Bonjour à tous ! Tout d'abord, je vous dois des excuses pour ma loooongue absence, les vacances d'été ont toujours eu un effet catastrophique sur ma capacité à écrire... Mais les cours ont repris, et me revoilà donc !

Encore une fois, merci à tous ceux qui prennent le temps de me lire et de me donner leur avis ! Cette fois-ci je remercie NaomiWeaver, à qui je n'ai pas pu répondre avant, je le fais donc ici : Merci beaucoup déjà ! Ça me fait très plaisir que l'histoire te plaise ! Concernant Kuroko oui, ils ont l'habitude, mais ils parvient malgré tout à toujours les surprendre, et surtout, ils étaient dans un autre lieu, une autre ambiance et ils n'ont pas percutés tout de suite ;) Ahah, pour la scène de Riko, j'ai eu pas mal de remarques au sujet des tee-shirts x) Il n'est pas totalement exclu que cette scène arrive plus tard, je ne sais pas trop si je vais trouver où la caser... Ouvre l'œil, sait-on jamais ! :p Quand au truc qui rampe... ma foi, je ne peux évidemment rien dire ! x)

Voila, c'est tout pour cette fois ! Bonne lecture à présent, la suite ne devrait pas trop tarder, elle est déjà en partie écrite.


L'entraînement en commun s'achevait, et les joueurs de chaque équipe se réunissaient autour de leur coach respectif. Les quatre as avaient fini par conclure qu'il fallait interroger les membres de leur propre équipe. Ainsi, les équipes de Shutoku, Touhou et Kaijo s'éloignèrent, et Kagami vit Aomine poser très familièrement le bras sur les épaules de Sakurai. Il espéra qu'il n'allait pas agir de même avec Wakamatsu s'il souhaitait obtenir une réponse autre qu'un hurlement furibond. Midorima avait sagement engagé la conversation avec son capitaine, Takao sur les talons. Quant à Kise, il s'était attaqué à Kasamatsu et, même si d'aussi loin Kagami ne pouvait entendre ses paroles, il ne put manquer la torgnole que le blond reçut derrière le crâne.

Enfin, les autres équipes disparurent de leur vue, et Riko tira un son strident à son sifflet pour attirer l'attention de ses joueurs.

- Je n'ai pas réussi à obtenir leur accord pour un match, annonça-t-elle sans préambule. Je ne les imaginais pas si réfractaires à cette idée. De toute évidence, ils ne veulent pas dévoiler leurs cartes durant ce camp, ce qui peut se comprendre... Mais je reste persuadée que des matchs seraient très bénéfiques, pour eux comme pour nous, je vais donc insister de mon côté. Alors ne vous relâchez surtout pas pendant l'entraînement ! Izuki et Koganei, entraînez-vous à recevoir les Ignite Passes de Kuroko. Kagami et Teppei, travaillez vos feintes, et toi Hyuga je te laisse t'occuper des autres premières années. Au boulot !

Ce jour-là, c'était le tour de Seirin de profiter d'un des petits gymnases, tandis que Kaijo héritait de la forêt alentour, mais les joueurs en venaient presque à regretter d'être à l'intérieur : certes, les conditions d'entraînement étaient bien meilleures sur un terrain plat et régulier, mais il faisait un tel soleil qu'ils auraient adoré en profiter, en sentant une petite brise leur effleurer le visage de temps à autre. Là, tout ce qu'ils sentaient, c'était l'odeur de sueur qui stagnait, exacerbée par la chaleur moite du gymnase.

Lorsque la pause de midi sonna, c'est donc avec un soulagement manifeste que les joueurs de Seirin allèrent s'installer à l'ombre des arbres, en prenant soin de laisser la porte du gymnase ouverte pour aérer cette étouffante chaleur. Ils grignotaient leurs sandwichs en silence, profitant dans le calme du doux bruissement des feuilles sur les arbres, et de temps à autre du chant d'un oiseau plus téméraire que les autres, à quelques mètres d'eux. Le soleil, à présent haut dans le ciel, tapait fort. Un léger courant d'air plus que bienvenu venait parfois s'enrouler autour de leur peau, échauffée par l'effort, et ils pensèrent tous qu'à cet instant, ils n'avaient besoin de rien d'autre pour être satisfaits. Même Riko était en sueur, et elle tirait sur le col de son tee-shirt pour y faire passer de l'air. Elle jeta un œil sur ses joueurs, jaugeant leur fatigue pour concocter son programme de l'après-midi, mais un regard sur Kagami la distrait de ses préoccupations premières : Le garçon semblait bien plus fatigué que les autres, et elle l'interrogea donc. Après une hésitation, Kagami en profita pour expliquer à tout le monde sa mésaventure nocturne. Au grand plaisir de l'Américain, qui n'avait au fond toujours pas digéré le coup de Numéro Deux dès le réveil, il vit avec un plaisir vengeur que tous les regards se tournaient vers Kuroko avec une lueur de reproche. Mais pour obtenir les informations souhaitées, il fut forcé de préciser que son ombre ne pouvait être le coupable, puisqu'il était à ce moment-là couché sur son futon.

- T'as dû rêver, tout simplement, non ? Demanda Hyuga d'une voix sceptique.

- C'est ce que je me disais aussi, mais Midorima, Kise et Aomine ont entendu comme moi. Vous avez rien entendu, vous ?

Les autres joueurs secouèrent la tête de concert.

- J'ai naturellement le sommeil très lourd, et après la journée qu'on avait passée, je suis tombé comme une masse, confia Teppei.

Les autres approuvèrent de la tête. Visiblement, le tour que prenait la conversation ne leur plaisait pas.

- Ta description ressemble à une histoire de fantôme, objecta Koganei, formulant tout haut ce que tous pensaient tout bas.

Furihata fut parcouru par un violent frisson. Ce n'était un secret pour personne qu'il était un garçon très anxieux, voire peureux selon certains. Alors ne pouvaient-ils pas arrêter d'évoquer des fantômes à tout bout de champs ? Par définition, un fantôme est le résidu d'une âme retenue sur terre, un concentré d'émotions violentes, un esprit invisible aux vivants qui agit dans l'ombre du monde. C'était définitivement effrayant ! Et si l'on n'avait jamais pu prouver l'existence des fantômes, l'inverse était tout aussi vrai. Oui, Furihata, contrairement à ses camarades, était intimement convaincu que les fantômes n'étaient pas une chimère.

Il s'apprêtait à demander (supplier serait plus juste) que l'on change de sujet, quand les membres de Seirin qui l'entouraient se mirent à fixer un point entre les arbres, dans son dos. Craignant à moitié ce qu'il allait découvrir, le jeune brun se retourna et aperçu deux silhouettes familières qui approchaient en louvoyant entre les troncs. Izuki et son regard perçant fut le premier à les reconnaître : Kise et Kasamatsu. Furihata poussa un discret soupir de soulagement, car autant qu'il sache, ces deux-là appartenaient encore au monde des vivants.

Kise les vit également et, en quelques enjambées de ses longues jambes de mannequin, il les rejoignit en s'écriant d'une voix plus aiguë qu'à l'ordinaire :

- Kurokocchi ! Kagamicchi ! Y'a vraiment un fantôme !

A cette désastreuse nouvelle, Furihata ne put contenir un gémissement étouffé qui lui attira l'attention de Kise, lequel fut content d'avoir trouvé quelqu'un qui les craignait manifestement autant que lui. Il allait donc expliciter ses propos quand Kasamatsu, qui l'avait rattrapé, lui envoya une féroce bourrade dans le dos : Ce n'était pas là un geste amical.

- N'essaie pas de te justifier avec cette histoire sans queue ni tête, ordonna-t-il.

- Mais pas du tout Kasamatsu-sempai ! Je te jure que j'avais vérifié ! Je ne me suis pas trompé !

Perdus, Seirin suivait le dialogue, les yeux ronds.

- Euh... intervint Riko, de quoi parlez-vous ?

Lançant un dernier regard furieux à son joueur, Kasamatsu se tourna vers la coach et expliqua :

- Il manque deux gourdes pour les joueurs, apparemment notre as ne sait plus compter. C'est lui qui était chargé de les amener aujourd'hui.

- Mais puisque je te dis qu'elles ont disparues ! Le compte y était, j'en suis sûr !

Le blond défendait très ardemment sa cause, et Kasamatsu devait bien admettre que son joueur n'était pas du genre à tenter à tout prix de dissimuler ses erreurs. Son regard dériva sur l'équipe qui l'entourait et tomba sur Kuroko. Quelques regards suspicieux l'accompagnèrent, et la cible des ces yeux accusateurs leva les mains devant lui en guise de protestation :

- Je n'ai pas bougé d'ici, comment ça pourrait être de ma faute ?

Kasamatsu, agacé, vit ses doutes revenir et asséna un nouveau coup au mannequin :

- Mais non, je ne t'accuse pas Kuroko. C'est juste qu'il n'a pas fait son boulot correctement. Tout dans le physique et rien dans la tête !

Kise parût peiné par les paroles de son aîné.

- Tu es dur Sempai ! Et je suis certain de ce que je dis !

A cet instant, Sakurai déboula à fond de train depuis le gymnase voisin et passa devant eux sans les voir, gardant la tête baissée. Un peu surpris, les joueurs mirent à moment à réagir.

- Hé, le champignon ! Appela finalement Hyuga.

La petite silhouette de Sakurai se figea sur place :

- Oui ! Désolé ! S'exclama-t-il d'une voix tremblante.

Il revint sur ses pas et releva enfin la tête pour regarder ses interlocuteurs. Tous purent voir qu'il semblait au bord des larmes.

- Qu'est-ce qu'il t'arrive, le champignon ?

A son ton, il était difficile de savoir s'il était exaspéré ou compatissant.

- Allons, Hyuga, arrête de l'appeler comme ça, le reprit Teppei, il s'appelle...

- Désolé d'être un champignon ! S'écria aussitôt Sakurai, lui coupant la parole. Et je suis désolé d'être un incapable, désolé de ne pas avoir assez pris de gourdes, désolé, désolé !

Il y eut un silence lourd de sens.

- Tu veux dire, demanda lentement Hyuga, que vous n'avez pas assez de gourdes ?

Et le shooter de Touhou, tout en ponctuant son récit d'excuses, expliqua qu'il avait été chargé de ramener les gourdes pour les autres joueurs au début de l'entraînement, et qu'au moment de la pause on s'était aperçu qu'il en manquait deux.

- C'est bien un fantôme ! Gémit Furihata.

- Mais non, c'est une coïncidence, grogna Kagami, l'air revêche.

- Deux gourdes eux aussi ? C'est une sacrée coïncidence alors... rétorqua Kuroko, aussi stoïque que d'ordinaire.

Kasamatsu semblait gêné, lui, et il jetait des regards étranges à son coéquipier, comme s'il regrettait de l'avoir frappé pour rien.

Quelques minutes plus tard, alors que les suppositions battaient leur plein entre les joueurs, ils virent Midorima arriver, l'air perturbé. En apercevant le petit attroupement, il obliqua pour les rejoindre et s'enquit, aussi hautain qu'il le put, de la raison de ce raffut. Kuroko se chargea de lui expliquer, et tous découvrirent alors qu'il avait l'art et la manière de résumer les choses tout en gardant la cohérence des événements. Quand il eut compris ce qui se passait, le shooter de Shutoku resta un instant silencieux. Il remonta ses lunettes sur son nez et observa les joueurs de ses yeux verts un instant, comme pour les jauger. Finalement, il avoua :

- Il nous est arrivé la même chose. Nous avons d'abord soupçonné Kuroko, mais Takao affirme ne pas l'avoir vu, et d'après vous il n'a pas bougé d'ici...

Riko blêmit, Furihata cacha son visage dans ses mains, imité par Sakurai. Kise s'agrippa à l'épaule de Kasamatsu, visiblement incapable de parler.

- Un vrai fantôme ? demanda le capitaine de Kaijo d'une voix tendue.

Midorima et Kagami secouèrent la tête de concert.

-Il doit y avoir une raison rationnelle derrière tout ça, affirma Midorima d'un ton péremptoire.

-Ce soir, on demandera à la gérante combien de gourdes elle avait préparée, trancha Hyuga d'un ton définitif.

Sa voix s'était faite autoritaire, et il ordonna la reprise de l'entraînement, ce qui sembla tirer la coach de sa torpeur. Son sifflet en bouche, elle siffla deux fois, l'air concentrée. Les joueurs de Seirin se dirigèrent donc vers le gymnase, tandis que Midorima, Sakurai, Kasamatsu et Kise repartaient vers l'auberge chercher des gourdes pour remplacer les disparues. Tous jetaient des regards méfiants autour d'eux, comme pour chercher quelque chose qui n'aurait pas dû être là.

Ils regagnèrent donc la salle surchauffée, qui avait fort heureusement eu le temps de bien aérer, et tous poussèrent un soupir de soulagement en respirant l'air, qui était à peu près sain.

- N'oubliez pas de bien boire pour vous réhydrater avant la reprise, sinon vous serez tout courbaturés demain, conseilla Riko.

Concentrée sur son rôle de coach, elle n'avait pas réfléchi aux implications de sa phrase. Cependant, cela n'échappa pas aux joueurs, qui jetèrent un coup d'œil méfiant aux gourdes sagement posées dans un coin. Personne n'osa aller les chercher. Teppei et Izuki lancèrent un regard à Hyuga :

- Hyuga, c'est toi le capitaine, va les chercher, lança Teppei d'une voix qui peinait à cacher sa nervosité.

- Oui, c'est ton rôle, capitaine, renchérit Izuki en se glissant derrière lui.

Aidé par Koganei et Mitobe, il poussa le jeune homme récalcitrant en direction des gourdes. Mais, peu désireux d'aller vérifier en personne, Hyuga s'écria :

- N'importe quoi ! D'abord, vous respectez mon statut que quand ça vous arrange ! Et puis c'est pas au capitaine de faire ce genre de tâche, mais aux jeunots ! Au boulot, Furihata !

L'interpellé sursauta violemment, et se désigna du doigt, comme pour dire ''MOI ?'', mais ne bougea pas d'un pouce. Devant la réticence du garçon, Hyuga se mit à vociférer sur le respect qu'on devait à ses aînés et le pauvre seconde se précipita vers le coin où étaient entreposées les gourdes.

''Impossible qu'il en manque, de toute façon, on voyait très bien la porte du gymnase de là où on était, si quelqu'un était venu, on l'aurai vu, tentait-il de se rassurer. Même si les fantômes existent, ils ont mieux à faire que voler des gourdes ! Pour les autres équipes, ça doit être une coïncidence, hein ?''

Mais en réalité, il traînait de plus en plus les pieds à mesure qu'il approchait, comme si retarder l'échéance allait changer la situation. Une fois arrivé devant le tas, il déglutit avec difficulté, inspira un grand coup et, retenant sa respiration, il commença à compter. Arrivé au bout, il se dit qu'il avait dû faire une erreur et il recommença. Deux fois. Mais peu importe combien de fois il comptait, la vérité était là : Il manquait effectivement deux gourdes...

Livide, il se retourna vers ses coéquipiers qui, anxieux, attendaient son verdict, la gorge nouée par l'appréhension. Son expression d'horreur, plus que la pâleur inquiétante de sa peau, leur donna la réponse. Riko, qui avait fini par faire le lien, se joignit à l'angoisse générale.

- Qui... Qui était chargé de s'occuper des gourdes aujourd'hui ? s'écria-t-elle d'une voix plus aiguë que d'ordinaire.

- C'était moi... Répondit machinalement Izuki, toujours en état de choc.

On ne pouvait même pas l'accuser d'avoir mal compté : Izuki était de loin le meilleur d'entre eux en math. Parcourus d'un frisson surprenant vu la chaleur ambiante, ils échangèrent des regards. Eux aussi... A ce point-là, on ne pouvait plus parler de coïncidences.

Ils restèrent figés jusqu'à ce que Kuroko les reprenne à l'ordre, aussi imperturbable que d'ordinaire :

- Pour l'instant, ça ne sert à rien d'y réfléchir. Reprenons l'entraînement, et ce soir, comme Hyuga-san l'a proposé tout à l'heure, on demandera à la gérante combien de gourdes elle avait préparé.

Un peu sonnés à l'idée de se faire enguirlander par Kuroko, les autres restèrent un instant silencieux, avant de se ressaisir.

- Kuroko-kun a raison, inutile de se prendre la tête, affirma Riko, l'air plus convaincue qu'elle ne l'était en réalité. Rappelez-vous qu'on a payé cher pour ce camp d'entraînement, alors ne gaspillez pas votre énergie pour des bêtises. A tous les coups, comme hier, ça va être un malentendu.

Un peu rassurés, les joueurs soupirèrent et se remirent à leurs exercices.

Comme la veille, ils finirent l'entraînement très tard : La nuit était déjà tombée, étendant son voile noir constellé d'étoiles sur le ciel. L'air s'était également bien rafraîchi, et Riko ordonna à son équipe de se dépêcher de rejoindre l'auberge pour ne pas attraper froid après l'effort. L'angoisse, qui les avait quittés durant l'entraînement pour laisser la place à la concentration du sportif, revenait à présent se loger en eux tandis qu'ils regardaient les bois qui les entouraient sur le chemin menant à l'auberge. L'obscurité rendait les arbres plus mystérieux, plus inquiétants, comme s'ils étaient habités par une force maléfique, et nombre des joueurs se surprirent à détourner le regard.

Aussi furent-ils immensément soulagés en franchissant le seuil de la porte de l'auberge éclairée, où la gérante leur annonça que le bain était prêt. Cependant, ce dernier était tiède quand ils y entrèrent : Les autres joueurs avaient fini depuis longtemps. Lorsque, réchauffés et vêtus des mêmes yukatas que la veille, ils pénétrèrent dans le réfectoire, ils remarquèrent aussitôt l'ambiance particulière qui régnait : La rumeur du fantôme-qui-n'était-pas-Kuroko s'était répandue comme une traînée de poudre, et les joueurs discutaient à voix basse en jetant de fréquents coups d'œil par-dessus leurs épaules. La gérante avait une nouvelle fois disparue dans la cuisine, mais le gérant paraissait soucieux également. Il jeta un regard aux nouveaux arrivants et leur enjoignit de se rasseoir. Une fois l'équipe de Seirin installée, il se leva et frappa ses mains potelées l'une contre l'autre pour réclamer le silence. Les joueurs, qui s'étaient déjà penchés vers les membres de Seirin pour leur annoncer les dernières nouvelles, se redressèrent et fixèrent leurs yeux sur le petit bonhomme rondouillard. Contrairement à sa femme, le vieil homme semblait assez peu sûr de lui, et il prit la parole d'une voix hésitante :

- Hum ! Eh bien... J'ai entendu parler de ce qui est arrivé aujourd'hui, cette histoire de gourdes... euh...

Il essuya ses mains, probablement moites, sur son kimono brun. Il n'avait visiblement pas l'habitude de s'exprimer ainsi en public, et sa nervosité en était d'autant plus perceptible. Il inspira à fond et reprit, d'une voix plus ferme :

- Après une rapide enquête, il s'avère qu'il y avait bien le bon nombre de gourdes quand vous êtes partis ce matin. Nous... nous ne comprenons pas ce qu'il s'est passé mais... Il se racla la gorge, et poursuivi sur un ton plus assuré. ...Mais soyez prudents, il y a peut-être quelqu'un qui rôde dans les environs. Même si je ne vois pas l'intérêt qu'il y aurait à voler une gourde, ou deux, à chaque équipe, ajouta-t-il avec un petit sourire.

Il avait tenté de détendre un peu l'atmosphère, mais sa tentative d'humour tomba à plat. Un silence quasi-religieux planait sur la salle. La gérante, qui était discrètement revenue durant le discours de son mari, s'avança et prit la parole à son tour, attirant tous les regards. Cette femme avait une autorité naturelle et imposante, et elle n'eut pas besoin de hausser la voix pour être écoutée :

- Il n'y a pas non plus de raisons de paniquer. Continuez donc votre séjour comme prévu, ce n'était probablement qu'un vagabond de passage. Et puis un vol de gourdes n'a rien de dangereux. Donc à présent laissons ce sujet de côté et passons à table.

Comme répondant à un signal, les serveurs franchirent la porte des cuisines à cet instant, les bras chargés. Il y avait bien plus de marmites que la veille et les serveurs fixaient Kagami, l'air revêches. Celui-ci ne comprit pas l'hostilité teintée de défi qu'il voyait briller dans leur regard.

Une soupe miso traditionnelle fut servie, et les marmites furent vidées jusqu'à la dernière goutte. Sans se décourager, les serveurs enchaînèrent avec des gyozas au poulet et un tempura de légumes. Les quantités étaient énormes, et la plupart des joueurs pâlirent en voyant la montagne de plats, en équilibre sur un chariot, qui se dirigeait vers eux. La nourriture était délicieuse et, hormis les exceptions comme Kuroko et son appétit de moineau, tous se resservirent au moins trois fois. Quant à Kagami, il n'en finissait plus d'avaler des assiettes à toute vitesse. Cependant, les serveurs notèrent avec satisfaction une baisse de régime sur la fin... Qui n'empêcha pourtant pas l'Américain de terminer chaque plat jusqu'à la dernière miette. En dessert, on leur servit un gâteau au thé vert, et Kagami termina sa part tout en zieutant celle de son ombre, qui était amplement rassasiée.

Les membres du personnel, qui avaient crus un instant pouvoir triompher poussèrent un grognement collectif. Frustrés, ils virent le monstre avaler le gâteau de son camarade et jeter un œil désolé autour de lui, à la recherche d'une part supplémentaire. Mais son espoir fut déçu, et il quitta le réfectoire avec les autres.

Une fois seuls, les cuisiniers échangèrent un regard. L'un d'eux soupira qu'il était impossible de rassasier le garçon, mais il fut repris à l'ordre par un de ses aînés : Sa toque haute indiquait qu'il était le chef de cuisine, et son visage fatigué sous des cheveux déjà bien gris montraient qu'il n'était plus tout jeune. Cependant, la flamme de la détermination brillait toujours dans ses prunelles chocolat :

- Même vorace, ce garçon reste humain, il est donc possible de combler son appétit. Ne baissez pas les bras, il nous reste encore quelques jours pour le vaincre ! N'oubliez pas, il a peut-être gagné une bataille supplémentaire, mais il n'a pas encore remporté la guerre ! Nous avons toujours fait honneur à l'auberge jusqu'à aujourd'hui, nulle raison que ça change ! Déclama-t-il d'une voix forte, animée par la passion.

Et, se rassemblant autour de leur chef, les cuisiniers se mirent à chuchoter tout bas, à la manière d'un sutra - ou d'une malédiction :

- Nous l'aurons un jour ! Nous l'aurons !

Dans le couloir, Kagami fut pris d'un inexplicable frisson : il n'avait pourtant pas froid... Une sorte de cri de guerre leur parvint soudain depuis les cuisines. Surpris, les joueurs se demandèrent rapidement ce qui se passait, mais la question leur sorti vite de la tête : ils avaient des préoccupations plus importantes en tête à cet instant. Durant le repas, la rumeur des bruits étranges que certains avaient entendus durant la nuit s'était répandue, s'ajoutant à l'inexplicable épisode des gourdes, et beaucoup appréhendaient d'aller se coucher. Quelques courageux avaient même décidés de veiller toute la nuit. Les raisons en étaient nombreuses : les plus sceptiques voulaient vérifier la véracité de ces informations, certains avaient trop peur pour fermer les yeux, d'autres enfin, comme Imayoshi, jubilaient à l'idée de voir un fantôme.

Contrairement aux soirs précédents, les joueurs n'allèrent pas s'enfermer de suite dans leurs chambres, préférant discuter des derniers événements dans le couloir. Un peu à l'écart, Kagami, Aomine et Midorima discutaient entre eux : L'esprit rationnel de Midorima avait repris le dessus, et il affirma d'une voix sans appel, en remontant ses lunettes, que rien ne se produirait cette nuit-là.

- Moi j'ai l'impression que si, marmonna Kagami.

Son instinct, que certains comparait à celui d'une bête sauvage, et qui ne l'avait jamais trompé jusqu'ici, lui soufflait que tout ça était loin d'être fini.

-Hin, tu flippe Bakagami ? Se moqua Aomine.

-Comme si, imbécile, rétorqua aussitôt l'interpellé.

-Tu parles ! Je parie que tu vas te faire dessus s'il se passe quelque chose !

Et ils continuèrent sur ce ton, sous les soupirs lassés du joueur de Shutoku.

Mais en réalité, malgré leurs paroles bravaches, aucun des deux garçons n'en menait large. Aomine surtout, en tant que japonais, avait grandi au milieu d'histoires folkloriques au sujet d'esprits, bien plus que Kagami, car les États-Unis est un pays jeune et moderne où les histoires de fantômes n'ont plus leur place aux côtés de la science. Et le bronzé angoissait : si fantôme il y avait réellement, qu'était-il censé faire ? On ne pouvait pas se battre contre un fantôme...

Les coachs arrivèrent alors et grondèrent de mécontentement en voyant que leurs joueurs n'étaient pas encore couchés. Tous furent donc contraints de prendre la direction de leur chambre, en traînant des pieds.

Sur le chemin, Kagami contempla un instant le profil de son ombre. Kuroko paraissait serein. C'était difficile à dire, vu son impassibilité coutumière, mais le dunker ne distinguait aucune trace d'angoisse sur son visage fin. Curieux, il lui demanda :

- Kuroko, tu crois aux fantômes toi ?

- Oui, se contenta de répondre son camarade, d'un ton plus que laconique.

- Alors que t'en as jamais vu ? Insista le plus grand, surpris.

Le passeur tourna ses prunelles azur vers lui, et Kagami eut l'impression d'être transpercé jusqu'à l'âme par ce regard aigu.

- « Faut-il absolument voir les choses pour qu'elles existent ? Cela signifie-t-il qu'avant qu'on les rencontre, les fantômes n'existent pas ? D'un autre côté, c'est parce qu'on y croit que certaines choses finissent pas exister. », Prononça Kuroko d'un air sentencieux.

La réponse, sibylline, n'aida pas Kagami qui se gratta le crâne, perplexe.

- ... Quoi ? Finit-il par lâcher.

- Juste une phrase que j'ai lue récemment dans un livre, répondit Kuroko en secouant la tête, un léger sourire aux lèvres.

- C'est une jolie citation, commenta Midorima derrière eux. Un peu philosophique aussi...

- Toujours accroché à tes bouquins, hein, Tetsu ? Ricana Aomine juste devant.

- Un singe dans ton genre ne pourra jamais comprendre la beauté des mots, de toute manière, le rabroua Midorima, qui s'était senti personnellement insulté par la remarque du bronzé.

- Je t'ai pas causé, espèce de rat de bibliothèque !

- Et alors, tu as quelque chose contre les rats de bibliothèque ?

A la surprise générale cette dernière phrase, prononcée sur un ton mi-chantant mi-agressif, émanait d'Imayoshi.

Bouche bée, Aomine resta planté devant son aîné sans rien trouver à répondre. Imayoshi, un grand lecteur ? Il avait du mal à l'imaginer. Ignorant totalement l'air ébahi de ceux qui l'entourait, Imayoshi se tourna vers Kuroko et lui dit :

- Moi je connais cette phrase.

- Ça ne m'étonne pas de toi, Imayoshi-san, répondit le plus petit en souriant.

- Ce bouquin est génial. L'auteur arrive à nous captiver de bout en bout, tout en transmettant une philosophie de vie si poétique et apaisante à travers ses personnages ! Reprit le capitaine de Touhou.

- C'est sûr que ça fait rêver, admit le passeur. Mais le mieux c'est...

Et, sous les yeux interloqués de leurs camarades, les deux garçons s'éloignèrent, entièrement absorbés par leur conversation.

- Depuis quand ils s'entendent si bien, ces deux-là ? Interrogea Aomine, toujours sous le choc.

Kagami se contenta de hausser les épaules pour montrer son ignorance et son incompréhension, aussi sonné que lui. Décidément, son ombre ne cesserait jamais de le surprendre. Aomine, lui, semblait plutôt craindre les possibles conséquences d'une alliance entre le capitaine sadique et son ancienne ombre au caractère bien trempé.

Finalement, après un petit moment tout le monde reprit ses esprits, et chacun regagna sa chambre. Quand Kagami fit coulisser la porte de la sienne, il eut la surprise de découvrir son camarade, installé en tailleur sur le sol, Numéro Deux sur les genoux. Le chien se tortillait sous les mains de son propriétaire pour être certain d'être caressé et grattouillé là où il le souhaitait.

Saisi d'effroi presque malgré lui, Kagami se figea sur le pas de la porte. Néanmoins, s'il était incapable de faire un pas de plus dans la chambre, il n'avait pas non plus envie de hurler, et de briser par la même occasion l'atmosphère chaleureuse de la pièce. En effet, Kuroko dégageait beaucoup de douceur à cet instant, et le dunker se dit qu'il venait de découvrir une nouvelle facette de sa personnalité. Mais son ombre releva les yeux, croisa les siens et reprit son masque neutre. Il parût comprendre le dilemme de son camarade et, saisissant le chiot dans ses bras, il rejoignit le jardin sans faire de commentaire, permettant à l'Américain de recommencer à respirer.

Osant désormais entrer suffisamment dans la pièce pour refermer la porte derrière lui, il s'exécuta et se passa une main lasse sur le visage. Il avait vraiment été très surpris de voir que son ombre s'entendre si bien avec Imayoshi. Il n'aurait jamais imaginé que ces deux-là puissent avoir des points communs. En fait, se rendit-il compte, au fond il ne savait pas grand chose de son ami en dehors du basket et de ses relations avec les membres de la Génération des Miracles. Il aimait les chiens au point d'avoir accepté d'adopter le chiot errant, il croyait aux fantômes, avait une tête impossible au réveil et avait un humour bien à lui. Et à part ça...

Songeur, Kagami fixa la porte menant au jardin jusqu'à ce que celle-ci coulisse à nouveau pour laisser réapparaître l'objet de ses pensées.

Imperturbable, le passeur annonça qu'il avait mit Numéro Deux dans sa niche. Il se dirigeait vers son futon, avec l'évidente intention de s'y coucher, quand, sentant que le regard de son camarade ne le quittait pas, il demanda :

- Qu'est-ce qu'il y a, Kagami-kun ?

Le dunker tergiversa un instant, pas sûr de ce qu'il allait dire. Finalement, il se lança :

- Ton bouquin là... Celui dont tu parlais avec Imayoshi...

- Oui ?

- Quand on sera rentrés... File-le moi, je le lirai.

C'était un petit pas pour mieux connaître son coéquipier, mais c'était mieux que rien. Un peu gêné malgré tout, Kagami détourna le regard. Quant à Kuroko, d'abord un peu surpris, il finit par laisser un franc sourire naître sur ses lèvres.

- Bien sur, Kagami-kun, répondit-il.

L'autre garda un silence un peu bougon, et ils se couchèrent.

-/-

Dans la chambre d'Imayoshi et Aomine, une paire d'yeux bleu marine ne quittaient pas la silhouette fine d'Imayoshi. Aomine était déjà allongé sur son futon, par-dessus la couverture, couché sur le côté, le bras retenant sa tête dans une attitude nonchalante. Imayoshi, lui, s'activait à défaire son futon avec des gestes que la fatigue rendait lents.

- Alors comme ça... commença l'as.

L'autre s'interrompit et leva la tête vers lui, le fixant derrière ses lunettes et ses paupières plissées qui ne pouvaient suffire à dissimuler la vivacité de son regard. Il ne dit rien, attendant que l'autre poursuive.

- Comme ça, t'es un grand lecteur ?

Imayoshi, l'air à la fois narquois et provocateur, lui sourit. Il y avait aussi un peu de bravade sur son visage, comme s'il le défiait d'oser rire.

- Tu ne sais pas tout de moi...

- J'vois ça... grogna Aomine.

- Ça t'intéresse ? Interrogea Imayoshi, sardonique.

Aomine se laissa retomber sur le dos en soufflant d'un air las.

-Pas vraiment, non, rétorqua-t-il sans prendre la peine de réprimer son bâillement. Seulement j't'imaginais pas comme ça.

- Ne jamais se fier aux apparences, tu connais la règle, riposta l'autre en terminant d'étaler son futon.

Tandis qu'Imayoshi se relevait pour éteindre la lumière, Aomine reprit la parole :

-Depuis quand t'es pote avec Tetsu comme ça ?

Imayoshi lui coula un regard goguenard qu'il agrémenta d'un petit rire moqueur :

-T'es jaloux ? Ricana-t-il.

Le bronzé lui jeta un regard furieux. Puis il grogna et posa son bras sur ses yeux pendant que son camarade, qui avait éteint la lumière, s'enfouissait sous les couvertures avec un soupir de satisfaction. Imayoshi avait prévu de rester éveillé, mais la fatigue qui parcourrait son corps eut raison de lui et il s'endormit aussi vite que son coéquipier.

Mais ils ne dormirent pas longtemps. A peu près une heure plus tard, ils furent brusquement réveillés par un son lugubre. Comme la veille, on aurait dit que quelqu'un rampait sur le sol, mais en plus des halètements douloureux, on pouvait désormais entendre également des gémissements plaintifs, et un étrange cliquetis métallique à glacer le sang.

Aomine et Imayoshi se redressèrent d'un coup sur leur séant. Échangeant un regard, ils se dégagèrent de leurs draps et progressèrent sans bruit jusqu'à la porte coulissante. Le bruit était plus fort à présent, plus proche. L'as de Touhou jeta un œil vers son camarade, et constata qu'il avait l'air ravi.

''C'est vrai, il aime les histoires de fantôme, ce tordu... se rappela-t-il.''

Lui-même ne s'amusait pas du tout. Il était intimement persuadé qu'un des joueurs s'était mis en tête de leur faire une mauvaise blague, et il avait bien l'intention de lui mettre la main dessus très vite pour lui faire passer l'envie de jouer à ça.

D'un accord muet, Aomine et Imayoshi ouvrirent la porte et sautèrent dans le couloir. Cette portion de couloir n'était qu'une succession de porte menant à des chambres, il n'y avait donc pas de fenêtres par lesquelles la lueur de la lune aurait pu se faufiler. Il faisait noir comme dans un four.

Les deux camarades de chambre eurent à peine le temps de réaliser que le bruit s'était tût, comme sorti d'un rêve, qu'ils furent soudain éblouis par une brusque lumière vive : Un peu plus loin, Kasamatsu venait d'appuyer sur l'interrupteur, l'air sévère. Visiblement, il avait, tout comme eux, espéré mettre la main sur le coupable et lui passer un bon savon. A côté de lui, Kise, le bras levé pour se protéger les yeux, sondait le couloir d'un air anxieux. Aomine l'imita, l'air sombre, et Imayoshi jeta un coup d'œil autour de lui, mais à part eux, le couloir était vide.

Quelques secondes plus tard, les portes coulissantes des autres chambres s'ouvrirent de toutes parts, révélant des joueurs en pyjamas, mais l'air plus tendus qu'endormis. De toute évidence, tous avaient entendu l'étrange bruit.

Aomine, suspicieux, chercha la petite silhouette de Kuroko. Il le repéra à côté de Kagami, sur le pas de leur porte. Ses cheveux, comme toujours à son réveil, partaient dans tous les sens, et il regardait autour de lui, visiblement aussi perplexe que les autres. Leur chambre était loin de la leur, trop pour que le passeur l'ait rejointe pendant le court laps de temps qui s'était écoulé depuis l'instant où le bruit avait cessé. Aomine aurait pu soupçonner les autres élèves des chambres plus proches, mais aucun d'entre eux n'aurait pu être assez discret pour rejoindre sa porte sans se faire repérer. De plus, de ce qu'il pouvait en voir, aucun joueur ne manquait à l'appel. Parcouru par un mauvais pressentiment, l'as de Touhou dût admettre que de toute évidence, aucun des joueurs n'était responsable de ce qui s'était produit...

Le murmure presque extatique d'Imayoshi à sa droite lui confirma qu'il n'était pas le seul à être arrivé à cette conclusion :

-Un vrai fantôme !

Autour d'eux, les joueurs commençaient à se quereller avec leurs voisins, les priants d'avouer qu'il était coupable de la plaisanterie douteuse, mais évidemment, tous niaient la moindre implication, et le ton montait très vite. Kagami avait évidemment rejoint la lutte verbale, et il apostrophait le pauvre Sakurai d'un air féroce. Midorima tentait d'extorquer des aveux à Mitobe, qui ne pouvait que secouer les mains en signe d'innocence, pendant que Koganei traduisait à côté, sous l'hilarité de Takao, toujours prompt à rire. Wakamatsu s'était approché de Teppei qui rigolait nerveusement, une main sur la nuque tandis qu'à côté, Hyuga menaçait Moriyama. Furihata et les autres premières années échangeaient des regards terrifiés, tandis que Kise, plus pâle que jamais, s'accrochait désespérément à l'épaule de Kasamatsu, pour l'heure occupé à tenter d'établir un dialogue avec Kuroko, qui se contentait de le regarder de ses grands yeux bleus. Difficile de savoir à quoi il pensait, bien entendu, mais Aomine le soupçonnait d'être tellement troublé qu'il en perdait ses mots. Sans doute n'entendait-il même pas ce que l'autre lui racontait.

Évidemment, toutes ces discussions ne se passaient pas dans le plus grand calme, ce fut donc sans surprise que les joueurs virent soudain débarquer Riko et Momoi en tenue de nuit. Mais ils étaient tous tellement perturbés que personne, hormis Moriyama, ne se retourna sur Momoi, pourtant adorable avec ses yeux bouffis de sommeil, ses longs cheveux en désordre et son air perdu.

-Qu'est-ce qu'il se passe ? Demanda-t-elle en se frottant les yeux.

Riko, de son côté, n'avait pas le moindre aspect attendrissant : Elle dégageait, malgré son pyjama, la même férocité que si elle s'était trouvée sur un champ de bataille. Elle saisit le premier joueur de son équipe à sa portée, à savoir Hyuga, et se mit à l'agonir d'injure, tout en lui promettant les pires souffrances si ils les avaient réveillées sans raison.

-D'ailleurs, qu'est-ce que vous faîtes tous dans le couloir à cette heure-là ? Le camp d'entraînement n'est pas terminé que je sache ! Vous vous relâchez parce que ce n'est pas moi qui m'occupe de l'entraînement en commun ?

Et Hyuga se ratatinait devant la colère de la petite femme qui lui faisait face, tandis que Teppei tentait désespérément d'expliquer la situation aux nouvelles arrivantes qui l'écoutaient de plus en plus éberluées.

-Un bruit ? Que vous avez tous entendu ?

Furihata hocha vigoureusement la tête à plusieurs reprises, visiblement terrifié. Momoi croisa le regard d'Aomine et lui indiqua Kuroko du menton, mais son ami secoua la tête pour indiquer que le joueur fantôme n'était pas le coupable cette fois-ci. Momoi pâlit.

-Bon sang, mais qu'est-ce que c'est que ce boucan ? S'exclama soudain une voix tonitruante bien que féminine.

Tous se retournèrent vers l'origine du cri, et virent arriver la petite silhouette amaigrie de la gérante, très digne même dans ses pantoufles et ses vêtements de nuit. Derrière elle trottinait son mari, essoufflé et tentant tant bien que mal de réajuster son haut remonté sur son ventre bedonnant.

Aussitôt, des voix s'élevèrent pour tenter d'expliquer aux propriétaires ce qui venait de leur arriver, mais cela ne créait qu'un brouhaha incompréhensible qui finit par faire craquer la gérante :

-ASSEZ ! hurla-t-elle, et le silence se fit immédiatement.

Elle se tourna vers Kuroko, qui paraissait le moins touché par les événements grâce à son air impassible, et lui ordonna de lui expliquer la situation. Le passeur s'exécuta d'une voix neutre. La fin de son récit fut suivi par un silence pesant. Face à lui, la gérante avait fermé les yeux, tandis que le gérant affichait une mine horrifiée. Rouvrant les yeux, la gérante prit le temps de fixer ses prunelles vert pâle dans les yeux de chacune des personnes présentes avant d'annoncer :

-Bon, on ne peut rien faire ce soir, je vous conseille de retourner vous coucher pour le moment, nous éclaircirons tout cela demain matin. A la lumière du jour et après plusieurs heures de sommeil, nous trouverons sans doute une explication tout à fait rationnelle. A présent, tout le monde retourne dans sa chambre, et pas de discussion !

Aidée par Riko, qui décidément plaisait bien à la vieille femme, elle veilla à ce que chaque joueur referme bien sa chambre, puis elle s'approcha de son mari.

-C'est comme l'histoire que nous a raconté l'ancien propriétaire quand nous avons acheté l'auberge, lui souffla celui-ci, comme s'il n'osait plus parler à voix haute.

-Sottises ! Répliqua sa femme. Il n'est rien arrivé pendant vingt ans, je ne vois pas pour quelle raison cela se produirait maintenant. En attendant, je vous interdit de parler de cette histoire aux résidents.

Haussant les épaules, le gérant la suivit sans rien ajouter. Aucun des deux n'avait vu Kise entrouvrir sa porte quelques instants plus tôt pour suivre leur conversation. Le mannequin déglutit avec difficulté, une lueur de terreur dans le regard...