Palabres : Voilà la dernière partie de ce one-shot un peu long, merci d'avoir suivi jusqu'ici, merci au reviewers anonymes que je ne peux pas remercier personnellement par MP et peut-être à bientôt sur d'autres projets !
Partie III
Kirk se promenait souvent dans la salle des machines. Il aimait à sentir battre le cœur en fusion perpétuelle de son vaisseau, se laisser bercer par l'écoulement tranquille de son énergie dans les circuits, percevoir les vibrations des mouvements précis et élégants des turbines et de l'assemblage minutieux des composants de sa gracieuse dame d'argent. Son chant harmonieux de mécanique parfaitement entretenue calmait ses angoisses et tranquillisait son esprit plus durablement que tout ce que pouvait raconter Surak dans ses enseignements... Il laissait la discipline vulcaine à Spock, lui n'avait besoin que de renouer avec la machine, faire corps avec elle pour retrouver sa paix intérieure. Il allait avoir besoin d'une sacrée dose...
Jim posa la main sur une canalisation d'eau et laissa le métal rafraîchir sa paume moite. Il avait la sensation que tout son corps était rongé par un feu glouton dont il ne parvenait pas à cerner l'origine. Il savait qu'il l'éprouvait particulièrement en présence de Spock. Chaque fois que le commandant le contredisait, s'adressait à lui sans le regarder dans les yeux ou laissait transparaître une émotion un peu trop humaine, les flammes s'agitaient en lui, embrasaient son irrationalité. Il se souvenait d'avoir provoqué Spock sans aucun motif sur la passerelle et voilà qu'il l'embrassait férocement dans les ascenseurs ? Attirer son regard sur lui devenait une nécessité vitale. Il se demandait si la tension ambiante n'avait pas perforé ses défenses. Lui fallait-il des vacances ? Conneries ! Il en avait trop dit de toute façon pour revenir sur sa décision. D'ailleurs, quel bien des vacances pouvaient-elles lui faire s'il devait les passer loin de Spock à s'interroger constamment sur ses faits et gestes ?
Kirk colla son front contre la conduite d'eau et l'aurait très probablement martelée de coups de tête s'il ne s'était pas ouvert la boîte crânienne plus tôt dans la journée. Il prit une grande inspiration et se résolut à passer les prochaines quarante secondes à penser à n'importe quoi, excepté Spock, et tout ce qu'il accomplit fut de se rendre compte qu'il avait très envie de baiser. Il n'osait pas imaginer ce que ça donnerait s'il déverrouillait son esprit et laissait sa préoccupation numéro un et la numéro deux faire ensemble des cabrioles...
Peut-être sa frustration était-elle trop forte car il se mit soudain à entendre l'écho de respirations précipitées et de petits gémissements étouffés.
Abuse pas, Kirk, tu ne peux pas avoir ce genre d'hallucinations sonores...
Il retint une envie de se fracasser franchement et définitivement la tête contre la conduite d'eau pour remettre en place le truc qui déconnait dans son lobe frontal et alla découvrir l'origine des bruits qu'il percevait. Prudemment et à demi-vouté par réflexe martial, il chemina sans bruit, guidé par les soupirs ténus qui irritaient son ouïe. Alors qu'il dissimulait sa présence derrière un tuyau lui apparurent distinctement des supplications mielleuses teintées d'un fort accent russe... C'était la saison des amours sur son vaisseau ou quoi ?
— Sulu... Pas ici...
— Alors dans mes quartiers...
— Mais... tes plantes carnivores... me font peur.
Kirk perçut quelques sons... humides ainsi qu'un couinement sexy de Chekov.
— Tes quartiers ?
— Tu sais bien qu'il y a-ah... l'autre...
— Alors ce sera ici...
— Mais...
— Pavel, reprit Sulu avec sérieux et autorité, j'aurais pu te perdre aujourd'hui aussi alors laisse-moi te sentir contre moi...
Kirk jugea qu'il en avait déjà trop entendu, dès le lendemain il attribuerait une nouvelle chambre au petit Chekov. Une chambre seule...
Spock ne pouvait pas redouter une entrevue, c'était illogique. Il n'y avait pas plus irrationnel que la crainte ou la peur et il ne pouvait décemment pas les éprouver puisqu'elles naissaient de l'inconnu et que Jim était loin de lui être étranger. Ils avaient par ailleurs échangé certains fluides corporels ainsi que quelques uns de leurs désirs cachés les plus profondément enfouis... Pourtant Spock ne parvenait pas à demander l'accès à la chambre de son capitaine parce qu'il savait que son capitaine s'y trouvait, qu'ils y seraient seuls et qu'il devrait lui expliquer comment il l'avait drogué à son insu et pourquoi il avait perdu le contrôle de son pouvoir télépathique et que l'un et l'autre sujet lui vaudraient la colère de Jim. Et il ne voulait pas le voir dans cet état. Il préférait le Jim insouciant et léger qui lui faisait des tapes dans le dos, des blagues salaces et lui roulait des pelles dans les ascenseurs... Il retira les syntagmes impertinents de sa pensée et tapa le code d'accès de la chambre de son supérieur hiérarchique.
— Capitaine, dit-il en inclinant la tête alors que celui-ci, torse nu et la peau qui embaumaient de manière parfaitement illogique le bois de cèdre de son gel douche, enfilait un tee-shirt noir.
— C'est pas trop tôt, Spock, j'ai failli commencer sans toi ! s'exclama-t-il.
Le sourcil interrogateur de son subordonné ne lui échappa pas.
— Il m'a paru que nous devions nous entretenir au sujet de ...
— T'en fais pas, coupa Jim, on va discuter... Mais d'abord, retire-moi ces vêtements.
Le commandant en second dévisagea le capitaine qui le lorgnait de haut en bas.
— Tu n'en auras pas besoin pour ce qu'on va faire, ajouta-t-il.
Spock ouvrit la bouche et lâcha dans un souffle un peu trop court pour un Vulcain un misérable « Plaît-il ? ». En guise de réponse, James lui lança une tenue de sport noire qui arborait fièrement le logo de Starfleet.
— Je mentirais si je te disais que ce que tu étais en train d'imaginer me déplaît mais avant tout, tu me dois une session de judo, tu n'as pas oublié ?
— Non, je n'ai... pas oublié.
Hésitation qui, chez Spock, signifiait précisément le contraire. Le sourire auto-satisfait du capitaine lui fit presque croire que sa carnation faciale avait trahi son tumulte intérieur. Il focalisa son attention sur les vêtements que Kirk lui avait donnés pour oublier son embarras.
— Pourquoi est-ce que je suis le seul à devoir porter un kimono ? s'enquit-il platement.
— Parce que mon petit doigt me dit que ça t'ira bien.
À son expression, Jim voyait que Spock était partagé entre lui rétorquer que selon toute vraisemblance son auriculaire n'était point doué de parole et que, quand bien même la tenue lui irait bien – avec toute l'imprécision sémantique dont le terme était porteur –, ce n'était pas une raison nécessaire et suffisante pour qu'il accepte de la porter.
— Change-toi vite, je t'attends devant la porte.
— Attends, Jim...
Spock n'était pas particulièrement emballé à l'idée de se promener dans les couloirs de l'Enterprise avec un kimono sur le dos.
— Quoi ? Tu préfères que je reste ? le taquina Kirk avec une voix un petit peu trop chaude pour être innocente.
— Ce ne sera pas nécessaire...
Kirk sortit, un indéfectible sourire aux lèvres et laissa son second à sa résignation. Il ne mit pas longtemps à enfiler sa tenue et rejoignit son capitaine qui l'attendait, appuyé contre un mur.
— J'avais raison, s'enthousiasma-t-il en le voyant.
De drôle de bulles éclatèrent sous les côtes de Spock et il se demanda s'il devait s'en inquiéter.
— Allons-y, Capitaine, dit-il en le précédant.
James le rattrapa en quelques foulées.
— Gêné, Mr. Spock ?
L'intéressé ne répondit pas et ils cheminèrent en silence vers la salle d'entraînement. Spock se réjouit de sa proximité géographique car le regard dévorateur que son compagnon dardait sur lui mettait son épiderme à vif et un étonnant courant électrique torturait ses doigts comme pour le presser de chercher l'apaisement contre la peau de Jim. Heureusement, la salle de sport était fréquentée en permanence et le regard des autres membres de l'équipage lui servirait de garde-fou. Le commandant en second s'accrochait à cette idée avec une hargne qui n'était pas très éloignée du désespoir. Ce sentiment malvenu s'accrut davantage lorsqu'ils arrivèrent.
— Où sont les autres ? demanda-t-il.
Son regard, égal, balaya la pièce immense. Les appareils de musculation : vides ; les rings : inoccupés, les tatamis : désertés.
— Privilège de capitaine... sourit Kirk dont l'amusement ne semblait pas avoir de limite.
Il entama immédiatement quelques mouvements d'échauffement tandis que Spock se listait mentalement la table des matières du corpus ancestral des enseignements de Surak.
— Okay, on peut commencer mais avant ça...
Le capitaine sortit une paire de gants de ses poches et la lança à son sparring-partner.
— Au cas où... précisa-t-il.
Il ne tenait pas à être terrassé en un coup par une fusion mentale inopinée. Spock enfila les gants avec ce qui ressemblait à s'y méprendre à un sourire en coin.
— Redouterais-tu une autre fusion mentale ?
Un feu d'artifice d'étincelles sembla jaillir du point de jonction de leurs regards. Ils se jaugèrent quelques secondes avant que Kirk ne se fende d'un sourire mutin.
— Si je dois me retrouver humide et pantelant, j'aime autant que ce soit à cause de l'entraînement, si tu vois ce que je veux dire...
Le capitaine Kirk interpréta avec délectation le silence de son subordonné comme l'aveu coupable de la gêne qui résultait du sous-entendu. La fusion mentale avait décloisonné et rendu audible ce que l'un et l'autre refoulaient de désirs inavouables. Ils s'agrippaient un peu nerveusement à leur égo comme on couvre avec détresse ses parties génitales quand on est surpris nu. Mais ils avaient déjà tout vu. James avait connu par l'esprit tous les fantasmes de Spock à son endroit jusqu'aux derniers replis de son imagination – par ailleurs plutôt fertile pour l'emmerdant-monsieur-je-sais-tout- qu'il était – et il s'empourprait à l'idée que Spock savait qu'il voulait qu'il le prenne en bouche alors qu'il siégerait sur son fauteuil de comandant... Il n'eut pas même la bonne grâce de rougir de ses pensées. L'unique chose qui lui importait était la façon dont il parviendrait à faire voler la coupe au bol de Spock, peu importait le contexte.
Les deux adversaires s'inclinèrent pour signifier l'ouverture du combat et initièrent quelques feintes pour tester leurs réflexes. La garde de Spock, impeccable à l'instar du reste de sa personne, ne laissait pas entrevoir de faille. Kirk, quant à lui, tenait une posture plus offensive mais tout aussi impénétrable. Leurs regards, calculateurs, jaugeaient chaque mouvement, chaque flexion de genou, chaque tressaillement léger des doigts, chaque frémissement des paupières, chaque souffle. Spock s'attarda peut-être un peu trop longtemps sur l'ardent arrondi arénacé des lèvres de son adversaire parce qu'il se retrouva soudainement tracté par le col, chaviré, littéralement. L'arrière de son crâne heurta les tatamis. Étourdi, il vit valser de manière languide la lumière vive des projecteurs au plafond, à moins que ce ne fût les arceaux outrageusement bleus des pupilles de son adversaire. Il se demanda si la tête lui tournait à cause du choc ou parce que Jim avait passé ses cuisses de part et d'autre de son bassin et qu'il le retenait plaqué au sol les deux mains contre sa poitrine.
— T'as un phaseur à la ceinture ou t'es complètement maso ? le provoqua Kirk dans un large sourire.
— Négatif, Capitaine.
Le calme inébranlable du Vulcain altérait sa patience de simple humain, sa passivité alors qu'il n'avait cessé de lui tendre des perches pour l'amener à dévoiler ses intentions l'évaporait carrément. Jim cessa de sourire. Calmement, ses paupières s'abaissèrent et il prit une profonde inspiration pour ne pas se laisser aller. James rouvrit les yeux et les arrima à ceux de Spock. Le regard résolu, il s'inclina avec lenteur vers la figure de son adversaire qui n'exprimait pas la moindre émotion. En son for intérieur, il savait qu'il n'avait qu'à se pencher pour cueillir le baiser qu'il mourrait d'envie d'arracher. La distance de leurs deux visages pouvait se mesurer en longueurs de cil et, déjà, il était ardu de démêler leurs souffles. Les lèvres charnues et rouges de Kirk s'entrouvrirent en frémissant. Il inspira doucement et but l'air qu'expirait Spock.
— Qu'est-ce qui t'a fait perdre le contrôle de ton pouvoir ? demanda-t-il, finalement.
Peut-être pensait-il déstabiliser son opposant, cependant Spock n'avait pas oublié ce pourquoi il était étalé à terre. Il releva un genou qui vint s'insérer de manière pernicieuse entre les cuisses de Jim et profita de l'effet de surprise pour inverser leur position. Le commandant en second sut qu'il s'agissait d'une mauvaise idée quand il vit les pupilles de Jim se dilater sous l'afflux d'adrénaline. Il préféra détourner le regard.
— Je l'ignore, répondit-il.
La poigne rageuse de Kirk se referma sur son kimono et il fut violemment tracté vers l'avant.
— N'essaie pas de me mentir, c'est moi qui t'ai appris comment faire.
Il y avait trop de frictions entre leurs deux corps et de proximité entre leurs bouches.
— Il me semble que cette prise n'appartient pas aux mouvements réglementaires du judo, remarqua Spock, impavide.
— Ne change pas de sujet !
La prise du capitaine se resserra et le tissu du kimono glissa hors de la ceinture qui le retenait pour dévoiler les muscles glabres et appétissants du torse du Vulcain. Inconsciemment, James déglutit et passa la langue sur ses lèvres devenues soudainement sèches. Spock sur lui, dénudé, presque entre ses cuisses et indubitablement érigé, l'allumait au point qu'il ne lui était plus possible de cacher son excitation.
— Jim, il m'est difficile de raisonner de manière logique dans cette... position.
— Si tu savais à quel point je me fous de la logique, là, tout de suite... répliqua-t-il avant de se redresser sur les coudes pour embrasser son idiot de second.
Son regard s'arrondit de stupeur lorsque son idiot confirmé de second le tint à distance et lui couvrit la bouche de sa paume. Jim avait envie de le mordre au sang en représailles et ne pouvait même pas à cause des gants qui faisaient obstacle. Il voulut contester mais ses jurons outragés s'étouffèrent dans le tissu.
— Jim, attends, écoute-moi. L'attirance que tu éprouves pour moi en ce moment a été provoquée par l'ingestion des pilules de régénération que je t'ai données. Je soupçonne ce produit d'agir comme un aphrodisiaque sur les humains car à chaque fois que tu en as ingéré une dose j'ai remarqué une accélération de ton rythme cardiaque, une respiration plus lourde et l'augmentation de ta production de phéromones. La soudaine montée en puissance de tes désirs sexuels a pu contribuer à la perte de contrôle de mon pouvoir télépathique car, lorsque nos peaux se sont touchées, j'étais moi-même en pleine lutte contre les désirs que tu connais désormais et qui sont en moi depuis un certain temps maintenant. Aussi je te demande pardon et j'espère que tu ne m'en tiendras pas rigueur.
Spock ne libéra la bouche de son capitaine qu'une fois son plaidoyer fini. Celui-ci, légèrement essoufflé, le jaugeait avec une incrédulité manifeste. Il leva les yeux au ciel, massa ses paupières du bout des doigts et se pinça l'arête du nez avant de soupirer de lassitude. Spock avait beau n'être que télépathe par le toucher, il était presque certain que Jim venait de le traiter implicitement d'idiot, ce qui, quotient intellectuel à l'appui, était parfaitement illogique.
— Jim, je...
— Sérieusement : la ferme, Spock.
Kirk saisit les pans lâches du kimono et attira Spock contre lui pour l'embrasser. Alors que leurs bouches se goûtaient pour la seconde fois, ses mains se faufilèrent sous le col noir, effleurèrent les omoplates puissantes et firent tomber le vêtement des épaules de Spock. Au toucher, James avait la sensation que courait sous les muscles de son second une tension extrême à laquelle faisait écho la crispation maladroite de ses lèvres. Quelque chose retenait le Vulcain de répondre à ses empressements alors même qu'il n'était plus apte depuis longtemps déjà à cacher son désir. Piqué, Jim rompit le baiser et attrapa vivement la main droite de Spock. Doucement, il tira sur l'extrémité de ses doigts pour retirer le gant qu'il portait. Les yeux bleus piégèrent les yeux noirs tandis que Jim prenait la main de Spock entre les siennes.
Du bout des doigts, dans une caresse légère et volontairement frustrante, il parcourut la paume du Vulcain. Il effleura brièvement l'intérieur du poignet puis revint titiller les lignes de la main avant de flirter avec le bout de ses doigts. Les joues de Kirk se teintèrent d'un rouge impudique lorsque Spock ferma les yeux, lèvres entrouvertes, en proie au plaisir. Cette vision de son second était délicieuse et il allait le dévorer incessamment s'il ne lui opposait pas un peu de résistance. Il s'exécuta presque littéralement et, après avoir isolé l'index et le majeur de Spock, y déposa un baiser. Avait-il réellement entendu le glaçon vulcain confiner un gémissement ? Pour confirmer son hypothèse, Kirk passa un coup de langue sur les deux doigts.
— Jim, s'il-te-plaît, a-ah-arrête... lâcha Spock, le souffle court.
James sentait qu'il n'allait pas tarder à laisser les commandes à ses instincts les plus bas et il se mit à mordiller doucement la pulpe de son index. De ses lèvres il pinçait la peau, plantait ses dents dans la chair, léchait les meurtrissures qu'il laissait sur son passage, et Spock en retour réprimait à peine des gémissements gutturaux. La tension inassouvie qu'endurait Kirk commençait à devenir insupportable, sa bouche abandonna son œuvre et, bravache, il guida la main de Spock entre ses jambes.
— C'est pas un aphrodisiaque à la con qui risque de me faire ce que tu me fais... avoua-t-il d'une voix rauque d'où transparaissait un soupçon de tristesse derrière la provocation.
Aussitôt, Jim grogna de douleur et de plaisir mêlés. Spock avait repris le contrôle de ses mains et palpait un peu rudement ses parties intimes par-dessus ses vêtements. On l'attaquait directement sous la ceinture et Kirk n'y était pas foncièrement opposé mais n'aurait pas été contre un petit plus de plaisir et un petit peu moins de sauvagerie. Il allait s'exprimer sur le sujet lorsque la langue de Spock se fraya une place entre ses lèvres pour lui électriser les sens et court-circuiter ses fonctions cérébrales. Par réflexe, il empoigna la nuque de son second et l'attira contre lui pour rendre l'échange plus intense. Il avait la sensation qu'il n'aurait jamais assez de ses lèvres qui s'échinaient à rendre les siennes captives, de cette langue qui cherchait la sienne, de ce baiser au goût doucereux d'asservissement. Il était sous l'emprise de cette bouche qui torturait ses sens et mobilisait toute son attention alors que les mains de Spock sévissaient comme bon leur semblait. Il ne savait pas quand il avait perdu son tee-shirt, ni à quel moment il s'était retrouvé les jambes à l'air avec la bouche de Spock sur ses mamelons et sa main sur son... Mon dieu, est-ce qu'il venait de gémir le nom de Spock ? Et que faisaient ces damnées lèvres dans son cou ? Jim se cambra violemment tout en s'accrochant avec violence aux épaules de son partenaire. Il fallait qu'il se reprenne d'urgence, le fait était que Spock était trop vêtu et pas assez décoiffé à son goût.
Jim allait le rendre fou. Sa façon d'être sensible à chacune de ses caresses, la soumission involontaire de son corps qui accompagnait chacun de ses mouvements et se pliait à tous les caprices du siens, sa poigne puissante qui tirait sans ménagement sur sa chevelure, broyait ses omoplates et sa bouche, cette bouche vorace et pyromane, cette bouche qui lui mordait les lèvres, lui suçait la langue et attisait son désir. Spock sentait croître en lui un incendie titanesque qui ne laisserait rien de son amant s'il le laissait s'étendre et pourtant rien ne pouvait plus l'arrêter. Sa bouche s'appliquait à marquer le cou et la nuque de Jim de suçons violacés, tandis que ses mains s'affairaient plus bas, à cadence soutenue. Il ne pouvait plus se stopper, les plaintes sensuelles entrecoupées de gémissements sonores, la cambrure toujours plus accentuées de Jim et le roulis lascif de ses hanches contre sa main agissaient comme une drogue infernale qui le laissait constamment en état de manque. Il voulait voir Jim atteindre l'orgasme, voir sa tête se rejeter en arrière dans un dernier abandon tandis que ses yeux impudemment bleus rouleraient d'extase dans leurs orbites. Et il s'y dédiait tout entier lorsqu'il sentit les doigts de son amant descendre le long de ses hanches et s'infiltrer sous son pantalon.
— Hors de question que je jouisse avant toi, parvint à prononcer Kirk malgré son état.
Spock ne put empêcher son visage d'affecter un demi-sourire d'amusement.
— Que le meilleur gagne... répondit-il, magnanime, en déposant un baiser sur sa joue.
Les sourcils de Spock atteignirent des sommets de perplexité lorsqu'une explosion de rouge imprégna le visage de Jim, débordant jusqu'à la pointe de ses oreilles.
— Cette réaction était... mignonne, diagnostiqua-t-il.
Les rougissements de Kirk redoublèrent d'intensité.
— Tu vas vite voir que je n'ai rien de mignon... grinça-t-il, légèrement humilié, en attrapant Spock par les hanches pour plaquer son bassin contre le sien.
Les jambes emmêlées, les mains maculées de fluides mêlés, ils s'apportèrent l'un l'autre la jouissance. Pantelant et le regard fiévreux, Spock frissonna longuement lorsque les doigts impénitents de Jim tentèrent de s'insinuer à nouveau sous ce qui lui restait de vêtements.
— J'ai bien peur, Capitaine, que poursuivre et aller jusqu'au bout ne nuise à la qualité de notre travail, demain sur la passerelle, annonça-t-il doctement.
Kirk soupira.
— Je suis résistant, tu sais...
— Et moi Vulcain. Si je devais perdre le contrôle pendant l'acte – ce que, te connaissant, tu t'efforceras de me faire faire – il te faudra plusieurs jours pour t'en remettre.
Loin de s'effaroucher de l'avertissement, Kirk continua à caresser, au niveau des reins, la peau soyeuse et veinée de vert du Vulcain. Près de se tendre à nouveau, Spock emprisonna les mains de Jim dans les siennes. Leurs regards s'accrochèrent une fois encore et les iris sombres paraissaient lui signifier la puissance du désir de possession qui hantait Spock, désir qui s'accompagnait de la crainte de capituler face à sa bestialité. Pourtant, par-dessus tout, il lui semblait percevoir toute la tendresse que Spock avait pour lui. Ces émotions, suaves et électrisantes à la fois, il avait l'impression de les sentir couler en lui, comme diffusées en bruine vaporeuse sous sa peau depuis le bout des doigts de son amant.
— Très bien, j'ai compris... capitula le capitaine. Quand est-ce qu'on pourra le faire ?
Ils échangèrent un autre regard et l'horreur la plus totale passa sur le visage de Kirk lorsqu'il comprit. Il se laissa tomber contre le torse du Vulcain, dissimulant à peine sa frustration.
— Salaud, geint-il mollement.
Il allait le faire attendre jusqu'à leur prochaine permission. Et Spock l'entoura de ses bras pour le serrer contre lui avant de lui caresser le dos dans une tentative d'apaisement.
— J'ai l'impression de m'être fait baiser... se plaignit Kirk en enfouissant néanmoins le visage dans le cou du Vulcain.
Celui-ci eut un autre de ses sourires en coin.
— Eh bien, pas tout à fait.
Mais ce ne saurait tarder... poursuivit intérieurement Spock.
FIN