Coucou les amis,

Voici le vingtième (j'aime l'idée de finir sur un chiffre rond) et dernier chapitre ma première fiction !

Quand j'ai commencé à la publier, il y a quelques semaines, je ne pensais pas être lue par tant de personnes, et surtout, recevoir tant d'encouragements et de compliments : un ÉNORME merci à vous tous, lecteurs et commentateurs ! Ça a été une merveilleuse expérience, et j'ai été contente de la partager avec vous tous.

Dans l'immédiat, je ne prévois pas de démarrer une nouvelle fiction, même si l'envie d'écrire est toujours là ; j'imagine que dans quelques temps, je reprendrai peut-être "Sorybrooke Collège" pour l'améliorer et l'enrichir (et dieu qu'il y a de quoi faire ...), ou je me lancerai dans l'écriture d'une autre FF, voire d'un récit totalement déconnecté d'une série télé ... cela se fera selon l'inspiration du moment ! Dans tous les cas, je reviendrai poster ici.

Bonne lecture !


Chapitre 20

- Je suis la petite amie d'Emma. Enchantée, Mlle Mills.

Ces mots résonnèrent un long moment dans la vaste demeure. Emma ôta sa main du bras de Lily, comme si elle s'était brûlée. Elle la regardait avec un air d'incompréhension totale : qu'est-ce qu'elle racontait ? Jamais elles n'avaient eu de liaison ! Elles s'étaient connues très jeunes, alors qu'elles étaient toutes les deux dans une période délicate de leur vie, et elles avaient noué une forte amitié, chacune pouvant compter sur l'autre lorsqu'elle était en galère. Puis leur relation avait connu des hauts et des bas, et cela faisait maintenant quelques années qu'elles ne s'étaient plus données de nouvelles. Lorsque Emma l'avait vue, là, dans l'entrée, elle avait ressenti une bouffée de joie : Lily n'était pas forcément associée à une période heureuse de sa vie, mais elle avait souvent été pour elle une vraie bouffée d'oxygène.

Ce plaisir des retrouvailles avait cependant vite été balayé par sentiment d'ahurissement complet : à quoi jouait-elle en prétendant être sa « petite amie » ?

Après un temps qui sembla infini, la blonde pivota vers Régina. Sans qu'elle en ait réellement conscience, son esprit nota le sourire sardonique qu'arborait Cora Mills, toujours observatrice silencieuse de la scène qui se jouait entre les trois jeunes femmes. La Principale du collège de Storybrooke était blanche comme un linge le sang semblait avoir quitté son visage. Totalement figée, ses yeux vides étaient posés sur Emma. Les lèvres légèrement entrouvertes, elle donnait l'impression de vouloir dire quelque chose, mais pas un son sortit de sa bouche.

Emma prit la parole :

- Régina …

- Ta petite amie ?

La voix atone de la brune l'avait coupée dans sa phrase. Une sueur glacée recouvrit le corps d'Emma : Régina n'allait quand même pas croire ce que Lily racontait !

- Non ! Ce n'est pas ma petite amie !

La jeune enseignante avait crié, des accents de panique dans la voix. Elle prit à partie Lily, toute trace de chaleur ayant disparu de son visage :

- Qu'est-ce qui te prend ? Tu es complètement cinglée ! Pourquoi …

Son ancienne amie la coupa à son tour, et sans lui accorder le moindre regard, s'adressa à nouveau à Régina :

- Ma petite amie, oui …

Elle sembla vouloir continuer, mais les mots moururent dans sa gorge, et elle déglutit, comme si tout à coup elle avait du mal à parler. C'est à moment-là que Cora Mills se fit entendre.

- Régina, ma chérie …

Elle s'approcha de sa fille tout en parlant.

- Tu me connais, quand j'ai su que tu entretenais une relation avec cette … femme (ce dernier mot avait été comme craché, et accompagné d'un regard chargé de mépris envers Emma), j'ai fait quelques recherches à son sujet … et ce que j'ai trouvé m'a horrifiée.

A présent, elle tenait dans ses mains celles – glacées – de sa fille, pendue à ses lèvres, malgré elle. Elle poursuivit, du même ton onctueux.

- Je ne vais pas y aller par quatre chemins : elle en a après ton héritage, ou plutôt, devrais-je dire, elles en ont eu après ton héritage.

Elle fit un mouvement de la tête vers Lily.

- Elle m'a tout raconté … c'est Emma qui a eu cette idée … te séduire, te mettre dans son lit, pour ensuite, progressivement te soutirer de l'argent … dont elle profiterait avec sa petite amie.

Cora lâcha ses mains, et la prit par les épaules, ses yeux plantés dans ceux de la brune. Régina, totalement perdue, était incapable de se détourner d'elle.

- Lily a accepté de tout me raconter car elle ne supporte plus cette situation … au début, elle avait été d'accord, pour l'argent, mais là, elle trouve que cela va trop loin …

Emma secoua la tête, comme pour sortir d'un mauvais rêve. C'était ça, elle était en train de cauchemarder, et elle n'allait pas tarder à se réveiller. Tout au long de la tirade de Cora Mills, elle avait été dans l'incapacité de réagir, tant elle était sidérée par ce qu'elle entendait. Quand enfin le silence revint dans le manoir, elle fit un pas vers sa compagne :

- Régina … Tu ne crois pas à tout cela, n'est-ce pas ?

Sa voix se voulait assurée, mais elle ne put s'empêcher de trembler.

- C'est ta mère qui a manigancé tout cela ! Pour nous séparer ! Tu t'en rends compte, hein, que c'est du grand n'importe quoi ?

Emma fit brusquement volte-face, apostrophant sans ménagement Lily :

- Qu'est-ce qu'elle t'a promis, cette folle, pour que te racontes un tel tissu de mensonges, hein ?

- Ne traite pas ma mère de folle !

Sa Principale avait hurlé. Le sang sembla tout à coup refluer dans son visage. Celui-ci, sans expression jusque-là, se déforma sous le coup de la colère, de la tristesse et d'une immense et cruelle déception.

- Je te l'avais dit, ma chérie … elle est comme Daniel, qui s'est si facilement détaché de toi quand je lui ai proposé une grosse somme d'argent … ce n'est pas à toi qu'elle s'intéresse …

La voix mielleuse de Cora s'insinuait comme un poison dans le cerveau de Régina toute la douleur qu'elle avait ressentie à l'époque où Daniel l'avait trahie remonta d'un coup, l'envahissant totalement. Elle n'était plus capable de réfléchir sereinement, ou d'être rationnelle. Sa mère la connaissait parfaitement, et avait utilisé son point faible : l'intolérable sentiment d'abandon qui avait été le sien quand elle avait découvert que son amant l'avait trompée. Bien sûr, Régina s'en était remise, mais Cora savait qu'il serait facile de rouvrir la plaie, et que sa fille y serait particulièrement vulnérable.

OOOoooOOO

- Emma ?

La voix de Ruby dénotait toute l'inquiétude de la rousse. Son amie assise à côté d'elle dans la voiture n'avait pas décroché un mot depuis qu'elles avaient quitté le manoir des Mills. La jeune femme l'avait appelée, lui demandant de venir rapidement la chercher. Ruby n'avait au départ même pas reconnu la voix de son amie, tant celle-ci était dévastée.

- Emma, tu veux bien me dire ce qui s'est passé ?

L'enseignante de mathématiques était incapable de lui répondre. Les événements de la dernière heure écoulée tournaient sans cesse dans son esprit : l'arrivée de Lily, sa joie de la retrouver, l'incompréhension devant les mots de celle-ci, la colère lorsqu'elle comprit ce que Cora Mills était en train de faire, et l'horreur de se rendre compte que Régina avait foncé tête baissée dans la brèche.

Tout à coup, une colère froide l'envahit : comment avait-elle pu croire sa mère ? La manœuvre était tellement évidente ! Toutes les deux savaient que Cora Mills voulait les séparer, et pourtant Régina ne lui avait pas laissé une chance de s'expliquer : les affirmations de Lily, les mots de Cora, avaient suffi pour que la brune la rejette, et lui demande de partir.

Au fond d'elle, Emma savait pourquoi sa Principale avait réagi si violemment, de manière si épidermique : sans nul doute, tout cela lui avait renvoyé à la figure la trahison de Daniel, et folle de douleur, elle avait refusé de retomber là-dedans, préférant couper toute discussion avec Emma. Régina ne leur avait laissé aucune chance … jamais elle n'avait semblé mettre en doute les paroles de sa mère, ou même de Lily. Elle était tombée dans la faille ouverte par sa mère les pieds joints, et Emma ne put s'empêcher de ressentir un immense sentiment de déception : la brune ne lui faisait pas confiance, elle venait d'en avoir la preuve criante.

La colère occultant un peu la douleur qu'elle ressentait, l'enseignante prit enfin la parole, expliquant en quelques mots heurtés ce qui s'était passé à son amie. Ruby, d'abord incrédule, frappa violemment son volant, faisant une embardée sur la route :

- Mais quelle garce, cette bonne femme !

Elle fulminait.

- Mais comment Mills a pu être assez stupide pour croire sa mère ? C'est gros comme une maison, son histoire ! Et comment Lily a pu te faire ce coup-là ?

Ruby ne décolérait pas. Les réactions virulentes de son amie réconfortèrent un peu Emma.

- Elle l'a fait pour l'argent … elle me l'a avoué à demi mots avant que je ne parte … Cora lui a promis un énorme paquet si elle racontait à Régina qu'elle était ma copine … et comme on ne s'était pas quitté en très bons termes, et qu'elle avait besoin d'argent … j'imagine que cette … mégère n'a pas eu trop de mal à la convaincre de me faire ce coup-là …

Son ressentiment contre Régina était retombé aussi brusquement qu'il était venu. Elle se sentait totalement vide. Elle venait de perdre l'être qui lui était le plus cher, et elle avait l'impression qu'un trou béant avait pris la place de son cœur dans sa poitrine.

- Ce n'est pas possible que Régina Mills se laisse avoir comme ça elle va se rendre compte que tout ce que sa mère a raconté n'était que des conneries, ce n'est pas possible autrement.

La voix forte et convaincue de Ruby résonna dans l'habitacle de sa voiture. Emma aurait voulu la croire, mais elle avait la certitude que celle-ci, engluée dans son passé, aurait le plus grand mal à se sortir des griffes de sa mère.

OOOoooOOO

Régina fixait les flammes qui dansaient dans la cheminée de son appartement. Assise dans le canapé, elle entendait sa mère qui préparait une boisson chaude dans sa cuisine. Cette dernière avait absolument tenu à rentrer avec elle, refusant de la laisser seule après ce qui s'était passé. A vrai dire, la Principale du collège de Storybrooke se moquait totalement qu'elle soit là, ou pas. Et si elle avait été dans son état normal, elle se serait rendue compte que Cora Mills avait uniquement tenu à être présente auprès d'elle pour vérifier qu'elle ne cherche pas à recontacter Emma. La femme d'affaires avait d'ailleurs été très vite été soulagée sur ce point : elle avait tant et si bien convaincu sa fille de la trahison de l'enseignante, que celle-ci n'avait même pas essayé de joindre son amante. Depuis qu'Emma avait quitté le manoir, le cerveau de la brune s'était comme déconnecté de son corps, et celui-ci avait pris le relais, faisant mécaniquement tout ce qu'il avait à faire : manger, dormir, s'habiller … La Principale avait même réussi à aller travailler, traitant les affaires courantes comme elle avait l'habitude de le faire, répondant au téléphone, gérant les élèves pénibles ou les dossiers urgents. Mais ce n'était pas elle, Régina, qui faisait tout cela. Elle, elle était restée bloquée à ce qui s'était passé en ce dimanche matin, avec l'arrivée de cette Lily Page. La petite amie d'Emma. Elle ferma les yeux à ce souvenir, et s'enfonça un peu plus dans le canapé. Elle sentit qu'on lui mettait une tasse brûlante entre les mains, mais elle ne réagit pas. La petite amie d'Emma. Elle avait mis un temps infini à se remettre de la trahison de Daniel, puis avait fait un énorme travail sur elle pour enfin refaire confiance, et voilà que tout recommençait … bien sûr, Emma avait essayé de nier … mais comment la croire ? Daniel n'avait-il pas fait de même ? Elle avait bien vu comment Emma avait regardé Lily quand elle était entrée dans le manoir … elle avait rayonné, littéralement. Elle l'avait prise dans ses bras.

La brune secoua la tête de dépit, et se leva, posant la tasse sur la table basse.

- Je vais me coucher.

- Ma chérie … il faut que nous parlions. Tu ne peux pas continuer à te morfondre comme ça. Les Mills ne se morfondent pas. Ils encaissent, et se relèvent.

La voix dénuée de tout amour maternel de Cora Mills lui fit lever les yeux vers sa propriétaire.

- Je me morfondrai si j'ai envie de me morfondre, mère. Et si cela ne vous plaît pas, je ne vous retiens pas. Je suis sûre que des affaires urgentes vous attendent à New-York.

Les mots claquèrent sèchement. Sans attendre de réponse, Régina tourna les talons et alla s'enfermer dans sa chambre.

OOOoooOOO

3h42. Emma soupira, exaspérée, et balança ses couvertures au bas de son lit d'un coup de pied rageur. Une semaine. Cela faisait une semaine qu'elle ne dormait plus. Et il ne fallait pas être devin pour savoir pourquoi. Presque machinalement, elle jeta un coup d'œil à son portable. Deux messages, de Ruby et de Mary Margaret, l'attendaient. Malgré son immense tristesse et sa fatigue, ils lui arrachèrent un petit sourire. Heureusement que ses amis avaient été là l'enseignante d'arts plastiques avait rapidement fait passer l'information aux autres, et tous avaient répondu présents, faisant de leur mieux pour la soutenir. Une semaine que Régina l'avait congédiée, et que celle-ci refusait de la voir, ou même de répondre à ses appels. Elle avait beau eu tenter de l'intercepter au collège, frapper chez elle, rien n'y avait fait.

Emma avait passé ces sept jours à osciller entre un désespoir sans fin, et une colère froide et toxique. Car oui, elle en voulait à Régina. Elle lui voulait terriblement d'être tombée si facilement dans le piège tendu par sa mère. Les ficelles étaient tellement grosses ! Dans ces moments de rage, Emma aurait voulu avoir la force de l'oublier, et de passer à autre chose. Mais c'était parfaitement impossible. Pas une minute ne passait sans qu'elle ne pense à la brune. Elle se retourna pour la énième fois dans son lit, les yeux remplis de larmes, serrant son oreiller à s'en étouffer. La douleur lancinante au fond d'elle menaçait de la submerger, et elle doutait de pouvoir encore lui résister bien longtemps.

Subitement, elle se redressa dans son lit, les poings serrés enfoncés dans le matelas. Il fallait qu'elle fasse quelque chose, cela ne pouvait plus durer.

OOOoooOOO

- Régina, il faut que vous fassiez quelque chose. Vous ne pouvez pas rester dans cet état.

La voix douce et prudente de son Adjoint fit lever la tête à l'intéressée. Quand le regard de la Principale se posa sur lui, il dut se faire violence pour ne pas reculer d'un pas, tant ce dernier était hostile.

- Graham … si vous évoquez encore une fois, de près ou de loin, ma vie privée, je vous donne ma parole que je ferai tout ce qui est en mon pouvoir pour vous faire muter.

Cette fois-ci, le jeune homme recula véritablement. Il déglutit, et pour la première fois depuis longtemps, il repensa à cette image de la Méchante Reine qui l'avait poursuivie fut un temps à ce moment précis, elle ne l'avait jamais autant méritée. Graham l'observa, alors qu'elle s'était remise à écrire, l'ignorant complètement. Sa supérieure n'allait pas bien, c'était le moins que l'on puisse dire. Cela faisait un peu plus de quinze jours qu'elle et Emma avaient rompu, et il lui semblait qu'elle avait perdu du poids, sans parler de ces immenses cernes violettes qui lui mangeaient le visage. Bien sûr, elle venait travailler tous les jours, souvent très tard, comme si elle essayait de s'oublier dans son activité professionnelle, mais elle n'était plus elle-même. Dure et cassante, elle n'était plus que l'ombre de la jeune femme souriante qu'elle était devenue grâce à Emma.

Graham soupira intérieurement. Il avait tout essayé, tout tenté pour que Régina accepte de voir Emma, mais il avait fait chou blanc à chaque fois. Celle-ci, d'habitude si clairvoyante et psychologue, perdait toute faculté et toute réflexion dès que le sujet « Emma » était abordé, comme si cela réveillait en elle un ancien traumatisme. Il finit par quitter silencieusement le bureau de la Principale, songeant que cette fois-ci, il n'avait plus aucun moyen d'aider ses deux amies.

OOOoooOOO

- Mlle Mills ! Mlle Mills !

Régina leva des yeux agacés vers l'opportun qui venait de faire irruption dans son bureau.

- Monsieur Cassidy, j'espère que vous me dérangez pour une bonne raison.

Neal avait un air sincèrement inquiet quand il reprit la parole :

- J'étais en train de quitter le collège, et en passant devant la salle de sciences physiques, j'ai senti une forte odeur de gaz j'ai voulu entrer pour voir, mais je n'ai pas les clés de cette partie du bâtiment, et comme à cette heure-ci il n'y a plus que vous dans le collège …

Régina se leva immédiatement, son trousseau à la main. Elle sortit rapidement de son bureau, Neal sur ses talons. Marchant devant lui, elle ne put surprendre le petit sourire satisfait du professeur d'EPS. Celui-ci enchaîna :

- J'imagine que Monsieur Gold aura laissé un bec bunsen ouvert par inadvertance …

Ils étaient arrivés devant la salle, plongée dans le noir. Effectivement, une odeur de gaz flottait dans l'air. La Principale glissa sa clé dans la serrure de la porte, et y rentra d'un pas décidé, laissant son trousseau accroché, tendant le bras pour appuyer sur l'interrupteur. A peine eut-elle franchi le seuil, que la porte se referma derrière elle, et qu'elle entendit la clé la verrouiller. Elle fit volte face, actionnant vigoureusement la poignée.

- A quoi jouez-vous, Monsieur Cassidy ! Cela ne me fait pas rire du tout ! Je vous ordonne d'immédiatement rouvrir cette porte !

Une voix s'éleva, mais ce n'était pas celle de l'enseignant d'EPS.

- Je lui ai demandé de ne rouvrir cette porte sous aucun prétexte. La seule personne qui peut la déverrouiller, c'est moi, et je ne le ferai que quand tu auras accepté de me parler, Régina.

Le cœur de la Principale rata un battement. Elle se retourna lentement, et fut harponnée par deux grands yeux verts tourmentés.

- Nous n'avons plus rien à nous dire, Mlle Swan. Ouvrez cette porte.

Emma s'attendait à une attitude de ce genre, mais malgré tout, elle ne put s'empêcher de frissonner en entendant le ton glacé employé par la brune. Elle avait de la peine à croire que cette même voix avait été capable d'être si chaude et si sensuelle lorsqu'elle murmurait son nom au milieu de la nuit.

- Très bien … Mills ; j'ai tout mon temps. Et j'ai même prévu que cela se passerait comme ça, rajouta-t-elle, en sortant de sous la paillasse de l'enseignant un sachet bien garni. Elle en dévoila le contenu sous les yeux de sa Supérieure, toujours silencieuse : des bouteilles d'eau et des sandwichs.

- Vous voyez, Mills, je suis parée pour la nuit !

Emma lui adressa un sourire victorieux, et fit mine de se caler confortablement sur une chaise, les pieds posés sur le bureau du professeur. Régina sentit la moutarde lui monter au nez.

- Vous pensez vraiment, Swan, qu'une attitude aussi puérile me convaincra d'écouter vos excuses minables ?

Emma laissa tomber lourdement ses pieds sur le sol.

- Mes « excuses minables » ?

Le ton était incrédule.

- Parce que tu crois vraiment que j'ai l'intention de m'excuser ?

Elle s'était levée, et s'avançait lentement vers sa supérieure, l'air presque menaçant.

- Et de quoi devrais-je m'excuser, d'après toi, mmh ?

L'enseignante avait parlé de plus en plus fort, la voix vibrante d'une colère contenue. La brune ne pipa mot. Seule sa mâchoire crispée, et ses yeux assombris suggéraient son état d'agacement. Emma reprit, cherchant à provoquer son interlocutrice :

- Laisse-moi réfléchir …

Elle leva les yeux au ciel, la main sur le menton, dans une pause exagérée d'intense réflexion.

- Ah, oui, je sais ! Je devrais m'excuser de ne pas te laisser te complaire dans la petite histoire cousue de fils blancs inventée par ta mère ! C'est ça ?

Le ton était devenu franchement moqueur.

- Il est vrai que c'est une si jolie histoire … tellement bien ficelée … et qui tombe tellement à propos !

Emma s'arrêta un instant, le temps de fusiller du regard son interlocutrice.

- D'ailleurs, je suis étonnée de te voir encore là. Ta mère a pu si facilement te manipuler, que je pensais que tu étais déjà à New-York, en train de préparer les bans de ton mariage avec … comme s'appelle-t-il, déjà ? Léopold ?

La jeune enseignante avait réussi son coup. Régina explosa.

- Je t'interdis de …

- De quoi, Régina ? Dis-moi ? Que veux-tu m'interdire exactement ? De dire la vérité ?

Les deux jeunes femmes étaient nez à nez, leur visage à quelques centimètres. La tension était telle qu'elle en était presque palpable. De manière parfaitement incongrue, une violente bouffée de désir envahit la brune, la faisant vaciller. Elle se gifla mentalement, et recula d'un pas.

- La vérité …

Sa voix n'était plus qu'un murmure.

- La vérité, c'est que j'ai vu ton regard quand tu as pris cette femme dans tes bras …

Emma fut désarçonnée.

- Mon regard ? C'était celui de quelqu'un ravi de retrouver une personne qu'il n'avait pas vu depuis longtemps, et qui avait été une amie …

La blonde rajouta, désabusée :

- Amie qu'elle ne redeviendra jamais, vu le coup qu'elle m'a fait …

Elle secoua la tête, comme pour effacer de sa mémoire le visage de Lily, et refixa ses yeux sur sa supérieure, l'air dur. Elle était réellement en colère contre la brune, et celle-ci n'allait pas s'en tirer comme ça. Elle reprit la parole :

- La seule personne dans cette pièce qui a à présenter des excuses, c'est toi.

Les yeux de Régina Mills s'écarquillèrent de stupeur.

- Pardon ?

- Tu m'as très bien entendue. Tu me dois des excuses pour m'avoir traitée comme une moins que rien, après avoir écouté les paroles mensongères de la femme qui est malheureusement ta mère.

Les mots prononcés par Emma claquèrent comme autant de balles de revolver. Régina les prit en pleine figure, les assimilant lentement. Emma, impitoyable, s'approcha encore un peu plus de la Principale :

- Et soit dit en passant, son histoire était tellement énorme, que je me demande encore comment toi, habituellement si fine, tu as pu l'avaler.

Un silence pesant tomba entre les deux jeunes femmes, qui ne se quittèrent pas des yeux. Régina, qui jusque-là avait encaissé les paroles dures de l'enseignante s'en broncher, se rebella soudain. De quel droit lui parlait-elle sur ce ton ? Ses lèvres s'étirèrent lentement, dans un sourire sans joie.

- Et donc, Mlle Swan, parce que vous êtes là avec vos jolies phrases, à m'assurer que tout va bien, je devrais vous croire ?

Ses yeux noisette étaient presque noirs sous le coup des émotions violentes qui l'agitaient, et qui menaçaient de la submerger.

- Il y a quelques années, sans nul doute que je me serais laissée convaincre facilement … mais entre temps, on m'a déjà fait ce coup-là : celui de la trahison avérée que l'on tente de rattraper par tous les moyens …

Ça y est. On y était, songea Emma. Celle-ci ne s'était pas trompée. Toutes les réactions actuelles de la brune étaient conditionnées par ce qu'elle avait vécu avec Daniel. Et très clairement, cela avait été pour elle un véritable traumatisme. Régina poursuivit :

- Ma mère … est très loin d'être parfaite. Mais malgré tous ses défauts, elle ne m'a jamais abandonnée, elle …

La voix de la brune n'était plus qu'un murmure. Tout le ressentiment qu'Emma éprouvait à l'égard de sa Principale s'envola, et son cœur se serra. La brune paraissait si fragile, d'un seul coup … L'enseignante n'osait imaginer ce que Régina avait dû vivre pour en arriver à s'accrocher à sa harpie de mère comme elle le faisait. D'une voix plus douce, Emma reprit la parole :

- Je ne t'ai jamais abandonnée, Régina … ni jamais trahie.

Se perdant dans ses yeux, Emma sentit que la brune commençait à vaciller. Loin de sa Cora Mills, elle semblait retrouver une partie de ses facultés de raisonnement.

- Il serait facile de te le prouver. Lily m'a avoué qu'elle avait raconté être ma petite amie sur l'ordre de ta mère, qui lui avait promis en échange une importante somme d'argent. J'imagine qu'elle accepterait de répéter devant toi ces mots. Mais je n'ai pas envie de t'apporter ce genre de preuve. Je veux que tu me fasses confiance. Que tu me croies, si je te dis que jamais je ne t'ai trahie, et que jamais je ne te trahirai.

Emma, qui n'était qu'à quelques centimètres de sa Principale, prit dans ses mains celles de la brune. Celle-ci commença par se raidir, mais n'essaya pas de se dégager.

- Et si je te demande de me faire confiance, c'est que j'ai une excellente raison de le faire …

Devant ces derniers mots presque chuchotés, une lueur interrogative anima les yeux de Régina. Emma sentit les battements de son cœur s'accélérer à l'approche des mots qu'elle s'apprêtait à prononcer elle déglutit avec difficulté, la bouche soudain sèche, et ne put s'empêcher de serrer convulsivement les mains de sa supérieure.

- Je vous aime, Mlle Mills.

Un poids immense s'envola des épaules de Régina Mills. Elle réalisa soudain qu'elle n'attendait que cela, craignant tout au fond d'elle, sans jamais avoir osé se l'avouer, que les sentiments de la blonde ne soient pas à la hauteur des siens. Tout à coup, ce fut comme si l'épisode du manoir n'avait jamais existé, comme si sa mère n'était plus qu'un pantin insignifiant, dont les paroles étaient incapables de la toucher. Et elle sut. Elle sut que l'enseignante était la personne qu'elle avait toujours attendue, elle sut qu'elle était la personne en qui elle pourrait avoir une totale et absolue confiance.

- Je t'aime, Emma.

Sous ces trois petits mots, les yeux de l'intéressée se fermèrent un bref instant. Quand ils se rouvrirent, Régina put y lire sans difficulté un désir dévorant et impatient. Cela suffit pour faire sauter ses dernières barrières. D'un même élan, leurs lèvres se scellèrent, maladroitement, violemment, et leurs mains pressées cherchèrent à rattraper le temps perdu. Le professeur de mathématiques enlaça la Principale du collège de Storybrooke, et l'assit sans ménagement sur une des paillasses, n'ayant cure du carrelage dur et froid sous les fesses de son amante. Elle posa des mains possessives sur ses hanches, et l'attira vers elle, l'obligeant à écarter les jambes pour pouvoir s'y installer. Elle l'embrassa à pleine bouche, tandis que les doigts fins de Régina déboutonnèrent la chemise d'Emma. Quand ceux-ci purent enfin se poser sur la peau douce de l'enseignante, celle-ci ne put empêcher un grognement de s'échapper. Cela lui avait tant manqué !

Les deux jeunes femmes finirent par s'écarter l'une de l'autre, haletantes, à la recherche d'un peu d'oxygène. Leurs regards se harponnèrent.

- Nous allons vraiment faire l'amour ici, dans la salle de Gold ?

La voix rauque d'Emma fit frissonner Régina. Un sourire espiègle étira les lèvres gonflées et brillantes de cette dernière.

- On va commencer par faire l'amour ici …

Elle ne put finir sa phrase, la bouche d'Emma Swan à nouveau sur la sienne.

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J'espère que vous aurez apprécié ces dernières lignes. A très bientôt !