29/07/20

Hey hey hey tout le monde ! J'espère que vos vacances se déroulent bien malgré la petite crise sanitaire que nous traversons (et que beaucoup oublient aussi visiblement). Bref, en espérant que tout se passe bien pour vous, je reviens avec ce chapitre aujourd'hui ! Pour le coup, j'aimerais vraiment bien avoir vos réactions (:

Réponse aux reviews

Fenrir83, et Kalyska, merci pour vos reviews (j'ai répondu en privé) ;)

May : Hey ! Je suis contente de revoir des anciennes têtes ahah, même si j'admets que j'ai dû mal à me souvenir de sous quel pseudo tu as déjà commenté, désolée ! Franchement, OUI. En 5 ans, j'ai eu le temps de faire tout mon lycée, de commencer l'université (de faire un échec scolaire aussi oopsie). Je DETESTE laisser une histoire publiée inachevée, ça m'est arrivé tellement de fois je trouve ça frustrant. Je suis contente de m'être accrochée, on arrive bientôt à la fin maintenant...

J'imagine qu'avoir déjà une vie scolaire un peu plus stable m'aidera déjà ! Ca fait longtemps que c'est compliqué pour moi, m'enfin, je pense qu'on s'en sort au bout d'un moment, c'est gentil de t'en soucier haha

AH ! Quelqu'un qui apprécie Isaac ! A part ma bêta et moi-même, on est pas nombreux je crois... Et justement, j'aime beaucoup Eve aussi. Elle a beaucoup plus évolué que je ne le pensais, et en revoyant le début de cette histoire, je me rends compte qu'elle a beaucoup grandi (en même pas un an pour elle !).

Merci d'avoir laissé une review, tu n'imagines pas à quel point ça me motive de voir que malgré mon délai de publication indécent, y'a quand même des gens qui suivent :)


Précédemment *tum tum*: Après l'affrontement entre Karma et Nagisa, la Civil War de la classe E prend fin. C'est finalement la "Save Team" qui l'emporte (comme dans le manga). Alors qu'Eve se décidait à aller parler à Rio, un bruit de détonation éclate dans la colline. /CLIFFHANGER/


Chapitre 42 — Leçon perdue – L'heure du silence

Un coup de feu. Un vrai. Pas un de ces stupides pistolets anti-sensei à air comprimé. Pas une de ses balles qui picotait un peu si tirée de trop près. Cette fois, Eve savait. Elle le connaissait. Elle sentait le danger pulser dans chacune de ses capillaires.

Elle se jeta immédiatement à terre, rapidement suivie des autres élèves. Près d'elle, Irina qui eut le réflexe de tout de suite contacter les autorités. Eve fixait le sol, haletante. Pas encore. Pas ici. Ses ongles se mirent à gratter la terre, comme à la recherche d'une échappatoire.

— Calme-toi. Tu l'as déjà fait, tu peux le refaire.

La voix d'Isaac résonna quelques instants avant que les mots n'atteignent vraiment la jeune fille. Il fallait qu'elle reste calme. Qu'elle réfléchisse.

Nouvelle détonation.

Nouvel effondrement. Cette fois, ce n'était ni un accident, ni une coïncidence. Eve sentait son estomac se nouer, sa vue se brouiller, l'acide de son estomac remonter dans son œsophage.

— SILENCE ! Et que personne ne bouge !

Le cri de l'homme sembla déchirer l'air comme un éclair déchirait le ciel. Les élèves et les professeurs, à terre, fixaient les nouveaux venus. Koro-sensei lui demeurait debout ; il ne craignait pas ce genre de balles. Son gros visage jaune poussin s'endurcit, puis commença à virer à un noir d'encre que son entourage avait appris à craindre.

— Nous savons que vous possédez des informations sur notre Sauveur ! continua-t-il.

Le silence continuait de régner, même si la classe E ne comprenait toujours pas tout à fait le mobile de l'attaque. Des informations sur leur sauveur ? Les seules informations qu'ils possédaient, si c'étaient bien de ces dernières dont ils parlaient, concernaient Koro-sensei.

— Nous sommes ici pour vous empêcher de détruire le Sauveur de cette planète !

Alors là. C'était le pompon.

Ils venaient tout juste de voter pour ne plus le tuer que des inconnus au bataillon débarquaient pour Dieu sait quelle raison. Qu'allaient-ils seulement faire d'eux ? Ils avaient l'air bien trop menaçants pour émettre une quelconque hypothèse optimiste.

— Ce que comptent faire mes élèves ne vous regarde en aucun cas, gronda Koro-sensei, le visage cette fois définitivement noir.

Les élèves, toujours au sol attendaient la réaction de leurs assaillants. Ceux qui étaient présents à l'assaut du cinéma se faisaient encore plus discrets. Si la classe avait déjà souffert silencieusement de l'épisode du Dieu de la mort, le cinéma avait été un coup en trop pour beaucoup. Eve devenait folle : ils voulaient le sauver, elle aussi, eux aussi. Alors pourquoi ne pas discuter sans armes pointées sur eux ? Les lèvres de l'adolescente subissaient son anxiété, recherchant inlassablement une idée.

— Nous ne voulons pas le tuer ! s'exclama Nagisa, qui était moins effrayés que tous les autres élèves.

Eve observa le jeune adolescent se lever pour faire face aux ennemis. Son regard était dur et concentré, comme s'il paraissait se moquer complètement des blessures de son précédant affrontement avec Karma. L'Anglaise pris le temps d'examiner les hommes : ils formaient un groupe d'une bonne quinzaine de personnes. Ils étaient armés, Dieu sait comment, car le Japon restreignait pourtant le port d'arme, même si dans leur monde cela n'étonnait plus personne à présent.

Ils étaient grands et tous habillés de vêtements noirs de manière à cacher leurs visages et donc leur identité. Les armes, toujours braquées sur les adolescents et leurs professeurs, les empêchaient de faire quoi que ce soit.

— Sachez que si vous voulez la récompense, garder en otage mes précieux élèves annule automatiquement l'obtention de cette dernière, informa également le poulpe.

Ce dernier voulait agir ; mais ses élèves étaient trop éparpillés. S'ils venaient à ouvrir le feu, il n'aurait pas le temps de protéger tous ses élèves sans les blesser à cause de sa vitesse inhumaine. Le dilemme était cornélien. Il fallait alors convaincre ces hommes que ses élèves ne lui feraient aucun mal.

— AU SOL ! AU SOL ! répéta compulsivement l'homme en noir.

Nagisa, résigné, s'abaissa pour se retrouver dans la même position que ses camarades. La frustration grimpait en lui. Il observa son Koro-sensei à la dérobée ; s'il n'avait pas agi, c'est que le risque était trop grand. Il en ferait de même.

— Je sais qui vous êtes, prononça Eve aussi fort qu'elle ne le put.

Un silence pesa.

Le regard toujours rivé sur le sol, la sueur perlant par tous ses pores, l'Anglaise se força à continuer :

— Nous ne voulons pas non plus tuer votre… « Sauveur », poursuivit-elle, la voix tremblotante.

— MENSONGES ! Le gouvernement vous paie et vous a formé pour ça ! hurla un des autres hommes, qui avait crié à Nagisa de se remettre au sol.

Ils sont fanatiques. Avec amertume, Eve se rendit compte de la véracité des informations que Ritsu lui avait fourni. Il était donc impossible de discuter avec eux. La jeune fille sentit le canon d'une arme se rapprocher d'elle. Cette fois, son corps se mit à trembler de façon incontrôlable. Elle n'osait même pas observer l'homme qui la mettait en joue ; elle préférait mourir plutôt que de revivre cette scène.

Elle ferma les yeux. Attendant presque que la balle ne lui traverse le crâne, n'arrache une à une les connexions nerveuses de son cerveau, celles qui lui donnaient vie et faisait d'elle qui elle était, détruise l'autre côté de sa boîte crânienne, et achève enfin sa misérable vie.

Mais cela n'arrivait pas.

— Nous ne voulons pas le tuer ! Laissez-nous tranquille !

Cette fois, c'était Hinano qui avait crié. Peut-être était-ce en voyant l'Anglaise aussi mal en point, peut-être était-ce nerveusement, peut-être pensait-elle réellement qu'en le répétant une fois de plus, ils seraient raisonnés.

Seulement, au même instant, les sirènes de voitures de police résonnèrent autour de la plus haute colline de Kunugigaoka. Le sang de tous les individus sur la colline se figea : les uns parce qu'ils savaient que des renforts arrivaient, les autres parce qu'il ne leur restait que peu de temps pour achever leur mission.

Et cette fois, les iris de quelqu'un qui a déjà vu la mort, sait quand elle arrive, finirent par distinguer l'ombre de celle-ci.

PAN.

Une balle fut tirée. Ce fut le début d'un affrontement chaotique. Koro-sensei commença par mettre à l'abri les élèves les plus loin d'Irina et Karasuma, tandis que ces derniers s'occupaient des autres.

Eve ne put respirer. Elle voyait le sang. Encore du sang. Tellement de sang. Il coulait presque autant que coulaient les larmes sur son visage. Son cri resta bloqué, tout comme son souffle, au milieu des cris des autres hommes en noir, au milieu des autres élèves qui hurlaient eux aussi. Elle voyait son sang couler.

Sang. Rouge. Rouge. Rouge. Vengeance.

Elle voulait attraper l'arme d'Isaac. Elle se voyait la sortir du holster, la crosse de métal entre les mains. Puis elle se voyait se lever et aller éclater la tête de celui qui avait fait ça. Cet enfoiré qui fuyait. Mais elle le poursuivait, son corps n'était plus qu'un outil pour accomplir sa vengeance. Son cœur en tachycardie n'était qu'un tambour qui sonnait l'heure de la guerre. Elle enclencha le chien du revolver, posa son index sur la détente avant de faire tomber l'enflure d'un coup de pied dans les chevilles.

Il tombait, presque au ralenti. Elle, elle n'avait jamais été aussi rapide, minutieuse, incisive. Cherchant à abattre son adversaire d'un seul coup.

Elle se voyait. Au-dessus de lui. L'extrémité de l'arme en face de son regard pétrifié.

Elle appuya sur la détente.

— Eve. Lâche-ça.

Elle remonta à la surface.

Rien n'avait été imaginé. Elle baissa les yeux : l'homme était toujours allongé, le souffle coupé. Mais la balle n'était pas partie. Elle n'avait pas entendu le bruit. Quoique. Il devrait déjà avoir un trou entre les deux yeux. Quand elle releva la tête, elle comprit. Koro-sensei était debout devant elle, le teint jaune cette fois, un sourire désolé accroché à sa tête ridiculement trop ronde.

C'était comme l'autre fois. Tous ses sens semblèrent se remettre à fonctionner d'un coup. Ses poumons qui brûlaient, son cœur qui semblait vouloir s'échapper de sa cage thoracique, sa gorge serrée qui l'empêchait presque de respirer. Tout en même temps.

Koro-sensei lui fit signe de se retourner.

Isaac.

Eve fit le chemin inverse à une allure modérée compte tenu de la situation. Elle avait peur de ce qu'elle allait voir. Elle ne voulait pas affronter ça. Pourtant, chacun de ses pas la rapprochait doucement plus de ce qu'elle craignait le plus. Elle s'agenouilla près de son mentor.

Oh non. Oh non. Non. Non.

Un élève auquel Eve ne décrocha même pas un regard tentait de maintenir l'hémorragie. Mais il était évident qu'une artère principale était touchée. La jeune anglaise avait presque oublié à quel point le sang était rouge, et surtout à quel point le corps humain en était normalement constitué.

— Pars pas. Tu peux pas faire ça maintenant gros con, siffla Eve la voix brisée.

L'intéressé ne put répondre que d'un sourire fatigué duquel s'échappa un filet de sang. L'Anglaise dégagea les mains qui appuyaient sur la blessure pour y mettre les siennes. Si elle appuyait plus fort, elle pourrait réduire le flot et peut-être que des secours pourraient-

— C'était très Black.. widow ce que tu as fait.

— Oh mon dieu, tais-toi, les secours vont arriver, économise ta salive parce que je vais pas te laisser comme ça. Je vais clairement pas te laisser t'en tirer comme ça espèce de gros salopard macho.

Eve ne s'embêtait même plus à étouffer ses pleurs. De quel groupe sanguin était-il déjà ? Les sirènes paraissaient proches maintenant. Ça irait. Ça irait. Il le fallait.

— Eve.

— Koro-sensei ! s'exclama Eve d'un ton rassuré. Il est A+, je me rappelle maintenant. Il me faut au moins 5 poches de sang, à température ambiante. Oui, oui, c'est comme ça il m'avait expliqué. Il faut ça et amenez un médecin aussi et-

— Eve, répéta-t-il doucement, mais étrangement d'un ton plus ferme.

Ses mains étaient couvertes d'hémoglobine. La chemise d'Isaac, habituellement d'un blanc immaculé n'était plus qu'un lointain souvenir. La poitrine de l'homme ne se soulevait plus que d'un mouvement imperceptible, presque invisible.

— Mais qu'est-ce que vous faites ? demanda Eve d'une voix faible, ne comprenant pas ce qu'il se passait. Dépêchez-vous, enfin !

Seules les sirènes, les cris des policiers et les gémissements de douleur d'Isaac semblèrent lui répondre.

— S'il vous plait, implora l'adolescente. Je serais sage, je ferais plus n'importe quoi comme me barrer à l'autre bout du monde. Je dirais la vérité, je ferais plus la folle, j'arrêterais de vous engueuler vous et les autres. Je ferai ce qu'on me dit, mais s'il-vous-plaît faites quelques chose !

Une main faiblarde attrapa l'avant-bras blessé de la jeune fille. Eve se retourna vivement vers le blessé. Il l'avait sauvée quand elle avait été mal en point. C'était une balle aussi. C'était possible. Il fallait juste que cet idiot s'accroche un peu plus.

— Accroche-toi ça va le faire, je suis là, rassura-t-elle.

— Demande.. à Ritsu… elle te dira…

— Oui, oui, mais tu m'expliqueras plus tard c'est bon, tais-toi maintenant.

Les lèvres de l'ancien agent se soulevaient doucement, comme pour laisser s'échapper difficilement des mots qui semblaient rester bloqués.

« Désolé… »

Les paupières lourdes de l'agent du gouvernement se fermèrent sur les iris chocolat qui distingèrent des yeux vert sapin pleurer pour lui. Il était satisfait. Il ne pensait pas que quelqu'un le pleurerait.

— On le perd… on le perd..!

— Eve, c'est fini.

Oh.

Elle s'arrêta de pleurer d'un coup sec. Oh. C'était donc ça. La main qui agrippait son avant-bras se mit à glisser jusqu'à la terre devenue poisseuse. Elle s'était murée dans le déni. Bien évidemment. Ce serait trop dur pour elle si elle se rendait compte une nouvelle fois de son inutilité. A quel point elle était incapable.

Ses doigts attrapèrent la main qui était posée au sol. Doucement, comme si elle pouvait se briser, elle la serra doucement. Isaac était un macho idiot, sans humour, égocentrique, sans empathie, sans beaucoup de qualités finalement. Mais aussi sans personne.

Et personne ne méritait de mourir seul. Surtout pas lui. Il n'était clairement pas parfait. Il était même loin de ça. Mais à son égard, il avait malgré tout été un soutien. Dans son poignet, elle sentit sous ses doigts une faible pulsation. Elle serra la main plus fort encore. Pour qu'il sache qu'il n'était pas seul. Doucement, sa tête fatiguée se reposa sur l'épaule de l'agent. Les pulsations se firent plus distantes et plus faibles. Après de longues, très longues secondes, quand elle ne sentit plus rien, Eve lâcha la main.

Elle lâcha tout. Elle lâcha toutes les larmes qu'elle avait retenu depuis ces derniers jours, elle lâcha toutes les insultes qu'elle avait en réserve. Elle se sentait de nouveau seule au monde. Elle lâcha au sol tous les coups qu'elle aurait aimé donné aux fanatiques.

…xX*Xx…

— Eve ?

Isaac était parti. Le Soleil était en train de se coucher. Eve n'avait même pas bataillé quand des ambulanciers avaient pris le corps. Elle était restée statique, les mains en sang, le regard vide. Après quelques seconde de latence, l'Anglaise releva la tête. C'était Rio. Elle n'avait pas l'énergie de se battre. Mais quand deux bras l'étreignirent, elle se détendit. Elle aurait voulu pleurer, mais ses yeux étaient secs. Elle était même trop fatiguée pour verser des larmes.

Elle serra plus fort son amie contre elle. S'il y a quelques secondes elle se sentait seule, avoir sa meilleure amie à ses côtés avait enlevé au moins un poids de son corps. D'abord confuse et réservée, Eve se sentit doucement soulagée.

— Je suis désolée.

Eve fut indécise devant ses mots. Etaient-ce des excuses de condoléances, s'excusait-elle de quelque chose ? Rio comprit qu'elle n'était pas claire devant le silence de son amie, et continua :

— On aurait dû discuter. Et je suis désolée de ce qui est arrivé aujourd'hui. Il méritait pas ça. Je… Je pense pas que tu doives rester seule avec tout ce qu'il s'est passé. Et je ne parle pas que d'aujourd'hui. Je sais pas exactement tout ce que tu as dû faire, et supporter depuis notre dispute mais… Je pense que ça fait suffisamment longtemps que tu portes tout toute seule. Si tu as envie de m'en parler, et même avant ça de rester avec moi, tu peux.

Pour seule réponse Eve se rejeta dans ses bras. Elle aimait la chaleur de son amie : elle lui avait manqué. Elle avait rarement vu quelqu'un d'aussi sensible et débile à la fois. Mais c'était son amie et toutes leurs idioties lui avait grandement manqué. Au loin, les professeurs observaient la scène, légèrement rassurés. Leur élève la plus instable venait de retrouver un peu de réconfort, mais cela n'empêchait pas qu'ils avaient à présence une classe probablement traumatisée de leur prise d'otage et d'un meurtre.

Si personne n'appréciait vraiment Isaac, les élèves du cinéma lui étaient au moins reconnaissants. Les autres le trouvaient antipathique, mais pas tellement méchant.

…xX*Xx..

— Si tu as besoin de quelque chose, je suis en bas, indiqua Rio.

— Merci Rio.

Les cheveux encore dégoulinants, Eve fixait son écran de portable, morne. Silencieusement, elle cliqua sur l'application de Ritsu. La petite androïde lui sourit tristement, visiblement au courant de l'incident.

Sous ses ongles se trouvaient encore un mélange de terre et de sang. Elle le fixa mollement avant de s'activer à effacer les dernières traces physiques de ce qui s'était passé. Ses parents prévenus, Eve passait la soirée chez Rio. La police et les pompiers avaient officiellement été appelés pour un départ d'incendie : le bâtiment de la classe E étant vétuste, ça ne paraissait pas incohérent.

Eve hésitait.

Que lui avait donc laissé Isaac ? Ses dents se refermèrent sur ses lèvres d'ores et déjà en sang après une après-midi passée à penser. Elle réouvrit finalement son portable, et tapota sur l'application.

— Isaac m'a laissé quelque chose, prononça difficilement la brunette.

L'application s'ouvrit et laissa apparaître une myriade de dossiers, vidéos, fichiers, tous plus mal organisés les uns que les autres. Parcourant rapidement les noms des dossiers, Eve comprit que l'héritage de son mentor promettait d'être utile.

Finalement, au milieu de ce capharnaüm de documents figurait un fichier texte différent des autres. « For Eve ». Elle hésita à ouvrir, bien qu'il n'y ait aucune ambiguïté quant au destinataire. Elle ferma les yeux quelques secondes, inspira, et cliqua pour en découvrir le contenu.

« Je ne sais pas combien de temps il me reste. Si tu lis ces lignes, c'est qu'il m'en restait bien moins que ce j'espérais. Enfin, de toute façon mes jours étaient comptés, quelle que soit la manière dont je vois la situation.

Tu dois bien te demander. Pourquoi toi ? En réalité, cela aurait pu être toi comme quelqu'un d'autre. Ci-joint quelques petites infos que j'ai récupéré ces dernières années, dont les plus récentes grâce à toi.

Maintenant que je suis mort, je ne pourrais plus les utiliser, mais j'ai espoir que tu t'en sortes bien. Ne les laisse juste pas pourrir dans un disque dur. C'est tout ce que je te demande. »

Elle ne pensait plus cela possible, mais une, puis deux larmes se mirent à dévaler ses joues déjà éreintées par sa journée. Pas par tristesse cette fois-ci. Elle était énervée. Pas un mot pour elle. Juste des « occupes-toi des infos stp ». Les gouttes salées continuaient de s'échapper de ses paupières rougies, sans discontinuer. C'étaient quelques pauvres mots qu'il avait probablement eu le temps d'écrire aux chiottes. Etait-ce donc tout ce qu'elle méritait ?

Il s'était servi d'elle. Eve gloussa tristement : elle aussi l'avait utilisé. Elle n'était pas toute blanche non plus. Isaac était loin d'avoir été le seul opportuniste dans cette histoire.

Mais elle n'avait pas son détachement. Si elle avait disparu, il ne s'en serait sûrement pas soucié.

Le dos de l'adolescente se pressa contre le carrelage froid de la salle de bain, puis il glissa pour qu'Eve se retrouve en position assise. Elle sentit le goût métallique du sang émerger de ses lèvres meurtries, qu'elle mordillait sans même s'en rendre compte. Ce contact la fit tressaillir. C'était officiel, elle ne supportait plus le sang. Grande sera sa joie lorsque Mère Nature rendra sa visite mensuelle, rendant encore plus éprouvante cette période déjà bien difficile.

Le sang lui fit remonter toutes les images qu'elle tentait désespérément d'oublier. Les sirènes qui hurlent, la terre humide sous ses doigts crispés, un fanatique qui s'apprête à tirer sur Hinano, Isaac qui se place devant la trajectoire.

Ah.

C'était donc ça. Peut-être que son égoïste petite personne ne supportait pas qu'il se soit sacrifié pour quelqu'un d'autre. Et pas pour elle. Et pourquoi donc d'ailleurs ? Pour finalement crever comme un martyr, mais à part elle, personne ne le pleurait. Idiote. Oh ce qu'elle était idiote.

Enragée, Eve retourna son regard vers le reste des documents. Elle aurait voulu qu'ils brûlent tous. Elle supprima la note qu'elle venait de lire, et parcouru le reste des documents qu'elle n'avait pas vu. Sélectionnant un à un les fichiers qui allaient bientôt disparaître de la surface de la planète.

« Eve.. »

Ignorant la voix robotique, l'Anglaise continua de cocher chaque nom, et arrivant presque à la fin, une nouveau fichier s'ouvrit. Elle n'avait pourtant pas cherché à l'ouvrir. « Merci quand même », « une vraie emmerdeuse », « un peu suicidaire quand même ». C'était la version antérieure de ce qu'elle avait lu, certains passage étaient barrés avaient été supprimés de la version finale. La fin originale était la suivante « Désolé. »

« Je pense que ce que tu as lu n'était pas représentatif de ce que tu as l'air de penser Eve. Tu sais, j'ai fait partie de votre équipe clandestine. J'ai bien vu qu'il ne s'occupait pas de toi seulement pour ne pas avoir de problèmes. Et pas seulement pas peur de représailles de Koro-sensei. »

La pointe d'humour de l'IA fit sourire la brunette. Reniflant un coup, elle la laissa continuer.

« D'après ce que j'ai pu apprendre, je me permets de t'apporter ces informations complémentaires. Elles devraient t'aider à effectuer un meilleur deuil. Moi-même je.. dois apprendre. Courage Eve, ce n'était pas facile, mais je suis convaincue que tu as fait ce qui était le mieux à faire. »

Les pixels qui composaient Ritsu s'animèrent d'un sourire triste, fermèrent les documents, et affichèrent une photo de Eve et Rio.

— Merci Ritsu, je pense qu'on t'oublie trop souvent. Tu es vraiment devenue indispensable ici. Et merci pour tout ce que tu as fait haha…

Après son rire nerveux, Eve se releva et ouvrit finalement la porte de la salle de bain. Il fallait qu'elle se force à aller de l'avant. Elle savait que rien ne serait comme avant, elle savait qu'elle aurait de nouvelles crises, de nouveaux coups de mous. Mais elle savait également que rester seule comme elle l'avait fait n'avait pas été la solution. Si elle ne pouvait s'empêcher de se sentir coupable de ce qui était arrivé, elle se forçait à avancer.

Descendant les marches de l'étage, elle se souvint du début de l'année. De cette époque où elle était innocente et pensait naïvement que tout irait bien.

Mais en voyant le sourire de sa blondinette préférée, Eve eut envie d'y croire une nouvelle fois.


J'espère que vous avez apprécié ce chapitre, il a fait pleuré ma bêta... (déso jtm)

Petit point important : on arrive presque à la fin de cette histoire, et j'avais de prévu un chapitre "bonus". S'il y a des choses que vous aimeriez voir, des questions, des intéractions entre les personnages ou des informations, n'hésitez pas à le dire en commentaire (:

A suivre