Hi ! Les quelques habitués de Snowball doivent déjà connaître la chanson mais... la connexion ne passait plus. Du tout. Et j'avoue qu'à force d'essayer, je n'avais juste plus la foi (de continuer à le faire toute la journée, je veux dire, hein, Snowball c'est comme un cancrelat, c'est un bébé fiction survivant - qui a encore pas mal de chapitres d'avance dans la boîte –). Toutes mes excuses.

Mais, de façon assez surprenante, on a eu l'opportunité de déménager et... eh bien, c'est fait. Si je n'ai toujours pas une connexion dite « normale », le Domino (aka Airbox aka Clé 3G aka Solution de dépannage) capte nettement mieux ici. Alors ça semble en bonne voie, et on peut croiser les orteils. Pour le moment, en tout cas, le site passe, profitons-en !

PS. Dès que tout ceci est correctement en ligne, je file dès que possible répondre à vos reviews du précédent chapitre, encore toutes mes excuses pour l'attente.

Note de Chapitre (I) : Voici donc le nouveau Chapitre de Snowball, avec un titre terriblement sérieux, des problématiques cruciales et des actions absolument... épiques. (Et on oublie pas la tension les enfants, la tension.)(Tousse fortement.)


oOo

Chapitre VIII : La Guerre des Chaussettes.

OoO

Le morceau de laine effectua une courbe tout à fait artistique dans les airs, avant qu'une main tendue ne le rattrape fermement. Peut-être un peu trop fermement, d'ailleurs. C'était presque... sec. Et ça frisait la maltraitance.

— Jack… soupira Bruce, du ton de celui qui en avait marre de répéter encore et encore les mêmes choses. Actuellement, tu es ce qui se rapproche le plus d'un être humain normal…

En grimaçant un peu et en abandonnant là toute pensée sur le sort d'un quelconque morceau de laine, Jack fit prudemment un pas sur le côté. Après avoir décidé de tout raconter à Bruce, il avait aussi fini par lui parler de son état actuel. Pas seulement sans pouvoirs, mais comme amputé de tout ce qui faisait de Jack Frost… eh bien, « Jack Frost ». Pas seulement en manque de boules de neige et de cascades aériennes, mais aussi en manque de froid. Avec des sensations dont il n'avait même plus le souvenir. L'envie de dormir. La faim. Et, cerise sur le sundae : sensible aux basses températures. Voir même, frileux. Fri-leux, quoi. C'était juste ridicule.

Sérieusement, ça devait aller à l'encontre totale d'une clause de son contrat, ou un truc du genre, c'était pas possible autrement.

Jack Frost n'avait pas froid.

— Et donc, tout logiquement, et surtout après avoir eu une telle fièvre, tu es fragile et sujet à une rechute. Alors… Fais-moi le plaisir…

Plus le docteur Banner avançait dans sa phrase, plus il s'approchait, et plus son interlocuteur présumé (victime, ouais !) reculait.

Jack jeta un bref coup d'œil derrière son épaule. Bon. Tout allait bien. Le mur était encore loin. Il pouvait largement fuir. Ouep, absolument. Il pouvait...

— De mettre ces foutues chaussettes !

Fuir, OK, bonne idée.

MAINTENANT.

L'esprit détala aussitôt vers la gauche, effectuant un plongeon assez inspiré, avec pour objectif de se retrancher derrière le canapé. Mais, n'en étant pas à son coup d'essai, le médecin l'avait devancé, et s'était placé pile sur sa trajectoire. Jack se réceptionna de justesse à quatre pattes, un mètre à peine devant la muraille Brucienne, et sans perdre une seconde, bondit dans la direction opposée.

Mais le destin était un sale enquiquineur.

Alors qu'il était à deux doigts de rejoindre le rempart sécurisant du bar de la cuisine, un solide bras le crocheta en plein vol, stoppant net son élan. Sans même avoir eu le temps de reprendre son souffle, il se retrouva donc à pédaler dans le vide, fermement maintenu par les aisselles juste au-dessus du sol. Le jeune gardien se débattait comme un beau diable, mais rien à faire, la prise de ces foutus bras sortis de nulle part, et légèrement recouverts de sueur, ne se desserra pas d'un pouce. Bien au contraire.

— Clint ! C'est pas du jeu ! finit par s'écrier Jack, sans cesser un instant de gesticuler dans tous les sens. On avait dit : « PAS de super pouvoirs d'agent surentrainé » !

— Ce ne sont pas des super pouvoirs. Juste beaucoup d'exercice, répliqua calmement l'accusé, imperturbable.

— Ben, c'est de la triche !

— Et… ose seulement me dire que si tu le pouvais, tu ne m'aurais pas gelé le bout du nez, là, tout de suite ?

— Tu l'aurais mérité, bougonna immédiatement l'esprit, en tentant de croiser ses bras pour montrer sa profonde désapprobation.

Bruce, qui observait la scène de loin, redressa ses lunettes avec un mouvement de tête désabusé.

Malgré son acceptation plutôt rapide, il avait fallu quelques jours à Clint pour réellement voir Jack. Ou peut-être bien un peu moins, étant donné qu'il avait soigneusement gardé l'information pour lui. Du moins, jusqu'à la première tentative d'enfilage de chaussettes... où sans prévenir, l'agent Barton était intervenu, l'air de rien, bloquant le jeune Gardien sans le moindre mal, tout en attrapant l'une des chaussettes pour la lui enfiler lui-même. Ce qu'il avait presque réussi à faire, vu que l'adolescent s'était immédiatement figé, plus que surpris, à l'image du docteur Banner.

Et depuis le début de la matinée, ça n'arrêtait pas.

Le scientifique les regarda encore quelques instants se disputer comme de véritables gosses (en profitant pour remettre de l'ordre dans sa tenue), avant de lancer :

— Je vous laisse. J'ai du travail.

Et de se diriger avec un naturel désarmant vers l'ascenseur. Désarmant pour Jack, qui affichait une expression profondément choquée par la dite déclaration et l'acte qui se déroulait actuellement juste devant ses yeux.

— Bruce ! Hé. Tu vas pas me laisser tout seul avec lui, quand même ?

La cible de cette supplique pour le moins désespérée s'arrêta juste devant l'ascenseur, et se contenta de leur adresser un petit signe de la main sans même se retourner.

— Agent Barton, je compte sur vous.

— Reçu cinq sur cinq, Doc'.

— Bruuuuuce, m'abandonne pas ! C'est traître ! geignit l'esprit, toujours aussi bloqué par les bras de l'archer.

— Soyez sages, se contenta de répondre « le traître » avant que l'ascenseur ne se referme sur lui et ne l'emporte à travers la tour, les laissant seuls dans le salon.

Son départ ne laissa qu'un lourd silence. Plus personne ne bougeait, comme si une quelconque puissance cosmique avait appuyé sur le bouton pause de l'univers. Puis Clint se composa un air exagérément détaché tout en baissant les yeux sur son infortuné prisonnier.

— Tu as entendu le monsieur ? Laisse-toi faire. C'est pour ton bien.

Prisonnier, qui, dans ses bras, se crispa de tout son être.

— Enfile ces chaussettes.

— NOOOOOOOON !

Le cri du jeune gardien fut aussi immédiat que déchirant, mais le redoutable agent ne broncha pas d'un iota, et le plaqua rudement au sol avec la ferme intention de lui enfiler les deux petits bouts de laine incriminés. Et il avait de l'expérience, l'animal.

Jack était fait comme un rat.

oOo

Un long moment plus tard, un docteur Banner en sueur, mais parfaitement serein, passait brièvement la tête entre les portes de l'ascenseur.

— Déjeuner. Dans quinze minutes.

Avant d'appuyer une nouvelle fois sur le bouton d'appel et de disparaître comme il était venu. Jack et Clint, en plein match de catch sur le sol du salon, s'interrompirent docilement avant d'aller se laver les mains et de s'installer chacun sur un tabouret. Réglé comme une horloge, Bruce revint exactement quinze minutes plus tard, les cheveux encore humides, pour se glisser avec une parfaite nonchalance derrière le bar. Les deux attablés observèrent sans un mot ce dernier enfiler un tablier rose bonbon, fort généreusement garni en froufrous, et commencer à préparer le repas comme si de rien n'était.

Depuis quelques jours, Bruce s'était mis à la cuisine.

Cuisiner n'avait jamais été une priorité, mais être le toubib attitré de l'équipe et avoir un jeune adolescent affamé sur les bras changeait quelque peu la donne. Se sentant responsable du jeune esprit, le scientifique s'était donc dévoué. Et un peu plus tôt dans la semaine, l'agent Barton, entrant par hasard dans la cuisine au bon moment, un livre ouvert à la main, était tombé sur son collègue en train de s'exercer… vêtu d'un charmant petit tablier rose.

Tablier qui avait été offert à Natasha, peu après son installation par un Tony très joyeux, qui avec un subtil jeu de sourcils, avait désigné la jeune femme puis les plaques de cuisson dans son dos, avant de revenir sur le dit tablier. Impensable pour le commun des mortels, hilarant pour Tony Stark. Nul besoin de préciser que la jeune femme n'avait que très peu gouté à son « humour désopilant » du moment. Ce jour-là, Iron Man avait dû courir très vite pour la sauvegarde de ses organes de reproduction, poursuivi à travers toute la tour par une Veuve Noire très en forme. Et très armée.

Une fois les choses calmées, la tueuse avait finalement saisi « la chose » avec la ferme intention de s'en débarrasser. La brûler, de préférence avec quelques joujoux du milliardaire, dans un magnifique petit feu de joie contrôlé, était une option terriblement séduisante. Mais un appel d'urgence du SHIELD avait coupé court à ses projets, et la jeune femme s'était contentée de fourrer l'horreur dans les tréfonds d'un placard anonyme. De toute façon, personne n'utilisait vraiment cette cuisine. Ce... Ce truc serait donc oublié à jamais.

C'était sans compter le docteur Banner, qui à la recherche d'un tablier pour protéger ses affaires des dégâts qu'il ne manquerait pas de causer, avait retourné toute la cuisine pour en trouver un. Trouvaille qu'il avait immédiatement failli refourguer au fin fond de l'abysse obscure dont elle était sortie, mais qu'il s'était finalement résigné à enfiler, ne voulant pas salir une blouse ou une protection spéciale « Science » pour ça. Lorsque Clint l'avait surpris avec l'objet incriminé, il y avait eu un petit silence. Puis Bruce avait plissé les yeux et pointé une spatule menaçante dans sa direction.

— Aucun commentaire.

— Mais je n'ai rien dit, Doc', avait simplement répondu le Faucon avant de s'installer tranquillement au bar.

Et, effectivement, l'agent n'avait pas fait la moindre remarque, s'installant systématiquement à la même place chaque jour, attendant patiemment que le repas soit prêt. Soit en observant son collègue procéder, soit en feuilletant l'un de ses nombreux livres sur Jack Frost. Comme s'ils avaient toujours fait ça. Comme si Bruce cuisinant, et les deux coéquipiers mangeant ensuite au même moment, côte à côte, était une habitude bien ancrée.

Bien sûr, les premiers « essais culinaires » du docteur n'avaient pas été très concluants. Sa seule expérience, étant, après tout, assez succincte. Nombre de casseroles avaient été éprouvées, pâtes brûlées, et livres de cuisine épluchés jusqu'à plus soif, avant que la nourriture n'ait une apparence relativement convenable. Ce qui était actuellement le cas, et même si ce n'était pas encore tout à fait ça, cela restait bien plus sain que les plats préparés on-ne-sait-comment-et-quand, ou que le contenu parfois douteux des boîtes de converses et autres plats sous plastique.

Donc, oui, Clint, agent entraîné et ayant l'habitude de prendre soin de son corps, n'avait pas réellement hésité, et s'était joint au duo initial pour prendre ses repas. Des repas non seulement à heures fixes (ou presque), mais avec de la compagnie, en plus de ça. Bien qu'il n'ait pu, pendant un moment, que deviner la présence de l'esprit avec eux.

Esprit qu'il surveillait justement du coin de l'œil, et qui se tortillait actuellement sur le tabouret d'à côté, avec l'intention sans équivoque de se débarrasser des chaussettes qu'on avait enfin réussi à lui enfiler.

— Pas de chaussettes, pas de nourriture, avertit simplement le docteur Banner en leur tournant toujours le dos, ayant très bien entendu le bruit du frottement de la laine contre la peau, même le nez plongé dans ses casseroles.

Pris en faute, Jack grommela ouvertement, mais s'exécuta, l'appel du ventre ayant raison du reste. Mais ça ne lui faisait pas plaisir, c'était clair. Ses grimaces étaient assez équivoques. Même chose pour ses marmonnements, ainsi que ses divers geignements d'inconfort, qui ne faisaient que parfaire le tableau. Face à son manège, Clint laissa un discret (et quelque peu perfide) sourire prendre place sur ses lèvres.

Sourire que ne loupa absolument pas Bruce, qui avait jeté un coup d'œil derrière son épaule au bon moment. Et ce fut en secouant légèrement la tête qu'il retourna à sa préparation.

Depuis que l'archer voyait l'esprit, il ne semblait pas se lasser un seul instant… de se venger. Suite aux premières prises de bec, son collègue lui en avait fait la remarque, arguant qu'un « agent d'élite » ne devrait pas avoir à se venger d'un « simple adolescent ». « Justement ! » avait répliqué le dit agent d'élite, les sourcils froncés, avant de se lancer dans sa prochaine offensive. Visiblement, Clint ne pardonnait pas à Jack son petit coup du « livre sur le pied ». Ou il ne se pardonnait pas d'avoir été surpris aussi facilement, même par une menace strictement invisible à son regard et ses sens.

Quoi qu'il en soit, depuis qu'il pouvait agir, c'était une véritable petite guerre miniature. Avec, comme prétexte parfait : les fameuses chaussettes. Bruce insistait parce qu'il était médecin. Clint insistait parce que c'était une vengeance servie sur un plateau d'argent. Parce que tout ça ne plaisait pas du tout, mais alors pas du tout, à Jack. Et même si le docteur Banner pensait cerner un peu ce qui posait problème (en être réduit à ressentir le froid, être en franche position de faiblesse, et devoir en enfiler la preuve tangible), il trouvait quand même les réticences du jeune gardien un peu trop prononcées.

Cuillère en bois appuyée contre les lèvres, patientant le temps que sa sauce prenne, Bruce ne pouvait que réfléchir au problème.

Sans en trouver un seul instant la solution.

Parce qu'en réalité, il n'avait pas toutes les données du dit problème.

Jack lui avait tout dit, oui. Mais il avait juste oublié de mentionner à quelle époque, exactement, il était sorti de la glace. Et même si ses souvenirs étaient plus que restreints, l'esprit en était persuadé : il n'avait pas vu l'ombre d'une chaussette dans sa vie. Bien sûr, il connaissait. Il avait côtoyé bien assez d'enfants comme ça. Même Nord, sous ses épaisses bottes, devait en avoir.

Sauf que voilà, lui, il n'en avait jamais eu besoin. Se balader pieds nus ne posait aucun problème à Jack Frost, et il en revendiquait farouchement la liberté. N'en déplaise aux elfes de Nord avec leur protocole et leurs foutues chaussures, là.

Donc, oui, en un sens, Bruce avait bien visé juste. Rien que l'idée d'enfiler ces chaussettes mettait l'esprit dans tous ses états. Preuve flagrante de sa faiblesse et de son état diminué actuel, tout ça, tout ça.

Mais il y avait aussi une angoisse plus subtile, plus primaire. Avec ça aux pieds, il se sentait comme pris au piège. Le frottement de la laine contre sa peau était étrange. De ne pouvoir écarter ses orteils que jusqu'à un certain point sans rencontrer de résistance, dérangeant. Et de ne plus sentir le souffle du vent glisser sur ses mollets, juste angoissant.

Sans pouvoir s'en empêcher, Jack plongea vivement la main sous son sweat et serra la fiole de verre entre ses doigts. Il ferma les yeux, et se mit à compter jusqu'à cent, se persuadant que tout ça n'était qu'un simple petit malaise qu'il pourrait très vite dépasser. Comme d'habitude.

Inconscient des troubles de son jeune patient, Bruce continuait son ouvrage, son esprit à la fois concentré sur ce qu'il faisait, et flânant autour des souvenirs de ces derniers jours.

Il s'était mis à la cuisine.

C'était juste tellement improbable que ça le laissait, alors qu'il avait une cuillère en bois et une main à moitié plongée dans une casserole de sauce, encore franchement dubitatif. Mais dans son état, Jack avait besoin d'une alimentation un minimum équilibrée. Et de fait, il se montrait aussi affamé que pouvait l'être un « jeune de son âge ». Si ce n'est plus.

Pourtant, si on était honnête, et même si ça ne lui ressemblait pas, Bruce aurait pu faire comme Tony, et commander des plats exorbitants de traiteur, en renouvelant le stock chaque jour, s'assurant ainsi de leur fraîcheur. Non. Sans conteste, il y avait une autre raison. Une raison qu'il gardait farouchement pour lui. Et un certain autre gars.

Parce qu'aussi incroyable que ça puisse paraître... la cuisine détendait Hulk.

De très (très) longues heures de méditation avaient permis à Bruce de sentir vaguement sa présence, évitant ainsi pas mal d'incidents et lui permettant de se débarrasser de sa montre. C'était flou, et c'était lointain, mais l'hôte pouvait désormais sentir comme des fluctuations, dans la masse verte que représentait l'Autre dans son esprit.

Toujours intimement liées, les dites fluctuations étaient presque toujours en rapport avec son propre état nerveux, mais avoir un œil en permanence sur la chose permettait au scientifique de prévenir les dégâts. Personne n'était, vingt-quatre heures sur vingt-quatre, sur le qui-vive. Surtout pas quand la colère ou d'autres sentiments prenaient le pas sur la raison. Et Dieu sait que Bruce possédait un self-control impressionnant. Mais il restait humain, et donc faillible. Et être faillible quand on pouvait se changer à tout moment en un immense colosse verdâtre particulièrement caractériel et avec une toute aussi immense proportion à la violence et la destruction, ce n'était pas bon.

Sentir Hulk, c'était ériger une barrière de plus, et limiter d'autant plus les dérapages.

Le nez plongé dans un bocal d'épices, inspirant à plein poumons les effluves exotiques qui en émanaient, et se rappelant vaguement des scènes de vie quotidienne entraperçues pendant « ses voyages », Bruce avait, de façon tout à fait surprenante, senti la masse s'apaiser. Pas grossir, ni tourbillonner, ni s'agiter telle une excroissance monstrueusement vivante, mais plus comme se ramasser sur elle-même, à l'image d'un chat soupirant d'aise sur son coussin. Ne loupant pas une miette de ce soudain changement, le docteur Banner était passé immédiatement à la réalisation d'une simple recette, piochée au hasard dans l'un des livres étalés sur le comptoir.

Et il n'avait certes pas fait du grand art, mais plus il avançait, et plus ses gestes se faisaient sûrs, lents et hypnotiques, et plus l'Autre se détendait. Donc Bruce lui-même se détendait. Quand le plat avait fini par être servi, l'homme s'était presque senti serein. Pour la première fois depuis bien longtemps. La masse verdâtre était comme étalée dans un coin de son esprit, tel un animal alangui sous l'agréable chaleur des rayons du soleil.

Alors oui, ça paraissait complètement dingue. La cuisine n'étant, après tout, pas l'activité la plus dénuée de stress qui soit. Mais les gestes, ainsi que les arômes, avaient un effet tout simplement thérapeutique sur l'Autre et sa conscience agitée. Et dans le fond, ça ne déplaisait pas au docteur Banner. Chimie et cuisine n'étaient pas des domaines si éloignés, en fin de compte. Et créer quelque chose de ses mains était plaisant. Pas juste détruire. Ou faire exploser. Mais créer. Juste dans le simple but de faire quelque chose d'agréable.

Et avant même qu'il ne s'en aperçoive, des souvenirs et des sensations auxquels il n'avait même pas fait attention avaient fini par l'absorber tout entier.

Il avait passé plusieurs années dans le tiers-monde, et beaucoup de gens se fourvoyaient à ce propos : les habitants qu'il avait côtoyés ne mangeaient pas mal. Au contraire, ils faisaient des merveilles avec très peu. Juste avec ce qu'ils avaient sous la main, aidé par des siècles de culture et des trésors d'invention. Ses sens avaient été bercés par des milliers d'épices, d'odeurs, et avaient contemplé tout autant de recettes, sans même qu'il n'en ait conscience ou ne s'y attarde vraiment. Être en fuite n'encourageait pas vraiment au tourisme culinaire, après tout.

Mais maintenant, les souvenirs s'étaient juste réveillés.

Sans en avoir réellement conscience, le scientifique laissa un petit sourire prendre place sur ses lèvres en retirant la casserole du feu.

Le plat, cette fois, possédait une apparence et un goût nettement au-dessus des premiers essais. Le doute n'était plus permis : l'homme progressait un peu plus à chaque nouvelle incursion dans la cuisine. Et certainement avec un peu plus d'enthousiasme que le commun des mortels.

Bruce Banner venait de trouver son nouveau dada.

oOo

— Hé, Doc', je me demandais…

— Hm ?

Plongé dans un livre de recettes, Bruce releva la tête pour observer son collègue Avengers qui s'étirait non loin. Bien sûr, il aurait très bien pu faire ça dans le dojo, mais il ne semblait pas encore prêt à cesser la surveillance « Frostienne », et ne quittait donc plus un seul instant des yeux sa cible du moment. Cible, qui marmonnait actuellement à voix basse, roulée en boule au fond du canapé, tel un chaton maltraité. Jack n'avait visiblement toujours pas digéré (lui non plus) le coup des chaussettes.

Clint cessa soudainement sa surveillance, et un étirement assez acrobatique pour se relever et se frotter la nuque, tout en s'approchant du bar où était accoudé le scientifique. Il s'y installa également, posant ses avant-bras sur la surface lisse, profitant de cet agréable soutien sur ses muscles tirés par l'effort.

— Lui faire porter des chaussettes, c'est très bien, reprit le Faucon en posant son regard sur l'autre homme, qui s'était remis à feuilleter son livre, tout en prêtant une oreille attentive à la conversation. Mais… ses fringues, là, ça fait combien de temps qu'il se les trimballe ?

Bruce jeta un coup d'œil en direction du sujet de leur conversation, avant de reporter son attention sur Clint. Ses doigts redressèrent d'une pichenette ses lunettes tandis qu'il se remémorait pensivement les faits.

— La première fois que je l'ai vu, il portait déjà cet ensemble. Étant donné l'état dans lequel l'agent Coulson l'a trouvé, et ce qui a suivi, je ne pense pas qu'il ait pu se changer. Il doit donc être arrivé avec. Et je n'ai pas noté un seul changement depuis. Peut-être que, d'habitude, son… enfin, ses capacités lui permettent d'en changer à sa guise.

Avec un petit hochement de tête, Clint confirma que ce n'était pas du tout impossible. Il avait déjà vu ce genre de choses. Ou plutôt, il avait déjà vu une certaine personne le faire. Une personne qu'il préférerait oublier.

— Mais, maintenant…

— Il doit en être incapable, compléta l'agent, en dessinant vaguement un bâton du bout de doigts.

— Probablement.

Quand le docteur Banner avait décidé de tout raconter, il avait tout raconté. Même la partie « Sans Bâton, pas de Pouvoirs » (tout en majuscules). L'agent laissa sa tête rouler quelques instants le long de son bras replié avant de reprendre la parole.

— Donc, il se traine là-dedans depuis déjà un petit moment.

— Alors qu'il a eu une violente poussée de fièvre…

— Pas très recommandé.

— Non, pas vraiment, confirma le médecin en titre.

L'archer se redressa alors d'un bond, et son coéquipier aurait pu jurer qu'il mourrait d'envie de se frotter les mains avec satisfaction, tel un méchant de dessin animé.

— Il va donc falloir le foutre à poil.

— Le faire changer de vêtements, agent Barton, corrigea son, presque toujours imperturbable, interlocuteur.

— Bien sûr. On ne néglige pas les normes d'hygiène.

— Hm, hm, commenta Bruce, légèrement peu convaincu.

Affichant une attitude tout à fait professionnelle, la cible du « hm hm » se contenta de regarder droit dans les yeux son accusateur, revêtant en un instant le masque de l'agent parfaitement compétent qu'il était. Le duel silencieux de regards insistants dura un petit moment, avant que Clint ne repousse finalement son tabouret du bout de sa botte.

— Alors, on fait quoi ? Je pense pas que mes affaires iront. Et les vôtres, Doc'… On pourrait en mettre trois comme lui, dans un de vos pantalons.

Ses doigts pianotèrent un instant sur le comptoir.

— Probablement plus de trois, en fait.

Bruce replaça une boucle rebelle derrière son oreille, légèrement gêné. Oui, ses pantalons n'étaient pas, souvent, de la plus petite taille qui soit. Mais c'était ça, ou risquer de voir Hulk tout nu. Et personne ne le souhaitait.

— Pour Stark, ça n'irait pas non plus.

Traduction : « Même si ça me dérangerait pas du tout d'aller fouiner dans ses placards et d'y mettre un foutoir monstre, je suis au regret de confirmer qu'il ne possède pas non plus la bonne taille. ». Bruce résista très fort à l'envie de se pincer l'arête du nez.

— On pourrait emprunter quelques trucs à Natasha, finit par dire l'homme aux cheveux ébouriffé, d'un ton parfaitement neutre, provoquant un vif haussement de sourcils de son vis-à-vis.

— Vraiment, agent Barton ?

— Eh bien… disons juste qu'il n'a pas intérêt à faire un trou dans un de ses pyjamas en soie, ou esprit invisible ou pas, je ne pourrais garantir sa survie. Et faudra bien tout remettre en place. Mais oui, ça pourrait éventuellement coller. Avec une bonne dose d'élastiques. Vous avez des ceintures en rab' ?

Effectivement, Natasha devait être la plus svelte des habitants de la tour, mais quand même, « emprunter » des affaires à la Veuve Noire ne semblait pas véritablement être une bonne idée. Bruce croisa lentement les bras.

— Ça pourrait être une solution… provisoire, avertit-il, avec un bref froncement de sourcils, avant tout commentaire. Mais je pense tout de même qu'il faudra aller acheter le nécessaire à un moment ou un autre. Et le plus tôt sera le mieux.

Le front du Faucon se plissa légèrement.

— Je pourrais m'en occuper.

Son collègue le contempla quelques instants, avant de faire un petit signe de tête.

— Je n'ai aucun doute sur vos capacités à rentrer et à sortir de la tour sans être vu, agent Barton. Ni même sur celui de faire vos achats dans la plus grande discrétion. Mais éviter en toute légalité une caisse enregistreuse…

Une petite grimace fugitive tordit les traits du dit agent. Depuis l'attaque, le monde connaissait non seulement les Avengers, mais aussi leurs visages. Ou du moins, New York les connaissait. Clint n'arriverait jamais à faire ses achats sans être reconnu, et le contenu de ses sacs ainsi que lui-même seraient probablement en tête des tabloïds dès le lendemain. Ce que les deux hommes préféraient éviter, pour des raisons évidentes.

— J'irai.

L'archer cligna des yeux. Bruce Banner qui sortait de son antre ? Voilà un évènement peu commun. Stark avait réussi, on ne sait trop comment, à retenir le docteur parmi la civilisation, mais le faire sortir de ces murs s'était vu opposer un refus clair et net de la part de ce dernier. Jusqu'à maintenant.

Mais d'un autre côté, c'était assez logique. Oui, le monde les connaissait, mais le monde avait surtout vu un gigantesque mastodonte vert. Seules quelques rares personnes, hors « confidence », connaissaient le véritable Bruce Banner. Le reste ne connaissait qu'Hulk. Le docteur était arrivé sur sa petite mobylette au milieu de bataille, et s'était aussitôt transformé, après tout.

Clint jeta un coup d'œil derrière son épaule, en direction du canapé.

— Par hasard, vous n'auriez pas du papier et un stylo sur vous, Doc' ?

— Heu, si…

Bruce extirpa d'un geste machinal le calepin qu'il gardait toujours sur lui, dans la poche de sa chemise (et ce, malgré l'étalage de technologie de la tour – les habitudes avaient la vie dure –), avant de le tendre avec un stylo au Faucon.

Avoir de quoi écrire en permanence à portée de mains n'était pas qu'une habitude bien ancrée, chez le docteur. C'était un besoin vital. Une nécessité. Dès qu'il avait une nouvelle théorie ou un élément nouveau, et qu'il ne pouvait se rendre au laboratoire tout de suite, il l'écrivait dans ce petit carnet. Hors de question de risquer d'oublier une seule seconde le moindre indice, la moindre idée, la moindre information, qui pourrait, à terme, lui permettre un jour d'éradiquer sa condition.

Clint feuilleta machinalement le calepin et arracha une page vierge à la fin, avant de tapoter pensivement son menton avec le bout du stylo. Après avoir observé quelques instants le plafond, il baissa la tête et nota une série de chiffres sans hésiter une seule seconde, avant de tendre le résultat au docteur Banner.

Le médecin cligna des yeux.

— Ses mensurations ? Et… elles m'ont l'air tout à fait exactes. Comment…

— Je l'ai palpé, répondit Barton en ouvrant et refermant les doigts.

Bruce, le stylo parcourant pensivement les lignes écrites, marqua un temps d'arrêt, et haussa franchement un sourcil.

— « Palpé » ?

— Un agent entrainé ne perd jamais une occasion de récolter des informations, Doc', énonça Clint, semblant toujours aussi neutre. J'ai beau être moins calé que Natasha en la matière, j'ai eu assez d'occasions ces derniers temps pour l'examiner. Et j'ai de bons yeux.

Ça, pour avoir de bons yeux… l'agent Barton avait probablement l'une des meilleures vues au monde. Et peut-être même la meilleure.

Bruce ne chercha donc pas à discuter, rangeant son sourcil et ce qu'il pensait du choix de mots dans un coin.

— Pour ce soir, on empruntera un pyjama à l'agent Romanoff, reprit-il, en rangeant le carnet dans sa poche. Mais uniquement un pyjama. J'irais chercher le reste dès demain.

Pour l'instant, ils allaient avoir besoin d'un peu de temps. La soirée entière ne serait pas de trop pour convaincre Jack de laisser ses habits fatigués de côté.

Tout à ses pensées, alors qu'il se dirigeait vers le canapé, l'Avengers manqua d'ailleurs de glisser sur quelque chose. Et en posant ainsi ses yeux sur la chaussette abandonnée sur le sol, Bruce ne put que secouer la tête.

Non. Définitivement.

La soirée entière ne serait pas de trop.

oOo

Le lendemain, en posant les yeux sur la foule grouillante des rues de New York, qui palpitait et s'agitait à moins d'un mètre de sa position comme un monstrueux organe vivant, Bruce Banner se dit qu'il avait eu une très mauvaise idée.

Les foules… n'évoquaient rien de bon. Moyens de dissimulation et pièges en puissance en même temps, elles renvoyaient l'image de la fuite. De la traque.

Sentant l'Autre remuer dans son esprit, l'Avengers se força à fermer les yeux et à respirer, lentement, calmement. Il l'avait déjà, il pouvait le refaire. User de l'IA de la Tour Stark pour tout et n'importe quoi n'était pas une solution durable. Aucun livreur ne passerait la nouvelle sécurité, pas sans le maître des lieux dans le coin, et Happy n'était pas un garçon de courses. Bien sûr, techniquement, Bruce pourrait délivrer les autorisations nécessaires. Tony lui avait donné les pleins pouvoirs. Mais il ne le ferait pas. La tour était la maison de Tony. Et même si sortir n'était pas la meilleure idée qui soit, que ce soit pour lui ou pour le monde, cela ne ferait pas de mal à son corps de marcher ailleurs que sur un tapis de course.

Puis, acheter quelques vêtements ne prendrait pas trop de temps. Si le réfrigérateur se vidait, il faudrait aussi penser à faire quelques courses alimentaires, mais ce n'était pas encore à l'ordre du jour. Le modèle se trouvant dans la cuisine était grand, très, grand. Et dans la pièce adjacente, il y avait toute une réserve à disposition. Pour ne pas dire qu'il n'y avait pas que les laboratoires qui étaient équipés de chambres froides. Si la nécessité s'en faisait sentir, la Tour Stark pourrait probablement tenir un siège.

Bruce secoua quelques instants la tête, méditant sur ce fait incroyable, et sur le soin obsessionnel du détail qu'avait apporté le milliardaire au moindre centimètre carré de son « bébé ». Puis il rentra les épaules, et s'enfonça d'un pas décidé, après avoir encore respiré longuement quelques instants, dans la fourmilière géante se trouvant devant lui.

Le trajet se passa pourtant sans incident notable, et Bruce arriva rapidement sur place. JARVIS lui ayant quasiment imprimé un itinéraire au mètre près, telle une mère inquiète de voir son fils quitter pour la première fois la maison, ce n'était pas si étonnant.

Lorsque les portes vitrées du magasin se refermèrent derrière son dos, il respira quand même un peu plus calmement (ou de façon moins contrôlée, c'était un peu confus), tout en cherchant à abaisser machinalement sa casquette. Avant de se souvenir qu'il n'en avait plus besoin depuis un moment. L'ex-fugitif se crispa quelques instants à ce souvenir du passé, puis se forçant à relâcher la tension s'accumulant dans ses épaules, s'avança entre les rayons. Et tout se passa très bien, jusqu'au moment où une vendeuse surgit obligeamment de derrière un présentoir.

— Vous cherchez quelque chose en particulier, monsieur ? demanda-t-elle immédiatement, d'un sourire plein de gloss et de dents impeccablement blanches, agitant ses ongles manucurés dans les airs alors qu'elle s'approchait.

Bruce se figea en un instant, imitant très bien une biche prise dans les feux d'une voiture, avant de se maugréer intérieurement et de forcer la « machine » à se remettre en route. Il souleva vaguement ce qu'il avait en mains.

— Non, c'est très gentil à vous, mais… commença-t-il doucement, avec un petit sourire poli, avant de se faire couper l'herbe sous le pied.

— Oh, mais c'est l'un de nos nouveaux t-shirts ! Ils font un malheur chez les jeunes, en ce moment, vous savez. C'est pour votre fils ? babilla-t-elle avec un rythme bien trop élevé et sans même prendre la peine de chercher à respirer entre deux phrases.

Avec une légère angoisse, l'Avengers pouvait presque voir la jeune femme sautiller sur place. Un peu plus, et elle battait des mains, ravie. Ravie de quoi, il n'en savait rien. Le scientifique jeta un bref coup d'œil au magasin et constata que les lieux n'étaient pas vraiment bondés. En fait, il était le seul client.

Pressentant une catastrophe imminente, le docteur Banner tenta une nouvelle approche.

— Je…

— C'est pour son anniversaire ? intervint subitement une deuxième vendeuse tout aussi souriante, en se glissant en un instant aux côtés de la première.

Mais d'où sortait-elle ?

— Non, c'est…

— Wouah, même pas ?! s'exclama une troisième, surgissant de derrière ses collègues, tel un diablotin jaillissant de sa boîte. Incroyable !

Une. Une invasion.

Bruce essaya très fort de ne pas cligner des yeux.

— Et il vous laisse lui acheter des vêtements, comme ça, sans rien dire ?

— C'est rare, une telle docilité.

— Et que ce soit vous, son père, qui vous en chargiez…

— Adorable, tout bonnement adorable !

Adorable ? Qu'est-ce qui était adorable, exactement ? Bruce ne comprenait pas, mais ce qu'il savait, c'est qu'il était dans une position dangereuse, et qu'il risquait de se faire encercler à tout moment. Non, rectification : il était déjà encerclé, et son rythme cardiaque commençait à faire de petits bonds de mauvaise augure. S'il ne sortait pas vite là, ça allait certainement mal finir.

Attrapant rapidement ce qu'il avait repéré, c'est-à-dire l'essentiel, Bruce Banner, l'hôte d'une force pour ainsi dire colossale et d'une intelligence redoutable, battit promptement en retraite.

Sous les gloussements et les babillages ravis de trois jeunes femmes tout à fait enthousiastes.

oOo

Clint Barton était franchement amusé.

Depuis sa confortable place sur le canapé, il avait tout vu. JARVIS ayant, en effet, décidé de pirater la caméra du magasin pour suivre en direct les pérégrinations du docteur. Ce qui, tout bien considéré, était un acte tout à fait logique, quand on décidait de lâcher le Hulk en personne dans les rues hostiles de New York. Mais il n'avait pu s'empêcher de noter qu'au passage, en plus de faire très « mère poule inquiète », que cet acte sonnait très « Stark », et que l'IA faisait preuve d'une marge de décision un peu plus importante que prévue. Il faudrait qu'il en touche deux mots au SHIELD, plus tard. Gérer son créateur n'était déjà pas chose facile, alors si son IA s'y mettait aussi…

Mais, pour l'instant, ce n'était pas à l'ordre du jour, et il s'était contenté de suivre avec intérêt le parcours de son collègue. Pour au final, le voir se hâter très très rapidement vers la sortie. Un petit sourire en coin s'était alors dessiné sur ses lèvres. Contempler le célèbre Hulk, redoutable force de la nature (et officieusement, relatif génie scientifique), être vaincu par trois demoiselles à peine sorties de l'adolescence, c'était quelque chose d'assez cocasse.

Lorsque la dite force de la nature était rentrée, Jack, lui, avait croisé les bras, bien décidé à prendre une pose se voulant menaçante, malgré le sourire qui avait flotté sur ses lèvres un peu plus tôt face au spectacle. Ce qui avait lamentablement échoué, étant donné que son pantalon s'était fait promptement la malle.

L'esprit avait dû le retenir in extremis en jurant, pour ne pas finir, eh bien, en très petite tenue au beau milieu du salon. Même avec l'aide d'un cordon et en ne prenant que les affaires de la plus fine d'entre eux, les vêtements restaient trop grands. Mais au moins, il les portait. Le convaincre n'avait pas été évident, et cela avait donné, la veille, libre cours à une mémorable partie de catch entre l'archer et le gardien. Que Bruce avait contemplé en silence. Pourtant, de façon assez surprenante, et sans que rien ne l'annonce, ce fut Jack lui-même qui y mit le point final. En acceptant d'enfiler le pyjama, et en filant surtout très vite à l'abri des regards pour le faire.

Personne n'avait trouvé à y redire. Tant qu'il acceptait de se changer… Et pour avoir accepté, il avait accepté, vu la façon dont il plongea immédiatement sur le sac de Bruce. Après une exclamation aussi vive que soulagée, la tête encore dedans, l'esprit s'en empara définitivement et fila s'habiller dans un coin, avec cette fois, un pantalon à la bonne taille. Visiblement, tout semblait mieux que les affaires trop larges de Natasha.

Clint sentit son petit sourire amusé revenir à la charge, tandis que le docteur Banner se remettait en commençant les préparatifs pour le dîner, et que Jack tentait quelques pas à côté du canapé, testant la sureté de ce nouveau pantalon. Pieds nus.

Repérant très vite les morceaux de laine plus ou moins dissimulés entre deux coussins, le Faucon les chopa au vol, avant de carrément se jeter de tout son poids sur sa cible pour la plaquer au sol sans hésitation.

Un petit moment plus tard, alors que leur futur repas commençait à dégager des effluves intéressants, et que Clint avait presque réussi à lui enfiler la deuxième chaussette (à Jack, pas au repas), la voix de JARVIS résonna à travers tout le salon.

— Le capitaine Steve Rogers se trouve actuellement dans les environs immédiats de la tour. Les scans de sécurité sont presque terminés, et Monsieur Rogers devrait atteindre cet étage dans un peu moins de cinq minutes.

Les deux Avengers présents se figèrent instantanément à ces mots.

— C'était prévu que… ? commença Bruce, sa cuillère en suspension au-dessus d'une casserole.

Clint, littéralement vautré sur Jack, se redressa, et s'assit avec le plus grand naturel sur le dos de ce dernier, le clouant toujours aussi efficacement au sol.

— Non.

Bruce, les yeux posés sur leur jeune invité, fronça les sourcils.

— Ce n'est pas vraiment…

L'agent, le regard fixé droit sur les portes de l'ascenseur, déclara avec son air neutre habituel :

— Le Captain, a, en dehors du champ de bataille, toujours eu un sens du timing quelque peu… particulier.

Sa phrase à peine achevée, le panneau de l'ascenseur clignota, et les portes qu'il fixait s'ouvrirent avec un chuintement discret. Clint retint un reniflement approprié.

Salut, Cap'.


Note de Chapitre (II) : Si des gens sont encore vivants dans la salle suite à... tout ça, je ne peux donner aucune certitude, étant encore en plein flou niveau déménagement/connexion, mais le prochain Chapitre : « Steve Rogers » (qui est tombé de sa chaise suite à ce titre ?), a pour objectif d'arriver le 28 février. Idéalement, dans deux semaines donc, comme d'habitude. Ou ce qui était prévu avant que la connexion ne me fasse faux bond, ahem.

Encore une fois, je vous remercie infiniment pour votre lecture, encore plus pour vos reviews, follow's et favoris (c'est juste trop d'honneur hiiii).