Désolée d'avoir pris mille ans à écrire cette deuxième partie! Je ne vous retiens pas plus longtemps et vous laisse savourer la suite! J'espère que ça vous plaira et n'hésitez pas à me laisser vos impressions ensuite~

Takashi était assis devant son repas mais n'avait pas du tout envie d'y toucher. Tanuma mangeait, concentré sur la télé. Le plus jeune le sentait mal à l'aise et c'était de sa faute. Comment avait-il osé s'imposer à lui de la sorte?

- Tanuma…

Le regard noir de son senpaï se tourna vers lui.

- Oui? S'enquit-il en déposant ses baguettes.

- Je suis désolé. Je vais retourner chez les Fujiwara.

Tanuma lui fit une moue contrariée.

- Tu ne me déranges pas. Reste. Mon père part demain matin pour un mois, si c'est ce qui te gêne.

Incapable de soutenir son regard, Natsume fixa son assiette encore pleine.

- Je suis un fardeau. Tu vas gâcher ta vie avec moi à côté.

Avec un soupir, le brun se leva pour se rassoir tout près de son ami.

- Je ne vais pas gâcher ma vie. Je veux prendre soin de toi jusqu'à ce que tu ailles mieux. Je sais que tu dis des choses pareilles pour essayer de m'éloigner mais ça ne fonctionnera pas. Tu es précieux pour moi et ce n'est que la moindre des choses de t'épauler pendant ce moment difficile. Ne dis plus jamais que tu es un fardeau parce que c'est faux. Mange maintenant, t'as besoin de forces pour récupérer.

Natsume obéit sans entrain, contrit et peu fier de lui.

OoOo

Le téléphone sonna. Natsume pressentit que c'était le docteur. Il s'allongea sous le kotatsu et suivit Tanuma du regard alors qu'il allait répondre.

Il revînt près de lui peu après et lui tapota la tête en s'asseyant à son tour. Natsume sentit l'anxiété monter en lui à toute vitesse. Il avait peur d'entendre les résultats des examens, peur d'apprendre une mauvaise nouvelle.

Tanuma le rassura d'un sourire.

- Tu es en parfaite santé, tu n'as plus à t'en faire pour ça.

Takashi pu à nouveau respirer.

- Ils ont aussi tout ce qu'il faut pour le faire enfermer, si tu portes plainte.

Son ton était ferme. Il sous-entendait qu'il ferait tout en son pouvoir pour mettre Matoba derrière les barreaux, quitte à l'obliger à le faire déposer son témoignage.

- Pas maintenant, Tanuma. Je… je ne suis pas prêt.

- Quand tu le seras, fais-moi signe, ok?

Takashi opina du chef sombrement.

OoOo

- As-tu vu Nyanko-sensei?

Tanuma lâcha son manuel de mathématiques.

- Ponta? Non. Pas depuis… ce jour-là.

Ce jour-là, ce jour maudit, s'était passé le vendredi. Le samedi avait filé rapidement, comme le dimanche, qui s'achevait à présent.

Natsume pinça les lèvres. Il avait l'impression que tout allait de travers depuis que Matoba avait posé ses mains sur lui. Le jeune homme ouvrit la porte fenêtre en grand malgré le temps frais. Il lui semblait oublier quelque chose d'important.

La mémoire lui revînt soudain.

Le livre des amis. Où était-il?

Madara apparut au moment même où la question résonnait dans son esprit.

- Sensei! Où étais-tu?! S 'exclama le jeune homme en prenant le gros chat dans ses bras.

- Nya.

Natsume fronça les sourcils, certain que l'ayakashi se foutait de lui.

- T'es fâché?

- Nyaaaaaaaaa~.

Intrigué, Tanuma tendit l'oreille discrètement sans cesser ses occupations.

- Nya?

- Je ne suis pas d'humeur à jouer alors parle!

Le chat le regarda dans les yeux avant de lui donner un coup de patte sur l'oreille. Tanuma réalisa la situation avant son ami.

- Natsume… Tu as vu des youkai ces derniers jours?

Le châtain se retourna vers son ami d'un bloc. Il pâlit visiblement.

- Non. Pas un seul.

Nyanko descendit de ses genoux et, en un « pouf » sonore, se métamorphosa en humaine.

- C'est pour ça! S'exclama-t-il en faisant les cents pas dans la pièce. J'ai envoyé des messagers, ils me disaient que tu les ignorais. Mais non, tu ne les voyais pas, simplement.

- Sensei, habille-toi.

Les deux jeunes hommes rougissants avaient détourné le regard du corps nu et féminin qu'avait adopté l'Ayakashi.

Avec un soupir agacé, Madara obéit. Ayant maintenant toute leur attention, il continua.

- J'ai le livre des amis. Il m'appartient désormais.

Natsuma se pétrifia.

- Pourquoi? Tu sais ce qu'il signifie pour moi Sensei! Fit-il en se redressant.

- Tu ne peux plus voir les Youkai, Natsume. Il ne te servira plus jamais. Tu ne fais plus parti de notre univers. J'ignore ce que t'a fait l'exorciste mais quoi qu'il en soit, il t'a privé de ton don.

Le monde de Takeshi s'effondrait lentement autour de lui.

- Sensei…

- Tu ne risques plus rien. Les youkai t'ignoreront comme ils ignorent la majorité des humains. Tu peux vivre normalement dorénavant. N'as-tu pas toujours rêvé de ça?

Les lèvres serrées de Takeshi tentaient d'empêcher ses sanglots de franchir sa bouche. Oui, il avait espéré être normal plus d'une fois mais il s'était fait à cette existence et ne pouvait plus s'imaginer autrement qu'entouré de ses amis esprits. La solitude l'effrayait encore plus que les monstres.

- Te rencontrer fut un honneur, Natsume. Je te souhaite une longue et belle vie.

Madara lui fit un sourire franc. Puis il disparut.

La douleur transperçait la poitrine du châtain comme des lames acérées. Elle devînt de plus en plus vive, de plus en plus insupportable… Il devait faire quelque chose pour qu'elle cesse. Et vite.

Il se leva d'un bond sous le regard surpris de son ami et alla s'enfermer dans la salle de bain. Il se laissa glisser sur le carrelage glacé alors qu'une crise d'angoisse s'emparait de son corps déjà stressé par les derniers événements. Il entendait vaguement Tanuma taper à la porte.

- Laisse-moi seul! fit le jeune homme en couvrant ses oreilles.

Tout ce bruit allait le rendre fou. Ou peut-être l'était-il déjà? Il se sentait si mal qu'il avait l'impression qu'il allait rendre l'âme d'une seconde à l'autre. Et la dernière chose dont il avait envie, c'était que son ami le voit si pitoyable. Il avait suffisamment aperçu sa faiblesse ses derniers jours, il n'allait pas en rajouter une couche.

- Laisse-moi Tanuma. J'ai besoin d'être seul.

Le tapage se fit plus hésitant avant de s'arrêter complètement.

- Je serai dans ma chambre si tu as besoin, d'accord? lui répondit la voix de l'autre côté de la porte.

- Ne t'inquiètes pas.

- Bien sûr que je suis inquiet, imbécile.

Les grincements du parquet apprirent à Natsume que son compagnon s'éloignait. Il devait trouver un moyen d'évacuer son anxiété avant qu'elle ne le consume entièrement.

Il essaya de respirer plus lentement, en vain. Il n'arrivait pas à se calmer. Natsume se redressa et se retrouva face avec son reflet dans le miroir. Ses traits tirés et ses cernes noires lui donnaient l'air d'un cadavre ambulant.

Dégoûté par cette vision, il leva le poing dans l'intention de fracasser cet objet de malheur qui lui renvoyait cette image de lui.

Il hésita avant d'agir pour finalement abandonner l'idée. Il n'était pas chez lui et qu'en dirait Tanuma s'il commençait à détruire sa maison?

Alors, son regard se porta sur le rasoir reposant sur le bord de l'évier. Il le prit sans réfléchir et le démonta rapidement pour ne garder qu'une de ses lames entre ses doigts. Il la fit tournoyer un peu, l'amertume lui brûlait le fond de la gorge.

Takashi jeta les armes et céda à sa pulsion dans le mince espoir de voir son geste le soulager de ses démons.

La lame entailla la peau fine de son poignet avec une facilité déconcertante. C'était un peu douloureux mais cette douleur était risible comparée au reste. Presque libératrice. Natsume observa avec une fascination morbide son fluide vital s'écouler paresseusement hors de son corps. Le rouge aspergeait la porcelaine blanche de l'évier et glissait vers le tuyau, de la même façon dont les larmes de Takeshi roulaient sur ses joues dénuées de couleur.

Ce n'était pas suffisant. La douleur palpitait toujours violemment dans sa poitrine.

Alors, il recommença, en appuyant plus fort. Un deuxième trait sanglant se joignit au premier, plus profond cette fois. Le flux se fit plus dense, tout comme les sanglots de Natsume qui montaient en crescendo.

Ce qu'il ressentait était inexplicable. Il avait besoin d'extérioriser sa peine et sa douleur, ses peurs et ses doutes. C'était pitoyable, il le réalisait mais ne voyait pas comment faire autrement. Il avait l'impression de se noyer, lentement.

- Natsume, je t'entends… Ouvre-moi maintenant. S'il-te-plaît.

Le ton désespéré de Kaname le foudroya. De la culpabilité se rajouta à la panoplie d'émotions qui dressait déjà son éventail.

Le jeune homme ouvrit l'eau du robinet et tenta de rincer toutes les traces de son égarement. Il devait bander son poignet… ça ne passerait pas inaperçu. Sa bêtise lui donna la nausée.

Natsume se rattrapa de justesse à l'évier, prit d'un soudain étourdissement. Il pinça des lèvres quand il sentit ses jambes lâcher.

Il s'évanouit.

OoOoO

Il y eut un bruit sourd derrière l'huis et il n'en fallut pas plus à Tanuma pour enfoncer la porte d'un coup d'épaule.

Ce qu'il découvrit derrière lui glaça le sang dans les veines.

Natsume, inerte, sur le carrelage glacé. Il y avait du sang mais il ne comprit pas d'où il venait sur-le-champ. Non, il ne comprit que lorsqu'il aperçut le rasoir mis en pièces. Fou d'impuissance et de tristesse, il appela une ambulance. C'est la dame à l'autre bout du fil qui le guida pour les premiers soins, seul il ne serait parvenu à rien.

Toute sa rationalité était effacée par l'inquiétude grandissante pour son ami.

OoOo

Natsume n'avait pas envie d'ouvrir les yeux. Il sentait les intraveineuses dans son bras gauche, il entendait le bip régulier du moniteur et n'avait pas besoin de voir son environnement. Il savait qu'il était à l'hôpital.

Et s'il ouvrait les yeux, on lui demanderait certainement des explications…

- Il a besoin d'aide.

C'est la voix de Tanuma qui résonnait, plus loin.

- On ne peut pas l'aider s'il refuse tout traitement… Ce doit être son choix, pas le nôtre.

Ces mots sortaient de la bouche du docteur Nagasawa.

- Il a tenté de se suicider! N'est-ce pas suffisant?

Takashi soupira en reconnaissant sa mère adoptive.

- Il fait des crises d'angoisse, docteur. Et il est trop fier pour appeler au secours. Il ne veux pas être un boulet alors jamais il ne demandera quoi que ce soit. Gardez-le à l'hôpital, imposons-lui une thérapie… N'importe quoi. Je ferais n'importe quoi plutôt que de le regarder mourir à petit feu.

Natsume tourna la tête sur le côté et, levant enfin les paupières, aperçut l'ombre de Tanuma, de Fujiwara-san et du docteur derrière le rideau l'isolant des autres patients.

- Je vais déjà lui prescrire du prozac, ça ne peux que lui faire du bien vu son état. Mais je ne peux l'obliger à les prendre ni à aller voir un psychiatre. Ce sera à vous de le convaincre. Et je pense qu'il en aura besoin pour surmonter son viol.

Natsume faillit vomir. Comment pouvait-il parler de… ça… avec une telle froideur? Une telle désinvolture?

La colère l'envahit comme un raz-de-marée. Aussitôt son moniteur reporta les battements furieux de son cœur, attirant l'attention des autres sur lui. Il eut envie de fusionner avec le matelas.

- Natsume-kun, bonjour!

Le sourire hypocrite du docteur ne fit pas plaisir au châtain.

- Je vous déteste, cracha-t-il, incapable de retenir sa rancœur.

- Je ne suis pas là pour me faire aimer, jeune homme, mais pour soigner.

- J'ai pas besoin qu'on me soigne. Foutez-moi la paix.

Natsume le toisa d'un air hautain qui ne lui ressemblait pas. Il remarqua les mouvements de Tanuma mais ne s'attendait pas à ça.

Une gifle. Puissante.

Takashi resta sans voix. Il releva les yeux, s'attendant à trouver les traits de son compagnon déformés par la colère mais il ne trouva qu'une expression pleine de détresse.

Sans comprendre, Natsume vit Fujiwara-san et le docteur se retirer discrètement, les laissant seuls tous les deux.

- Pourquoi? Lâcha enfin Kaname, après de longues minutes d'un lourd silence.

- Je… Je n'avais pas l'intention de mourir Tanuma. Je ne sais pas pourquoi j'ai fait ça.

- Alors au lieu de faire des conneries pourquoi n'en parles-tu pas avec moi? Hein!

Tanuma serra les poings avec virulence avant de continuer son discours.

- Suis-je si insignifiant à tes yeux que tu n'as même pas envie de te confier à moi?! Tu ne me fais pas confiance, c'est ça?

- Non… Non c'est pas…

- Alors quoi? Tu as honte? Tu préfères te rouler en boule dans un coin et pleurer toutes les larmes de ton corps tout seul alors que je t'ouvre les bras juste à côté? Ouvre les yeux Natsume bon sang! Je le répète sans arrêt depuis quelques jours mais tu n'entends rien! Tu ne veux pas m'écouter! Je t'aime! JE T'AIME PUTAIN!

Il criait toujours mais des larmes mouillaient impunément ses joues rougies par la colère.

- Je t'aime alors parles-moi. Tu peux tout me dire. Je vais t'écouter. Je t'aime alors je veux que tu sois heureux, c'est normal non? Je n'en peux plus de te voir dans cet état… s'il-te-plaît…

Natsume ne s'était jamais sentit aussi démuni de toute sa vie. Il prenait peu à peu compte de l'ampleur de l'aveu de son ami et… pleura à son tour. Tanuma était simplement mort d'inquiétude pour lui, ça sautait aux yeux. Il réalisa lentement. Il n'avait pas été le seul à souffrir dans cette histoire.

Ses mains tremblèrent, son cœur bondissait dans sa poitrine.

- Je suis désolé Kaname.

Sa voix frémissait, il ne contrôlait plus son corps. L'expression meurtrie du brun l'acheva. Il lui tourna le dos, s'apprêtant à partir.

C'était un malentendu. Une méprise. Ses mots n'avaient pas bien été interprétés.

- NON Kaname reste!

- J'ai compris Natsume. Tu ne m'aimes pas de cette façon. J'ai compris.

Et là, Tanuma lui tira le sourire le plus triste qu'il lui fut donner de voir. Un déclic se fit dans la tête de l'ex-gardien du livre des amis.

S'il ne réglait pas ce quiproquo maintenant, il le perdrait. Il le perdrait comme il avait perdu tous les autres.

Sans même prêter attention à la douleur, il arracha les aiguilles plantées dans son bras et se leva pour retenir son ami.

Il le retourna sans douceur et l'embrassa tout aussi durement. Il s'éloigna sitôt fait et ajouta:

- Je suis désolé. Vraiment. Je ne voulais pas t'inquiéter autant… Je n'ai pas réalisé que…

Un rire nerveux franchit les lèvres de Tanuma. Avec beaucoup d'hésitation, il leva une main pour caresser tendrement la joue de son vis-à-vis.

- Pardon, Kaname, pleura Takashi, n'essayant même plus de se retenir.

Alors le plus grand prit le visage de son aimé en coupe et lui vola un autre baiser, infiniment plus doux que le premier. Il gouta langoureusement ses lèvres tout en laissant vagabonder ses mains dans sa chevelure claire. Natsume posa timidement une main sur son torse.

Il sentait son cœur battre sous ses doigts, lui-même ne s'était pas sentit aussi vivant depuis des jours.

Ils se séparèrent un peu à contre cœur. Leur promiscuité ne mit pas Natsume mal à l'aise, au contraire. Il se rendit compte de l'entière confiance qu'il avait envers son… amant. Oui, une confiance aveugle et beaucoup de respect mais pas seulement.

De l'amour aussi, à ne plus en douter. Un amour violent qui tempêtait en lui.

- Kaname… Je t'aime aussi.

C'était sorti naturellement. Natsume ne le regrettait pas.

Tanuma lui sourit doucement à nouveau. Il passa ses bras autour de ses épaules et le serra contre lui avec une fermeté rassurante.

Natsume était certain de trouver cette sensation de sécurité nulle part ailleurs qu'ici, dans son étreinte.

- Merci, émit le châtain infiniment plus serein.

- C'est rien, rassura l'autre en lui embrassant le front sans desserrer l'étau de ses bras.

OoOoO

- Où est passé ton père? S'enquit Takashi.

- En déplacement, comme d'hab.

Tanuma était plongé dans ses révisions et lui avait répondu avec légèreté.

- Ca nous laisse tout seuls?

Sentant l'appréhension dans la voix de son amant, Kaname posa son stylo et chercha le regard miel de Natsume.

- T'es anxieux?

Le susnommé se contenta d'hocher la tête de façon raide.

- Relaxe, tu sais très bien que je ne toucherai pas sans ton accord.

Il s'était passé plusieurs semaines depuis sa confession mais jamais ils ne s'étaient retrouvés tous les deux dans une même pièce, entièrement seuls. Les Fujiwara avaient veillé au grain; Natsume était toujours sous étroite surveillance. La médication l'avait aidé à rester la tête hors de l'eau et son état général s'en était vu nettement amélioré. Il n'avait pas fait d'autres crises de panique, ni d'automutilations quelconques. Bref, Natsume remontait la pente à son rythme. Le traumatisme n'en restait pas moins important et Tanuma Kaname s'était armé de toute la patience du monde pour surmonter ça avec lui. Sa frustration sexuelle ne le ferait jamais gâcher sa relation avec Takashi.

Quand il n'en pouvait plus, il s'enfermait dans les toilettes avec sa main droite. Et ça, Takashi n'avait pas besoin de le savoir. Il attendrait aussi longtemps qu'il le faudrait.

Perdu dans ses pensées, Tanuma ne sentit pas que son amoureux s'était agenouillé juste à côté de lui.

- Je sais que t'en as envie et je…

Tanuma lui jeta un coup d'œil torve.

- Tu n'as pas à te forcer. Je peux attendre.

- Non… je… pensais essayer. Voir si peut-être… continua Natsume, ses lèvres étirées d'un sourire tremblant mais les yeux pétillants de détermination.

Certes, Tanuma avait une maîtrise de lui-même incroyable mais comment pouvait-il résister à ça? Il essaya de prendre sur lui parce qu'il savait que la probabilité d'aller jusqu'au bout frôlait zéro.

- Viens-là, dit-il en l'enserrant d'un bras.

Leurs lèvres se retrouvèrent. Tanuma les lécha, les mordilla gentiment et d'un coup de langue expert lui demanda la permission d'approfondir leur échange.

Natsume desserra enfin les dents mais semblait toujours tendu.

- Tu ne me donnes pas envie à être aussi stressé.

Le brun constata sa bourde trop tard. Ce n'était pas comme ça qu'il allait parvenir à ses fins.

- Pardonne-moi, Takashi. C'était débile, fit-il en plongeant le nez dans son cou.

- C'est rien. Je te fais confiance et si… et si ça ne va pas je le dirai d'accord?

Le front contre le sien, son regard planté dans ses orbes miel pleines de convictions, il sut qu'il avait en face de lui l'homme de sa vie, qu'il pourrait retourner le monde pour lui.

- Je t'aime.

Trois petits mots avec une signification si lourde et complexe… Ces derniers exprimaient mieux ses sentiments pour Takashi que des centaines d'autres ne pourraient le faire.

Un sourire doux éclaira le visage de son compagnon. Il était enfin détendu. Tanuma détruirait cette barrière imposée par ce salaud qui avait brisé la vie de Natsume et la remplacerait par du plaisir et du bonheur. Il se l'était promis.

Ses caresses furent aussi légères qu'une brise. Du bout des doigts, il fit glisser le yukata sur l'épaule d'ivoire de son amant, mettant à découvert un bourgeon de chair rose déjà dressé. Il longea son bras avant de remonter jusqu'à son trapèze puis de redescendre sur son muscle pectoral. Sa peau était plus douce que dans ses rêves; son regard seul suffisait à le faire s'embraser de désir.

Mais sa réticence ne s'en irait pas si facilement. S'il allait trop vite ou pire s'il le blessait, qu'arriverait-il?

Tout s'écroulerait à nouveau.

Tanuma sentit la paume chaude de son amant se poser sur sa joue. Il leva le regard vers lui, ses orbes mordorés l'hypnotisèrent entièrement.

Sans un mot, Takashi s'agenouilla pour finalement le prendre dans ses bras. Ses lèvres frôlèrent son cou en un baiser tendre. Ses doigts s'aventurèrent sans pudeur sous son t-shirt.

Le souffle court, Tanuma réalisa que cette position était idéale. Il devait laisser Takashi mener, se serait plus facile et même certainement plus agréable pour le châtain. Aucun risque de ramener de mauvais souvenirs à la surface ainsi, n'est-ce pas? Son cœur palpitait violemment dans sa poitrine.

Cette nouvelle perspective lui restait un peu en travers de la gorge mais peu lui importait sa condition à lui, la seule qui était importante pour le moment était celle de Takashi.

Les lèvres de ce dernier malmenaient les siennes alors que sa langue chaude lui faisait perdre tout ses moyens. Il se retrouva sur le dos sans s'en rendre compte. Takashi le surplombait, son Yukata avait glissé sur ses hanches frêles et mieux encore: son regard était embué de désir.

Un gémissement incontrôlé fila hors de sa gorge.

- Takashi… Je te veux. Je te veux tellement!

Les mains du bruns tremblèrent sur les cuisses de son amant. Il n'en pouvait plus! Son érection douloureuse était sur le point de faire exploser son pantalon, son cœur battait si vite et tout dans sa tête était noyé par le brouillard de l'envie.

Kaname pensait avoir atteint l'apogée. Comment pouvait-il désirer encore plus Takashi?

Oh. Comme ça.

Les dernières pensées cohérentes de Tanuma s'évaporèrent au moment où son petit ami se lécha les doigts puis les porta à son entre-jambes…

Non vraiment, c'était tellement sensuel que le jeune homme faillit tourner de l'œil. Quand avait-il enlever son caleçon au passage? Qu'importe. Le membre gorgé de sang de Takashi saillait hors de ses habits et au fur et à mesure que ses caresses s'intensifièrent, il tombait de plus en plus sur lui.

Il finit par être entièrement allongé sur son torse, son poing refermé sur son t-shirt alors que son autre main restait invisible.

Tanuma ne savait plus quoi faire. Pouvait-il le toucher? Devait-il le toucher?

Maladroit et hésitant, il commença par caresser ses épaules, puis ses omoplates. Ensuite vînt ses côtes, le bas de son dos, ses fesses.

Oh mon dieu ses fesses.

- Takashi… implora-t-il au plus jeune.

Il défit enfin son jean. Baissa enfin son caleçon. Le châtain se défit de son yukata précipitamment avant d'embrasser l'homme sous lui avec encore plus de vigueur.

Tanuma eut le souffle coupé quand il sentit la chaleur de Natsume se poser sur son sexe érigé.

Il se frotta inconsciemment à lui.

Natsume se redressa soudain, cracha délicatement dans sa main et à la grande surprise de Kaname, étala la salive sur sa verge.

Il sursauta et fut incapable de retenir son râle de plaisir. Il eut envie de crier quand il le lâcha, mais n'eut pas le temps de se remettre de sa caresse que Natsume s'empala de lui-même.

Lentement, sûrement, il s'enfonça dans les entrailles de son amoureux. Il s'accrocha à lui de toutes ses forces. Il était sa bouée de sauvetage. S'il le lâchait, il se noierait. C'était simple.

Takashi avait enfoui sa tête dans le creux de son cou et son souffle chaud à son oreille ne l'aidait pas à garder la tête froide. Les gémissements qu'il ne tarda pas à échapper lui firent perdre le peu de contenance qu'il lui restait encore.

Ses mains agrippèrent ses hanches fermement et l'obligèrent à se mouvoir. Natsume s'arc-bouta instantanément. Sa bouche s'ouvrit en un cri muet.

- Kaname, doucement… bredouilla le plus jeune en plaquant d'une main les hanches du brun au sol.

- J'en peux plus… Je…

Natsume sourit tendrement et commença à bouger de par lui-même. Son déhanchement se fit plus rapide et malgré la légère douleur le harcelant, il s'obstina à continuer. Il avait envie de combler Kaname et ce sentiment surplombait tous les autres.

Enfin, c'était comme ça avant qu'un éclair de plaisir ne traverse son corps.

Il échangea un regard étonné avec son amant et d'un nouveau coup de bassin, essaya de répéter le mouvement.

Ça ne manqua pas. Il fut littéralement submergé de plaisir. Ce fut si intense qu'il ne put retenir son orgasme.

Il se pressa contre le torse viril de Tanuma en un ultime gémissement. Le plus âgé vînt à son tour, se déversant au plus profond des entrailles de Takashi.

Les deux jeunes hommes tentèrent de reprendre leur souffle. Tanuma serra fort Natsume dans ses bras alors que ce dernier profitait de la chaleur de son amant.

Kaname avait attendu longtemps pour ce moment et l'attente en avait valu le coup. Il se sentait léger, serein. Et il semblait en être de même pour Natsume. Ses longs cils chatouillaient ses joues rougies et un doux sourire étirait ses lèvres.

- Tu as été… wow, avoua Tanuma tout doucement.

Le concerné pouffa puis resserra sa prise. Tanuma lui rendit son étreinte, lui caressa les cheveux avant d'ajouter.

- Excuse-moi d'avoir été aussi nul.

- Tais-toi. C'était parfait, fit le châtain en embrassant son amoureux.

OoOoO

- Matoba Seiji, vous êtes condamné à 15 ans de prison pour coups, blessures et agression sexuelle sur un mineur.

Le marteau en bois s'abattit sur son socle, mettant fin à la séance.

Menotté, Matoba fut amené vers l'endroit qui lui convenait le plus. Une cellule. Peut-être que quinze années lui permettrait de réfléchir à ses actions. Natsume le regarda sortir, la tête haute.

Quatre années étaient passées depuis son agression mais de savoir cet homme enfin derrière les barreaux le soulagea d'un poids immense.

Plus personne n'aurait à subir ses vices innommables. Il ne laisserait plus de victimes comme lui dans son sillage. Et ce grâce à sa dénonciation.

Il était fier de lui, fier de ce qu'il avait accompli. Ils pouvaient tous vivre dans un monde un peu moins sombre désormais. Il sentit la paume de Kaname dans la sienne avant de sortir de la pièce encore bondée.

Il sortait le dos droit et les yeux secs.

Il sortait de là en homme et non en victime.

Les grandes portes en bois se refermèrent sur cette image de lui.