ça ! » aboya Potter.
Eh bien, ça se gâtait plutôt vite.
C'était bien sa veine que Weasley soit le mec le plus franc et le plus prévisible de toutes les personnes qu'il avait jamais rencontrées. Non qu'il fût surpris, mais sérieusement, Drago savait qu'il possédait plus d'intelligence que ça. Il grogna intérieurement. Parfois, les apparences sont trompeuses.
Visiblement, sa maturité était une condition dépendant de la présence d'Hermione.
« C'était ton idée de le faire entrer.
- Tu ne dictes pas les règles dans cette pièce, Potter. Je les dicte. Et si tu ne peux pas accepter ça, tu peux dégager, lui dit-il sombrement.
- Très bien, c'est ce que je vais faire. »
Potter s'était à moitié retourné quand Drago le titilla : « Bonne idée. Bon vent, » avant d'ajouter : « Oh, et n'oublie pas d'informer ton supérieur que tu ne sais pas coopérer avec les autres. Dis-lui que ça a commencé à affecter négativement ton travail et la façon dont le Ministère intente les actions en justice. Je suis sûr que ça fera sa journée. Et la tienne. »
Moins d'une minute dans la pièce et la situation était passée de gérable à frôlant le bord du précipice. Weasley s'avérait être un handicap plus qu'un tampon. Drago était à deux doigts de faire avorter la mission, et leur dire à eux deux de dégager de son bureau. Mais il prit une grande inspiration et se souvint de la raison pour laquelle il était là.
Potter se retourna, le regard noir, furieux.
« Je laisserai l'information m'échapper… par accident, bien sûr. » Drago s'appuya sur son fauteuil et joua avec sa plume. « Tu croyais que ton travail administratif après l'incident au Manoir Marquette était de la torture –
- Très bien, abdiqua Potter. Mais ne traite pas Ron comme s'il était un abruti. »
Ron grogna.
Potter avait le regard tueur.
Et Drago leva finalement les yeux au ciel. Eh bien, ils étaient clairement de nouveau potes. Il fronça les sourcils. « D'accord, mais je refuse de te laisser me hurler dessus dans mon bureau. Pas cette fois, Potter. »
Si n'importe qui en-dehors de Granger s'était fourré dans ce genre de situation, il n'en aurait rien eu à faire. Faire équipe avec quelqu'un qu'il méprisait ? Bordel, il fallait être sacrément taré. Il aurait aimé justifier ses actions en disant qu'elle aurait fait la même chose pour lui, mais hélas, ce n'était pas si simple. Si ces deux dernières semaines prouvaient bien quelque chose, c'était que les choses étaient plus compliquées que ce qu'il avait d'abord cru.
Enfin, de son côté à lui.
« Maintenant que nous sommes passés au-dessus de ça, il y a quelques questions que je dois –
- Est-ce qu'il s'agit des questions que tu vas me poser au procès ?
- Tu connais la chanson, Potter.
- Alors, murmura laconiquement le sorcier. Pourrais-tu me re-familiariser avec l'affaire ? Ça fait un moment. »
Drago ne répondit rien, il tendit simplement le dossier à Potter, qui le relut brièvement avant de lui rendre.
« Tout est bon pour toi ?
- Le mec qui a failli faire exploser sa maison en mélangeant des potions illégales dans sa cave oui, je me souviens de lui.
- Bien, alors, on s'y met. »
Tandis qu'il questionnait Potter, une toute petite partie de l'esprit de Drago vagabonda.
Quelques semaines auparavant, Hermione avait ouvert la porte entre eux et lui avait demandé pourquoi il était resté. Ce vendredi soir, quand ils étaient restés assis dans le salon de Granger après le dîner, il avait été aiguillé par une sorte de révélation mentale, concernant la réponse sur laquelle il s'était étranglé.
Il était un putain d'idiot.
Il aurait dû partir quand il en avait eu la chance. S'il n'avait pas été là, elle ne lui aurait jamais posé la question. S'il n'avait pas réfléchi à la réponse si longtemps, il s'en serait bien sorti. Drago allait tout sauf bien.
« Raconte-moi tout ce que tu as fait quand tu es arrivé sur place, l'intima Drago.
- On nous a donné l'alerte d'un feu magique vers onze heures du matin et je suis arrivé sur place peu après l'appel. Monsieur Schusses était hors de sa maison, et on l'a arrêté dès qu'il est devenu évident qu'il était à l'origine du feu. Le protocole classique a été suivi… tu as besoin que je passe en revue ce protocole avec toi ? » demanda Potter.
Drago secoua la tête. « Non. Je connais tout du protocole des Aurors dans cette situation particulière. » Il feuilleta les parchemins du fichier et en isola un. « J'ai juste besoin que tu inspectes soigneusement ta déclaration sur l'honneur. » Il tendit le parchemin à Potter et l'observa le parcourir rapidement. Weasley le regardait d'un air de dire 'Qu'est-ce que tu attends ?'
Putain de bordel, il n'avait vraiment pas un iota de patience ? Honnêtement ?
Honnêteté.
Ce mot était dans sa tête depuis des jours. Tout le monde voulait qu'il soit honnête, même sa mère. Il avait accepté de dîner avec elle la veille au soir parce qu'il s'était dit qu'elle voulait le voir avant de partir pour les îles Fidji en vacances. Il s'était avéré qu'elle avait organisé ce repas pour pouvoir lui donner sa bénédiction au sujet de sa relation avec Hermione.
« Je sais qu'on n'en a pas encore parlé, mais si tu te retiens à cause de son sang… tu n'as pas à le faire.
- Son sang est le dernier de mes soucis. Quand est-ce que tu t'es mis en tête que je pensais -
- Tu t'en fiches ? Honnêtement ? »
Il se renfrogna en y repensant. Honnêteté. Pansy lui avait dit d'être honnête avec lui-même. Eh bien, pendant le dîner avec les Finnigan, il l'avait fait. Et ce qui en avait découlé avait été le pire dîner de toute sa vie. Ses pensées l'avaient gardé plus silencieux qu'à son habitude, mais personne n'avait remarqué. Du moins il l'espérait. Bordel, parler normalement avait été compliqué avec elle qui le frôlait de son bras et sa jambe.
Qu'est-ce qui lui prenait ?
L'honnêteté n'était définitivement pas son amie : en l'espace de quelques minutes, Drago avait accepté le fait qu'il aurait enclenché cette poignée de porte. Il serait allé vers elle parce qu'il avait de l'affection pour elle, et il serait resté parce qu'avoir de l'affection pour elle – chose qu'il avait fini par admettre – avait évolué vers quelque chose d'autre.
Quelque chose de plus.
Quelque chose de plus profond.
Des sentiments.
Mais cette confession interne ne signifiait rien. Ses sentiments disparaîtraient. Ils l'avaient toujours fait, Drago avait donc décidé de les garder pour lui-même. Il avait juste besoin de temps, c'était tout. De temps pour s'en débarrasser. De temps pour reprendre le contrôle qu'il avait perdu. De temps pour trouver son propre chemin. Et il ne pouvait pas faire ça quand elle était dans les parages. Donc, il l'évitait. Éhontément. Il avait reçu des notes et des messages d'elle, mais n'avait pas répondu. Il lui avait bloqué sa Cheminée. Il faisait tout ce qu'il pouvait pour se donner la distance dont il avait besoin jusqu'à ce que son problème disparaisse.
Cela faisait plus de deux semaines, pour l'instant, et ça n'avait pas porté ses fruits.
Une petite voix tenace, à l'arrière de son esprit, lui disait qu'il était stupide.
Drago se sentait clairement stupide.
« Oui, tout est correct. » Drago sortit de ses pensées quand Potter lui tendit le parchemin. « On est bons, là ? »
La Belette semblait incroyablement nerveux tellement nerveux que tout ce que le Balafré avait à faire, c'était tourner la tête pour voir que quelque chose clochait clairement. Drago n'avait vraiment pas besoin de ça. « Je crois que oui. »
Potter se leva de son siège, mais Weasley resta assis, fixant Drago les yeux écarquillés. Celui-ci leva la main calmement. Trois. Ça avait fonctionné la dernière fois. Deux. La Belette était à moitié relevé de sa chaise quand Potter se retourna finalement. Un. On pouvait voir qu'il aurait préféré mâcher du verre pilé plutôt que de parler à Drago autrement que professionnellement, mais il demanda : « Je sais que ça ne me regarde pas, mais comment va Hermione ? »
Pile au bon moment.
« Tu ne sais pas ? »
Potter fronça les sourcils. « Si je savais, je ne te demanderais pas, rétorqua-t-il agressivement, avant de soupirer : Écoute, je ne peux pas aller chez elle.
- Pourquoi pas ? Je sais qu'elle a changé ses sorts barrières pour t'en autoriser l'accès. » Drago pencha la tête sur le côté, curieux.
« C'est compliqué, mais je veux juste savoir si elle va bien. »
Il était intrigué. Potter ne savait pas que Weasley l'avait vue, et Weasley arborait un air affreusement coupable. Peut-être que les choses n'allaient pas si bien entre eux. Voilà qui était intéressant. « Elle va bien, mais je suis sûr que Weasley aurait pu te le dire. »
Potter se tourna vers son meilleur ami le regard blessé. « Tu l'as vue ? »
Voir la Belette ne plus savoir où se mettre était une petite délectation dans la journée de Drago. « Eh bien, une ou deux fois, mais –
- Et tu ne me l'as pas dit ?
- Tu n'as pas demandé, Harry.
- Je suis – il faut qu'on parle. On a tous les deux dit des choses qu'on ne voulait pas dire, enfin, moi oui. Mais on est meilleurs potes, tu aurais au moins pu me donner spontanément ce genre d'information – »
Cela mit la Belette sur la défensive : « Notre amitié n'est plus la même qu'avant, fit-il en se levant. Qu'est-ce que tu croyais que j'allais faire, juste tout oublier ? »
Potter se passa une main dans les cheveux, frustré : « Bien sûr que non, mais je pensais qu'on essayait –
- On essaye, mais ça ne veut pas dire que je te fais complètement confiance. Tu sais, des fois, je ne pense pas que tu comprennes totalement ce que tu m'as fait. Tu m'as menti, pendant des années. Tu savais ce qui était arrivé entre toi et Hermione, et tu ne m'as rien dit. Tu m'as laissé croire quelque chose que tu savais être faux. Tu – » Weasley s'interrompit subitement et regarda Drago d'un air embarrassé.
« Ne te retiens pas pour moi, fit-il de sa voix traînante.
- Tu sais, tu es vraiment un crétin, Malefoy. » Weasley le fusilla du regard. « Je ne sais pas comment elle peut te supporter. »
Il haussa les épaules, parce qu'il n'était pas sûr non plus de savoir.
« Elle doit être sacrément dingue pour te considérer toi comme un ami.
- Ce qu'elle voit en moi, ce ne sont pas tes affaires, Weasley, lâcha-t-il avant de tourner les yeux vers le second sorcier. Je transmettrai tes salutations à Granger. Maintenant, dehors. Tous les deux.
- Mais – » commença Weasley, mais il ne finit jamais car Potter le coupa : « Dis-lui que je suis désolé. Je pensais juste – non, je ne pensais pas, je – » Potter semblait frustré, et Drago compatit, une seconde seulement. Il connaissait la sensation d'être frustré. Surtout la concernant. Il ne connaissait ce sentiment que trop bien. Drago stoppa cette pensée et dévisagea Potter, qui dévoilait un peu plus d'humanité que ce dont Drago était prêt à être témoin. « J'ai tout foutu en l'air, hein ? »
Après une pause malaisante, Drago déclara d'une voix calme qui l'étonna lui-même : « Je pense que tu connais la réponse à cette question, Potter.
- Je suppose que oui, mais est-ce que tu penses que tu peux la convaincre de m'écrire ?
- Non, je ne peux pas, » répondit-il honnêtement. Il ne pouvait pas forcer Granger à faire quoi que ce soit, et il ne comptait même pas essayer.
« Pourquoi pas ? »
La vie était pleine de rejets et à peine – il s'interrompit mentalement. Il ne pouvait pas dire ça, il préférait ne pas prendre le risque, pour éviter de voir jouée la carte du rejet. Drago n'avait franchement pas pensé à cela, et cela le fit se poser de nombreuses questions.
« Je t'ai posé une question, Malefoy. Pourquoi pas ? » répéta sommairement Potter.
Weasley avait le visage rouge, comme d'habitude.
Drago le dévisagea longtemps, et durement. « Eh bien, pour commencer, toi et moi ne sommes pas amis. Granger et moi le sommes. » Peu importait qu'il soit en train de l'éviter activement, et puis, ni l'un ni l'autre n'avait besoin de savoir. Il secoua la tête tristement. « Tu sais, ce n'est même pas mon rôle, pourquoi est-ce que je t'aiderais alors que tu dois t'aider toi-même. » Quand Potter ouvrit la bouche, Drago claqua des doigts. « Tu sais ce qu'il s'est passé cette nuit-là, Potter. Tu sais que je ne peux pas la forcer à faire quoi que ce soit, et que je ne le ferai pas.
- Et j'ai dit que j'étais désolé pour ça. Pour ce qui est arrivé avec –
- Va le dire à Granger toi-même, répondit sèchement Drago.
- Je te dis que –
- Rien qu'il ne m'importe d'entendre, encore une fois, le coupa-t-il impatiemment.
- Cette nuit-là, fit Potter furieusement. Je ne savais pas que Ginny me suivrait. Je –
- Tu as mis une énorme pression sur elle alors qu'elle essayait de se confier à toi à propos de votre fils. Et tu n'as pas arrêté même après qu'elle t'ait dit de dire autre chose. » La rougeur et la fureur de Potter semblaient saigner hors de lui. Ce qui était intéressant, parce la propre colère de Drago montait, et ses propres joues étaient chaudes. « Oui, elle m'a tout raconté. » Weasley avait l'air complètement perdu, tandis que Potter semblait nauséeux.
« De quoi tu parles, Malefoy ? » demanda lentement Weasley.
Une fois encore, il prit la bonne décision d'ignorer sa question. « Tu as ruiné l'anniversaire de son fils, à ses yeux. »
Un autre silence tendu tomba entre eux, mais il ne dura pas. Drago ne le laissa pas durer.
« Je ne pense même pas pouvoir faire en sorte qu'elle réponde à ta lettre, même si j'essayais. Tu vas devoir lui parler, face à face. Elle ne t'enverra pas de lettre, parce qu'elle ne fait pas confiance à ta colocataire.
- Ma coloca – je vis avec Ginny !
- Exactement.
- Qu'est-ce que ça veut dire ? »
Drago en avait assez. Et d'eux, aussi. « Tu as vaincu le Seigneur des Ténèbres, à toi de deviner.
- Mais je ne comprends pas. Je vis avec Ginny –
- Exactement, répéta-t-il d'un air appuyé.
- C'est juste dingue. Ginny ne ferait jamais rien pour –
- Il y a un nombre infini de raisons pour lesquelles on ne devrait jamais dire jamais, Potter.
- Je crois que je la connais suffisamment bien pour dire qu'elle ne – »
Weasley bondit de sa chaise. « Stop ! J'en ai assez de tourner autour du pot ! » Drago et Potter le regardèrent, l'un avec les yeux plissés, l'autre avec des yeux curieux. « Je balance tout. Parvati est allée en Italie et s'est procurée le certificat de naissance de ton fils. Elle prévoit d'écrire un article dessus. »
Le silence tomba dans la pièce.
Partie Trois : Nouveau soleil
Les murs se moquaient encore d'elle.
Elle voulait de la couleur. Beaucoup de couleur. Hermione voulait de l'art. De la vie. Du sens. Quelque chose. N'importe quoi. Quelque chose qui ferait taire les murs moqueurs. Elle était plus que des murs vides et du mobilier sans intérêt. Elle était plus que du vide et de la tristesse. Elle voulait leur prouver qu'elle n'était pas seule.
Et plus important encore, elle voulait se le prouver à elle-même.
Sans même s'embêter à réfléchir aux conséquences, elle grimpa dans son grenier, attrapa le premier tableau qu'elle y trouva, et l'accrocha au-dessus de l'âtre de sa cheminée. Elle se tourna vers Apollon, assis sur le coussin du milieu, se léchant la patte. « Qu'est-ce que tu en penses ? »
Apollon lui jeta l'un de ses regards désintéressés – et brevetés –, et miaula.
Hermione fit un pas en arrière, tourna la tête sur le côté, et se rendit compte qu'il était de travers. Mais quand elle s'avança pour l'arranger, elle observa la peinture plus attentivement. Hermione n'arrivait pas à se souvenir s'il s'agissait de l'une des peintures appartenant à ses parents, qu'elle aurait récupérée après leur mort, ou une qu'elle avait achetée elle-même quand son budget s'était amélioré. Peu importait, l'image la laissait sans voix et comblait son cœur. C'était une peinture à l'huile magnifique, un lever de soleil au-dessus d'un horizon d'eau.
Il était impossible qu'elle ait choisi cette peinture par accident. Si ses sentiments du moment avaient pu être peints, cela aurait donné cette image. Elle était ce nouveau soleil. Elle ne donnait pas encore son plein potentiel, elle ne fournissait pas autant de chaleur que ce dont elle était capable, mais elle allait y arriver.
Alors, Hermione sortit de chez elle en pyjama, les cheveux décoiffés. Elle prit sa voiture, qu'elle utilisait rarement, et roula jusqu'au magasin de peintures Moldu le plus proche. C'était un petit magasin familial, mais elle repartit avec un échantillon de toutes les couleurs disponibles et le nom du vendeur qui l'aiderait quand elle aurait fait son choix.
Ils avaient dû penser qu'elle était folle.
Elle en avait certainement l'air.
Hermione rentra chez elle, se tint devant un mur nu de son salon, et se mit à le couvrir des échantillons de Strawberry Rhubarb (NdT : un rose brique qui n'a pas de nom français), Cool Lava (rouge pétant), Orange Zest (orange foncé), Empire Yellow (jaune foncé), Green Acres (vert foncé), Blue Feather (bleu-gris), Grape Parfait (lavande foncé), et bien d'autres couleurs.
Ç'aurait été une surcharge de couleurs pour n'importe qui, mais pour Hermione, il s'agissait d'un nouveau départ.
Elle procéda ensuite par élimination.
Elle avait enlevé la Mint Majesty (menthe) du mur et comptait en faire de même pour la Sensible Hue (gris pastel) quand elle entendit la question circonspecte de Pansy : « Mais… qu'est-ce que tu fais ? »
Hermione jeta la Sensible Hue par terre avec les dix-neuf autres couleurs qu'elle avait déjà éliminées, se tourna, et haussa les épaules, penaude : « Je vais peindre mes murs. »
Les sourcils de Pansy se haussèrent très lentement. « Eh bien, c'est… impulsif.
- Je sais. » Elle fit la moue et enleva Pale Cherry (rose-gris pastel) du mur de couleurs.
Pansy s'assit sur le canapé et sourit quand Apollon s'installa confortablement sur ses genoux. « Je n'arrive franchement pas à me souvenir de la dernière fois que tu as fait quelque chose d'impulsif – » Un élément capta son regard : « C'est un tableau, là, sur ton mur ? Tu te sens bien ?
- Je me sens bien. » Serene Sky (bleu ciel) rejoignit rapidement les autres au sol.
« Hé, j'aimais bien celle-là !
- C'était trop simple. »
Pansy ne dit rien pendant un moment. « Tu es sérieuse, là, hein ?
- Complètement. »
Pansy prit Apollon dans ses bras, se mit debout, et ôta ses talons. « Alors, tu vas définitivement avoir besoin du génie des couleurs que je suis. Si tu veux, je peux prendre ma baguette –
- Pas de baguette. Les couleurs sont plus vives avec la peinture Moldue. » Hermione blêmit devant Velvet Evening (gris très foncé) et le laissa tomber par terre. Tout fut silencieux dans les minutes qui suivirent, tandis que Pansy retirait du mur Bright Citrus (jaune citron), Sable Brown (marron très foncé) et Maple Leaf (bleu gris très foncé), sans sourciller. Hermione l'observa, les yeux écarquillés : « En fait, j'aimais bien Bright Citrus.
- Ça aurait juré avec ton tapis, fit-elle remarquer.
- Je prévois d'acheter un nouveau tapis… et des nouveaux meubles. Des nouveaux tout. Je garde la table, par contre. »
Outre le fait qu'il y avait des coups de crayon dessus, elle était robuste.
Pansy élimina Ash Violet (mauve pastel) et Plum Blossom (mauve) avant de finalement demander : « Qu'est-ce qui a donné l'élan ?
- Mes murs sont blancs. »
Pansy ne comprit pas. « Tes murs ont toujours été blancs.
- Exactement. » Hermione retira Mystical Purple (gris-mauve). « Cette pièce en dit très peu à propos de qui je suis, et j'ai pensé que je pouvais tenter un changement. »
Sa meilleure amie la dévisagea un moment avant qu'un petit sourire ne fasse son apparition. « Donc, tu as décidé de peindre.
- Et d'accrocher un tableau au mur.
- Je vois.
- Des petits pas, je sais, mais –
- Non, les petits pas, c'est bien. Vraiment bien. Je suis fière de toi. Vraiment. » Et elle sourit.
Hermione lui offrit un petit sourire, et ôta Fresh Pink (rose pétant) du mur. « Alors, que me vaut cette visite ? »
Pansy enleva le reste des échantillons rose. « Rien de particulier. Je venais discuter.
- Discuter ? Demanda Hermione, suspicieuse. Tu n'es pas censée être au boulot ?
- Si, bien sûr, mais j'ai pris une longue pause déjeuner. » Elle détacha Rum Spice (marron clair), l'observa un instant, et le laissa tomber au sol. Il devait y avoir encore au moins cinquante couleurs toujours accrochées au mur.
Hermione croisa les bras, le visage interdit. « Pour venir ici et discuter ?
- Oui, répondit Pansy.
- Eh bien, de quoi voulais-tu parler ?
- Oh, comme d'hab', répondit-elle d'un ton désinvolte. Comment tu vas, comment se passe ta thérapie, si tu as parlé à Drago, et comment va le boulot de ton côté. Est-ce que – »
A présent, Hermione était encore plus suspicieuse. « Mais je t'ai vue hi-
- Fais-moi juste plaisir. »
Hermione enleva tous les échantillons de tons violets. « Je vais bien, la thérapie se passe bien, et le travail se passe bien.
- Et Drago ? » l'interrogea Pansy sur un ton qu'elle ne reconnut pas.
Ses épaules se raidirent légèrement : « Je ne l'ai pas vu depuis le dîner à sept. Il est resté après, m'a regardée nettoyer, et puis il est parti. Je ne l'ai pas revu depuis. Il a fait en sorte d'être indisponible, pour moi, du moins. » Hermione se sentait bizarre à propos de toute cette situation, et elle s'éclaircit la gorge pour tenter de la débarrasser de la boule qui l'occupait.
Elle ne savait pas ce qui lui prenait, ou ce qu'elle avait fait pour le contrarier – si du reste il était contrarié. Elle lui avait écrit une semaine et demi plus tôt, mais sa réponse avait été, disons, sèche. Il l'évitait, et ne s'en cachait pas. Il participait à tous les dîners auxquels elle ne pouvait pas aller, faisait dire à sa secrétaire qu'il était occupé quand il ne l'était de toute évidence pas, et l'avait bloquée de son réseau de Cheminée. Et ce qui avait débuté comme une sensation irritante dans sa gorge, était devenu une sensation de brûlure entre ses mains et un sentiment d'appréhension dans son cœur.
« Je suis sûre que c'est –
- Il m'ignore. » Sa voix était aussi froide que la glace. « C'est comme ça. »
Elle n'avait aucun contrôle sur lui. Il pouvait prendre des décisions, aussi, et il semblait qu'il en avait pris une. Et ça la mettait en colère, parce que c'était tellement arbitraire. Mais s'il ne voulait pas qu'elle soit son amie, alors – Hermione arracha Cheerful Hue (jaune ''gai'') du mur et le laissa tomber au sol.
Elle ne se sentait plus si gaie.
Pansy la regarda avec inquiétude. « Hermione –
- Je vais bien. Vraiment, dit-elle platement.
- Tu mens.
- Je pratique l'indifférence.
- Mais tu n'es pas indifférente. »
Elle leva les yeux vers Pansy : « Ce serait plus facile si je l'étais.
- Tu devrais lui parler. Je suis sûre qu'il y a une explication.
- J'ai essayé, dit Hermione en haussant les épaules. Il ne veut pas me voir. »
Une partie d'elle voulait lui réécrire, mais sa fierté ne le tolérerait pas. Elle n'allait pas lui courir après, elle n'allait pas supplier, et elle n'allait pas essayer – surtout qu'il n'avait pas l'air d'en avoir envie. S'il s'en fichait, alors elle ferait tout son putain de possible pour s'en ficher, aussi. Hermione ferait comme si elle n'était pas déçue et en colère contre lui. Elle ferait comme si elle ne se sentait pas rejetée et trahie. Hermione retira Mellow Yellow (jaune pastel), l'air clairement morose.
« Drago est une créature bornée. Et même si j'ai mes hypothèses quant au pourquoi il t'évite –
- Je sais ce que tu crois, et tu as tort, lui dit Hermione. Il n'a pas de sentiments pour moi, Pansy. Je sais que c'est ce que tu m'avais dit, mais c'est faux. » Elle ouvrit la bouche pour dire autre chose, mais se ravisa, secoua la tête et enleva Burnt Sienna (ocre).
« C'est le caractère de Drago de lancer une riposte défensive contre tout ce qu'il ne peut pas contrôler. » Apollon se mit à se tortiller dans ses bras et elle le relâcha pour focaliser toute son attention sur Hermione. « C'est dans son caractère de lancer une riposte pour se défendre contre toi. Il se lance dans une bataille perdue d'avance, et tu ne devrais pas abandonner au premier signe de défaite.
- On les appelles signes pour une bonne raison. »
Pansy retira Minty Mist (menthe très clair). « Oui, pour te prévenir pour te faire savoir qu'il se passe quelque chose qui n'est pas sous ton contrôle. Ça ne veut pas dire qu'il faut tourner les talons au premier signe de conflit. Si je t'avais laissé tomber après le premier signe de confit, je ne serais pas là aujourd'hui. On n'aurait pas surmonté le fait que tu m'aies menti à propos de Matthew, mais je me suis battue pour ta confiance. J'ai fait mon maximum pour garder ton amitié parce que je savais que ça en valait la peine. Et, nous voilà, affirma Pansy fermement. N'abandonne pas la bataille. »
Hermione dévisagea sa meilleure amie, l'air grave. « Les choses sont compliquées entre nous depuis que son père est mort peut-être depuis plus longtemps. Je ne sais pas si on va vers l'avant ou si on recule. Il –
- Lutte pour garder le contrôle sur lui-même et sur les sentiments qu'il éprouve. »
Elle avait d'énormes doutes concernant ce que disait Pansy. En-dehors des quelques petits craquages, il avait toujours gardé le contrôle de ses émotions. Ce qu'elle disait n'avait aucun sens. « Pansy –
- Il n'est pas la personne la plus facile, je sais. » Elle roula des yeux et retira Winter Blue (gris bleu). Et Hermione approuva mentalement. « Des fois, j'ai envie de le pousser du haut des escaliers et lui jeter des sorts jusqu'à ce qu'il ne puisse plus voir clair. Il est terrifié et il fait de la grosse merde quand il a peur. »
Eh bien, elle n'était pas nécessairement à l'abri d'un comportement stupide.
« Je – » Pansy hésita, changea sa phrase. « Je pourrais rester là et râler toute la journée sur cet idiot, mais ça n'aurait pas de sens si tu ne sais pas répondre à ma question.
- Qui est ? »
Pansy la regarda et c'était de loin bien plus intense que n'importe quel regard qu'elle avait jamais eu. « Qu'est-ce que tu veux, toi ? »
Et Hermione répondit du mieux qu'elle put sans s'étrangler : « Je ne sais pas. »
Partie Quatre : Sainte patronne des mensonges et de l'hypocrisie
Drago pensa d'abord quelque chose proche de : « Eh bien, c'était des plus inattendus ».
Pourtant, quand Potter ouvrit la bouche et dit : « Je ne te crois pas. »
Alors il dut se rappeler que c'était Weasley qui avait annoncé la nouvelle, pas lui. La réponse de Potter était pourtant plutôt du genre de celle qu'il aurait pu avoir en réaction à une annonce de Drago, pas de son supposé meilleur pote. C'était une preuve supplémentaire que les choses n'étaient pas autant réglées entre eux que ce qu'il avait cru. Weasley eut l'air aussi surpris que ce que ressentait Drago. « Tu quoi ? »
Potter ouvrit la bouche avant de claquer d'un ton sec : « Je n'y crois pas. » Il fit un pas en arrière, secouant la tête. « C'était planifié. Vous avez planifié ça, les accusa Potter. Je ne sais pas ce qui se trame qui vous a fait vous allier contre moi, mais –
- Oh, remets-toi, Potter. Il ne s'agit même pas de toi, le coupa brusquement Drago.
- Il s'agit d'Hermione, compléta Weasley. Et de ton fils.
- Et dans quel but es-tu ici, Malefoy ? Demanda Potter.
- Écoute – , amorça Drago, avant d'être interrompu par un Harry Potter emporté.
- Et ne me balance pas de conneries comme quoi tu serais là par bonté de –
- Va te faire foutre, Potter, se défendit Drago violemment.
- Tu – »
Weasley saisit le bras de son ami quand Potter se rapprocha de Drago. « Harry, arrête. »
Et quand Drago se pencha en avant dans son fauteuil, il retira un seizième des paroles mauvaises qu'il avait eues concernant Weasley dans l'heure qui venait de s'écouler. Il n'était pas complètement inutile. « Quand tu seras prêt à te sortir la tête du cul et à écouter, on pourra t'expliquer ce qu'il se passe. Comme je l'ai dit tout à l'heure, il ne s'agit pas de toi, et Weasley a raison. Il s'agit de Granger et Matthew, donc ravale ta fierté, ferme-la, pose ton cul, et écoute ce qu'on aimerait t'expliquer. »
Potter le fusilla férocement du regard avant de calmement retirer son bras de la poigne de Weasley. « Très bien, marmonna-t-il avant de se rasseoir sur sa chaise. Mais je fais ça uniquement pour eux. »
C'était largement suffisant.
Tandis que Weasley commençait à expliquer, Drago observa le visage de Potter qui assimilait toutes les choses qu'ils avaient apprises ces dernières semaines. Il fronça les sourcils quand Weasley raconta comment il avait reçu le certificat de naissance par Lavande et eut l'air perdu quand il apprit que Patil était derrière tout cela. Il sembla curieux quand Weasley parla d'une complice, mais fronça de nouveau les sourcils quand Drago coupa Weasley et se mit à parler de l'enquête qu'ils avaient lancée.
« La bonne nouvelle, c'est que Pansy a pu faire augmenter la charge de travail de Parvati avec l'aide de Rita –
- Skeeter ? Mais elle déteste Hermione ! s'exclama Potter.
- Et c'est toujours le cas, crois-moi. Pansy dit qu'elle a fait la tronche pendant une journée entière avant d'accepter d'aider avec beaucoup de réticence.
- Pourquoi elle a accepté ? » demanda-t-il curieusement.
Drago ferma le dossier sur son bureau. « Rita adore Pansy et ma mère. Depuis que mon père a… succombé, Rita a contribué grandement à garder le nom de ma mère en-dehors des articles de potins. » La quantité de ragots qui avaient fait surface après l'enterrement de son père était presque obscène, mais aucun écrit n'avait été imprimé. « Elle ne veut pas que ma mère soit ébranlée.
- Mais qu'est-ce qui te fait penser qu'on peut lui faire confiance ?
- On peut, c'est tout, rétorqua-t-il d'un air irrité. Et si on ne peut pas, je convaincrai Granger de l'enfermer dans un bocal pendant quelques mois. » Weasley et Potter le fixèrent les yeux écarquillés. Drago sourit d'un air narquois et ajouta avec désinvolture : « Rita n'avait pas l'air trop fan de ça. »
Weasley bégaya : « Comment savais-tu – »
Drago grimaça. « Non que cela importe, mais Granger m'en a parlé, le soir où la sœur de Weasley a découvert quelques petites choses plutôt dérangeantes à propos de Potter ici présent. » Le sorcier pâlit.
Weasley fronça les sourcils. « De quoi parle-t-il ? » demanda-t-il en regardant Potter.
Ça y était. Le moment où Weasley aurait pu découvrir que son meilleur ami avait été amoureux d'Hermione pendant des années. Et qu'il l'aimait toujours à un certain degré. Il aurait pu découvrir que c'était ça que sa sœur avait entendu à son insu. Drago observa le pâle Potter regarder Weasley, mal à l'aise, rajuster ses lunettes et se gratter la tête.
Cela aurait été vraiment facile pour Drago de le faire d'ouvrir sa bouche, dire la vérité, et mettre fin à ce que croyait Weasley : que ce qu'il s'était produit entre ses deux amis était juste physique, du moins du côté de Potter.
C'était là. Entre ses mains.
Le pouvoir de réduire en miettes l'amitié la plus populaire du monde sorcier.
Le pouvoir d'administrer le coup de grâce qui séparerait Potter et son Weasley.
C'était là.
Potter était horriblement silencieux. Le froncement de sourcils de Weasley s'accentua. « De… quoi parle-t-il, Harry ? »
Mais Drago pensa aux conséquences, aux disputes, et à la débilité de tout ça. Au final, ce n'était pas son devoir. Au final, il savait qu'il y avait plus que réduire en miettes leur amitié, et qu'une troisième personne serait affectée par les retombées une personne qui n'avait plus besoin d'aucun malheur dans sa vie. Il ne voulait pas dire qu'il faisait ça pour Granger, parce qu'alors cela l'empêcherait de faire toute sorte de progrès dans sa quête de tuer les sentiments qu'il avait pour elle, mais c'était la vérité.
Bordel de merde.
Donc, quand Weasley le regarda, il le fixa en retour : « De quoi tu parlais, Malefoy ? »
Drago répondit en se massant la nuque. « Je parlais de la nuit où ta sœur a découvert l'existence de Matthew. Si tu pouvais suivre, Weasley. »
Le visage de Potter, qui était devenu terriblement pâle, reprit quelques couleurs aux joues quand la vie leur revint. Le visage de Weasley rougit et il murmura : « Oh, je pensais qu'il y avait peut-être encore autre chose dont personne ne m'avait parlé. »
Potter regarda sur la gauche, incapable de regarder son ami en face. Drago secoua la tête, mais Merlin, qu'est-ce qu'il rêvait d'être franc à cet instant. Il soupira. Ce qu'il ne faisait pas pour protéger Granger. « Eh bien, tu pensais mal. Ce ne serait pas la première fois, n'est-ce pas ? »
Weasley lui jeta un regard noir avant de tourner la tête vers son ami. « Enfin bref, il y a plus que tout ça. Parvati compte falsifier le certificat de naissance de Matthew pour dire que Malefoy en est le père. »
Eh bien, il ne prenait assurément pas de pincettes.
La pièce retomba dans le silence tandis qu'ils encaissaient ses mots l'un d'eux pour la première fois, les deux autres pour la deuxième fois. Drago, pour une raison étrange, ne réagissait pas aussi mal que la Belette. Il comprenait que c'était une mauvaise nouvelle pour Granger, mais l'idée d'être lié à elle de cette manière n'était pas tout à fait horrible. Drago pâlit. Cette pensée n'était pas aidante dans sa volonté de se débarrasser d'elle.
La détresse passa dans les yeux de Potter. « Mais pourquoi toi ? » Demanda-t-il à Drago, qui leva les yeux au ciel en réponse pour cacher ce qu'il ressentait intérieurement. « Je suis le père de Matthew. Ça devrait être –
- Écoute, je ne veux pas plus que toi que ce truc sorte, mais –
- On ne pense pas que le but soit de dévoiler l'existence de Matthew, Harry, » interrompit Weasley, et il avait l'air de souffrir d'être d'accord avec une chose que Drago Malefoy avait dite des semaines auparavant. « Malefoy pense que quelqu'un essaie de réécrire l'histoire. Pour quelle raison, je n'en sais rien. »
Rongeant un de ses ongles, Potter médita sur les mots de Weasley en hochant la tête d'un air pensif. Drago fronça les sourcils de dégoût. Potter resta silencieux, et soudain se remit à parler, déballant ses questions d'une traite : « Donc, qu'est-ce que vous faites à propos de tout ça ? Comment Hermione l'a pris ? Qu'est-ce que je dois faire ? Qu-
- Eh bien, pour commencer, tu pourrais reprendre ta respiration et nous laisser répondre à tes questions, » répondit Drago d'un ton sec.
Potter se renfrogna encore, si c'était possible.
« On t'a dit que Blaise était parti en Italie, et que Pansy avait aidé à ralentir la progression de Parvati, lui rappela Drago. Granger a l'air de s'en sortir. » Et il ne comptait pas en dire plus… tant qu'il ne pourrait pas aller vérifier lui-même, comme il en avait d'ordinaire l'habitude. « Et si je te dis ce qu'il faut que tu fasses, tu le feras ?
- Pour eux, je le ferai. » Il arborait un air férocement déterminé. « Dis-moi ?
- Garde un œil sur ta petite amie. »
Quelque chose passa dans les yeux de Potter.
Cela semblait être un enchevêtrement d'incrédulité, de prise de conscience, et de colère. « Quoi ?
- Tu n'es pas sourd, Potter. On a besoin que tu surveilles ta petite amie. »
Il bondit de sa chaise. Son visage était passé de normal à écarlate à une vitesse plutôt impressionnante. « Tu penses que Ginny a quelque chose à voir avec ça ? » C'était une affirmation, pas une question. Quand Drago ne répondit pas, il se tourna vers Ron. Des mots bouillonnant d'un sentiment de trahison échappèrent de ses lèvres : « Tu penses que ta sœur a quelque chose à voir avec ça ?
- Non ! Je ne le pense pas ! Mais Hermione a dit qu'il fallait pouvoir l'écarter, et je suis d'accord ! Gin était furieuse quand elle a découvert, Harry. Elle – je comprends pourquoi ils la suspectent. » Quand son ami eut un rire sans joie, Weasley tenta de le raisonner un fait que Drago trouva étrange. Weasley ? Raisonner quelqu'un ? Mmh. Peut-être qu'il avait mûri. Mais alors, vraiment un tout petit peu. « On te demande de faire ça pour prouver son innocence, pas sa culpabilité. »
Drago ricana silencieusement et Weasley essaya de l'éviscérer d'un de ses regards mortels.
Drago était plutôt convaincu de sa culpabilité. Il n'avait juste pas encore assemblé toutes les pièces.
« Mais elle est passée à autre chose. On a parlé et bataillé pas mal à propos de ça. Que Ginny soit au courant pour Matthew n'a rien changé.
- Bon, je vais interrompre tes conneries. Ça a tout changé, Potter, que tu veuilles bien le voir ou non.
- Ginny – attends, elle est partie avant que vous ayez pu finir. Et je n'ai jamais évoqué le sujet parce qu'elle ne l'a jamais évoqué. On s'est disputés uniquement à propos d'Hermione… » sa voix perdit en intensité. « J'ai juste supposé qu'elle savait, mais je ne crois pas qu'elle sache vraiment.
- Et ne lui dis rien, ordonna Drago. Ça pourrait tout changer. On ne sait pas.
- Ginny ne ferait pas une chose pareille ! Pour ce qu'on en sait, ça pourrait être toi, Malefoy ! »
Drago haussa un sourcil. « Moi ?
- Je ne sais pas, parce que tu es –
- Oui, je sais. Je suis Malefoy, dit-il de sa voix traînante, ennuyé. Je suis un pauvre con. J'ai été un pauvre con toute ma vie. J'ai fait des trucs dégueulasses. C'est bon ? » Drago jeta un regard noir à Potter. « Trouve une meilleure raison, Potter, parce que je suis au courant pour Matthew depuis bien trop de mois pour que ça puisse être moi qui ai fait quelque chose.
- Et pourquoi tu n'as rien fait ? »
Potter, réalisa-t-il, s'immisçait un peu trop à son goût.
« Ce ne sont pas tes affaires, lui dit-il fermement.
- Si, je pense que ce sont les miennes. Tu détestais Hermione –
- Encore faux, Potter. Je te détestais. Et Weasley, ici présent. » Il lui lança un bref regard noir qui lui fut promptement rendu. « Granger était une miss-je-sais-tout autoritaire qui m'a frappé en Troisième Année et me surpassait dans toutes les matières. Il se trouve qu'elle s'est liée d'amitié avec vous par hasard dans le train. Je ne la détestais pas. J'ai presque oublié son existence après la guerre, avec son départ hâtif pour Venise. »
Potter haussa un sourcil, mais la tension dans sa voix était manifeste : « Et maintenant ? »
Maintenant. Eh bien, maintenant, le sang battait dans ses oreilles comme un marteau. Maintenant, la Belette et Potter le dévisageaient avec un mélange de curiosité et de confusion, et la bouche de Drago goûtait la cendre. Il était fatigué de penser la pression qu'il subissait avait affecté tous les aspects de sa vie.
« Et maintenant, Malefoy ? » répéta Weasley, mais il semblait infiniment moins inquiet que Potter, qui lui semblait perdu.
Drago se préparait à leur dire que rien n'avait changé, mais il ne pouvait pas mentir. Non, il n'allait pas mentir. Mais il ne resterait foutrement pas assis là à les laisser le questionner sur ses sentiments pour Granger. Il avait déjà eu bien assez de cette merde avec Pansy, Blaise, sa mère, et son putain d'oncle, pour l'amour de Merlin.
« Je ne suis plus indifférent, répondit-il finalement avec soin. C'est tout ce que vous avez besoin de savoir.
- Tu n'as pas –
- Weasley ! Aboya Drago. Ce n'est pas le moment ! » Il prit un instant pour reprendre le contrôle de ses émotions. « On se décentre de moi, et on se recentre sur le problème qu'on a. » Oui, le problème. Quelle manière parfaite de les distraire de la tournure qu'avait pris la conversation un interrogatoire subtile pour déceler qui éprouvait des sentiments pour Granger, et une compétition.
Une à laquelle Drago ne voulait même pas participer.
Drago se vida la tête pendant le silence. « Donc, tu le feras ?
- Je n'espionnerai pas Ginny.
- Espionner, c'est un peu dur. On a besoin que tu… gardes un œil sur elle, c'est tout, suggéra Drago. Fais plus attention à elle, fais le tour de chez toi pour trouver n'importe quelle preuve la disqualifiant. »
Potter secoua la tête : « Ginny et moi avons assez de soucis en ce moment, on n'a pas besoin –
- Non, écoute, Harry. C'est tout ce qu'on te demande de faire. Fais ton enquête, » lui dit Weasley.
Il se redressa : « Vous êtes incroyables, tous les deux. Je m'en vais. »
Le moment était venu d'abattre leur dernière carte le percuter dans ce qu'il pensait être acquis. La voix terriblement calme de Drago résonna dans le silence : « Tu serais impressionné de ce que tu pourrais découvrir si tu creusais un peu plus, Potter. »
Il se figea et se retourna : « Qu'est-ce que ça veut dire ?
- Tu es stupide à ce point ? Je ne peux franchement pas croire que tu n'aies pas encore compris, après tout ce temps. » Il y allait au culot, mais espérait taper dans le mille.
« De quoi parles-tu, Malefoy ? » cracha-t-il.
Il visait très haut quand il répondit : « Tu m'as parlé d'une lettre que tu as envoyée à Granger –
- Quel rapport avec tout le reste ? »
Drago y pensa une seconde. Il jeta un œil à Weasley qui faisait de stupides petits gestes de la main. « Je – je crée une motivation pour que tu cesses d'être un idiot.
- On dirait que tu bluffes, Malefoy, dit-il en croisant les bras. J'ai beau être – » Potter choisit prudemment son mot : « attaché à Hermione, il n'en reste pas moins que j'ai foiré lamentablement les choses entre Ginny et moi, et je ne veux pas la perdre – »
Enfin ! Quelque chose sur quoi jouer. « Arrête les conneries, Potter. Tu ne l'aimes même pas. »
Ça, il savait que c'était vrai.
« Putain, mais tu te prends pour qui, à me dire qui j'aime et qui je n'aime pas ? Répliqua violemment Potter.
- Sois honnête. » Il grimaça à ses propres mots.
Une petite voix dans sa tête lui souffla 'Faites ce que je dis, pas ce que je fais, hein ?'
Et on aurait dit la voix de Pansy.
« C'est vrai ? » Harry ne répondit pas à Weasley qui répéta : « Harry. C'est vrai ? »
Potter plissa les lèvres, d'abord. Il serra les poings, fixa le sol, et resta raide une minute entière. Finalement, il leva les yeux vers ceux de son ami et relâcha la tension de son corps : « Je pense – je pense qu'avec le temps je pourrais vraiment –
- Avec le temps ? s'égosilla Weasley, le visage cramoisi. Tu en as eu, du temps. Tu es avec Ginny depuis cinq putains d'années ! Tu devrais savoir, depuis, bordel ! »
Potter eut l'air furieux d'être ainsi tancé, mais sembla réfléchir à ce qu'il pouvait dire. « Parfois, ça ne fonctionne pas comme ça. Parfois, tu peux être avec quelqu'un pendant des années et ne même pas savoir –
- Tu n'es pas juste en train de gâcher ton temps et le sien. Tu –
- Et qu'est-ce que tu sais de ma relation – ou de n'importe quelle relation, d'ailleurs ? Rétorqua Potter plutôt brusquement. Tu n'en as même pas eu une seuledepuis qu'Hermione t'a quitté. »
C'était un pur coup bas.
Drago croisa les bras. Ça démarrait bien.
En l'entendant dire ça, Weasley eut l'air de se prendre un coup de couteau derrière la tête. « Qu'est-ce que j'en sais ? Dit-il violemment. J'en sais assez pour ne pas mener quelqu'un en bateau.
- Ce n'était pas mon intention.
- C'est ce que tu as fait, Harry. » Weasley se passa une main sur le visage. « Je lui ai dit de te quitter, mais elle refusait. Elle pense que tu l'aimes réellement. Elle pense que tu es prêt à t'établir et te marier –
- Me marier ? s'exclama Potter, sous le choc. Je n'ai jamais rien dit à propos du mariage. Je lui ai dit qu'on prenait un nouveau départ. Je lui ai dit qu'on allait régler nos problèmes et reconstruire notre confiance en l'autre. Je n'ai jamais dit qu'on allait se marier.
- Elle dit que vous êtes allés ensemble voir les bagues en magasin.
- Non, c'est faux. Elle – » Le visage de Potter devint livide, et, décontenancé, il eut l'air de se rendre compte de quelque chose concernant la sœur de Weasley : « Elle ment.
- Qu'elle mente, ce n'est plus à établir, Potter, nargua Drago.
- Va chier, Malefoy, » rétorqua-t-il, mais c'était presque chuchoté. « Je ne comprends pas. Pourquoi est-ce qu'elle ment ? »
La Belette-fille s'attelait à la perfection à la projection de son futur avec Harry… sans faire participer ce dernier. « Il y a de nombreuses raisons qui font que les gens mentent. » Il s'avança vers l'endroit où se tenaient les deux amis, presque face à face. « Certains mentent pour se protéger, d'autres pour protéger ceux qu'ils aiment, d'autres parce qu'ils peuvent le faire, et d'autres encore mentent parce qu'ils se sentent menacés par quelque chose ou quelqu'un d'autre.
- La ferme, Malefoy, cracha Potter.
- Je ne suis pas celui dont la petite amie ment. Toi oui. Il faut que tu découvres à propos de quoi d'autre elle ment, suggéra-t-il calmement. On sait qu'elle a menti sur le fait d'avoir échangé des lettres avec Granger pendant des années. Penses-y, Potter. Je suis certain qu'il y a plus que ça.
- Et je suis certain qu'il n'y a rien, » rétorqua-t-il l'air borné.
Drago fronça les sourcils. Fallait-il vraiment qu'il explique tout à Potter ? « Putain, mais tu es vraiment un imbécile. Tu en as toujours été un, mais alors là, tu exploses tous les records, lui balança-t-il sans ménagement. Fais attention à elle. Fais attention aux choses que t'a dit Granger.
- De qu –
- Pourquoi tu n'as pas pu réparer les choses avec Granger après qu'elle soit partie pour Venise ?
- Je lui ai envoyé une lettre, mais –
- Merlin, tu es aveugle. » Drago secoua la tête. « La vérité là-dessus me saute aux yeux depuis des mois, pourquoi tu ne la vois pas ? Ton problème, Potter, c'est que tu n'écoutes personne. Ton problème, c'est que tu ne vois pas les choses que tu ne veux pas voir –
- Alors éclaire-moi, bordel !
- La lettre, idiot ! Celle d'il y a six ans ! Qui l'a expédiée ?
- Moi ! Cria-t-il, le visage rouge. J'ai envoyé la lettre ! Je l'ai écrite, mise dans l'enveloppe, et… je... » Potter ferma les yeux en retraçant visuellement cette matinée-là. Sa voix avait diminué drastiquement quand il reprit : « Je vivais au Square Grimmaurd. J'étais en retard à une réunion avec Kingsley. Ginny avait passé la nuit là. J'ai mis la lettre sur la table avec le reste des lettres à expédier, et –
- Et quoi, Harry ? » demanda Weasley impatiemment.
Il rouvrit les yeux et Drago reconnut cet air immédiatement.
Il vivait enfin un moment de clarté plus que bienvenu.
« J'ai dit à Ginny de l'envoyer. »
Et Drago sut qu'il ne faudrait plus longtemps pour que Potter réalise qu'il sortait avec la sainte patronne des mensonges et de l'hypocrisie.
Disclaimer: Tous les personnages, décors, etc. sont la propriété de JK Rowling. L'histoire est d'inadaze22.
Me voici avec le chapitre suivant ! J'espère qu'il vous aura satisfaits. J'ai eu très peu de retours sur le précédent, peut-être a-t-il moins plu. Un grand merci à celleux qui m'ont laissé un message, j'ai toujours le cœur plein d'amour quand je lis une nouvelle review ahah !
Ma cadence a un peu ralenti, j'ai actuellement 3 chapitres d'avance mais j'attendrai d'en avoir traduit encore 2 autres avant de poster le suivant. Vos critiques et motivations sont les bienvenues !
J'espère que votre confinement se passe au mieux, prenez soin de vous.
A bientôt !
little-Sniks