« La magie prend sa source au cœur d'un homme et se répand dans son sang. Elle ruisselle le long de son bras pour se glisser le long de sa baguette magique et s'élancer vers son but. La magie est une part constituante de l'être. Au même titre que vos mains ou vos jambes. A ceci près que l'on ne peut amputer un homme de sa magie, il en mourrait. La magie est comme un fleuve, on peut la détourner de son lit, lui faire faire milles choses, mais inévitablement, elle est amenée à se rebeller. Il faut la dresser, la renforcer puis la fluidifier. »

Le professeur Flitwick fit une petite pause pour se donner le temps d'admirer les visages impressionnés et passionnés qui étaient penchés en avant sur leurs tables pour entendre la moindre de ses paroles. Tous avaient entre dix et onze ans et venaient d'entrer à Poudlard. Une nouvelle génération de sorcier. Vêtus des uniformes traditionnels des étudiants Anglais. A savoir, une robe noire passée par dessus une chemise blanche. La salle était scindée en deux groupes. D'un coté, les enfants portaient des cravates vertes, et de l'autre des cravates bleues.

« Ces trois étapes sont nécessaires pour parfaire votre maîtrise de la magie. Nous passerons trois ans à travailler sur la première. Votre magie à l'heure actuelle est comparable à un torrent, un ouragan, rien ne s'est jamais opposé à elle. Elle est libre. Elle est dangereuse. Pour vous et surtout pour vos proches. »

Un frisson de peur traversa la salle. Les enfants qui faisaient face au minuscule professeur étaient conscients de leur magie depuis leurs plus tendres enfances. Ils l'avaient vu comme une camarade de jeu, une aide inopinée, parfois même une amie. Aucun ne l'avait jamais considéré comme un être potentiellement dangereux.

« Imaginez, que dans un moment de colère ou d'égarement, vous laissiez s'échapper votre magie. Celle-ci, enivrée par les sentiments qui vous traverseront, se montrera agressive et détruira ce qui vous entoure. Pour un enfant, cela se résume à casser un verre, soulever des tables. Il y a généralement plus de peur que de mal. »

Un soupir de soulagement commun fut poussé devant la bonne humeur apparente du semi-gobelin. Il marqua une nouvelle pause pour laisser son regard se poser sur un enfant qui se trouvait au dernier rang. L'enfant n'avait pas esquissé un geste depuis le début du cours. Il se contentait de le regarder, attentivement, mais ne réagissait pas.

« Maintenant, imaginons que nous parlions d'un adulte ordinaire, sa magie pourra s'embraser, détruisant ainsi sa maison. Il risquerait de blesser gravement les autres résidents. Il pourrait se blesser lui même. »

La joie qui était montée à l'écoute du discours bon enfant du professeur s'évapora. Douchée par la dureté de la réalité. Certains avaient souri en se rappelant de leurs expériences. Quand ils ne comprenaient pas ce qu'ils leurs arrivaient. Quand ils s'envolaient sans raison, quand les meubles tremblaient durant leurs caprices.

« Et si nous parlions de puissants sorciers, ce que vous êtes sans aucun doute. Les catastrophes provoquées par un manque de contrôle pourraient s'avérer d'autrement plus funestes. Dumbledore est le sorcier le plus puissant de notre génération. Il s'est énervé une fois et savez vous ce qu'il s'est produit ? »

Les enfants restèrent silencieux devant le ton grave de ce professeur qui semblait toujours si joyeux, toujours plein d'esprit et de vivacité.

« Une tempête s'est levée, au cœur de Londres. Je ne parle pas d'un petit orage, mais d'un véritable cauchemar... Des centaines et des centaines de moldus ont été blessés... »


« C'était la première fois que je faisais cours à Harry Potter. Je me souviens encore parfaitement de ces brefs instants où j'ai fait mon discours. Chaque année je commence de la même façon, pour mettre les enfants en garde contre leur propre magie. La magie n'a pas de sentiments, elle n'est que puissance. Il faut en avoir conscience. Comme chaque année, les enfants m'ont écouté, ils étaient passionnés, mais lui ne l'était pas. Il savait de quoi je lui parlais, il avait déjà discipliné sa magie et entamé la phase de renforcement. Il n'avait que onze ans et il avait déjà le niveau de magie d'un septième année... »

« Petit à petit, j'ai réalisé que je ne faisais ni face à James Potter, ni à Lily Evans. Nombre d'entre nous ne s'en sont rendus compte que trop tard. J'entends par là Severus et Minerva. L'enfant ressemblait à ses parents, mais il n'était pas eux. Là où James avait apprit la magie par passion pour elle, là où Lily l'avait dompté par amour de la connaissance. Lui, il l'a apprit pour survivre. La magie est le plus beau des cadeaux que l'on puisse faire à un être doué de conscience. Mais quand cet être vient à considérer sa magie comme une malédiction et un fardeau, il ne peut qu'arriver des choses horribles. »

« La magie d'Harry était toujours très calme, puissante et rassurante. En certains aspects on pouvait la rapprocher de celle d'Albus. Une sorte d'éminence grise bienveillante. La seule différence résidait dans la maîtrise de son porteur. Harry était loin d'avoir le niveau d'Albus. Alors quand cette puissance titanesque s'est agitée au retour du Lord Noir, de nombreuses catastrophes se sont abattues sur l'Angleterre. Harry était une personne avec un grand sens de l'empathie et une grande générosité, sa fuite était inéluctable dès l'instant où il s'est rendu compte qu'il ne pourrait canaliser convenablement son énergie. »

« Ce qui fût le plus triste à observer fut cette déchéance progressive et programmée. Rien ne pouvait stopper la course de sa magie, son renforcement exponentiel. D'habitude, la puberté magique commence aux alentours de la dix-septième année, celle d'Harry a commencé avant ses douze ans. La faute revenant à son enfance. S'il avait eu une vie normale ces problèmes se seraient posés à l'age de ses vingt ans, il aurait eu assez de connaissances pour résister... mais en l'état des choses, les difficultés ont commencé à ses quatorze ans. L'année où il fut précipité dans une des compétions les plus dangereuses d'Europe. Une compétition où il nous subjugua de merveilles avec sa magie, où il l'a repoussa dans ses retranchements, lui demandant toujours plus, la rendant avide de reconnaissance. »

« Personne ne su ce qui se passa là-bas. Ce fut un traumatisme, une coupure à vif dans l'évolution d'Harry et de sa magie. Quand il revint et annonça le retour de Vous-Savez-Qui, il était épuisé. Pour la première fois depuis des mois, il ne devait plus lutter pour garder en lui cette force écrasante. Il semblait à la fois horrifié par ce qu'il venait de vivre, et soulagé de ne plus avoir ce poids sur les épaules. J'ai parlé avec Albus de ce que cela faisait d'être la victime de sa propre magie. Albus est un sorcier exceptionnellement puissant. Il a toujours vécu dans la peur de céder à ses émotions un jour, comme il l'avait fait à Londres lors de son duel contre Grindelwald. Il me disait qu'il n'y avait pas de solution, seule la patience et l'abnégation pouvait permettre de contenir en sois sa propre énergie. Vous-Savez-Qui n'a jamais mené cette lutte contre lui même. C'est sans doute pour cela qu'il s'est écrasé devant la force brut de son adversaire. »

« La magie a la particularité de se renforcer avec le temps. Il ne s'agit là que d'un principe et il y a trois cas d'école. Si le sorcier est trop faible, sa magie stagnera voir s'affaiblira une fois achevé la puberté magique. Si le sorcier est puissant, sa magie s'affinera avec le temps, lui donnant de plus en plus de maîtrise, et parfois elle ira croissante. Si le sorcier est trop puissant, il devra retenir sa magie. Celle si, devant affronter une résistance, se surpassera pour tenter de battre cette barrière, ce qui la rendra plus violente, plus sauvage. C'est ce qui la renforcera encore plus. De fait, si un sorcier est très puissant, sa magie n'ira que croissante... C'est sans doute l'une des plus grandes injustices de ce monde. »

« Si Albus a réussi à tenir si longtemps sa magie en respect, c'est en raison de son savoir. Il a su tisser des protections autour de Poudlard qui absorbait quotidiennement son énergie. Certains disent qu'Albus est un fou avec sa passion des bonbons au citron, d'autres le traitent de lâche pour avoir refusé à plusieurs reprises de quitter Poudlard pour s'engager plus avant dans la lutte contre les mages noirs qui parsèment le monde. Albus ne peut tout simplement pas quitter Poudlard sous risque de voir le contrôle de sa magie lui échapper. Poudlard est une sorte de prison pour lui. Il ne peut quitter le château sans risquer de mettre en danger des dizaines d'innocents. Mais il a pour compensation d'en protéger des centaines en restant directeur. Il a trouvé son équilibre. Chose qu'Harry n'a pu faire durant sa scolarité, par manque de connaissance. Tout est allé trop vite. »

« La guerre grondait à l'extérieur et à l'intérieur du château. Nous professeurs, nous voyons nos élèves s'enfoncer dans la haine et la peur. Tout était prétexte pour les distraire. Notre plus grande erreur fut le tournoi de duel. Pendant près d'un an, ils ont oublié les rivalités, le temps de la sixième année d'Harry. Mais ce fut cette année qui marqua définitivement la scission entre lui et les autres élèves. Ce fut une folie de le faire affronter Albus en récompense pour sa place de premier. Jamais de mémoire de professeurs et de fantômes pour tous vous dire, nous avions vu un tel affrontement. Sauvage, violent, désespéré. L'air vibrait à chaque sortilège et le sol tremblait à chaque conjuration. J'avais cru pendant un temps que les barrières de protections dressées aux préalables ne tiendraient pas. Nous ne pouvons que remercier Albus pour son génie, jamais auparavant je n'avais vu de tels enchantements... Ce n'était plus deux hommes qui se battaient, c'était des monstres. »

« Malheureusement, c'est cette image que les camarades d'Harry ont retenu. Celle du monstre de puissance et non celle du garçon généreux. Il s'est retrouvé seul, déjà qu'il n'était pas très entouré auparavant. Il se perdit dans son propre monde. Terriblement seul. »

« Je n'ai pas assisté à son duel contre Vous-Savez-Qui, mais il l'a remporté. Puis il est parti et nous ne l'avons jamais revu... Voilà l'histoire d'Harry Potter. Voilà l'histoire de l'homme que vous cherchez par tous les moyens à ramener en Angleterre. »

Un silence respectueux accueillit les paroles du professeur de sortilèges. Seules les braises d'un feu mourant et quelques bougies éclairaient encore son bureau. Le meuble en lui même était recouvert de multiples parchemins, d'ouvrages vieux de plusieurs siècles et d'une tasse de thé. La fenêtre fermée donnait sur le parc du château, il était recouvert de neige. Les étoiles, déjà hautes dans le ciel, donnaient au lac des milliers de reflets. Pendant un bref instant, le professeur se perdit dans le paysage, tentant de se remémorer d'autres faits marquants.

« Auriez-vous une idée d'où nous pourrions le trouver ? » La personne qui avait posé la question était une belle jeune femme. Ginny Weasley, la benjamine de la famille. Une élève douée selon les souvenirs du vieux professeur. Elle devait avoir dans les trente ans aujourd'hui. Filius soupira en pensant à son age. Que le temps passe vite.

« Je n'en ai pas la moindre idée, des dizaines de personnes sont parties à sa recherche, mais aucune ne l'a jamais trouvé. Je n'étais pas particulièrement proche d'Harry. Il était dans ma maison il est vrai, il était studieux mais surtout discret. Je ne l'ai eu qu'une seule fois dans mon bureau. Pour le féliciter suite à sa première victoire au Quidditch. »

« Si vous aviez eu besoin de parfaire votre maîtrise de la magie, où seriez vous allez ? » Demanda Neville Londubat qui était aussi dans le bureau. Il était le compagnon de Ginny depuis de nombreuses années et cherchait désespérément l'aide d'Harry.

« Dans un endroit déserté de toute vie, dans le Nord, très loin au Nord... Là où les vents froids gèlent le cœur des hommes. C'est en ces seuls lieux que l'ont peut laisser libre sa magie sans risquer la vie d'autrui. Mais Neville, quelque soit la gravité de cette guerre. Je ne pense pas que chercher Harry soit une bonne solution. Il pourra vaincre une nouvelle fois Tu-Sais-Qui, mais rien ne l'empêchera de revenir, encore et encore. Harry est un sorcier très puissant, mais il est également un homme. »

Le professeur marqua un arrêt, cherchant ses mots, les sous-pesants pour parvenir à définir au mieux sa pensée. Après de longues secondes de réflexions, il finit par trancher pour la formulation la plus simple possible :

« Et il déteste ce pays plus que tout au monde... »


Ça fait plusieurs mois maintenant que je travail sur différents projets de fictions, j'ai enfin trouvé une idée qui me plaisait suffisamment pour commencer à écrire. Je ne promet pas une parution régulière où même semestrielle, j'ai un emplois du temps pour le moins chargé.

J'ai l'espoir que ce prologue vous ait plu et qu'il vous encouragera à lire la suite, merci d'avoir lu.

Et un grand merci à Lord Orpheus (Et toutes les personnes qui se cachent derrière) pour leurs aides précieuses tant pour les conseils d'écritures, que pour la correction et pour les débats qui m'ont permis d'affiner ma perception du personnage d'Harry Potter.

Tinky Winky Doodle