Un peu plus tard dans la soirée, les deux voleurs arrivèrent dans l'appartement de Spade, situé au dernier étage d'un building. La porte d'entrée donnait directement sur un grand salon meublé, alors éclairé par les lumières de Tokyo traversant les grandes baies vitrées donnant sur un balcon. Spade posa son manteau sur un canapé et invita Joker à s'y asseoir.
-Mets-toi à l'aise, je vais chercher la couronne.
Il partit immédiatement vers un couloir dont il referma la porte derrière lui et Joker attendit, contemplant la pièce dans laquelle il se trouvait. Il devina que Spade vivait régulièrement dans cet appartement et que les trésors qui y entraient ne restaient guère longtemps avant d'être transportés ailleurs. Des meubles récents, peut-être trop confortables pour une personne vivant seule mais témoignant d'un excellent niveau vie trahissaient légèrement ses activités de voleurs. Encore fallait-il trouver le propriétaire des lieux dans ce coin de Tokyo surpeuplé.
L'albinos entendit alors des bruits de pas sonores claquant contre le parquet. Ils ne pouvaient venir que du corridor, ce qui lui semblait absurde. Certaines règles de discrétion étaient vitales pour un cambrioleur et se transformaient en habitude ancrée dans le quotidien au fil du temps, man_re de marcher comprise. Joker pensa immédiatement à de la fatigue de la part de Spade et fut légèrement déçu. Au fond de lui, il espérait toujours que le cambrioleur lui montre autre chose que la couronne.
Il quitta la baie vitrée des yeux pour diriger son regard vers l'entrée du corridor et sentit sa mâchoire se relâcher sans qu'il ne puisse rien y faire. Devant lui, contre l'encadrement de la porte, se tenait Spade avec son trésor non dans les bras mais sur la tête. La façon dont il se tenait appuyé contre le mur rappelait beaucoup trop sa performance au Kaitou Club pour que ce soit involontaire.
-Alors ? demanda-t-il.
-Très...très beau. Vraiment. C'est...c'est comme sur les photos.
-Tu n'as encore rien vu, dit Spade en enlevant deux boutons de sa chemise. Mais si tu veux l'admirer plus en détail, il faudra venir la chercher.
Il disparut dans l'ombre du corridor et Joker resta interdit, trop confus pour faire quoi que ce soit. C'était comme un rêve où il n'était pas sur de contrôler tous ses gestes. Quelque chose d'aussi instinctif que l'ouverture d'une serrure mais un peu trop pesant pour être certain qu'il le faisant vraiment par lui-même. Cédant à ses impulsion, il suivit Spade dans le couloir et la partie de cache-cache commença. Pièce après pièce, l'albinos fouilla l'appartement pour finalement arriver dans la chambre du cambrioleur. Il fit quelques pas, entendit un courant d'air et amorça un geste pour se retourner mais il était déjà trop tard. Spade se tenait juste derrière lui, le dos contre la porte désormais close.
-Et la couronne ? demanda Joker en constant l'absence de l'artefact.
-Ne t'en fais pas, j'ai trouvé un trésor bien plus attirant juste devant moi.
Spade avança vers l'albinos d'un pas tranquille jusqu'à pouvoir enfouir sa main dans ses cheveux. Il le fixait droit dans les yeux et Joker eut un peu de mal à soutenir son regard tant il était éclatant. Les doigts du bleuté jouèrent un instant avec une mèche du voleur miraculeux, un doux sourire aux lèvres, et son visage franchit les derniers millimètres qui le séparaient de la peau de son amant. Leurs lèvres se touchèrent dans un court baiser, puis Spade le rompit avant de repartir à l'attaque, plus violemment cette fois-ci. L'albinos n'hésita pas un seul instant et ouvrit la bouche dès qu'il sentit la langue de son partenaire le taquiner. Il ferma les yeux étroitement, pencha la tête sur le côté et ceintura le voleur de ses bras pour le rapprocher encore plus jusqu'à se coller à lui. Il se perdait dans l'intensité de leur baiser sans pouvoir refréner l'envie d'en vouloir plus, d'aller plus loin. Il se pencha en avant mais Spade le retint d'une manière particulière. Il abandonna les cheveux du plus jeunes et descendit lentement, toujours plus bas, caressant la rainure de son cou et ses reins avec une légèreté aérienne. Puis, sans que Joker ne s'en aperçoive, il atteignit ses hanches et glissa sa main à l'arrière, faisant pousser un couinement à Joker.
-Inutile de se précipiter, chuchota Spade à son oreille. Un peu plus et tu me projetais au sol. On ne t'a pas appris à faire attention à ce que tu dérobes ?
-Arrête avec ça, aucun de nous n'est un objet et tu le sais très bien.
-Si c'est vraiment le cas, j'imagine que je n'ai plus à me retenir.
La main de Spade quitta le fessier de l'albinos et s'avança entre eux afin de défaire la boucle de sa ceinture, ce qui lui fut impossible tant il restait collé à lui. Il lui mordilla la lèvre inférieure pour le stimuler et profita d'un nouveau gémissement de Joker pour atteindre son but. Soudain, Spade le fit pivoter et le poussa dos au lit dans un rebond qui déstabilisa le voleur suffisamment longtemps pour que le bleuté envoie sa ceinture choir sur le sol. Il le retint prisonnier un moment, son corps juste au-dessus du sien et ses bras tendus entre lui comme une cage.
Les deux cambrioleurs se plongèrent chacun dans les yeux de l'autre et Joker put voir ceux de son amant briller de mille feux dans la pénombre de la pièce. C'était étrange comme les choses s'étaient déroulées vite depuis la première fois qu'il l'avait vu, sur cette scène du Kaitou Club. D'abord la curiosité, puis la surprise, le jeu et voilà qu'il se retrouvait dans la même chambre que lui et le désirait, avec pour seuls gênes ces courts instants où il ne le sentait pas contre lui.
Jamais le premier soir, hein ?
Le baiser reprit, plus passionné encore. Spade, ne se contentait désormais plus de la seule bouche de Joker et embrassa d'abord le contour de son visage, puis le cou, jusqu'à atteindre le creux de clavicule qu'il suçota avidement, lui faisant pousser un nouveau gémissement. Il s'y prenait avec une telle expérience que Joker eut bien du mal à déboutonner le reste de sa chemise malgré la liberté qu'il lui laissait, penché en avant sans lui faire sentir son poids qu'il savait pourtant léger. Les plis et les froissements se multiplièrent sans que Spade n'en tienne compte, bien au contraire. Il eut la même idée et redressa lentement le t-shirt de son partenaire, arrêta un court instant ses caresses pour le retirer complètement, termina le travail sur son propre vêtement et repris là où il en était, s'occupant cette fois du torse de son amant qui agrippa les couvertures, tentant de retenir ses gémissements du mieux qu'il le pouvait. C'était à en perdre la raison tellement l'autre ne lui laissait aucun répit. Il inspira profondément pour se détendre encore plus et se laissa tout entier aux mains du bleuté, laissant seules ses jambes remuer sous l'intensité des suçons qu'il laissait sur son corps.
Spade prit une pause et laissa l'albinos reprendre son souffle. Le mettre dans tous ses états était aussi excitant que l'entendre gémir et plus le temps passait, moins il parvenait lui-même à se contenir. Le sexe était l'un des seuls instants où il pouvait prendre du plaisir tout en prenant son temps et il devait avouer que son partenaire d'un soir lui donnait envie . Envie de lui, envie d'aller plus vite, envie de ne jamais finir, envie de s'enivrer encore et encore de ses baiser, de ses gémissements, de ses caresses. Il fixa le visage de Joker et croisa son regard.
-Ne me fais pas attendre, vas-y.
Mais la réaction de Spade fut différente de ce à quoi l'albinos s'attendait, ce qui ne le dérangea pas non plus. Leurs bouches furent de nouveaux unies par un baiser profond et passionnel, tellement long qu'ils durent se séparer brusquement pour reprendre leur souffle. Spade en profita pour poser directement la question.
-Tu es vraiment sûr de vouloir le faire ?
-J'en ai tout autant envie que toi, alors ne me fais pas attendre.
Souriant devant cette déclaration sans appel, Spade embrassa tendrement son amant Ils roulèrent sur le côté, face contre face et envoyèrent le reste de leurs vêtements rejoindre le sol. Spade prit auparavant un petit carré de sa poche arrière et d'en sortit un préservatif qu'il mit le plus rapidement possible.
-Je vais essayer d'y aller doucement, essaie juste de te détendre.
-Ne t'inquiètes pas, je suis certain que tu feras plus attention que mon premier coup.
-Alors comme ça, ce n'est pas la première fois qu'on s'essaye à ce genre de pratique ? Si j'avais su, je serais venu à toi plus tôt.
Joker eut un frisson en sentant la respiration du danseur sur sa nuque, aussi chaude que son torse qu'il sentait contre son dos. Il allongea son bras vers l'arrière et força Spade à enfouir son visage dans son coup, ce qu'il fit sans rechigner. Son souffle était bien moins calme qu'au départ, preuve de leurs ébats enflammés, mais savoir qu'ils étaient tous deux dans le même état suffit à l'albinos. Ses yeux se rétractèrent à l'instant où leurs corps furent pour de bon unis, coupant son souffle et laissant ses seules lèvres articuler le nom de son amant, son cœur battant à tout rompre comme pour pousser ce mot aux oreilles de son possesseur.
-Ça va ?
Joker releva les yeux et vit Spade, la tête toujours posée sur son épaule. Son visage, entre béatitude et inquiétude vis-à-vis de son partenaire, était rouge d'excitation. Une telle attention de sa part provoqua un nouvel élan en Joker qui l'embrassa furieusement pour toute réponse à sa question. Ils ne purent cependant rester dans cette position tant le va-et-vient devenait violent et il se rabattit sur le lobe de l'oreille de Spade qu'il mordilla avec affection, laissant la tête de ce dernier repartir à l'assaut de sa nuque.
-J...Joker...
-Jack. C'est...mon vrai nom.
-Jack !
Dans un coup de rein plus puissant que tous ceux qui avaient précédés, Spade serra Joker de toutes ses forces et resta immobile de longues secondes, laissant échapper un court râle de plaisir. Il relâcha sa prise, enserra son cou de ses bras et le sentit se tortiller pour se mettre à face lui. L'albinos scella leurs lèvres d'un ultime baiser, se serrant contre son corps pour ce qui allait être le reste de la nuit.
Lorsque Joker quitta la chambre le lendemain matin, habillé de pied en cape, il trouva Spade dans le salon, regardant Tokyo s'éveiller, une tasse de thé à la main. Il ne parvint malheureusement pas à suffisamment dissimuler son boitillement pour ne pas être remarqué du cambrioleur. Voilà qui allait lui coûter un petit moment sans pouvoir faire de larcins.
-Désolé si j'ai été un peu violent hier, s'excusa Spade.
-Ne t'en fais pas pour ça, au contraire. C'était merveilleux.
Il s'approcha de lui pour réclamer un baiser du matin auquel le bleuté répondit le plus langoureusement qu'il put. Même après une nuit aussi intense, ils pouvaient sentir les cendres de leur désir pour l'autre se réchauffer dangereusement.
-Tu restes ? Petit-déjeuner pour deux.
-Non merci, j'ai des choses à faire. La routine d'un gentleman cambrioleur.
-Je vois. Au plaisir de te revoir, beau gosse.
-Peut-être plus tôt que tu ne le crois, répondit Joker.
Ils se séparèrent enfin et, après un dernier baiser, Joker quitta l'appartement, laissant Spade seul. Cela faisait longtemps qu'il n'avait pas eu une nuit aussi ardente que celle-ci. Plus qu'un coup d'un soir, voilà que le cambrioleur numéro un dans le monde se transformait en quelqu'un qu'il voulait revoir, sentiment partagé si il en croyait ses dernières paroles.
Soudain, un "pop" sonore le fit sursauter. Intrigué par ce bruit qui n'avait rien à faire en ces lieux, il se dirigea vers la salle d'où il provenait et retint sa respiration quand il se souvint que c'était là où il avait caché la couronne avant de s'enfermer dans sa chambre avec l'albinos. Il poussa une commode, ouvrit un placard dissimulé dans les fondation et, à la place du trésor, trouva une carte de visite et des restes de dégui-gum, armes fétiches de celui qui venait de quitter les lieux. Il examina le morceau de papier.
-"Invitation pour le cambrioleur Spade à venir reprendre la couronne de Gengis Kahn dans les appartements du cambrioleur Joker"...
Un sourire fleurit sur le visage du bleuté. Voilà donc ce qu'il voulait dire par "plus tôt que tu ne le croit". Une invitation..
Quelque part au fond de lui, il sentit que la couronne allait faire plusieurs allers et retours.