Elle était arrivée en trombe au club et bien plus tôt que d'ordinaire, fulminant toujours intérieurement. Ruby avait tenté de lui demander ce qu'il se passait mais s'était retrouvée avec une fin de non-recevoir des plus abrupte. Elle n'osa pas insister et retourna se préparer pour son show, jetant tout de même des regards inquiets à la blonde de temps en temps. Cette dernière, murée dans son silence, dégageait une aura de haine qui repoussait quiconque passait dans le périmètre. Elle finit même par faire voler son portable qui se disloqua sous la violence de sa rencontre avec le sol. Ruby décida qu'elle en avait assez, se leva vivement de sa chaise pour venir poser ses mains sur les épaules de son amie, la fixant dans le miroir en face d'elles.

- Maintenant ça suffit, qu'est-ce qu'il se passe ?

- Ça ne te regarde absolument pas et j'apprécierais que tu ôtes tes mains de mes épaules. Merci.

Ruby soupira et leva les yeux au ciel, resserrant sa prise.

- Et si, au lieu de tous nous aboyer dessus, tu me parlais de ce qui ne va pas, histoire d'être un peu plus agréable et cesser de terroriser tout le monde ? Même Gold a fait demi-tour en voyant ta tête.

- Eh ben tant mieux, j'avais vraiment pas besoin de lui ce soir. Et je vois pas pourquoi je t'en parlerais.

La jeune brune pris un air faussement offensé, une main sur sa poitrine.

- Mais enfin ! Je pensais être ta meilleure amie pour la vie, moi !

Elle leva finalement les yeux pour lancer un regard assassin à travers le miroir qui perdit vite de son poids sous le regard amusé de son amie.

- Tu sais très bien que tu es mon amie, idiote… Mais-

- Aucun « mais » accepté, jeune fille ! Euh enfin, moins jeune que moi m'enfin ça marche quand-même.

- Et c'est en pointant ma décrépitude que tu penses pouvoir me tirer les vers du nez, hm ?

Elle avait dit cela sans pouvoir empêcher un sourire de s'attaquer à ses lèvres.

- Non pour ça, je compte sur ma gueule d'ange à laquelle tu ne sais pas résister.

Ruby joignit le geste à la parole et prit la tête la plus angélique et juvénile qui lui était possible de produire, ce qui fit rire la blonde.

- Tu sais, tu devrais éviter ce genre de tête sur scène, on pourrait se trouver dans la mouise si les gens venaient à penser que tu n'es pas majeure, hein.

Elle sentit le poing de son amie s'abattre sur son épaule avec violence et préméditation. Elle finit par se rendre en riant à nouveau.

- Bon bon, okay ! Me frappe pas, je consens à te livrer mes noirs secrets. En plus, c'est vraiment rien, je sais pas pourquoi je m'énerve autant…

- Moi j'dis, c'est que ça doit compter un minimum pour toi. Parce que si-

- Bon tu veux l'histoire ou tu la connais déjà et tu me la racontes ?

- Paaaaaaaaardoooooooon !

Ruby s'assit sur une chaise à côté d'elle, monta ses jambes contre sa poitrine et posa le menton sur ses genoux, les yeux avides de savoir et toutes ses dents encadrant son large sourire.

- Ta curiosité te perdra, un jour. M'enfin bref. Tu te rappelles que je devais aller visiter un nouvel appartement dans un quartier plutôt sympa ? Ben la propriétaire des lieux l'était nettement moins. On s'est un peu… pris la tête. J'ai même fini par lui coller une gifle monumentale, même ses voisins ont dû l'entendre.

La jeune brune écarquilla les yeux à la mention de la gifle.

- Comment ça tu l'as giflée ?!

- Comme je te l'ai dit. Elle a légèrement dépassé les bornes et… enfin voilà.

- Eh ben, je m'attendais pas à ça. Elle t'a dit quoi pour que tu en arrives là et que tu le rumines encore ?

- Hm. En gros, qu'elle ne pensait pas possible que malgré ma condition, je puisse me payer un tel appartement, qui est sacrément chouette au passage même si totalement dépourvu de vie.

- Mais… Tu t'es présentée genre « Bonjour, je suis showgirl, enchantée » ? Ou alors t'y as été habillée comme un sac ?

Elle se reçut un poing dans l'épaule en provenance de la blonde et gémit.

- Tu l'as mérité. Non, en fait on se connaissait déjà de-

- Swan ! Vous êtes en retard, bon sang !

Elle jeta un œil à l'horloge.

- Eh merde !

Se levant d'un bon, elle fila derrière le rideau, attendit que la musique se lance, que son nom soit annoncé, que son public la demande et fit son entrée sur scène. Elle encouragea ses spectateurs en battant le rythme avec ses mains « Gimme that thing that I love ! ». Elle avait oublié pendant quelques heures pour quoi elle vivait : les applaudissements et la clameur. Elle fit quelques pas de danse, dominant la scène, absorbant l'énergie qui régnait autour d'elle et quand vint le refrain, elle saisit la barre. Elle s'y hissa « make it real loud ! », se fixa par le genou et se cambra puis attendit quelques secondes. « Turn the lights on » et les spots la firent briller, chaque once de son costume réfléchissant et décomposant le spectre lumineux. Elle cria à nouveau à son public : « Make it real loud ! » et finit par se laisser glisser de quelques centimètres, sa main saisissant à nouveau l'acier pour commencer sa première acrobatie où elle finit dos au métal, tournoyant autour. Elle entonna « I live for the applause-plause » et enchaîna ses figures les unes après les autres. Les gens s'étaient levés et criaient, sifflaient, en redemandant encore et toujours. Une dernière vrille et elle se retrouva au sol, à genoux, épaules contre le sol, une main dressée vers le ciel « Gimme that thing that I love » et la musique mourut ainsi que les lumières.

Les premières notes d'un autre morceau se firent entendre, la scène toujours au noir. Elle se plaça rapidement et demanda à son public : « Tell me if you like it » et ajouta « It's just me and you ». La réaction fut immédiate et elle sentit l'électricité la gagner, passant par chaque personne présente dans la salle. La lumière la gagna lentement alors qu'elle ôtait son costume, une bretelle après l'autre, se retrouvant bientôt légèrement vêtue et se laissant totalement gagner par le rythme, son corps ne répondant plus qu'à ça. Elle clôt ses paupières, inspira, frémit : « Think I wanna make that move, now » et se lança dans plusieurs mouvements et figures au sol. En se relevant, elle jeta un regard aux personnes lui faisant face et dut retenir une exclamation de surprise. Tout se mit alors à tourner, la musique et les lumières se mélangeant et se répondant à mesure qu'elle progressait sur scène et laissait tomber un vêtement après l'autre, machinalement. Sachant la fin du morceau proche, elle fit face à la salle, leur lança un clin d'œil et un baiser puis se retira lentement vers les loges au moment où les spots s'éteignirent pour elle, pour ce soir.

Elle fila se rhabiller convenablement avant de se jeter sur la sortie de secours largement utilisée pour les pauses du personnel. Le froid automnal lui mordit le visage à peine eut-elle passé la porte et elle prit une large bouffée d'air qui lui brûla la trachée puis les poumons, la faisant tousser. Elle s'adossa à un mur à proximité, ferma les yeux et tenta de calmer les battements de son cœur qui s'étaient fait totalement erratiques et résonnaient violemment à ses oreilles. Son souffle était court et difficile à contrôler. Avait-elle vu juste ? C'était impossible. Pas après tout ça. Elle reposa sa tête contre le mur et sentit les basses du morceau diffusé à l'intérieur la traverser de part en part, la calmant. Son rythme cardiaque retrouva une certaine régularité bien que toujours trop élevé mais elle parvint à maîtriser sa respiration et se reprendre quelque peu. Elle finit par rouvrir les yeux et laissa échapper un cri de surprise. Elle ne s'était donc pas trompée.

- Qu'est-ce que vous foutez ici, putain ?

Plutôt que de lui répondre, la femme en face d'elle entrouvrit la porte à leurs côtés pour laisser filtrer la musique. La blonde rit lorsqu'elle reconnut la chanson.

- N'essayez pas de profiter des mots des au-

Elle n'eut pas le temps de finir sa phrase qu'elle se retrouva collée à la plus belle femme qu'il lui avait jamais été donné de contempler et dieu sait qu'elle en avait vu défiler. Cette dernière la saisit par la taille pour entamer une danse collé-serré, verrouillant ses yeux dans ceux de la blonde. Elle ne savait plus que dire, que faire et se laissa simplement emporter par le moment. Elle se perdit dans ses yeux sombres et brillants, reflétant les lumières de la ville autour d'elles. Aucune des deux ne prononça un seul mot et pourtant, il lui semblait sentir qu'elles parvenaient à se comprendre sans ça. Aucun regret, aucune excuse ne fut formulée à haute voix, elles laissèrent l'instant parler pour elles. Toute la colère que la blonde avait accumulée depuis plusieurs heures s'était brutalement évanouie, laissant place à une sorte de plénitude. Jamais elle n'avait expérimenté pareille sensation et surtout, vécu pareille situation. La logique et la bienséance auraient voulu qu'elle repousse cette femme qui l'avait tantôt séduite, tantôt blessée. Au diable tout cela, pour rien au monde elle ne souhaitait décrocher ses pupilles des siennes. Rien ne pourrait la convaincre de rompre le contact de leurs corps qui semblaient se reconnaître et se répondre mutuellement, s'embrassant dans une étreinte qui fit monter la température de la blonde. Pour ne rien arranger, la liste de morceaux du club ayant ses favoris, elle entendit monter progressivement la chanson qui les avait fait entrer en collision quelques jours auparavant. Elle sentit son corps désirer le sien encore plus ardemment qu'auparavant et put lire dans ses pupilles, maintenant à quelques centimètres à peine, que c'était réciproque. Elle sentit une main quitter sa chute de reins pour gravir son dos « You've got me on crazy position » et se glisser sous ses vêtements, caresser tendrement sa peau réagissant à chacun de ses contacts. « I just can't control myself » Elle vint taquiner légèrement, du bout du nez et des lèvres celles pulpeuses de la brune « Do you want more ? » qui choisit ce moment pour planter ses ongles dans la chair de sa partenaire de danse qui gémit.

Elle alla se nicher dans son cou et entreprit de lui rendre la monnaie de sa pièce, ses dents entrant en contact avec la peau hâlée au parfum entêtant. Elle parcourut son cou, son menton, dévia sur son oreille qu'elle titilla avec précision, sentant le corps contre le sien réagir violemment. Elle se stoppa soudainement pour faire à nouveau face à son désir se reflétant dans les pupilles qu'elle contemplait. Le refrain retentit à nouveau « Gimme more, gimme gimme » et c'en fut trop pour l'une comme pour l'autre. Elles prirent chacune possession des lèvres de l'autre dans un même mouvement, entrechoquant leurs dents. Les mains de la brune se frayèrent un chemin dans la chevelure longue et bouclée de la blonde, jusqu'à la nuque, qu'elle saisit pour essayer de la rapprocher encore plus. Elle se rendit compte que c'était impossible « More » mais avant de pouvoir aviser « Gimme more », elle sentit la showgirl forcer l'entrée de ses lèvres et s'approprier sa langue avec autorité « Gimme gimme ». Elles se mêlèrent et dansèrent ensemble encore, jusqu'au point de rupture, quand la chaleur se fit trop intense et que la blonde rompit le contact, poussa l'autre contre le mur et revint se positionner entre ses jambes. Il ne fallut que quelques microsecondes à la brune pour glisser sa jambe sur la taille à sa disposition et retrouver les lèvres qui étaient siennes depuis de longues secondes voir minutes.

Leurs mains ne manquaient pas de se glisser sur la peau à nu pour provoquer la plus grande réaction chez l'autre, se cherchant, naviguant et découvrant les courbes bien trop dissimulées par ces vêtements. La blonde entreprit de déboutonner le chemisier de soie de la divine inconnue pendant que cette dernière faisait sauter le bouton du jeans de la femme qui se trouvait toujours entre ses cuisses, sa jupe aussi sombre que ses pupilles relevée à la limite de la décence. Dans un souffle, la blonde finit par poser la question qui lui brûlait depuis des jours :

- Qui es-tu ?

- Une femme qui se consume pour toi, c'est pas suffisamment clair ?

Laissant la poitrine et le cou devant elle, elle remonta fixer cette fichue brune incendiaire qui lui résistait encore comme elle le pouvait. Elle lui saisit la mâchoire et serra. C'était plus une forme de possession que de violence et c'eût pour effet de faire à nouveau gémir la femme entre ses doigts. Elle reposa sa question avec plus d'autorité :

- Qui es-tu ?

- Une femme qui est en train de sciemment gâcher son futur mariage. Maintenant tais-toi et reviens contre mes lèvres.

Elle interposa deux doigts entre ses lèvres et les siennes, empêchant la brune de lui faire à nouveau perdre pied.

- Qu'est-ce que tu veux à la fin ?

- Savoir quel prénom souffler quand tu me touches comme ça.

La brune agrippa les cheveux de la brune et colla leurs fronts et leurs nez, semblant vouloir littéralement absorber ce qu'elle voyait dans les yeux verts étincelants.

- Regina.

La blonde sourit largement et se présenta à son tour :

- Emma.

- Je sais, j'ai vu ton show plusieurs f-

Regina fut interrompue par une main inquisitrice dont les doigts s'étaient glissés à l'intérieur de sa cuisse toujours accrochée à la taille d'Emma, l'effleurant à peine. Elle tressaillit et donna plus ample accès à son cou. La blonde n'eut pas besoin de plus pour aller mordre violemment la peau délicieusement fruitée à sa portée. Regina gémit et lui en demanda plus, passant sa propre main sur le ventre de la showgirl et entama l'ascension, jouant avec le tissu qu'elle finit par heurter et par s'en débarrasser d'un geste adroit qui lui laissa plus ample accès. Elle sentit le corps d'Emma la réclamer à corps et à cri pendant que le sien semblait faire passer le même message tandis que les doigts agiles de la blonde se glissèrent sous la jupe de la brune. Cependant, les attentions cessèrent soudain et Emma leva les mains en la fixant, un sourire aux lèvres.

- Je veux plus que ça.

- Pardon ?

- Viens avec moi.

Emma reboutonna son jean et tendit la main à Regina et répéta :

- Viens avec moi.

La brune sembla saisir les sous-entendus de cette proposition mais voulu tout de même s'en assurer.

- Et si je viens avec toi ?

- Ton mariage est déjà foutu et tu le sais. Et tu peux exercer loin d'ici, ton métier te le permet, d'après ce que mon ami m'a dit. Il y a des cabinets et des tribunaux partout.

Regina porta sa main à la joue d'Emma et la gratifia d'un sourire qui fit chavirer la blonde puis déposa sa main dans la sienne. Elle ne répondit rien, ses yeux et son cœur le firent à sa place. La blonde l'attira à elle, l'embrassa fougueusement et la dirigea vers sa voiture. Leurs lèvres ne se quittèrent que pour passer chacune sur leur siège respectif. Emma alluma la radio et sourit de la promesse :

« Want you make me feel like I'm the only girl in the world. Like I'm the only one that you'll ever love. Like I'm the only one who knows your heart. Only one. »


Et voilà pour cet OS chapitré (nettement plus amusant de vous faire languir, décidément). Ce fut court mais intense même pour moi et je reviendrai bientôt avec une autre idée qui m'est passée par la tête l'autre jour et bien évidemment avec la fin de KYLS.

Bonne semaine !