Chapitre 9
Son cœur lui semblait être sur le point d'exploser. Il s'était rarement senti aussi mal. L'habitacle dans lequel il se trouvait remuait de gauche à droite comme s'ils se trouvaient dans une partie de Mario Kart, et ça, pour l'estomac, c'est pas spécialement cool ! Il était tellement sonné qu'il se mit même à prendre en pitié les grotesques personnages de ce jeu il fallait qu'il se calme !
Il secoua la tête. Mauvaise idée. Cela lui valut un joli vertige ainsi qu'en supplément, la gentille impression que le monde jouait aux montagnes Russes. Et ça, pour le ressentir les yeux fermés, il fallait être très fort. Finalement, il se décida qu'il était temps d'ouvrir les yeux.
Après avoir pris une grande inspiration, il souleva ses paupières. Pour les refermer immédiatement, incapable de croire à ce qu'il voyait. Il réitéra son action mais le choc était définitivement trop brutal et Castiel perdit connaissance à nouveau, sur la charmante pensée qu'il était dans la merde jusqu'au cou.
« Ah bordel c'est froid ! » fut la première chose qui vint à l'esprit de Castiel alors qu'il ouvrit les yeux en crachotant. Ses mèches écarlates ruisselantes d'eau glacée vinrent se coller contre son visage et faire office d'irrigation au goutte à goutte, chose dont ses yeux se seraient bien passés. Secouant la tête pour libérer sa vue obscurcie par ce liquide crasseux. Il cligna des yeux un nombre incalculable de fois avant de daigner s'intéresser à ce qui se trouvait autour de lui.
Après avoir détaillé la pièce, il hésita entre deux hypothèses : une salle d'interrogatoire ou de torture ! Bien que les deux puissent s'accorder ensemble. Les murs sombre et froids ne possédaient aucune fenêtre et la seule source de lumière était une ampoule grésillante qui pendait lamentablement au plafond. Du coin de l'œil, il aperçut également une table grise au bois émietté qui portait une mallette noire et close. Ce scénario était digne des films américains de la fin du vingtième siècle. Il s'attendait même presque à voir débarquer un russe !
Mais alors que le jeune homme se félicitait pour son sens de l'humour à toutes épreuves, il posa un regard sur la personne face à lui et le rictus qu'il arborait s'évanouit. La présence de cette persone ici eut le bénéfice de ne confirmer qu'une chose : dans le véhicule, il n'était pas fou.
Son regard se chargea alors d'une colère sans nom et il se redressa comme il le put. Ce fut à ce moment qu'il se rendit compte qu'il avait été très... gentiment ligoté à sa chaise dans l'incapacité de bouger. Rageant intérieurement, il décocha un regard noir à la jeune fille en face de lui. Regard auquel la lycéenne répondit par un sourire hautain et condescendant. Passant une main dans ses cheveux marines, elle déposa le verre d'eau désormais vide sur la table avant de s'y asseoir – sur la table, pas sur le verre d'eau !
Elle darda ensuite un regard moqueur sur le jeune homme, regard auquel il répondit. Une bataille de celui-qui-détourne-le-regard-en-premier-il-a-perdu-et-c'est-qu'un-gros-caca-boudin commen-ça alors. Si le contexte n'avait pas été si grave, la situation aurait été risible.
Finalement, leur combat puéril fut interrompu par un coup sourd. Soupirant, Cersalia détourna le regard et s'avança vers la porte noire que Castiel n'avait même pas encore remarquée jusque là. D'un geste précis, la jeune fille la déverrouilla et l'ouvrit. Un homme taillé comme une armoire à glace vêtu d'un costume noir et de lunettes de soleil se pencha vers elle et lui murmura quelque chose à l'oreille. Le visage de Cersalia n'exprima rien tandis qu'elle acquiesçait mais le captif, lui, vit clairement son poing se serrer et ses ongles pénétrer la fine peau de sa paume. Il fronça les sourcils. Décidément, il ne comprenait rien !
Au bout d'un certain temps, le yéti en costume s'en alla après avoir glisser quelque chose entre les doigts de la jeune fille et il se retrouva de nouveau seule avec elle. Celle-ci le détailla des pieds à la tête, si bien qu'il finit par se sentir mal à l'aise. C'était une première ! Il était habitué à ce que les filles le reluquent, et ça ne le gênait absolument pas ! Mais cette fois, quelque chose lui disait que ce regard n'indiquait rien de bon, et surtout pas dans un lit ! Une partie de son cerveau l'applaudit et le félicita de sa perspicacité. Agacé, il lui demanda de se la fermer. Il devait quand même avoir des problèmes pour entretenir une conversation logique avec son propre cerveau. Il soupira.
Cersalia le tira alors de ses pensées en se dirigeant vers la mallette noire qui n'avait toujours pas bouger. Elle brandit une petite clef – sans doute ce que lui avait donné l'armoire à glace – et déverrouilla la mallette. Elle l'ouvrit en grand et Castiel frissonna. Cette petite boîte noire contenait tout un attirail de torture ! Une série de poignards était alignée, ainsi qu'une seringue accompagnée de plusieurs fioles contenant des liquides peu attirant. Il y avait également du fil, des cotons et des bandages. C'était quoi le délire ? Ils torturaient les gens, les blessaient puis les soignaient pour que ça ne s'infecte pas ? On se foutait de lui ? ! Alors que le jeune homme s'apprêtait à se concentrer sur sa « camarade », une petite boîte blanche attira son attention. Brillante, elle ressemblait à celles des nouveaux téléphones portables. Seulement Castiel se doutait que ce soit ça.
Portant le logo « CMSN » qui consistait à un entrelacs de chiffres autour d'un cerveau sur lequel trônaient ces quatre initiales, elle semblait rayonner au milieu de ces instruments de torture, comme s'il s'agissait de l'élément majeur de ce qui allait se dérouler, et cela inquiéta le jeune homme.
Son regard d'acier glissa alors de la boîte à la jeune fille qui manipulait les poignards avec des gants et un spray. On aurait dit qu'elle faisait une aseptisation. La tension du corps du garçon monta d'un cran. Elle comptait l'opérer ou quoi ? Non, non, non ! Ça n'allait pas le faire du tout !
Ignorant les tourments qui agitaient l'esprit du jeune homme, Cersalia s'empara de la petite boîte et l'ouvrit avant d'en examiner son contenu. Castiel eut beau se contorsionner dans tous les sens , il fut incapable d'apercevoir de quoi il s'agissait. Rageant intérieurement, il commença à se débattre avec ses liens, tentant de se libérer vainement. Tout ce qu'il réussissait à faire était d'avoir l'air d'une truite prise dans un filet. Plus il se débattait, plus il sentait la chaise vaciller. Et bientôt, ce qui devait arriver arriva. Il donna un coup de hanche de trop et la chaise se renversa. Il se retrouvait donc par terre, couché sur le côté droit, les jambes en angle droit à cause de la chaise et dans la totale incapacité de bouger. Il devait avoir l'air fin comme ça. Intriguée par le bruit, Cersalia se retourna et haussa un sourcil en regardant son prisonnier gisant à terre avec la dignité d'une carpe.
̶ ̶ Je peux savoir ce que tu fous ? Demanda-t-elle en haussant un sourcil inquisiteur.
̶ ̶ La ferme... grogna le poisson à terre.
La jeune femme s'accroupit juste devant son visage et entoura ses jambes de ses bras, fixant un regard curieux sur Castiel. Le regarder se trémousser par terre en essayant de se dégager était vraiment très intéressant. Elle pencha la tête sur côté et laissa même un rire moqueur s'échapper de ses lèvres. Elle pouvait se permettre de baisser sa garde, il n'était pas prêt de réussir à se défaire de ses liens. Elle les avait noués elle même et presque personne n'arrivait à se libérer de ses cordes. Elle avait toujours été- Elle n'eut pas le temps de terminer de formuler sa pensée qu'une silhouette bondissait sur elle. Elle fut renversée en arrière et se retrouva plaquée au sol sous le corps de Castiel. Pause ! Marche arrière ! On rembobine !
Quand avait-il fait ça ? Quand s'était-il libéré ? Et comment ? Non ! À plus tard les questions, elle n'avait pas le temps. Elle soupira fortement et figea son regard dans celui du jeune homme.
̶ ̶ Lâche moi. Tout de suite. Je ne voudrais pas te faire de mal inutilement, lâcha-t-elle, sarcastique.
̶ ̶ Bien sûr. Tout de suite. Et avec ça, je t'apporte un café ? Rétorqua Castiel sur le même ton en raffermissant sa prise sur ses poignets.
̶ ̶ Non, merci, mais si tu pouvais juste m'amener un peu d'eau, ça m'arrangerait !
La fin de sa phrase s'était terminée en cri étouffé à cause de l'impulsion qu'elle avait prise pour inverser les rôles. Elle se retrouva assise à califourchon sur le garçon. Hors contexte, cette position aurait clairement pu se révéler très ambiguë, mais là, elle n'avait pas le temps de penser à ça. Elle devait faire vitre. Elle savait qu'elle devait être efficace car elle ne pouvait pas lutter contre lui sans risquer de le blesser, elle le savait. Elle tendit donc rapidement sa main vers les liens qui gisaient à côté de la chaise et les utilisa pour attacher les poignets de Castiel entre eux. Ce dernier poussa un râle de rage. Râle que la lycéenne étouffa de la paume de sa main. Elle posa l'index de sa main libre sur ses propres lèvres et murmura un « Chuuut... » moqueur, le tout accompagné d'un rictus railleur.
Le rouquin avait l'impression qu'il allait exploser tant il était en colère. L'expression qu'affichait la jeune fille, normalement, c'était lui qui la portait. Lui et lui seul ! Pas cette gamine bleue prétentieuse ! Non ! Ce n'était pas de la mauvaise foi !
Sans se départir de son sourire, la dite gamine lui intima d'être sage et de ne pas bouger et retourna fouiller dans la mallette. Recommençant à se débattre pour se défaire de ses liens, Castiel se rendit rapidement compte que c'était inutile. Sa détentrice s'était bien rendue compte de ses capacités et l'avait attaché bien plus fortement que la fois précédente. C'était inutile ! Et ça avait le mérite d'attiser sa colère !
̶ ̶ Raah ! Mais pourquoi tu fais ça ! S'écria-t-il. Détache moi ! Je ne sais pas ce que tu me veux mais je ne te le donnerai pas ! Relâche moi ! Laisse moi partir ! J'ai horreur d'être attaché ! Allez ! Dépêche toi ! Oh ! Ça y est, j'ai compris ! T'es devenue folle de moi et tu es tellement sûre que tu n'as aucune chance que tu m'as séquestré ici pour que je devienne ton jouet sexuel ! T'es vrai-
̶ ̶ TAIS TOI ! Explosa finalement la jeune fille en se retournant vers lui. LA FERME ! TU NE SAIS RIEN ALORS BOUCLE LA !
Et pour une fois, Castiel se tut. L'expression de la jeune femme balaya de son esprit tous les arguments et autres insultes qu'il préparait. Sa mâchoire crispée tremblait et ses yeux reflétaient une réelle panique. Quelque chose clochait. Réellement. Il fronça les sourcils, tentant de percer ses iris insondables. Mais il n'eut pas le loisir de l'observer très longtemps car, rapidement, elle se passa la main sur le visage en soupirant. Elle se débarrassa par la même occasion des tensions qui tiraient les traits de son visage et se retourna pour la énième fois vers cette mallette noire que le rouquin trouvait de plus en plus inquiétante.
Quelques poignées de minutes s'étaient écoulées depuis le littéral pétage de plombs de Cersalia et, depuis, un silence pesant s'était installé. La lycéenne avait terminé de trifouiller dans la boîte et fixait désormais Castiel droit dans les yeux. Et ce dernier, en bel abruti orgueilleux qu'il était, il soutenait ce regard, refusant catégoriquement de détourner les yeux pour chercher une échappatoire. Ce silence de plomb se faisait de plus en plus lourd, si bien que le jeune homme craignait d'étouffer.
Heureusement pour eux, une sonnerie vint trancher l'ambiance glauque et tendue de la pièce. Soupirant de soulagement, Cersalia sortit son téléphone de la poche arrière de son jean et décrocha. Durant toute la conversation téléphonique, elle ne dit rien, se contentant d'acquiescer – ce qui, au téléphone, n'était pas très utile. Castiel n'avait donc aucune possibilité de savoir ce qu'il se passait. Il se contentait donc vainement de déchiffrer les pensées de la jeune fille au travers des expressions de son visage. Le bilan était mauvais. Quand, en l'espace de quelques minutes, une personne passe du soulagement à la frustration en passant par l'angoisse, la panique et la colère, c'est rarement bon signe. Maintenant, il restait à savoir si c'était mauvais pour elle ou pour lui.
Le lycéen n'eut pas le temps de pousser son résonnement plus loin – c'était une manie de le couper dans ses réflexions ? – car il fut coupé par les seuls et uniques mots que Cersalia prononça avant de raccrocher :
̶ ̶ Fais vite.
Après avoir mis fin à la conversation téléphonique, elle resta immobile un moment, les yeux clos et le téléphone serré dans son poing. Elle semblait réfléchir intensément et même Castiel n'eut pas le courage de l'interrompre.
Puis, sans crier gare, elle posa délicatement ( plaqua sans ménagement ) son portable sur la table et se précipita vers le captif qui était toujours affalé à terre dans sa peau de truite. Elle s'empara de ses poignets liés et les tira de sorte à faire bouger tout le corps qui leur était relié. Chacun de ses gestes semblaient être calculés précisément. Et cela se vérifia lorsqu'elle souleva légèrement le rouquin pour le reculer de quelques petits centimètres. Ce dernier entendit un discret « Parfait... » murmuré à son oreille mais ne se cassa pas à en chercher la signification.
Déjà, la jeune fille s'éloignait de lui pour se rapprocher de ce qu'il avait décidé de baptiser la « Table de la Mort ! ! ! ! » tant ce qui était disposé dessus lui inspirait douleur et souffrance. Cersalia saisit délicatement – un peu trop peut-être d'ailleurs – une fiole, un poignard relativement petit et la boîte blanche entourée d'un chiffon. En de lents mouvements, tellement lents que Castiel se dit qu'elle devait faire exprès, elle fit demi-tour et revint vers lui. Elle déposa près de sa jambe droit les charmantes petites choses qu'elle avait ramené et, le plus naturellement du monde, s'assit à califourchon sur son bassin. Le jeune homme haussa un sourcil.
̶ ̶ Ça va ? T'es à l'aise ? Y avait peut-être pas que du faux dans ce que j'ai dit tout à l'heure... En plus je suis attaché, t'aurais pas des pulsions SM toi, par hasard ?
Se saisissant du couteau qu'elle avait ramené et l'étudiant de près, elle esquissa un fin sourire.
̶ ̶ Fais moi plaisir, Castichou, ronronna-t-elle ironiquement en insistant sur le surnom. Tais-toi, d'accord ?
Sans se départir de son sourire qui faisait froid dans le dos tant il était en contradiction avec son regard glacial, elle fixa ses yeux dans ceux du jeune homme.
̶ ̶ On va commencer.
Elle avait dit ces mots d'une voix plus forte que pour les précédents et Castiel tiqua. Il vit son œil gauche donné un furtif regard derrière sa fine épaule gauche avant de revenir se fixer sur lui. Non. Il y avait définitivement anguille sous roche. C'était comme si elle essayait de convaincre quelqu'un, et il avait le sentiment que ce quelqu'un n'était pas lui. Et pour une fois, il fut soulagé de ne pas être celui dont on cherchait l'attention.
Tandis qu'il s'interrogeait sur l'identité de ce quelqu'un – chose qu'il n'est pas recommandé de faire lorsqu'on a les poignets liés et qu'une fille armée d'un couteau est assise sur vous – la dite fille commença à soulever son tee-shirt. Le contact de ses longs doigts fins le fit frissonner et il serra la mâchoire. S'il n'était pas attaché, la jeune fille y serait clairement passé. Et puis merde à la fin ! Qu'est-ce qu'elle essayait de faire ! ?
Avant qu'il n'ait pu trouver la réponse à cette question, il était torse nu. Un tique d'irritation secoua son sourcil gauche. L'ignorant, Cersalia se pencha vers son visage. Il se fit alors la réflexion que hors contexte, cette situation pouvait être vachement ambiguë. Les lèvres douces de la jeune fille vinrent effleurer le lobe de son oreille et ses poings se serrèrent. À quoi jouait-elle ? Alors que ses mains vinrent se poser sur son bras attaché, elle murmura dans le creux de son oreille :
̶ ̶ Je suis désolée. On fait ce qu'on peut. Endure ça.
̶ ̶ Hein ?
Elle se redressa et il lui lança un regard interrogatif auquel elle ne prêta pas attention. Elle saisit la fiole qu'elle avait ramené et l'ouvrit. Une odeur âcre agressa immédiatement leur nez et une grimace de dégoût vint tordre le visage de Castiel. Cersalia, elle, ne sourcilla pas. Elle semblait habituée à ce genre de choses. Elle imbiba le chiffon de ce liquide qui empestait et l'appliqua sur le bras gauche du garçon. Presque immédiatement, des picotements se firent ressentir à l'endroit qu'elle avait touché. Ils finirent par s'estomper et il se rendit alors compte que cette portion de peau, et même les muscles, nerfs et autres tendons couvrant cette partie de son corps étaient engourdis.
̶ ̶ Un anesthésiant, je suppose ? Demanda-t-il, amèrement, les dents serrées par la colère. Tu prends soin de moi, ça me fait plaisir. Tu devrais être mon infirmière particulière.
̶ ̶ Tais-toi, il ne faut surtout pas que je dérape, rétorqua l'intéressée, plus sérieuse que jamais.
̶ ̶ Et qu'est-ce que ça fait si tu dérapes ? Ton vilain chiffon va me fouetter ? Railla le jeune homme avant de se rendre compte qu'elle avait troqué le dit chiffon par le couteau qui se trouvait à terre. Il déglutit.
La jeune femme glissa le tissus humide sur la lame aiguisée et le lycéen à terre put voir ses mains trembler. Tout ça semblait aller de mal en pis. Cersalia ferma les yeux et prit une grande inspiration. Ses mains se calmèrent et elle se pencha sur le bras humidifié du jeune homme.
Cela faisait déjà quelques secondes qu'elle s'était penchée et rien. Il ne sentait rien si ce n'était qu'un souffle agaçant qui lui caressait la nuque et ça commençait sérieusement à l'énerver. Puis, ce souffle se fit plus concret, et, en tendant un peu l'oreille, il réussit à déchiffrer « Vite... Vite... ». Quoi vite ? Il devait faire quelque chose ? Mais qu'est-ce qu'il se passait à la fin ? ! Une légère douleur se fit alors ressentir dans son bras et il se crispa. Oula. Ça tournait mal pour lui. S'il ne se fiait qu'à son ressenti, il aurait dit que ce n'était qu'une simple aiguille. Seulement, si on prenait en compte l'anesthésiant, c'était un couteau. Ça ne le faisait pas du tout !
Mais alors qu'il sentait la douleur s'intensifier peu à peu, une sonnerie sourde digne de l'alarme incendie de leur lycée retentit dans tout le bâtiment. À ce moment là, la douleur de son bras diminua pour finalement s'estomper. En un mouvement rapide et précis, la jeune femme trancha ses liens puise laissa tomber de tout son long sur son corps musclé. Un cliquetis résonna, signe indubitable que l'arme avait chuté au sol. Fébrile, il ramena ses bras vers lui. Sans même prêter un regard de plus à sa blessure et tentant de comprendre cette situation, il souleva la tête de Cersalia pour étudier son visage. Ce dernier exprimait un soulagement sans nom et le cœur du garçon manqua un battement. Il devait se calmer très vite. Il lâcha ce visage et détourna la tête.
À ce moment là, la porte de la pièce s'ouvrit et s'écrasa contre le mur pour laisser passer un jeune homme à bout de souffle. Castiel eut à peine le temps de reconnaître Kentin que, déjà, il avait saisi son amie par le bras et l'avait relevée.
̶ ̶ Tu as réussi ? Le pressa-t-elle.
̶ ̶ Oui. Mais on n'a pas beaucoup de temps. J'ai été moins discret que prévu. Tu as dû t'en rendre compte... Mais j'ai réussi à mettre le mou-
̶ ̶ Chut ! S'écria la jeune fille en plaquant sa main sur sa bouche pour le faire taire.
̶ ̶ … Désolé, fit-t-il. Mais faut qu'on se grouille. Lève toi !
Il avait adressé ces derniers mots au rouquin et ce dernier lui répondit par un regard noir... avant d'obtempérer. Il ramassa son tee-shirt et entreprit de le renfiler. Mais alors qu'il commençait à lever les bras pour se rhabiller, une douleur vive s'empara de son bras et il grimaça. Il rabaissa rapidement ses membres et jeta un regard à sa plaie. Moins profonde que ce qu'il avait imaginé, elle restait tout de même conséquent et un filet écarlate s'en écoulait comme d'un sablier. Il serra les dents, espérant que le flot se tarisse.
Un soupir exaspéré résonna entre deux sonneries et Cersalia se dirigea vers la table ou elle attrapa un bout de tissus vierge et sec. Elle s'approcha ensuite du blessé et entreprit de bander son bras. Il fronça les sourcils et tenta de se dégager mais un seul regard de la lycéenne l'en dissuada. Réticent, il la laissa terminer. Elle serra une dernière fois le bandage avant de lui jeter son tee-shirt à la figure avec un très sympathique « Grouille. ». Il termina de s'habiller en observant les deux jeunes gens devant lui. Cersalia glissa le couteau de tout à l'heure dans un étui qui pendait à une ceinture avec d'autres aiguilles et lames de tailles aléatoires. Elle attacha ensuite cette même ceinture à sa taille, la passant au dessus de son tee-shirt. Et lorsqu'elle baissa les bras, sa veste ne la recouvrait pas. Il se fit alors la réflexion que c'était peut-être la raison pour laquelle elle mettait toujours des vestes très courtes. Elle échangea un regard avec Kentin qui hocha la tête
Le reste se passa très vite. Elle se saisit de la main de Castiel, lui glissant à l'oreille un « Cours ! » avant de se ruer en dehors de la pièce sur les talons de Kentin. Ne prêtant pas attention à leur environnement, ils coururent le long des couloirs. Le rebelle s'adapta vivement à leur rythme de course et, bientôt, ils furent dehors. Une cinquantaine de mètres devant eux se tenaient deux motos, dont la sienne. Il fronça les sourcils et accéléra l'allure, se libérant de la prise de la jeune fille. Mais alors qu'il commençait à les distancer, il entendit un cri étouffé derrière lui. Réagissant au quart de tour, il se retourna et vit Cersalia à terre, le corps tremblant et la jambe gauche secouée de spasmes. Jurant, il rebroussa chemin et accouru pour demander ce qu'il se passait. L'autre garçon semblait réfléchir à toute allure tandis qu'entre deux tremblements la jeune fille le suppliait de partir. Son visage était déformé par la douleur et ses poings serrés témoignaient de la torture qu'elle subissait.
Castiel soupira alors et la saisit par les bras pour la lever. Il appuya son dos tremblant contre son torse fort et passa ses bras autour de son ventre pour la maintenir debout. Fixant son regard acier dans celui émeraude de l'autre adolescent, il prononça alors des mots qui choquèrent les deux autres :
̶ ̶ Dépêche toi. Il faut lui retirer son implant sinon elle ne s'en sortira pas.
̶ ̶ Qu-Quoi ? Bégaya Kentin en retour, les yeux écarquillés. Comment tu sais ça toi ? !
̶ ̶ Plus tard les questions, on n'a pas le temps, dépêche toi !
̶ ̶ Je... D'accord, capitula le garçon en s'accroupissant devant elle.
Il sortit de la ceinture de la jeune fille le poignard qu'elle avait utilisé plus tôt. Il saisit ensuite son pantalon et le tailla littéralement en short. Assez court le short d'ailleurs. Il arracha les jambes du pantalon et écarta les cuisses de la jeune fille. Il inspira profondément, s'excusa à voix basse et glissa la lame sur sa peau claire. De sa position, Castiel ne voyait pas grand chose mais il était en train de rouvrir une ancienne cicatrice blanche qu'elle avait depuis des années. Un cri de douleur plus puissant que les autres s'échappa de ses lèvres et le rebelle y plaça immédiatement sa main pour étouffer le bruit. Il la serra plus fort pour contenir ses tremblements et pria pour que l'autre fasse vite.
Les yeux de Cersalia faillirent sortir de leurs orbites lorsqu'il écarta sa peau pour enfoncer un peu plus la lame dans sa peau, ne cessant de s'excuser. Finalement, il se redressa, le couteau à la main, et sur ce couteau, une petite puce électronique trouée par la lame ensanglantée. En la voyant, les yeux de la jeune fille s'emplirent de la larme de joie et Castiel retira sa main, libérant le sourire de soulagement qu'elle dissimulait. Elle articula doucement un « Merci... » et se détacha du rouquin derrière elle. Mais à peine eut-elle fait un pas que sa jambe la lâcha et, si le châtain ne l'avait pas rattrapée, elle se serait écrasée.
̶ ̶ Non... murmura-t-elle. Ne me dis pas que tu as utilisé le seul couteau qui avait de l'anesthésiant sur la lame.
̶ ̶ Euh... beugua en retour Kentin en examinant la lame. Je sais pas.
̶ ̶ Si, c'est ça, confirma à sa place Castiel, reconnaissant l'arme. Je vais te porter.
̶ ̶ Non, c'est bon ! Je peux marcher ! Argumenta-t-elle faiblement en essayant de se tenir droite.
̶ ̶ Arrête ça Cersi', la raisonna l'autre garçon en la poussant presque dans les bras du rouquin. On n'a pas le choix, je t'ai pas esquinté la jambe pour que tu te fasses choper.
Pendant qu'il parlait, il avait récupéré une des jambes de ce qui avait été le jean de la jeune fille et le déchirait désormais en deux. Une fois cela fait, il en entoura sa cuisse ensanglantée et noua le tissus. Au moment ou il se releva, des bruits de pas retentirent de l'endroit d'où ils étaient sortis. Kentin jura. Puis il se tourna vers Castiel qui se débattait avec la jeune fille qui refusait d'être portée. Il sortit des clefs de sa poches et les lui tendit.
̶ ̶ Tiens. C'est celles de ta moto. Partez, je les retiens.
̶ ̶ Tu es sûr ?
̶ ̶ Oui. On se retrouvera chez elle.
̶ ̶ Très bien. Évite de te faire tuer, j'ai encore des questions à te poser, sourit Castiel.
̶ ̶ Ne t'inquiète pas pour ça, et puis moi aussi de toutes façons, répondit Kentin avec le même sourire.
̶ ̶ NOON ! Intervint Cersalia. On peut pas te laisser derrière !
̶ ̶ Tu me vexes là ! Je vais m'en sortir ! Tu as encore beaucoup à faire ! Et tu dois faire un rapport à ma mère. Maintenant que tu sais qui elle est, tu peux t'en charger !
̶ ̶ Mais...
L'empêchant de continuer sa phrase, il échangea un regard entendu avec l'autre jeune homme et s'avança vers la porte d'où commençait à sortir des hommes vêtus de noirs de la même carrure que le yéti de toute à l'heure. Il sortit de sa ceinture un neuf millimètres qu'il tint dans sa main droite tandis que de l'autre, il gardait le poignard.
̶ ̶ Cours.
Ce fut le dernier mot que Castiel entendit. Chargeant la jeune fille sur son épaule, il se rua vers sa moto. Il ne lui fallut pas bien longtemps pour y parvenir mais lorsqu'il s'installèrent dessus, les bruits de combat résonnaient déjà. Un dernier coup d'œil derrière lui lui indiqua qu'ils avaient le temps de fuir. Il remercia intérieurement le jeune homme et démarra avant de partir en trombe. La lycéenne assise devant lui vacillait de plus en plus. Entre le fait qu'elle n'avait presque plus de forces et qu'elle tentait désespérément de se dégager pour retourner aider Kentin, elle risquait bientôt de tomber. Finalement, sa perte de sang, la douleur et l'anesthésiant eurent raison d'elle et elle s'évanouit contre le garçon. Ce dernier soupira. Irrécupérable. Il roula longtemps essayant de se situer. Finalement, les routes se firent de plus en plus fréquentées et les panneaux de plus en plus présents. Ils n'étaient pas si loin d'Amoris, une petite poignée de kilomètres à peine. Tant mieux.
Après une dizaine de minutes à rouler précautionneusement – chose plutôt rare chez Castiel – il arriva devant la maison de Leigh qu'il habitait avec ce dernier et son frère, ainsi que Rosalya depuis quelques jours. Il gara sa moto et, faisant attention à ne pas faire tomber la jeune fille, il se leva. Il la prit ensuite dans ses bras et s'avança vers la porte d'entrée. Il y donna trois discrets coups de pieds pour signaler sa présence. En écho résonnèrent bientôt des cris suraiguës à travers le bâtiment.
Bientôt, la porte s'ouvrit en grand pour laisser apparaître une furie blanche aux yeux mordorés. Alors qu'elle s'apprêtait à inonder Castiel sous une tonne et demi de réprimandes, Rosalya aperçut Cersalia inconsciente. Son regard qui, jusqu'alors était à peine énervé, devint orageux. Ces iris tempétueuses se figèrent dans celles acier qui leur faisaient face et le silence qui s'installa entre les deux jeunes gens se fit pesant. Très pesant. Tellement pesant qu'un rire nerveux franchis les lèvres rouquin tandis que des mimiques les plus extravagantes les unes que les autres se disputaient son visage.
Finalement, Rosalya décida de mettre fin à son calvaire et fit demi-tour pour rentrer dans la maison, le rebelle sur ses talons. Elle traversa le vestibule, le salon sur lequel toute sa panoplie de manucure était étalée, signe indubitable que Castiel tombait vraiment au mauvais moment. La preuve, la télé était allumée sur son émission préférée. Sans même jeter un regard à l'écran, elle continua sa route jusqu'aux escaliers qu'elle gravit. Ils débarquèrent dans un couloir doté de quatre portes. N'hésitant pas, Rosalya ouvrit la première à droite et y entra.
̶ ̶ Eh ! Rosa', c'est ma chambre !
̶ ̶ Je sais, mais ça, ce sont tes conneries, répondit-elle en désignant Cersalia d'un coup de menton.
̶ ̶ Je... Non, c'est pas ce que tu crois !
̶ ̶ Pose la sur le lit, on verra ça après.
Il obtempéra et recula pour laisser Rosalya faire. Celle-ci se pencha immédiatement sur la jambe gauche de l'inconsciente et dénoua le bout de jean qui l'entourait. La plaie apparut devant ses yeux et une grimace déforma son visage fin. Ce n'était pas beau à voir.
̶ ̶ Cast', va me cherche du désinfectant, des cotons, des compresses, une aiguille et du fil à recoudre. Vite s'il-te-plaît.
Marmonnant qu'il en avait assez qu'elle lui donne des ordres, il obéit tout de même et revint quelques minutes plus tard avec ce qu'elle avait demandé.
̶ ̶ Je n'ai pas souvent fait ça, alors il va me falloir du silence. Si je dérape, je pourrais causer une hémorragie.
̶ ̶ Hum.
Le jeune homme se retourna, tira sa chaise roulante et s'y assit à l'envers, appuyant ses mains et son menton contre le dossier pour mieux observer son amie. Celle-ci s'était attachée les cheveux en une queue de cheval et commença à nettoyer la plaie avec le coton et le désinfectant. Immédiatement, la croûte qui s'était formée se détacha et le sang commença à couler. Avec des gestes rapides et efficaces, Rosalya retira le liquide rouge qui obstruait sa vue puis appliqua une compresse sur la coupure. Elle la lâcha ensuite quelques instants le temps de saisir le fil et l'aiguille. D'un geste habile, elle glissa le fil dans l'aiguille et se mit à la tâche. Avec une concentration extrême, elle retira la compresse et commença à recoudre. La tension était palpable et même Castiel angoissa.
Finalement, elle se redressa, se passa une main sur le front et sourit au jeune homme qui laissa sortir un soupir de soulagement en se laissant tomber sur sa chaise. Chaise qui bascula et il se retrouva étalé par terre. Il commençait sérieusement à penser que les chaises le détestaient. Il grommela et se redressa sous le rire cristallin de son amie. Il lui lança un regard noir mais l'effet fut un peu décrédibilisé par son sourire. Un cognement contre la porte attira leur attention. Ils tournèrent la tête et découvrirent Lysandre, les bras croisés et le regard interrogateur.
̶ ̶ C'est une longue histoire, fit Rosalya. Enfin je suppose. Tu nous racontes Castiel ?
̶ ̶ Oui, mais en bas. Il vaut mieux la laisser au calme. Descendez, je vous rejoins. Je nettoie.
̶ ̶ D'accord, répondit-elle.
Les deux jeunes gens quittèrent la pièce, compréhensifs et le rouquin se retrouva seul avec la jeune fille inconsciente. Soupirant, il ramassa le bout de tissus ensanglanté, les cotons usagés, la compresse et le fil et les jeta dans sa poubelle. Il rassembla ensuite le matériel de soin et le posa sur son bureau. Puis, armé d'un rouleau de bandage, il s'approcha du lit. Il saisit délicatement la cuisse de la blessée et l'entoura du tissus avant de jeter le rouleau avec le reste. Il glissa ses doigts sur la bande blanche et leva les yeux vers le visage de la jeune fille.
̶ ̶ Toi aussi, tu nous expliqueras, murmura-t-il avant de quitter la pièce en fermant la porte.
Elle ouvrit doucement les yeux et battit plusieurs fois des paupières. Qu'est-ce qu'il s'était passé ? Elle s'assit sur le matelas et essaya de resituer les événements. Capture de Castiel. Plan mit à exécution. Évasion. Moto. Kentin. Kentin ! Il fallait qu'elle aille l'aider ! Vite ! La panique et l'urgence s'emparèrent de son corps et elle se leva du lit. Elle se rendit alors compte qu'elle était dans un environnement totalement inconnu. Une chambre. Déjà, s'était un début. Et vu la décoration de la dite chambre, elle craignait de connaître l'identité de son propriétaire. Les posters de Rock, les guitares, l'ampli et les médiators en vrac ne laissaient pas beaucoup de mystère. Mais pourquoi était-elle ici ? Ça n'avait aucun sens ! De toutes façons, cette journée toute entière n'avait aucun sens !
Deux minutes. Elle parlait de journée mais combien de temps s'était-il écoulé depuis qu'elle avait perdu connaissance ? Elle retourna la chambre et finit par trouver un réveil sous un tas de fringues. Ce dernier affichait plus de deux heures du matin. Alors, en comptant que Castiel s'était réveillé ce matin dans la pièce vers dix-sept heures, que la sonnerie avait résonné vers dix-neuf heures, le temps qu'elle s'endorme – comme une merde – sur la moto de l'autre idiot, elle avait dû dormir plus de six heures. Mais pourquoi autant ? À ce moment, une forte douleur émana de sa jambe et elle tomba à genoux en étouffant un cri de surprise et de douleur.
Un sourire amère étira ses lèvres. C'est vrai que ça risquait d'être problématique. Elle baissa les yeux vers ce qu'elle pensait être une affreuse plaie sanguinolente et, au lieu de ça, découvrit un bandage propre sans la moindre trace d'hémoglobine dessus. Ses doigts glissèrent dessus et elle fronça les sourcils. Il lui fallait des explications.
Plus ou moins sur d'elle, elle se releva et se dirigea d'un pas voulu décidé vers la porte de la chambre. Elle se trouva au beau milieu d'un couloir tout aussi inconnu de la pièce et se demanda où elle pourrait trouver quelqu'un susceptible de répondre à ses questions. À ce moment, une porte dans son dos s'ouvrit et un jeune homme apparut. Ses cheveux ébènes étaient humides et gouttaient encore sur sa chemise blanche, prouvant qu'il sortait sans doute de la douche. Cette chemise parfaitement ajustée sur son pantalon noir cintrait parfaitement sa taille musclée et son torse fort. Mais alors que Cersalia continuait son exploration, un éclaircissement de gorge l'interrompit. Elle releva les yeux et tomba sur deux iris noires et profondes qui la fixaient elles aussi. La jeune fille ouvrit la bouche, cherchant à dire quelque chose qui pourrait l'aider mais il la devança.
̶ ̶ Cersalia je suppose ? Viens avec moi, les autres t'attendent en bas, lui annonça-t-il avec un sourire rassurant en lui tendant la main tel un gentleman – manière qui lui rappela beaucoup celles de Lysandre, bien qu'elle ne l'ait pas côtoyé beaucoup.
̶ ̶ Deux... Deux minutes ! Contra-t-elle en rompant d'un pas, de peur d'être tombée dans un piège, il n'était pas impossible qu'ils l'ait retrouvée. Qui ça « les autres » ? Je suis où ? Et tu es qui ?
̶ ̶ Calme toi, sourit-il, toujours aussi calme en lui saisissant la main délicatement et en y déposant un baisemain. Je suis Leigh, le frère aîné de Lysandre, ( Ah bah tiens ! ) et nous sommes chez moi. Viens.
Sans rien dire de plus, il l'attira vers les escaliers qu'il commença à descendre. Gênée d'être prise en main comme ça, elle récupéra sa main et le suivit. Arrivé au pied des marches, le brun s'arrêta et prit la parole :
̶ ̶ Notre invité est réveillée.
Et il se décala pour lui laisser le passage. Elle fit un pas en avant avant de se figer. Devant elle, confortablement installée devant des tasses fumantes, se trouvaient une assemblée plutôt surprenante. Tout d'abord Rosalya, très décontractée, ne portant que des leggings noirs et une marinière flottante. Ses sublimes cheveux étaient attachées même si quelques mèches s'échappaient de sa queue de cheval. Près d'elle, assis sur l'accoudoir du fauteuil dans lequel elle se trouvait était assis Lysandre, ne portant qu'un débardeur blanc et un short qui lui arrivait aux genoux. Sa tenue dévoilait ses bras et ses jambes musclées à souhait et laissait parfaitement imaginé ses abdos merveilleusement bien dessinés, il n'avait rien à envier à son frère. Mais qu'est-ce que tous ces hommes au physique de rêve faisaient reclus au fin fond de cette ville, c'était bizarre.
La dernière personne que Cersalia remarqua avant de se faire étouffer fut Castiel affalé de tout son long dans le canapé, vêtu d'un débardeur noir et d'un short assorti. Elle n'allait pas faire l'éloge de son corps de rêve car, d'une, elle avait déjà eu l'occasion de l'observer maintes fois – ce qui était étrange étant donné qu'elle n'était pas là depuis si longtemps et qu'ils n'étaient même pas amis – et de deux parce que ça l'énervait de comprendre pourquoi toutes ces filles lui couraient après et que si elle n'avait pas connu son caractère – il faut le dire – de merde et n'avait pas eu un minimum de bon sens, elle aurait sans doute fait de même.
Mais le jeune fille n'eut pas le temps de se plaindre intérieurement plus que ça car elle se fit soudainement submergée par une tornade blanche. Surprise, Cersalia recula d'un pas et buta contre les marches, perdant l'équilibre. Si Leigh n'avait pas retenu les deux jeunes filles, elles se seraient sans doute fracassées le crâne contre les escaliers. Et, alors que la blanche s'éloignait en s'excusant, voilà qu'elle se retrouvait pour la énième fois dans les bras d'un homme. C'était chaud mais elle se fit la réflexion que le sentiment de sécurité qu'elle éprouvait avec Castiel était absent. Oula ! Elle manqua de se donner une claque alors que – sous une toux forcée du rouquin – Leigh la redressait et s'éloignait. Depuis quand elle comparait les étreintes des garçons. Non. Depuis quand avait-elle le loisir de le faire ? La situation devenait clairement dangereuse.
Elle secoua la tête pour chasser ces pensées futiles de son esprit et s'avança de quelques pas. Elle allait ouvrir la bouche pour demander des explications quand Rosalya la prit à nouveau dans ses bras, plus doucement cette fois. Elle la serra contre elle et elle sentit quelque chose d'humide couler dans son cou. Elle écarquilla les yeux et se recula pour soulever le visage de la jeune femme d'habitude si souriante et excitée ruisselant de larme.
̶ ̶ Qu'est-ce que... Rosalya ? Bafouilla Cersalia.
̶ ̶ Je suis désolée, Cersalia. Ce sont des larmes de soulagement. J'ai cru qu'on n'y arriverait pas. Mais à ce que j'ai compris, Castiel a mis beaucoup de temps pour revenir et tu as perdu beaucoup de sang.
̶ ̶ Quoi ... ?
̶ ̶ Hey ! Intervint le principal concerné en se redressant, les sourcils froncés. Ce n'est pas ma faute si... Fin c'est pas de ma faute !
̶ ̶ Ouais ouais... Je suis sûre que c'est ta surprotection qui t'a fait perdre autant de temps. Ça aurait pu être fatal !
̶ ̶ Attendez... tenta d'interrompre celle-ci.
̶ ̶ T'aurais préféré qu'elle se fracasse la tête par-terre ?
̶ ̶ J'ai pas dit ça ! Tu connais le principe du "juste milieux" ? !
̶ ̶ Non mais je rêve ! Quand on me demande quelque chose je-
̶ ̶ OH ! C'EST PAS BIENTÔT FINI ?! Explosa Cersalia, en ayant marre de ne pas être écoutée. Quelqu'un va m'expliquer ce qu'il se passe à la fin ? Pourquoi vous m'avez aidée après... tout ça ? C'est quoi ce BORDEL ! ?
Cette explosion de stress et d'angoisse à travers ses mots ne fut pas bénéfique à la jeune fille. Sa vision se troubla et, durant un instant, tout fut noir. Ses jambes vacillèrent et, pendant un certain temps, une sensation étrange de chaleur molletonnée l'envahit. Puis elle rouvrit les yeux et secoua la tête. Bizarre...
Ah ce moment, Lysandre décida qu'il était temps de calmer le jeu. Il se leva, passa entre Castiel et Rosalya – ce qui eut le mérite de briser leur bataille de regards parfaitement puérile – et posa ses mains sur les épaules de la jeune fille paniquée. Celle-ci sursauta et voulut reculer mais elle fut maintenue immobile par les iris envoûtantes aux couleurs chatoyantes du victorien. Pour la première fois de la soirée, il ouvrit la bouche et sa voix de velours apaisa la pièce.
̶ ̶ Calme toi. On va t'expliquer. Mais sache que tu peux te calmer. On est au courant de bien plus de choses que tu penses, voir même que toi. Ça va aller.
Prisonnière de son regard calme, elle hocha la tête. À y regarder de près, c'était un jeune homme magnifique. Ses yeux étincelants tranchaient avec l'expression calme et posée de son visage et ses cheveux argentés aux pointes grises lui donnaient un côté mystique. Tout cela donnait envie à Cersalia de percer tous ses secrets. Mais elle fut interrompue par la voix irritée d'un rebelle enragée.
̶ ̶ Bon, vous avez fini de vous violer du regard les tourtereaux ? Elle va finir enceinte à ce rythme là.
̶ ̶ Mais quoi encore ? S'énerva la jeune fille en se tournant vers lui. T'es jaloux ?
Elle posa sa dernière question avec un petit sourire qui eut le don d'énerver le garçon.
̶ ̶ Moi ? Jaloux ? La seule chose dont je pourrais être jaloux c'est... Non, je trouve même pas.
̶ ̶ Oui, c'est sûr, pour voir ce genre de choses, il faut savoir réfléchir. Et pour ça, on a besoin d'un cerveau ? Or, tu es totalement dénué de matière grise donc... Ne t'en fais pas, je te laisse un peu de temps pour comprendre le sens de ce que je viens de dire.
̶ ̶ Pardon ? ( Il se leva, souriant narquoisement. ) Je ne vais pas faire l'effort de réfléchir à ce que toi tu dis, je suis sûre que toi même tu ne t'ais pas compris.
̶ ̶ Répète un peu pour voir ! S'énerva Cersalia en se plantant en face du jeune homme.
Leurs visages se trouvaient à quelques centimètres l'un de l'autre et l'électricité régnait entre eux. Ils sentirent alors quelque chose les tirer dans le dos et se rendirent compte que Leigh venaient de les séparer. La jeune fille cligna des yeux et retourna la tête pour voir Lysandre sourire, amusé, et Rosalya les fixer, des étoiles dans les yeux.
̶ ̶ On a un bac à sable pour les deux gamins de maternelle ici ? Demanda le brun.
̶ ̶ Ooooooh ! S'extasia la blanche à ce moment en se ruant vers les deux adolescents qui s'étaient libérés en se lançant des regards noirs. Elle saisit une main à chacun et les pressa l'une contre l'autre. Vous êtes parfaits ensemble ?
Il fallut quelques secondes pour qu'ils comprennent ce qu'elle voulait dire par là mais lorsque l'information atteint leur cerveau ils se séparèrent en criant leur désaccord, ce qui eut pour conséquence de faire rire les trois autres. Ce fut à ce moment que la jambe de Cersalia décida de se manifester. Un éclair de douleur partit de l'intérieur de sa cuisse et, vif comme un serpent, il traversa toute sa jambe avant de remonter dans sa colonne vertébrale. Plaquant ses mains sur sa bouche pour étouffer son pathétique cri de douleur, elle bascula en arrière. Par réflexe, Castiel la rattrapa, l'empêchant de se fracasser le dos par terre. Il l'aida à marcher et l'assit sur le canapé avant de se tourner vers les autres en se grattant l'arrière de la tête.
̶ ̶ On a pas pu être très propres. On était pressés par le temps. Ça risque de mettre plus de temps que prévu pour que la douleur s'en aille.
Cette phrase ralluma dans la tête de la blessée toutes les questions qu'elle se posait. Elle prit une grande inspiration et leva les yeux vers eux.
̶ ̶ Vous allez m'expliquer à la fin ?
Ils s'échangèrent un regard inquiet avant de hocher la tête. Rosalya releva la manche de sa marinière pour dévoiler son épaule gauche. Lysandre retira son débardeur et se mit de dos. Leigh déboutonna sa chemise et montra son torse. Quant à Castiel, il se contenta de montrer l'intérieur de son poignet. Et là, Cersalia hoqueta : à chaque endroit de leur corps qu'ils venaient de lui montrer se trouvaient le même tatouage noir. Un œil grand ouvert derrière lequel se croisaient une épée et une branche d'olivier, symbole des deux divinités de la guerre. Mais surtout, il s'agissait du symbole d'une organisation des plus secrètes et restreintes : la WFP.
Bon, et bien voilà le chapitre 9. Je suis désolée pour les personnes qui me suivent - s'il y en a ? ^^'. Sur ce site, je n'ai aucun retour sur mes posts, donc, évidemment je privilégie l'entretien de mon blog et je m'excuse si j'ai des visiteurs réguliers. Mais sachez que signaler votre présence ne vous tuera pas. Bon, en tous cas, j'espère que vous avez apprécié et je posterai la suite d'ici à deux semaines - si je n'oublie pas. Encore désolée !
..Juliette..
