Broken dream

Avant toute chose, je tenais à remercier tous ceux qui ont lu et commenté mes précédentes histoires. J'adore recevoir vos impressions et discuter avec les gens du fandom. C'est un vrai plaisir.

J'espère que cette fanfic recevra un aussi bel accueil que les précédentes. Celle-ci est un peu différente. Pour être tout à fait honnête, je ne sais pas dans quoi je m'embarque. Une chose est sûre : elle sera plus longue que les autres et en plusieurs chapitres, histoire de me motiver à écrire. J'essaierai d'en poster un par semaine.

L'idée de cette fanfic est née lors d'une discussion avec Amelia theFujoshi. Je me suis mise au défi d'écrire un johnlock post saison 3 dans lequel Mary ne mourait pas et n'était pas mise de côté trop rapidement. J'espère que cette histoire te plaira, Amelia. J'attends tout particulièrement ton avis et tes critiques !

Sinon, j'ai volontairement inventé deux filles pour John, avec des noms choisis par mes soins, pour me détacher totalement des œuvres littéraires, cinématographiques et télévisuelles. Ceci est un futur qui n'existe que dans ma tête.

Je crois que j'ai fait le tour de ce que j'avais à vous dire. N'hésitez pas à me faire part de vos commentaires.

Bonne lecture :)


Chapitre 1

Un matin, au réveil, John doit se rendre à l'évidence.

Il est 5h, Mary est lovée contre lui, complètement nue, et il ne ressent aucun désir pour elle.

Il n'a pas la moindre envie de glisser sa main le long de son corps pour la caresser, pour la réveiller. Le contact de sa peau contre la sienne est agréable et familière, réconfortante. Peut-être trop.

John aime sa femme.

Il n'en doute pas une seule seconde.

Ensemble, ils ont construits une jolie petite famille. Leurs deux filles, Lily et Judith, en sont la preuve et sa plus grande fierté.

Mais depuis plusieurs mois, voire des années, s'il est honnête avec lui-même, John ne regarde plus Mary avec les mêmes yeux. Elle est devenue un membre de sa famille. Quelqu'un pour qui il a une grande affection et qui fera toujours partie de sa vie. Il ne sait pas trop comment l'expliquer. Mais la passion s'est envolée depuis longtemps. La vérité, c'est qu'il n'est plus très sûr d'être amoureux d'elle. Depuis quelques temps, il se surprend à s'ennuyer. Il a l'impression d'être revenu en arrière, au début de la première grossesse de Mary, avant de découvrir son secret.

Sa vie actuelle ne lui convient pas. Et cette simple pensée lui donne la nausée. Pourquoi n'est-il pas heureux alors qu'il a tout pour l'être ?

Sherlock lui manque, c'est vrai. Il ne le voit plus aussi souvent qu'avant depuis qu'il s'est mis dans la tête qu'un père de famille ne devait pas s'exposer au danger. Alors il sélectionne avec soin les affaires qu'ils résolvent à deux.

Et ça l'agace. Il a besoin d'action. C'est plus qu'une manière de vivre. C'est une drogue.

Mais ce n'est pas le seul problème.

John a le sentiment qu'il lui manque quelque chose. Il est entouré d'une famille qui l'aime et pourtant, parfois, il tourne la tête, une phrase au bout des lèvres et… il se rend compte qu'il n'y a personne à côté de lui. C'est une sensation étrange, qui ressemble un peu à la douleur fantôme d'un membre amputé.

Il ferme les yeux. Des émotions contradictoires se bousculent dans son cœur. Il soupire et dépose un baiser sur le front de Mary, puis la repousse doucement pour se lever. Il doit aller travailler.

Dans la salle de bains, alors qu'il se brosse les dents, il a l'impression d'avoir un ange juché sur une épaule et un démon sur l'autre. L'ange lui assure que ce qu'il ressent est tout à fait normal, qu'au bout de quatre ans de mariage, la relation entre les époux évolue. La passion laisse éventuellement la place à un amour plus posé, plus réfléchi, mais ça ne signifie pas qu'il est moins fort. Le démon, lui, le pousse à partir, lui promet des courses poursuites dans tout Londres et des morceaux de cadavres dans le frigo.

John ne sait pas s'il doit en rire ou en pleurer. Il a conscience que c'est l'ange qui a raison, qu'il ne doit pas détruire sa famille sur un coup de tête, mais depuis son réveil, le germe d'un doute s'est insinué dans son esprit et il ne cesse de croitre, de grandir. Il cherche à mettre des mots sur son mal-être lancinant, celui qu'il cache derrière un sourire factice, un masque bien travaillé.

Il faut qu'il en parle à quelqu'un. Il ne peut pas garder ça pour lui. Le poids de la culpabilité l'écrase. Il a besoin de conseils. Mais il ne sait pas vers qui se tourner. Son meilleur ami n'est pas la personne la plus indiquée pour discuter de ses problèmes de couple. Pire : il risque de tout comprendre avant que John n'ouvre la bouche et il sait que ça l'énervera encore plus. Greg… n'est pas une option non plus. Il a mis beaucoup de temps à se remettre de son propre divorce et il ne veut pas rouvrir une plaie qui a eu du mal à cicatriser. Molly… est toujours célibataire et toujours amoureuse de Sherlock. Il y a des choses qui ne changent pas. Non. John ne voit vraiment pas à qui il pourrait en parler. Et il se sent impuissant. Il se sent monstrueux. Sa femme et ses enfants sont merveilleux. Il ne devrait pas penser ce qu'il pense. Il a tellement honte qu'il n'ose même pas mettre des mots dessus.

Avec un soupir, il finit de s'habiller et part travailler.

Ses états d'âme le suivent toute la journée. Ses patients défilent et se ressemblent tous. Il leur fait la conversation, les soigne comme un automate. Il a l'impression de ne pas être tout à fait là, d'être sorti de son corps et de regarder la scène d'en haut, près du plafond.

A la fin de la journée, il n'y tient plus. Tant pis. Il ira voir Sherlock.

Après avoir verrouillé la porte de son cabinet, il envoie rapidement un message à Mary pour la prévenir qu'il rentrera tard et se met en route pour Baker Street.

Il laisse son vélo en arrière et hèle un taxi. Ça fait une éternité qu'il n'en a pas pris. Ça lui rappelle la vie commune avec Sherlock. Son moyen de transport préféré. D'ailleurs, ça lui fait bizarre d'être seul à l'arrière, ainsi, à regarder les cheveux blonds du chauffeur. Il espère que celui-ci n'est pas un serial killer. Depuis l'affaire d'Une étude en rose, il ne peut s'empêcher d'être suspicieux.

Se concentrer sur ses souvenirs, des choses triviales, l'aide à se vider la tête. Il n'a pas la moindre idée de ce qu'il va dire à Sherlock. Il ne sait pas lui-même ce qu'il veut, ce qu'il cherche. Mais en parler à quelqu'un, même à Sherlock, l'aidera sans doute à y voir plus clair.

Arrivé devant Baker Street, il paie le chauffeur (bien trop cher) et se dirige vers la porte. Le loquet est de travers. Mycroft n'est donc pas dans les parages. John sourit à ce souvenir. Il sonne une fois, deux fois, pour s'assurer d'avoir été entendu et attend.

Quand la porte s'ouvre, c'est Mrs Hudson qui l'accueille avec un grand sourire.

— John ! Quel plaisir de vous voir !

— Bonsoir Mrs Hudson.

La vieille dame le sert dans ses bras. La vision de sa robe violette réconforte John d'une manière qu'il n'aurait jamais crue possible. Son parfum chaleureux lui chatouille les narines… C'est un peu comme s'il rentrait à la maison après un long voyage. Et dans un sens, c'est le cas.

Quand Mrs Hudson lui propose d'entrer, il accepte avec joie. Ça fait des semaines qu'il ne s'est pas senti aussi léger. Il observe le couloir dans tous ses détails, se réjouit de ne noter aucune différence depuis sa dernière visite.

— Sherlock n'est pas là pour le moment. Il est sorti faire je-ne-sais-quoi. Vous le connaissez, il est toujours par monts et par vaux. Mais vous pouvez l'attendre chez moi. Je vais vous préparer une bonne tasse de thé et des biscuits.

— Merci beaucoup, Mrs Hudson. C'est un plaisir de vous voir, vous aussi.

Il la suit dans son appartement, puis dans la cuisine où il s'assoit pendant qu'elle s'affaire.

— Comment vont les filles ? Ça fait longtemps que je ne les ai pas vues, dit-elle avec un soupçon de reproche dans la voix.

John se sent honteux de ne pas les avoir emmenées ici plus souvent. La vie quotidienne a tendance à lui faire oublier ce genre de choses. Le temps passe à une vitesse folle. Lily a déjà trois ans et Judith presque dix-huit mois.

— Elles vont très bien, merci. Lily rentre à la maternelle en septembre. Mary m'a déjà prévenu qu'elle allait pleurer en la laissant à l'école.

En prononçant le nom de sa femme, John se sent grimacer. Il a l'impression d'avoir avalé quelque chose d'amer. Tout à coup, il remet sa visite en question. Que fait-il ici ? Sa place est chez lui, auprès de sa famille. Ses doutes ne sont que ça. Des doutes. Et pourtant… il se dit que s'il ne va pas au bout de sa démarche, quelle qu'elle soit, ces mêmes doutes continueront de le ronger de l'intérieur.

— Voilà, dit Mrs Hudson en posant une tasse et une petite assiette devant lui.

— Merci.

Il prend la tasse entre ses mains et observe le liquide laiteux avec intensité, comme s'il renfermait les réponses à ses questions.

— Tout va bien, John ? lui demande-t-elle. Vous n'avez pas l'air dans votre assiette.

Il relève vivement la tête. Trop vite. La pièce se met à tourner autour de lui. Il cligne des yeux pour se reprendre.

— Oui, bien sûr. Tout va pour le mieux. Je suis juste un peu fatigué, avec le travail à mon cabinet et les filles…, ment-il.

— Hmm…

Mrs Hudson n'a pas l'air convaincu. Elle l'observe par-dessus sa propre tasse de thé. Ses yeux marron se font scrutateurs.

— J'ai été mariée, moi aussi, vous savez. Vous pouvez me parler, si vous avez des problèmes avec Mary.

— Comment est-ce que vous… ?

John s'interrompt. La vieille dame l'a pris au dépourvu. Il ne comptait pas lui révéler la raison de sa présence ici. La vérité, c'est qu'il n'a pas vraiment de problèmes avec Mary. C'est le lui le problème. Il ne veut pas entacher la réputation de sa femme.

Mrs Hudson pose sa tasse sur la table.

— Vous passez à l'improviste un soir de semaine alors que je ne vous ai pas vu depuis une éternité et que vous pourriez profiter de votre femme et de vos enfants. Il ne faut pas être Sherlock pour comprendre que vous avez des problèmes de couple. A moins que vous ayez commis une faute professionnelle. Mais dans ce cas-là, ça m'étonnerait que vous prendriez le thé avec moi.

John a un sourire triste. Il sait que Mrs Hudson espérait lui décrocher un éclat de rire, que c'était un trait d'humour, mais il n'arrive pas à trouver ça drôle, pas vraiment. Il se demande s'il a toujours été aussi transparent. Ou si les talents de Sherlock sont contagieux.

Il prend une grande inspiration.

— Je ne suis pas heureux.

Il ne sait pas d'où vient cette affirmation. La phrase est sortie toute seule. Tout droit de son inconscient, sans passer par la case « réflexion ». Il a enfin mis des mots sur ce qu'il ressent.

— J'aime beaucoup Mary, continue-t-il. Et mes filles. Mais je suis vide. J'ai l'impression de ne plus être qu'une façade. Non. Je ne suis pas heureux.

— Oh John !

— Avez-vous déjà ressenti ça quand vous étiez mariée ?

Il ne veut pas de sa pitié. Il veut juste qu'elle le rassure. Qu'elle lui dise que ce qu'il ressent est normal, que ça va passer, et que dans quelques temps, la vie reprendra son cours. Tout cette histoire ne deviendrait alors qu'un mauvais souvenir.

— Pas du tout. Frank et moi avons toujours eu une relation passionnée. Jusqu'à la fin. Je l'ai aimé à la folie. Je l'ai détesté. Mais je ne me suis jamais ennuyé.

John fait la grimace. Mrs Hudson n'est pas non plus la confidente idéale. Il aurait dû s'en douter. Mais ce n'est pas comme s'il avait prémédité cette conversation.

— Que comptez-vous faire ? lui demande-t-elle finalement.

— Je n'en ai aucune idée.

— Vous ne pouvez pas rester dans cette situation, John. Ce n'est pas sain. Ni pour vous, ni pour votre famille.

— J'en ai conscience. Je ne veux faire de mal à personne, c'est tout.

— Croyez-moi. Plus vous attendrez et plus ce sera douloureux. Quand j'ai découvert que Frank était mêlé à des affaires de drogue… Je n'étais pas au courant jusque là, vous savez, je ne faisais que le secrétariat… (John lui adresse un regard incrédule qu'elle choisit d'ignorer.) J'ai compris que je ne pouvais pas rester, qu'il allait me mener à ma perte. Alors, je me suis posée une question. Une question très simple.

— Laquelle ? demande John.

Contre toute attente, elle a réussi à capter son attention. Il est suspendu à ses lèvres.

— « Parfois, ne vaut-il pas mieux accepter l'échec, plutôt que de s'acharner à faire fonctionner quelque chose qui ne marche pas ? »

A suivre…


Merci beaucoup d'avoir lu ce premier chapitre. Je reviens la semaine prochaine avec la suite. En attendant, n'hésitez pas à me dire ce que vous en avez pensé, ce que vous avez aimé et moins aimé, etc. A bientôt !