Echange standard

IMPORTANT ! A LIRE ABSOLUMENT AVANT DE COMMENCER !
J'ai eu envie de tester un concept : l'OS « interactif ». Le principe est simple : ceci en est la première partie (une vingtaine de page Word), qui plante le décor. La fin de cette première partie est telle qu'elle laisse une quantité astronomique de scénarios possibles pour la fin. Votre mission, si vous l'acceptez, est de reviewer cette première partie en ajoutant vos désirs/vos idées pour la suite. Il peut s'agit d'un simple mot, d'une phrase, d'un paragraphe, tout ce que vous voulez. Je sélectionnerai les idées qui m'auront fait délirer et je les intègrerai à la trame de ma seconde partie (laquelle sera publiée dans les semaines à venir). Je compte sur votre participation, je suis sûre qu'il y a moyen de bien rigoler avec la deuxième moitié de cette histoire ! Bonne lecture et n'oubliez pas de me faire parvenir vos idées (même les plus loufoques !)…

Merci à tous ceux qui ont reviewé mon précédent OS (Flight Plan) : swetty-girl-35, Manel, romeo'stomboy, Stiitch, MissLilly, laurave, M, Lh42, Babar, RoseWeasley98, sarahblue1, Pluwy, Kim, MELHANN, Sissi-Gina, nimyr, Auriane, , Im. , aurian04, JazzyO, Petitestef, Marianne, Anne, AydenQuileute, MayW, Little-Library, fantasia-49, Lucky-my, Marie 2906, Gaga-Ella, AS-Black, julia05, Lune-Bleue22, HermioneBIS, bonniechons, delphes, ohayo1234, nina, Diabolic Queen, Goutte-De-Mer, Pauline C-n Malefoy, Etoilemment, carowolf, Dragomione33, Capucine-Rosa, bellimia, MissDasey, Alaska66, yumeriku, AccioxPotter, Piitchoun. Avec une mention spéciale pour bonniechons qui m'avait lancé ce défi ! ^^

Bonne lecture !

L'explosion n'avait pas été violente. Il n'y avait pas eu de détonation, ni de boule de feu ou de fumée. Rien de bien spectaculaire en somme. Seul le contenu du chaudron avait jailli de toutes parts, l'éclaboussant abondamment et le projetant en arrière, lui ainsi que le gros imbécile responsable de cette soirée abominable.

Harry Potter. Rien que prononcer son nom dans sa tête lui donnait envie d'éviscérer tous les derniers représentants d'une espèce animale en voie de disparition. Si possible adorable et avec le poil soyeux. C'était de la faute de Potter si sa vie était une continuité d'emmerdes. C'était aussi de la faute de Potter s'il était ce soir en retenue dans les cachots et forcé de devoir refaire d la potion qu'il avait pourtant pris grand soin de saboter pendant le cours de Slughorn. Et enfin c'était de la faute de Potter s'ils avaient dû se mettre en binôme pendant ce même cours… Une minute, ah non, ça c'était de la faute de Slughorn.

Draco Malfoy ouvrit les yeux et la première chose qu'il vit fut le dessous d'un bureau, parsemé de chewings-gums multicolores collés par des élèves manquant manifestement de tout sens de l'hygiène. Il grimaça en réalisant que tout le reste semblait flou, comme s'il louchait. C'était une sensation assez étrange et il leva une main pour la passer devant son visage. La main était nette mais tout le reste derrière était plongé dans le brouillard. Merlin, il avait dû se cogner la tête plus fort qu'il ne le pensait. Peut-être qu'il devrait aller voir Mme Pomfresh avant d'écraser la cervelle de Potter avec son maudit chaudron. Ce serait plus prudent. On n'est jamais à l'abri d'une commotion cérébrale …

Draco se redressa sur son séant, encore un peu sonné et sentit quelque chose tomber de son menton. Il rattrapa l'objet au vol et baissa les yeux. Il serrait entre ses doigts une paire de lunettes rondes à cerclage noir, drôlement familières et les rapprocha de son nez pour mieux les regarder. Son regard passa à travers les verres et ô miracle, le monde derrière sembla plus clair.

« Qu'est-ce que … ? », marmonna-t-il en se frottant l'arrière du crâne… avant de se figer au beau milieu de son geste.

Qu'est-ce que c'étaient que ces cheveux ? Ils n'avaient plus rien de soyeux, de souple et de discipliné ! Voilà qu'ils étaient raides, drus et bourrés d'épis tous plus incongrus les uns que les autres. Enfer et damnation.

Draco Malfoy déglutit. Une idée terrible, impensable, se frayait lentement un chemin jusqu'à son cerveau mais il décida de l'ignorer. Ce ne pouvait être …
Les lunettes de naze, les cheveux ridicules… Il baissa le nez sur son uniforme de Poudlard et constata avec horreur, sous les motifs artistiques laissés par la potion terroriste, qu'il portait une cravate rouge et or.

« Oh non », lâcha-t-il, incapable de détacher ses yeux de son pire cauchemar. Il porta aussitôt une main à son front et tâtonna, fébrile. Soudain, sur la droite, juste sous une des innombrables mèches rebelles, il la sentit. Une petite boursouflure en forme d'éclair, là, juste sous ses doigts. « MAIS C'EST PAS VRAI ! », hurla-t-il avant de plaquer une main sur sa propre bouche. Même la voix était identique. Il n'y avait plus de doute possible : Draco Malfoy était devenu Harry Potter.

Harry Potter.

Harry je-ne-vous-ferai-pas-le-plaisir-de-mourir-et-débarrasser-la-planète-de-mon-ignoble-et-inutile-présence Potter.

Un grognement, suivi d'un bruit métallique sur sa droite fit sursauter Draco et il se retourna vivement. C'est alors qu'il le vit. Ou plutôt qu'il se vit. Son propre corps, élancé, magnifique, était étendu sur le sol désormais souillé de la salle de Potions. Il n'y avait qu'un seul petit problème. Il n'était pas dedans. Et s'il n'était pas dedans, alors qui… ?

Nouveau grognement et Draco vit son corps s'agiter, puis se redresser avec une expression stupide.

« Potter, c'est toi ? », demanda Draco d'une voix hargneuse.

Malfoy se vit tourner la tête et ouvrir des yeux ronds comme des soucoupes. Puis ses mains se mirent à tâter précipitamment son visage, tirant sur les joues, les cheveux, avec une expression de panique mêlée de dégoût.

« Hé, fais doucement, tu vas m'abîmer ! », protesta Draco en voyant les doigts de l'autre – ses propres doigts – pincer et laisser de petites marques roses sur sa peau pâle.

« M-M-Malfoy ? C'est… c'est toi qui est dans mon corps ? », balbutia Potter (car c'était bien lui !).

« Il semblerait », répondit le Serpentard, la mine sombre. Il baissa de nouveau les yeux sur sa nouvelle cravate rouge et or et grimaça. « Merlin, c'est un cauchemar… »

« Sans déconner ? », s'étouffa Harry, tout en passant (par la force de l'habitude) une main dans ses cheveux, créant une panique incommensurable dans les mèches blondes et disciplinées de son nouveau corps. Puis il bondit sur ses pieds. « Où est Slughorn ? »

« T'as oublié, Potter ? », cracha Draco en se relevant à son tour. « Il nous a enfermés seuls et sans baguettes jusqu'à la fin de notre colle. Soi-disant que c'est mieux pour l'esprit d'équipe. Mon cul, ouais. »

« Il faut qu'on le prévienne ! », s'écria Harry en fondant sur la porte pour tambouriner contre le panneau. « A L'AIIIIIIDE ! AU SECOUUUUURS ! PROFESSEUR SLUGHOOOOORN ! »

Draco tourna la tête pour lui lancer un regard pétri de mépris mais tout ce qu'il parvint à voir, fut une silhouette brouillée surmontée d'une tache platine, qui s'agitait dans tous les sens. Il grogna, se rappelant qu'il avait désormais besoin de ces horribles binocles pour y voir clair. Il les chaussa sur son nez avec une grimace de dégoût, tandis que Potter continuait de frapper la lourde porte de bois en beuglant. Draco secoua la tête, exaspéré. Puis il avisa un miroir, dans un coin de la pièce et s'en approcha. Il ne put s'empêcher d'avoir un mouvement de recul en voyant son reflet. Il était bien Harry Potter. Des pieds chaussés de vulgaires baskets de seconde main à la racine de ces cheveux improbables, tout y était. La bouche démesurée, le nez proéminent, le regard stupide. Et cette immense cicatrice qui lui mangeait la moitié du visage. Comment Potter faisait-il pour survivre avec ce physique ingrat ? Et plus important : comment lui, Draco Malfoy, habitué à un corps d'Apollon, allait-il survivre plus d'un quart d'heure à l'intérieur de ce corps hideux ? Draco avait tout à fait conscience qu'il exagérait un peu. Potter n'était pas si moche que ça. Mais il avait toujours tendance à surdramatiser.

Il réalisa alors que le calme était revenu dans la pièce et tourna la tête en direction de la porte. Potter ne hurlait plus, ce qui était déjà une grande amélioration, il ne frappait plus non plus la porte comme un dingue, encore mieux. Et il le regardait avec une expression furieuse.

« Par pitié, Potter, sois moins expressif, tu vas me creuser des rides avant l'âge », lâcha Draco, avant de constater avec une pointe de déception que son accent traînant n'allait pas du tout avec le timbre de voix de Potter.

« Comment est-ce que tu peux être aussi calme ? », aboya Harry en fronçant les sourcils. « On a échangé nos corps, Malfoy. Et toi, la seule chose qui t'intéresse c'est de voir à quoi tu ressembles ! »

« Ça s'appelle constater les dégâts, Potty », ironisa Draco. « Et ne te plains pas. Dans l'histoire c'est quand même toi qui gagnes au change. » Harry leva les yeux au ciel et poussa un grognement de rage, tandis que Draco continuait. « En tous cas, ça ne sert à rien de s'énerver. On est dans une école de magie, ce genre d'accident a dû arriver des centaines de fois. Dès que Slughorn reviendra, il nous filera un antidote ou nous emmènera chez Pomfresh et tout rentrera dans l'ordre. Tout ça ne sera plus qu'un mauvais souvenir et bientôt, on en rigolera. » Draco se tourna de nouveau vers le miroir. « Ou plutôt non, tu en rigoleras, alors que moi je devrai vivre toute ma vie avec la vision de cette cicatrice purulente sur mon front. »

« Va te faire foutre, Malfoy », cracha Harry. « Bien cordialement. »

Draco allait lâcher une répartie cinglante lorsque le verrou de la porte cliqueta et s'ouvrit. Horace Slughorn apparut sur le seuil, les sourcils levés et la bouche entrouverte. « Eh bien, mes enfants ? », demanda-t-il d'une voix surprise. « Qu'est-ce que c'est que tout ce boucan ? Il y a un problème ? »

« Oui, et un gros », répondit Malfoy, toujours devant son miroir. « Je suis extrêmement laid. »

Slughorn jeta un regard pétri d'incompréhension en direction de ce qu'il croyait être Harry Potter, puis se tourna vers celui qu'il croyait être Draco Malfoy, debout à quelques mètres et arborant une expression très, très, très lasse.

« Mais voyons, Harry… il ne faut pas dire ça, tu- », commença Slughorn, avant de s'interrompre en voyant « Malfoy » lever la main.

« Professeur, c'est moi, Harry », fit le blond d'une voix fatiguée. « Il y a eu un problème avec la Potion et… Malfoy et moi avons changé de corps. »

« Oooh », fit simplement Slughorn, tandis que de l'autre côté de la pièce, Malfoy rejetait sa tête brune en arrière pour pousser un long et bruyant soupir. « Voilà qui est singulier. Le philtre d'Embrouille que vous deviez concocter n'est pas censé avoir cet effet-là. Êtes-vous sûrs d'avoir bien respecté le protocole ? »

Draco roula des yeux tandis que Potter passait une nouvelle fois sa main dans ses cheveux blonds.

« Je … oui, Professeur », balbutia Harry. « J'ai ajouté les 12 feuilles de cranson officinal en premier- »

« 18 en réalité », le coupa Draco avec une grimace. « J'en avais rajouté dans ton petit tas. »

« Malfoy, espèce de sale- », commença Harry, le rouge montant sur ses joues pâles. Draco fit un pas en arrière et fut rassuré de voir que Slughorn retenait Potter par le bras.

« Allons, allons, Monsieur Malf-, enfin je veux dire, Harry… », reprit Slughorn avec une moue désapprobatrice. « Détendez-vous. Qu'en est-il du second ingrédient, la livèche ? »

« J'ai broyé les 4 tiges, comme c'était indiqué », répondit Harry.

Draco fit claquer sa langue contre son palais. « Tssk, ouais ça aussi, je t'ai filé des tiges de céleri à la place. »

« Quoi ?! », s'époumona Harry, que Slughorn avait de plus en plus de mal à retenir. « Et le pistil d'achillée sternutatoire, alors ? »

« Oh ça… », commença Malfoy en se mordant l'intérieur des joues pour empêcher un sourire narquois de se plaquer sur ses lèvres. « J'ai fait un petit pot-pourri avec à peu près tout ce que j'ai pu trouver dans l'armoire de gauche, alors … Joker. »

Slughorn se frotta les tempes, sentant une grosse migraine pointer le bout de son nez. Et dire que Dumbledore avait prétendu que l'enseignement était le plus beau métier du monde.

« Mais t'es vraiment un incroyable connard ! », s'exclama le Survivant, comme s'il réalisait ce fait pour la première fois de sa vie.

« La prochaine fois, t'iras chercher les ingrédients toi-même, Potter », s'esclaffa Draco en croisant les bras. « Je ne suis pas ton larbin, que ça te serve de leçon. »

« CA SUFFIT ! », hurla soudain Slughorn, faisant sursauter les deux adolescents. Le silence retomba aussitôt dans les cachots, pour le plus grand bonheur du professeur de potions. « Bien, récapitulons. Nous avons une mixture complètement aléatoire, deux imbéciles qui croient qu'un labo de potions est un terrain de jeu idéal pour régler leurs comptes et un échange d'enveloppes corporelles. Question : quel est le propre des potions, messieurs ? »

Les deux garçons échangèrent un regard perplexe.

« J'en sais rien, généralement c'est Granger qui répond à ce genre de questions débiles », marmonna Draco tandis que Harry lui jetait un regard venimeux.

« Le propre des potions, Har- monsieur Malfoy », reprit Slughorn, « est justement que leur durée d'action est temporaire. Quoi qu'on fasse, leur effet finira toujours par s'estomper. Ou alors il faut un antidote, mais espérons que ce ne soit pas le cas ici … »

« Je confirme, espérons », lâcha Draco en jetant un bref coup d'œil en direction de son reflet.

« Quoi qu'il en soit, je vois dans cette situation la punition idéale pour vos deux grosses têtes de mules », s'énerva Slughorn en tirant une des nouvelles oreilles d'Harry, qui protesta par un cri aigu. « Allez-vous coucher. Avec un peu de chance, vous aurez récupéré vos corps respectifs en vous réveillant demain matin. Et si dans 48 heures, ce n'est toujours pas le cas… » Il se tut et grimaça. « Bref, je vais essayer de fabriquer quelque chose pour régler le problème. »

« Attendez, Professeur », fit Draco en se détournant de son miroir. « Il est hors de question que je dorme ailleurs qu'à Serpentard. Je suis extrêmement allergique au rouge et or. »

Slughorn se retourna vers lui, les yeux lançant des éclairs, tandis que Potter laissait échapper un ricanement amer. « Il fallait peut-être y réfléchir avant, Monsieur Malfoy. En attendant, libre à vous d'essayer de pénétrer dans la salle commune et les dortoirs de Serpentard avec ce visage. Ce n'est pas comme si une grande partie des pires ennemis de votre nouveau personnage se trouvait précisément dans cette maison… Et ça vous fera le plus grand bien de découvrir un peu le monde de l'autre. Avec un peu de chance, vous ressortirez grandis de cette histoire… »

Draco déglutit en réalisant qu'effectivement, il risquerait de ne pas survivre suffisamment longtemps pour expliquer à ses amis sa situation. Quant à ressortir « grandis », il n'était pas franchement sûr du coup.

« C'est bon, j'ai compris… », grommela-t-il avant de récupérer son sac, d'arracher sa baguette de la main tendue de Slughorn et de sortir des cachots d'un pas rapide.

Quelle journée de merde…, pensa-t-il en remontant les couloirs jusqu'au rez-de-chaussée, avant de passer par la cour intérieure pour rejoindre la tour de Gryffondor. Une fois arrivé devant le portrait de la Grosse Dame, il se planta devant… et réalisa qu'il n'avait aucune idée du mot de passe. Et re-merde.

« Hé ! », appela-t-il en claquant des doigts à l'attention de la Grosse Dame. « Hep, vous ! Laissez-moi entrer ! »

Le portrait lui jeta un regard étrange. « Mot de passe ? », demanda la Grosse Dame en le dévisageant des pieds à la tête.

« Vous vous fichez de moi ? », demanda Draco, bouche bée. « Ça fait six ans que vous m'ouvrez la porte tous les jours. Vous pouvez bien faire une exception pour une fois, non ? »

« Je suis désolée, il me faut le mot de passe », rétorqua la Grosse Dame en lui jetant un regard courroucé. « Et je vous prie de rester poli. »

Draco ouvrit la bouche et repoussa sa frange en arrière, avant de se pencher vers le portrait. « OK, tu vois ça, vieille croûte ? Tu sais ce que c'est ? Je suis Harry Potter, la star du monde sorcier, je suis une foutue célébrité. Et j'aimerais rentrer me coucher car ma journée a été une suite absolument ininterrompue de galères, alors ouvre-moi tout de suite cette porte, c'est un ordre ! »

« Harry ? », fit une voix derrière lui.

Draco tourna sur ses talons et se retrouva nez à nez avec… Neville Londubat. Jamais Draco Malfoy ne s'était senti aussi heureux de voir ce mollasson de Londubat débarquer.

« Heeey ! Londu-euh … Neville ! », s'exclama Draco en affichant un large sourire faux. Il franchit les quelques mètres qui le séparaient de Neville et passa un bras autour des épaules du Gryffondor. « Je suis super content de te voir, tu sais ? »

Neville fronça les sourcils et lui jeta un regard interrogateur. « Ah oui ? »

« Parfaitement ! », mentit Draco en lui tapotant l'épaule, tout en se retenant de lever les yeux au ciel. « Dis-moi, tu n'aurais pas par hasard ce fichu mot de passe… ? J'ai beau me creuser la cervelle, je n'arrive pas à m'en rappeler. »

Neville fit une grimace, qui ne laissait rien présager de bon. « Ah toi aussi… j'ai perdu le papier sur lequel j'avais noté le nouveau… », marmonna Neville avec une tête de chien battu.

Le sourire faux de Draco disparut aussitôt et il dut se retenir de sauter à la gorge de Londubat. « C'est pas vrai, tu sers vraiment à rien ! », aboya Draco en repoussant violemment le garçon, qui lui jeta un regard scandalisé. « Non, enfin je veux dire … » Il se pinça l'arête du nez et soupira. « J'ai eu une très longue journée… »

« Ta colle avec Malfoy ? », fit Neville en hochant la tête. « T'en fais pas, j'ai compris. » Londubat se tourna de nouveau vers le portrait et soupira. « Pourquoi est-ce qu'ils se sentent obligés de toujours changer les mots de passe ? Ce serait bien plus simple d'en avoir qu'un seul, non ? »

« Ouais, enfin, on y perdrait un peu sur le concept du mot de passe, tu vois… », grogna Draco avec lassitude.

« Oui, je suppose », marmotta Neville, contrit. « Qu'est-ce qu'on fait, alors ? »

« Bah, on attend comme des cons », répondit Draco, la mort dans l'âme.

« Pardon ? », s'étonna Neville, qui n'avait décidément pas l'habitude d'un tel langage de la part d'Harry.

« …pagnons ! », corrigea illico Draco en se maudissant intérieurement. « Comme des compagnons d'infortune. Car c'est ce que nous sommes… face à cette maudite porte qui ne veut pas s'ouvrir, pas vrai Lon-Neville ? »

« Uh-uh », répondit celui-ci, légèrement désorienté.

C'est alors que le portrait sembla pivoter de lui-même, certainement parce que quelqu'un sortait de la salle commune. Une vague de soulagement submergea aussitôt Malfoy et il se promit intérieurement de serrer dans ses bras son sauveur. Du moins jusqu'à ce qu'il constate que la personne qui sortait de la salle commune n'était autre que… Hermione Granger. Et comble de la malchance, celle-ci était en larmes.

~o~

Après le départ précipité de Draco en direction de la tour de Gryffondor, Harry avait pris congé du professeur Slughorn, la mort dans l'âme. Il s'était dirigé en traînant les pieds vers la porte de la salle commune des Serpentards, qui n'était qu'à quelques dizaines de mètres de la salle de potions, croisant au passage Théodore Nott et Blaise Zabini, qui revenaient de dîner.

« Ah bah te voilà », lança Zabini en guise de salut. « Alors, ta retenue avec Potter ? T'as survécu ? »

Harry se retint de lever les yeux au ciel. « Comme tu vois… », fit-il sombrement. Sa réponse laconique parut surprendre ses deux « amis », qui échangèrent un regard surpris.

« Quoi, c'est tout ? », s'étonna Théodore, avant de s'arrêter devant la porte de leur salle commune. « Héritage. » La porte s'ouvrit toute grande. « T'as plus d'imagination que ça, d'habitude… »

« Il faut croire que ça s'est relativement bien passé », rétorqua Harry, pressé de changer de sujet. Les deux Serpentards se regardèrent de nouveau, puis éclatèrent de rire.

« Relativement bien passé ? », insista Théodore, hilare. « C'est ça, on te croit à mort. Allez avoue, c'était horrible, c'est ça ? Il a encore passé son temps à te faire la morale ? »

« Ou à parler de sa chère petite Je-Sais-Tout qui est soi-disant la sorcière la plus douée de sa génération ? », railla Blaise tandis que Théodore, pour une raison qu'Harry ne s'expliqua pas, riait à présent plutôt jaune.

Harry serra les poings mais décida de ne pas se faire remarquer. Il en allait de sa sécurité. « Ouais, c'est à peu près ça. Qu'est-ce qu'il peut être chiant, ce Potter », maugréa-t-il.

Il sursauta alors en sentant dans son dos deux bras se glisser autour de sa taille. Pansy Parkinson posa son menton sur son épaule droite et serra son torse (et sa poitrine) contre le dos de Harry. « Mon pauvre, pauvre Draco, malmené par ce vilain petit Potter », minauda-t-elle en frottant ses mains sur le torse de celui qu'elle prenait pour Malfoy. « Viens avec moi dans un coin tranquille, je te ferai oublier cet affreux lionceau. »

A droite d'Harry, Théodore leva les yeux au ciel, tandis que Blaise faisait un geste brusque de la main pour chasser Pansy, qui lui tira la langue.

« Fous lui la paix, Pans'. Qu'est-ce que tu peux être fatigante, quand tu t'y mets… », grogna Blaise, tandis que la jeune fille se frottait de plus belle contre Harry, de plus en plus mal à l'aise. « En plus, tu ne sors pas avec Malcolm Baddock, en ce moment ? », reprit l'Italien en fronçant les sourcils.

« Si, mais pour Draco, j'abandonnerais même le Ministre de la Magie en personne », susurra Pansy à l'oreille d'Harry. Celui-ci eut alors l'idée de vengeance envers Malfoy la plus ignoble de toute sa vie. Il se retourna, saisit les deux mains de Pansy entre les siennes et plongea ses iris gris dans ceux de la jeune fille.

« Pansy, tu ne devrais pas avoir ce comportement là avec les garçons », murmura-t-il tandis que ses deux amis le fixaient, bouches bées. « Tu es une fille extraordinaire et tu mérites le respect. C'est pourquoi… » Il laissa volontairement quelques secondes à la jeune fille pour intégrer la première partie de sa phrase, puis reprit. « C'est pourquoi j'aimerais que l'on se donne du temps. Pour se découvrir l'un l'autre, s'apprivoiser… et un jour s'aimer comme tu mérites d'être aimée. Avec respect. » Il vit les yeux de Pansy briller dans la pénombre et ses lèvres fines recouvertes d'une légère couche de gloss couleur pêche s'entrouvrir légèrement. Il leva une de ses mains pour lui caresser la joue et sentit la jeune fille frémir à son contact.

« Oh, Draco… », couina-t-elle en reculant d'un pas.

« A bientôt, Pansy », acheva Harry avec un sourire charmeur, avant de battre en retraite suivi de Blaise et Théodore qui n'en revenaient pas.

Avec ça, si elle ne colle pas aux basques de Malfoy jusqu'au jour de sa mort, alors je ne m'appelle pas Harry Potter, pensa Harry en réprimant un sourire mauvais. Se souvenant de l'agencement des lieux depuis qu'il y avait fait un tour métamorphosé en Grégory Goyle en deuxième année, Harry fonça vers le couloir des dortoirs des garçons et attendit que ses amis se dirigent vers leur chambre pour les suivre. Par chance, Crabbe, Goyle et deux autres types étaient déjà assis sur leurs lits (faisant leurs devoirs ou cirant leur balai), si bien qu'une fois que Blaise et Théodore eurent posé leurs affaires au pied des leurs, il ne resta plus qu'un seul lit vide : celui de Malfoy. Harry se laissa tomber dessus, soulagé de voir enfin cette journée cauchemardesque se terminer. Comme l'avait dit Slughorn, demain matin, il serait certainement à nouveau dans son corps et toute cette histoire ne serait plus qu'un mauvais souvenir.

« T'étais pas sérieux, quand même ? », demanda Blaise en sortant ses livres de classe de son sac.

Comme « Draco » ne répondait pas, Blaise lui balança une boulette de papier, qui l'atteignit en plein front. « Hé, je te parle », s'esclaffa Blaise en voyant son ami sursauter. « Qu'est-ce que tu nous fait ce soir ? T'es bizarre. D'abord, tu ne nous dis rien sur ta retenue avec le Balafré. Ensuite, tu nous fais une espèce de plan chelou avec Pansy… »

« C'est clair, d'habitude elle te les brise… », ironisa Théodore. « A moins que tu n'aies dit ça juste pour qu'elle te foute la paix… »

« C'est à peu près ça », répondit Harry en haussant les épaules.

Blaise gloussa et secoua la tête. « A mon avis, tu risques de le regretter. Elle va te coller encore plus aux miches, après ça. »

Précisément mon cher Zabini, pensa Harry, laissant enfin un large sourire carnassier étirer ses lèvres. Précisément…

~o~

Raide comme un piquet, Draco se figea en voyant Granger le regarder avec des yeux aussi rouges et gonflés que ceux d'un lapin albinos en plein choc anaphylactique. Et avant qu'il n'ait pu faire le moindre geste, celle-ci s'élança vers lui et entoura sa taille de ses bras, pour pleurer abondamment contre son épaule. Draco écarta aussitôt les bras pour éviter au maximum de toucher Granger avec, et une grimace d'horreur figea littéralement ses traits. Du coin de l'œil, il vit Londubat entrer dans la salle commune, non sans lui jeter un regard curieux. Autour de sa taille, il sentit les bras de Granger le serrer encore plus fort.

Qu'est-ce qu'elle fait, mais qu'est-ce qu'elle fait ? Au secours. Aidez-moi. Quelqu'un !

« Oh Harry », renifla Hermione avec un sanglot déchirant. « Je n'en peux plus de le voir avec cette pimbêche, j'en ai assez. ASSEZ ! »

Draco, qui n'avait absolument aucune idée de ce dont parlait Granger, choisit de ne rien dire et resta figé, bras écartés. Comme il ne bougeait ni ne parlait, Hermione finit par relever la tête et par s'écarter de lui avec une expression interrogatrice. Seuls les yeux écarquillés de Draco bougèrent pour rencontrer les siens et il vit qu'elle fronçait les sourcils.

« Harry ? », couina Hermione en reniflant de nouveau.

« Quoi ? », fit Malfoy, les dents serrées, tandis qu'Hermione le scrutait comme pour l'analyser. Puis soudain, elle ouvrit grand la bouche et sécha précipitamment ses larmes avec sa manche.

« Oh je suis désolée, Harry », balbutia-t-elle en tamponnant ses yeux et ses pommettes rougis. « J'avais complètement oublié ta retenue avec Malfoy. Et moi, je suis là à te parler de mes histoires débiles avec Ron… » Elle renifla encore une fois. « Alors, comment c'était ? Il n'a pas été trop pénible ? »

« Pénible ? », s'insurgea Draco avec une expression courroucée.

« Oui, pénible », répéta Hermione en haussant les épaules. « Désagréable, ennuyeux, fatigant, insupportable, odieux. Malfoy, quoi. »

« Bon ça va, ça va, pas besoin de me sortir tout le dictionnaire », grommela Draco en la précédant dans la salle commune. « Malfoy n'est pas si horrible que ça… »

Hermione haussa les sourcils. « Toi-même tu disais que- », commença-t-elle mais Draco leva une main pour la faire taire.

« Si tu me racontais plutôt ce que cet imbécile t'a encore fait », fit précipitamment Draco pour changer de sujet, en sachant pertinemment qu'il allait le regretter.

« Qui ça ? », demanda Hermione, désorientée.

« Ben l'autre, là… machin… », s'énerva Malfoy en claquant des doigts. Le seul nom qui lui venait à l'esprit était Weasley mais il doutait que Potter appelle son meilleur ami par son nom de famille.

« R-Ron ? », s'étonna Hermione en clignant plusieurs fois des yeux.

« Ouais voilà, Ron », répéta Draco avec une grimace. « Alors c'est quoi le problème, avec Ron ? »

Pour toute réponse, Hermione tendit le bras et désigna du doigt un point situé derrière Draco, au fond de la salle commune. Draco pivota et ce qu'il vit faillit littéralement lui retourner l'estomac. Weasley était assis sur le canapé près du feu et sa bouche était engluée à celle d'une autre Gryffondor. Draco la connaissait de vue mais n'arrivait jamais à se rappeler de son nom. Elle avait un prénom ridicule … un truc de fleur. Peu importait. Le rouquin se livrait à une véritable exploration de la cavité buccale de la fille, avec force coups de langues barbares et échanges de salives peu ragoûtants. Le spectacle était absolument affreux mais quelque part fascinant. Un peu comme quand on passe devant un accident grave et qu'on tend tout de même le cou pour essayer de discerner quelques taches de sang histoire d'avoir un truc à raconter aux copains. Ce ne fut que lorsqu'Hermione lui saisit le bras pour le tirer en arrière que Draco réalisa qu'il fixait les deux tourtereaux avec une expression dégoûtée depuis plusieurs dizaines de secondes. Il détourna les yeux de l'ignoble spectacle et reporta son attention sur Granger.

« Est-ce qu'on pourrait aller ailleurs ? », le supplia-t-elle. « Je ne supporte plus de les voir s'embrasser à longueur de journée… »

Draco jeta un regard déçu en direction des escaliers qui menaient certainement aux dortoirs (et donc vers la fin de cette journée cauchemardesque) et fut sérieusement tenté d'envoyer balader Granger. Mais ce n'est certainement pas ce qu'aurait fait le véritable Harry. S'il ne voulait pas devoir expliquer à cette Miss Je-Sais-Tout qu'il avait (encore) saboté la potion de Potter et qu'il était donc un Serpentard infiltré chez les lions, il allait devoir agir en fonction. Il poussa un long soupir et se tourna vers la Gryffondor.

« Où tu veux aller ? La bibliothèque, je parie ? », fit-il d'une voix lasse.

Hermione accusa le coup et grimaça en réalisant qu'elle aurait effectivement bien aimé faire un tour à la bibliothèque avant le couvre-feu. « Euh non… je pensais plutôt à la Tour d'astronomie ou… les rives du lac, histoire de pouvoir parler au calme », mentit-elle.

« On ne va pas aller au lac, c'est bientôt l'heure du couvre-feu », protesta Draco en levant machinalement le poignet… avant de constater qu'il n'avait même pas de montre.

« Je suis préfète, je me fiche du couvre-feu », fit Hermione, boudeuse. Puis elle leva un regard suppliant vers lui. Généralement, ce regard de cocker marchait toujours avec Harry. « S'il te plaît, Harry… »

Un ange passa. Draco regarda longuement Granger et son air de chien battu, hésitant entre une remarque désobligeante et … non en fait, rien. La remarque désobligeante était la seule chose qui lui venait à l'esprit.

« Ça marche, cette technique-là, d'habitude ? », demanda-t-il, un sourcil levé et un rictus narquois aux lèvres.

Draco réalisa que son sourire narquois ne devait pas avoir l'air d'en être un sur la tête de Potter, car Granger sourit de toutes ses dents, apparemment ravie, et hocha la tête.

« Tu le sais bien… », dit-elle avec un petit rire.

Potter, tu n'es qu'un faible, pensa Malfoy en se retenant de lever les yeux au ciel. « Bon, ok, va pour la bibliothèque… », céda-t-il, abandonnant tout espoir de se coucher pour le moment.

~o~

Dans le dortoir des Serpentards, Harry cherchait désespérément un pyjama parmi les affaires de Malfoy. La malle en bois d'ébène au pied du lit renfermait à peu près une centaine de tenues différentes, toutes pliées au millimètre près, mais pas un seul pyjama.

« Qu'est-ce que tu cherches, comme ça ? », demanda Goyle, depuis son lit où il engloutissait une Chocogrenouille.

« Mon pyjama, je ne me rappelle plus ce que j'en ai fait », marmonna Harry, espérant que quelqu'un finirait par lui dire où il le rangeait d'habitude.

Théodore gloussa et secoua la tête. « Il est là où tu le mets religieusement tous les jours », s'esclaffa le jeune homme. « Sous ton oreiller. »

Harry se frappa le front du plat de la main. « Ouais c'est vrai, suis-je bête… », ironisa-t-il en rabattant le couvercle de la malle. Il se releva et souleva son oreiller. A l'instar de tous les vêtements de la malle, le pyjama était également plié avec une symétrie parfaite et placé bien droit entre la taie et la couverture. Y'a pas idée de tout ranger aussi bien, pensa Harry en saisissant le pyjama noir entre ses doigts. Un vrai maniaque, ce mec.

Un grognement retentit du côté du lit de Goyle. Le Serpentard venait de découvrir la carte cachée dans son paquet de Chocogrenouille et ne semblait pas être très satisfait. « Depuis quand Potter a sa carte dans les Chocogrenouilles ? », grommela le gorille en dévisageant le portrait animé d'Harry.

« Quoi ? », s'exclama Blaise en sautant par-dessus son lit pour rejoindre Goyle. « Mais c'est vrai, en plus ! », ajouta-t-il en se tournant vers « Draco ». Le blond accourut aussitôt et saisit la carte entre ses doigts.

« Classe ! », laissa échapper Harry avec un léger sourire. « Si tu ne la veux pas, je la garde pour ma collection ! »

Le silence pesant qui tomba dans la pièce fit lever le nez d'Harry, qui avait oublié l'espace d'un instant où il se trouvait et qui il était. Son sourire s'évanouit aussitôt en voyant les regards perplexes des autres Serpentards qui l'entouraient.

« Hé, je déconnais », fit Harry avec un petit rire nerveux. « Si on peut plus rigoler… » Il retourna en direction de son lit, emportant néanmoins la carte avec lui. « Bon, je suis crevé, bonne nuit… »

« Attends, tu rigoles, j'espère ? », l'interpella Théodore en écartant les bras. « Et la soirée ? »

Oh non, pitié, pensa Harry en fermant les yeux. « Quelle soirée ? », fit-il d'un air las, espérant que ses amis le croiraient trop fatigué pour se joindre à eux.

« On est jeudi, vieux ! », s'exclama Blaise. « Et le jeudi, c'est … ? »

Harry fronça les sourcils, puis tenta une réponse ironique. « …Sodomie ? »

La blague sembla plaire à Théodore qui éclata d'un rire tonitruant, tandis que Zabini levait les yeux au ciel. « Soirée poker, imbécile. Tu m'as dépouillé de 200 Gallions la dernière fois, tu me dois une revanche », acheva-t-il en secouant la tête. « Et toi, arrête de te marrer », ajouta-t-il à l'attention de Nott, qui riait toujours.

Harry eut d'abord le réflexe de paniquer. Il ne savait absolument pas jouer au poker, alors jouer de l'argent ? C'est alors qu'il réalisa : il ne jouerait pas avec son argent… mais celui de Draco, et donc indirectement de la famille Malfoy toute entière. Le Survivant étira les lèvres du blond pour adresser son plus beau sourire à Zabini, toute envie de se coucher désormais envolée.

~o~

« … et elle n'arrête pas de me narguer, en plus. Comme si elle savait parfaitement combien je souffre, cette pimbêche. Dire que Ron est complètement aveuglé. Il ne voit rien de ses petites manigances pour m'éloigner, pour me discréditer à ses yeux. Ça me rend dingue, Harry ! Pas plus tard que ce matin, elle a encore blablablabla blabla blablablabla… »

Draco fixait inlassablement les séries de livres rangés sur les étagères de la section Botanique de la bibliothèque. Cela faisait un moment qu'il n'écoutait plus un traître mot de la diarrhée verbale de Granger et il était le premier surpris par son propre self control. Bien qu'il n'en laisse rien paraître à l'extérieur, il imaginait toutes sortes de techniques plus ou moins atroces qui lui permettraient de fermer une bonne fois pour toutes la boîte à meuh que Granger appelait bouche. Il était justement en train d'élaborer les plans d'une guillotine à fonctionnement perpétuel, lorsqu'il sentit soudain la tête de Granger se poser sur son épaule. Réprimant à nouveau une grimace de dégoût, il se tourna vers elle et réalisa avec soulagement qu'elle ne parlait plus. En revanche, elle s'était remise à pleurer. Un mal pour un bien.

Il poussa un long soupir et se concentra pour s'empêcher d'avoir tout réflexe malheureux pouvant entraîner la destruction totale et immédiate de la boîte crânienne de la Gryffondor.

« Harry, qu'est-ce qu'il faudrait que je fasse, selon toi ? », sanglota Granger, dont les larmes coulaient abondamment sur la manche du jeune homme.

Draco n'ayant absolument rien écouté depuis un bon moment, opta pour une réponse vague. « Qu'est-ce que tu veux que je te dise ? », fit-il, tandis que Granger décollait sa tête de son épaule. « Un de perdu, dix de retrouvés. Bon, peut-être pas dix en ce qui te concerne. Mais je connais au moins deux gars qui seraient ravis de te faire oublier We- euh, Ron. »

Granger renifla. « Hein ? », fit la jeune fille en le dévisageant sans comprendre.

« Théodore Nott, par exemple ! », reprit Draco avec un rictus. « Je suis sûr qu'il ne l'avouerait jamais devant Malfoy, mais j'ai entendu Pansy Parkinson dire à Bulstrode que Hestia Carrow du Club de Slug lui avait dit que Nott aurait avoué à Cormac McLaggen, au cours d'une soirée arrosée, que lui aussi en pinçait pour toi. »

Silence. Granger le regardait avec des yeux ronds comme des soucoupes.

« En clair, Nott a dit à McLaggen qu'il avait un faible pour toi », reprit Malfoy, pensant que la raison pour laquelle Granger le dévisageait ainsi était le manque de clarté de sa précédente phrase. « Et Hestia l'a entendu, elle l'a dit à Parkinson, qui l'a dit à Bulstrode et- »

« Harry, depuis quand tu te prends pour Gossip Girl ? », fit la Gryffondor avec un début de sourire.

« Qui ? », fit Draco, par réflexe. Avant de réaliser son erreur. La seconde suivante, la baguette de Granger était pointée entre ses deux yeux et sa propriétaire n'avait pas l'air content du tout.

« Tu n'es pas Harry ! », gronda Granger, tandis que Draco reculait de quelques pas en levant les mains au plafond. « Qui es-tu ?! »

« Quoi ? Mais enfin, G… Hermione, qu'est-ce que tu racontes ? », tenta misérablement Draco, avant de refermer précipitamment la bouche. Les yeux de Granger lançaient littéralement des éclairs.

« Qui que tu sois, tu as trois secondes pour me dire qui tu es et qu'est-ce que tu as fait d'Harry ! », menaça-t-elle en approchant, menaçante. « UN ! … »

« Granger, attends, je vais t'expliquer ! », balbutia Malfoy en continuant de reculer en direction de la sortie.

« TROP LONG ! DEUX …. »

« Baisse cette baguette, on va discuter calmement… »

« OU EST LE VRAI HARRY ? DEUX ET DEMI… », aboya Hermione.

« MAIS ENFIN QU'EST-CE QU'IL SE PASSE, ICI ? », fit une voix furieuse derrière Hermione. Celle-ci se retourna et Malfoy ne fut jamais aussi heureux de voir débarquer l'acariâtre maîtresse des lieux, Mme Pince. « MISS GRANGER, voulez-vous bien baisser votre baguette, par Merlin ! C'est un lieu d'étude, ici, pas une foire ! Sortez avant que je ne vous mette en retenue tous les deux ! », s'égosilla la bibliothécaire.

Malfoy ne se le fit pas dire deux fois. Il tourna les talons et détala en direction de la sortie, mais c'était sans compter la ténacité de Granger, qui le suivit de toute la force de ses petites jambes. Elle finit par le rattraper au détour d'un couloir et brandit de nouveau sa baguette dans son dos. « Hep ! On n'a pas fini ! », lança-t-elle. « Petrificus Totalus ! »

Le corps de Draco (ou plutôt celui de Potter) s'immobilisa aussitôt, à l'exception de ses yeux, et Hermione vint se planter juste devant lui. Son air furieux ne présageait rien de bon. « Bien, maintenant que tu es tout ouïe, tu vas répondre à mes questions. Bouge les yeux de haut en bas pour dire oui et de gauche à droite pour non. Tu as compris ? »

Draco acquiesça en levant et baissant les yeux deux fois.

« Est-ce que le vrai Harry va bien ? », demanda Hermione. Haut-bas fut la réponse. La jeune fille poussa un soupir de soulagement. « Est-ce qu'il est encore à l'intérieur de l'école ? » Même réaction. « Est-ce que tu as utilisé du Polynectar pour prendre son apparence ? »

Cette fois, les yeux émeraude de Potter bougèrent de gauche à droite. Hermione fronça les sourcils. « Pas du polynectar ? », marmonna-t-elle, pensive. « Est-ce que tu es aussi élève ici ? » Haut-bas. « Est-ce que tu es dangereux ? » Gauche-droite. Comme si j'allais lui dire, si c'était le cas…, pensa Draco en se retenant de lever les yeux au ciel.

La Gryffondor réfléchit. « Ok, je vais te libérer à condition que tu me dises absolument toute la vérité. Sinon… je te ferai regretter d'être né, compris ? »

Draco fit bouger plusieurs fois ses yeux de haut en bas.

« Finite Incantatem », marmonna-t-elle, sans pour autant baisser sa baguette par la suite. Tenant Draco en respect, elle lui fit signe d'avancer jusqu'à une alcôve dissimulée derrière une tapisserie et qui donnait sur un balconnet à l'extérieur. Hermione referma la porte-fenêtre derrière eux et croisa les bras sur sa poitrine.

« Ton nom », dit-elle simplement, les yeux plissés.

Draco poussa un long soupir. « Granger, arrête de jouer les bad ass, ça ne te va pas du tout… », lâcha le Serpentard infiltré en accentuant son intonation traînante. La jeune fille dévisagea un instant son « meilleur ami » avec stupeur, puis ouvrit grand la bouche.

« Malfoy ?! », s'exclama-t-elle, bouche bée. L'autre répondit par un hochement de tête las. « Mais … mais qu'est-ce qu'il s'est passé ? Où est Harry ? »

« C'est une histoire pénible, Granger et je ne suis vraiment pas sûr d'avoir envie de la raconter pour le moment », maugréa-t-il en faisant un geste en direction de la porte-fenêtre. Mais la jeune fille pointa de nouveau sa baguette sur lui, avec une expression furieuse. « Bon, disons que tu m'as convaincu… », se dégonfla le Serpentard en reculant de nouveau.

« Sans blague », gronda Hermione sans cesser de le menacer de sa baguette.

Avec un soupir exaspéré, Draco enfouit ses mains dans les poches du jean trop large et vieillot de Potter, puis détourna le regard. « Il y a eu un problème avec la potion pendant notre retenue », répondit-il en omettant de prononcer le mot « sabotage ». « Il semblerait que Potter et moi-même avons échangé nos corps. Slughorn dit que ce sera temporaire, mais en attendant… il trouve que vivre dans la peau de l'autre fait une excellente punition. »

Hermione écarquilla les yeux. « Tu es en train de me dire… qu'en ce moment-même, Harry est seul au milieu d'une meute entière de Serpentards ? »

Draco poussa un grognement. « Tu crois pas que t'exagères un peu, Granger ? Ce n'est pas comme s'ils allaient le bouffer tout cru, ton Potter. »

Le silence retomba et au loin dans la nuit, Draco entendit le léger crissement d'un grillon. Soudain, Granger sembla réaliser quelque chose et sa bouche forma un gigantesque « o ».

« Oh Merlin et moi qui t'ai déballé pendant vingt minutes l'intégralité de ma vie sentimentale… », gémit la jeune fille en passant ses mains dans ses cheveux hirsutes.

« Si ça peut te rassurer, Granger, je n'ai absolument rien écouté. Ou très peu », rétorqua-t-il en levant les yeux au ciel. « Et si je peux me permettre, il s'agirait plutôt d'un désert sentimental, que d'une vie… »

« Je croyais que tu n'avais rien écouté », le coupa Hermione, furieuse.

« J'ai dit très peu », fit précipitamment Draco en reculant d'un pas.

La Gryffondor le fusilla du regard, puis se frotta énergiquement le visage. « Bon, on ne peut pas rester là sans rien faire, il faut qu'on aille voir si Harry va bien ! »

~o~

« Bon, tu me la poses cette grosse blinde, histoire que je puisse distribuer ? », s'impatienta Blaise en poussant un long soupir. Comme « Malfoy » ne réagissait pas, Blaise se servit lui-même dans la pile de pièces pour poser deux Noises au centre de la table. « Bon sang, mais t'es vraiment à l'ouest ce soir… », maugréa l'Italien, avant de distribuer deux cartes à l'ensemble des joueurs, ainsi qu'à lui-même.

A la gauche d'Harry, Goyle grogna et posa ses cartes au centre. « Je me couche », bougonna-t-il, très vite imité par Nott. Blaise avança 5 Noises, Crabbe suivit le mouvement, tout comme Miles Bletchley et Daphné Greengrass, la seule fille qui avait apparemment le droit de jouer à la table des garçons. Celle-ci regardait d'ailleurs Harry, les sourcils froncés et semblait attendre quelque chose de lui.

« Tu suis, tu relances ou tu te couches ? », demanda-t-elle avec une pointe d'agacement. Harry comprit que c'était sûrement à lui de jouer. Il décida d'observer d'abord quelques tours afin de comprendre le fonctionnement du jeu.

« Je me couche », dit-il en envoyant ses cartes rejoindre celles de Goyle et de Nott. Même s'il était bien décidé à perdre un maximum d'argent, il fallait qu'il connaisse les règles afin de faire illusion. Il n'aurait qu'à observer et se coucher pour les deux ou trois premières manches.

Effectivement, au bout de quelques tours, Harry comprit à peu près ce qu'il devait faire et misa pour la première fois.

« C'est pas trop tôt, tu daignes enfin rejoindre la partie… », railla Nott avant de distribuer le flop. Un quatre de pique, un six de carreau et un sept de trèfle. Harry baissa les yeux sur ses cartes. Il détenait un as de cœur et un huit de cœur. Autrement dit, rien. Parfait. Il saisit une pile entière de Gallions (dix, pour être plus précis) et la posa devant lui, sous les regards éberlués de ses camarades.

Goyle rabattit ses cartes et se coucha en grognant. Nott plissa les yeux et suivit, tout comme Blaise, Crabbe, Miles et Daphné.

« Il bluffe », marmonna Blaise en l'analysant. « Il a rien du tout. »

« Qu'est-ce que tu en sais ? », fit Harry, mal à l'aise de s'être fait repérer aussi vite.

« Une intuition », répondit Blaise, tandis que Nott ajoutait le turn. (Un roi de pique. Toujours rien.) « J'ai remarqué que t'as l'air con quand tu bluffes. Et là, t'as l'air très très con. »

Miles ricana en voyant « Malfoy » froncer les sourcils. La remarque de Blaise sembla redonner un peu de courage aux autres, qui misèrent à qui mieux mieux. Nott abattit la dernière carte, le river. Un cinq de carreau. Harry regarda ses cartes. Il n'en avait pas deux pareilles, encore moins trois. Pas de couleurs identiques (du moins pas en quantité suffisante), à priori rien de bien folichon. Il ajouta une autre pile de Gallions, tandis que les autres s'empressaient de l'imiter sous le regard narquois de Blaise. Harry abattit ses cartes et au lieu d'un large sourire sur le visage de Zabini, il vit celui-ci se décomposer littéralement.

« C'est pas vrai, merde », fit l'Italien tandis que Daphné et Miles jetaient leurs cartes sur la table avec des grognements de dépit. « Il a une suite, j'y crois pas. »

« Hein ? », fit Harry, décontenancé. Quoi, j'ai gagné ? Minute, non c'était pas ça, le plan ! Je voulais perdre, moi !

« Zabini, je te retiens, toi et tes intuitions merdiques ! », gronda Miles en poussant les piles de Gallions vers Harry, qui n'en revenait toujours pas.

Blaise récupéra les cartes dans les mains de Nott et marmonna quelque chose d'incompréhensible, tout en regardant le blond réarranger ses tas de pièces d'un air étrangement perplexe.

A quelques couloirs de là, Hermione Granger et Draco Malfoy (sous les traits d'Harry Potter) dévalaient les escaliers à toute allure, traversaient le patio et s'engouffraient dans l'obscurité des cachots en direction de la salle commune de Serpentard.

« Granger, attends ! On ne peut pas rentrer comme ça, on va se faire lyncher ! », protesta Draco en essayant tant bien que mal de rester à sa hauteur.

« Qu'ils essaient un peu pour voir », maugréa Hermione, les cheveux en bataille d'avoir couru. « Mot de passe ! », aboya-t-elle en s'arrêtant net devant la porte.

« Granger, c'est complètement idiot ce que tu es en train de faire, par Merlin, réfléchis ! », tenta-t-il de la raisonner, mais la jeune fille le fusilla du regard.

« Mot. De. Passe », articula-t-elle en brandissant sa baguette en direction de Draco. Celui-ci écarquilla les yeux de terreur.

« Héritage », couina-t-il en reculant d'un pas. La porte s'ouvrit en grinçant. Hermione regarda le panneau de bois ouvert, puis le visage terrifié qui appartenait d'ordinaire à son meilleur ami, et roula des yeux.

« Vous ne pouviez pas faire plus cliché comme mot de passe ? », railla-t-elle à mi-voix. « Pourquoi pas Pureté, tant qu'on y est ? Ou Frappez-moi, je suis un gros raciste. »

« Déjà fait », répondit Draco par réflexe. Hermione lui jeta un regard perplexe. « Pour Pureté, je veux dire. Pas l'autre… », ajouta Draco le plus sérieusement du monde.

La Gryffondor secoua la tête et poussa un long soupir avant de passer le seuil.

« Non mais je rêve ?! », fit une voix furieuse à l'intérieur de la salle commune. Draco reconnut sans difficulté le timbre de voix de Blaise et suivit aussitôt Granger à l'intérieur. « Qu'est-ce qu'ils font là, eux ? »

Harry se retourna sur sa chaise et vit qu'Hermione et « lui-même » se tenaient debout au milieu de la pièce, entourés de Serpentards visiblement en colère. Il eut alors un éclair de génie.

« On se calme, c'est ma faute ! », lança-t-il à la cantonade. « J'avais besoin de Potter et de … sa Miss Je-Sais-Tout pour un truc en relation avec notre retenue. Je leur ai filé le mot de passe. »

Bien joué, Harry, pensa Hermione en remerciant intérieurement son ami d'avoir su mentir aussi vite.

« Tu leur as filé le mot de passe ? », s'égosilla Blaise, qui n'en croyait pas ses oreilles.

« Quoi ? C'est pas la fin du monde », se défendit Harry en haussant les épaules. « Il suffira d'en changer, c'est tout. »

Théodore jeta un bref regard en direction d'Hermione. Puis il se leva de sa chaise, les joues un peu roses, et se tourna vers Blaise. « Ouais, il a raison, y'a pas mort d'homme, vieux… On a qu'à dire que ce soir, c'est la trêve. »

Blaise lui jeta un regard las. « Tais-toi, Théo, quelque chose me dit que tu manques cruellement d'objectivité, là », railla-t-il en levant les yeux au ciel.

Hermione jeta un regard en direction de Nott, se remémorant ce que Malfoy lui avait dit juste avant qu'elle ne le démasque. Le jeune homme surprit son regard et esquissa un sourire pincé avant de se rasseoir illico. La Gryffondor se retourna vers Malfoy, qui lui adressa un regard appuyé dans le plus pur style « Qu'est-ce que je te disais ! ». Hermione leva les yeux au ciel et reporta son attention sur Harry, assis avec les Serpentards.

« Mais … », commença-t-elle en plissant les yeux. « Vous êtes en train de jouer au poker ! », s'exclama-t-elle en se précipitant vers la table recouverte de pièces d'or, d'argent et de bronze. « Avec de vrais Gallions, en prime ! » Elle chipa une pièce en or dans la pile d'Harry, qui fit la grimace.

Daphné Greengrass laissa retomber sa tête en arrière et poussa un grognement. « Et qu'est-ce que tu comptes faire, Granger ? Nous enlever des points ? Je te signale que tu ne devrais même pas être ici, en théorie ! »

Hermione referma la bouche aussi sec, piquée au vif, et Draco dissimula un sourire narquois derrière son écharpe rouge et or. Harry arracha le Gallion des mains d'Hermione et se leva précipitamment. « Bon, je vais régler deux trois trucs avec eux et je reviens », marmonna-t-il à l'attention des serpents, qui fusillaient toujours Hermione et celui qu'ils prenaient pour Potter du regard.

Il entraîna les deux intrus hors de la salle commune et referma la porte. Dès qu'ils furent seuls, Harry empoigna Hermione par les épaules et la secoua comme un prunier. « Hermione, enfin ! Tu as perdu la tête ? Tu veux qu'on se fasse tous démolir le portrait ? Et comment tu es au courant de toute cette histoire, d'abord ? J'ai du mal à croire que Malfoy t'ait tout raconté… »

Hermione croisa les bras sur sa poitrine et dévisagea le blond. « Malfoy fait un très mauvais Harry Potter, si tu veux mon avis… je l'ai démasqué assez vite. »

« Qu'est-ce qui l'a vendu ? », ironisa Harry. « Il a insulté un né-Moldu ? Il a fait une crise d'urticaire à cause de la déco en rouge et or ? »

« Il ne connaît pas Gossip Girl », répondit Hermione avec un soupir.

« Sérieux ? », fit Harry en regardant Malfoy avec une expression étrange. Ce-dernier lui adressa un geste grossier du majeur et Harry haussa un sourcil amusé.

« Trêve de plaisanterie », reprit Hermione. « Il faut qu'on te sorte de là ! Tu ne peux pas rester toute une nuit avec ces gens, c'est trop dangereux ! »

Malfoy roula des yeux, se sentant légèrement visé même s'il portait temporairement un uniforme des lions.

« En fait, je crois que je me débrouillais pas si mal… jusqu'à ce que vous débarquiez », protesta Harry en jetant un regard inquiet en direction de la porte. « Sérieusement, qu'est-ce qui vous a pris ? »

« Harry, je m'inquiétais pour toi ! », protesta Hermione. « Mais manifestement j'avais tort de me faire du mauvais sang. J'avoue que je ne m'attendais pas vraiment à te trouver au milieu d'un tripot improvisé. Il ne manquait plus que les cigares et le whisky pour compléter le tableau. »

« Jamais avant vingt-trois heures trente », intervint benoîtement Draco, tandis qu'Hermione et Harry s'interrompaient pour lui jeter un regard scandalisé. « Quoi, qu'est-ce que j'ai dit ? »

Hermione poussa un soupir et reporta son attention sur Harry. Mais celui-ci prit la parole avant qu'elle n'ait pu reprendre son sermon. « Hermione, tout se passe bien », la rassura-t-il. « Ils me prennent tous carrément pour lui. Ils pensent juste que je suis un peu fatigué après ma soirée de cauchemar en retenue avec Saint-Potter, mais à part ça, rien à signaler. Je pense pouvoir m'en sortir. »

« Oh, Harry… », gémit Hermione en le serrant dans ses bras. « J'irais dès demain matin voir Slughorn pour trouver une solution, si jamais tout n'est pas rentré dans l'ordre. En attendant, sois prudent, d'accord ? »

« Promis », lui assura le Survivant en lui rendant son étreinte.

Malfoy poussa un grognement. « Potter, lâche-la, j'aimerais si possible ne pas avoir à brûler cette chemise demain… »

Harry leva les yeux au ciel et Hermione le lâcha, fusillant Draco du regard. C'est alors que la porte de la salle commune s'ouvrit et la tête de Théodore Nott apparut dans l'embrasure.

« Euh dites … », marmonna le jeune homme, mal à l'aise. « Y'a Blaise qui dit que si tu ne reviens pas jouer, il se servira directement dans tes Gallions… »

« J'arrive », répondit Harry en voyant du coin de l'œil Malfoy à deux doigts de s'étouffer.

C'est alors qu'il se passa quelque chose de parfaitement inattendu. Nott passa une main dans ses cheveux noirs et, rougissant, se tourna vers les deux autres. « Ça vous dit, une petite partie ? »

Les deux élèves en rouge et or le dévisagèrent comme s'il était devenu fou.

« On n'a pas d'argent à miser », répondit Draco avec une pointe de déception. Il avait toujours adoré ses jeudis poker avec ses amis et l'idée d'en manquer un lui était insupportable.

« C'est pas un problème, Potter », fit Harry en se tournant vers Malfoy, un étrange sourire aux lèvres. « Je suis tellement riche que je ne sais même plus quoi faire de mon argent », ironisa-t-il tandis que Malfoy le fusillait du regard. « Je peux bien vous en prêter un peu… »

« Har- euh Malfoy ! », le réprimanda Hermione avec une expression courroucée. « Ce n'est pas le problème ! Les jeux d'argent sont interdits dans l'enceinte de- hmmm ! » La main de Draco se plaqua aussitôt sur sa bouche.

« Avec plaisir, Malfoy », fit Draco en esquissant un sourire carnassier. Hermione émit une autre série de « hmmmm ! » étouffés et Nott lui jeta un regard inquiet. « Ne t'en fais pas pour elle », reprit Draco en poussant la Gryffondor à l'intérieur de la salle commune. « On n'aura qu'à l'attacher dans un coin pendant qu'on joue… »

« Sans oublier de la bâillonner », plaisanta Harry en faisant mine de délacer sa cravate vert et argent. « Sinon elle va nous réciter l'intégralité du règlement intérieur avant que je réussisse à plumer Blaise… »

La main de Draco toujours plaquée sur sa bouche, Hermione leva les yeux au ciel et les deux ennemis ricanèrent à l'unisson. Théodore leur lança un regard perplexe, puis les suivit, entraînant Hermione de son côté de la table dès que Draco l'eut relâchée, de peur qu'ils ne mettent leur menace à exécution.

~o~

« Qui aurait pu croire que Potter soit un aussi bon joueur de poker ? », maugréa Miles en quittant la table d'un air dégoûté.

S'il savait …, pensa Draco en faisant des piles bien régulières avec toutes celles qu'il venait de rafler. Bien qu'ayant commencé la partie avec les quelques pièces que « le vrai » Potter avait bien voulu lui donner (de son propre argent, quelle ironie), il était devenu en moins d'une heure le joueur dominant, éliminant tour à tour Goyle, Crabbe et finalement, Miles Bletchley.

« Donc, si je comprends bien : le carré est plus fort que la couleur et la suite ? », demanda Hermione, en arborant l'air concentré qu'elle réservait généralement aux salles de classe.

« C'est ça ! », répondit Théodore, tandis que Blaise et Daphné Greengrass se jetaient des regards appuyés en les écoutant parler. « Ensuite, la quinte flush et la quinte royale sont les deux seules combinaisons qui soient plus fortes que le carré. »

Hermione, qui avait refusé catégoriquement de participer à cette énième violation du règlement intérieur, avait en revanche été ravie de constater que Nott ne rechignait pas à répondre à la moindre de ses questions. Mieux : il le faisait avec plaisir et pédagogie, si bien qu'Hermione ne communiquait désormais plus que par phrases interrogatives.

« Tout de même, vous pourriez jouer autre chose que de l'argent… », marmonna-t-elle, tandis que Blaise levait pour la centième fois les yeux au ciel et que Théodore réprimait un petit rire. « Je ne sais pas, moi… des Dragées surprise de Bertie Crochue ou des Chocogrenouilles ? »

« Oh mais qu'elle est mignonne… », railla Daphné en faisant claquer sur la table deux Gallions en guise de petite blinde (Miles ayant à son tour quitté la partie, les mises devaient encore augmenter). « Et dis-moi, princesse des Lions, qui donc se balade avec 200 Chocogrenouilles dans son portefeuille, hmmm ? Sans parler de l'aspect très peu diététique d'une telle mise… »

Hermione la fusilla du regard, vexée, mais ne répondit pas.

« Tu veux faire la croupière ? », proposa gentiment Nott en lui tendant le paquet de cartes.

Hermione en mourait d'envie depuis plusieurs tours déjà, mais une petite voix moralisatrice ne cessait de lui faire la leçon dans un coin de son cerveau. « Je ne sais pas… », hésita-t-elle. « Et si on nous surprenait, on aurait des ennuis… »

Théodore lui fourra la pile dans les mains, laissant ses doigts vagabonder un petit plus longtemps que nécessaire sur les siens et lui adressa un large sourire. « Tu t'en sortiras très bien. »

« Et puis franchement, qu'est-ce qu'ils pourraient nous faire ? Nous fouetter ? », ricana Blaise en secouant la tête.

« Sans parler que le vieux fou serait probablement ravi de voir nos deux maisons ''fraterniser'' », renchérit Draco en mimant des guillemets avec ses doigts et oubliant un instant qu'il n'avait plus l'air d'un Serpentard. Hermione lui jeta un regard effrayé, tandis que Potter s'était figé et que les autres le regardaient d'un air perplexe. « Euh… enfin, quand je dis le vieux fou, c'est affectif. Dumbledore est sans conteste le plus grand directeur que Poudlard ait jamais connu. C'est un génie. Un visionnaire. Un grand homme… »

« Arrête, Potter, je vais vomir dans ma bouche », ricana Daphné, tandis que les autres serpents s'esclaffaient. Hermione poussa un discret soupir de soulagement en voyant que tout le monde était passé à autre chose et en profita pour distribuer les cartes.

« Hé hé hé, devinez quelle heure il est… », marmonna Blaise en jetant un œil en direction de la pendule accrochée au-dessus de l'immense cheminée de la salle commune.

« 23h30… », répondit Draco en suivant son regard. Il tenta de dissimuler son sourire, après tout il était Harry Potter et Harry Potter n'était pas sensé savoir ce qu'il se passait le jeudi soir après 23h30.

« Exactement », fit l'Italien en se levant, un sourire machiavélique sur les lèvres. Puis il tapa dans ses mains en se tournant vers les derniers élèves installés dans la salle commune. « Allez, les jeunes, c'est l'heure d'aller au pieu. Du balai ! »

« Va te faire foutre, Zabini ! », lui répondit effrontément un garçonnet d'une douzaine d'années, assis en tailleur sur l'un des fauteuils de cuir noir. Daphné éclata d'un rire aigu tandis que Blaise approchait d'un air menaçant. La quasi-totalité des élèves quitta précipitamment les lieux pour regagner leurs dortoirs.

« Je te demande pardon ? », fit l'Italien en se plantant face au jeune récalcitrant.

Le gamin semblait avoir perdu quelque peu de sa contenance et il se mit à bégayer horriblement. « C'est vrai quoi … tous les jeudis soirs, c'est la même chose… dans salle commune, il y a « commune », on y reste si on veut… »

Hermione se retourna sur sa chaise, les sourcils froncés. « Qu'est-ce qu'il te prend, Zabini ? Laisse ces élèves tranquilles ! Tu veux que je te colle un rapport ? » Quelque chose heurta alors le crâne d'Hermione et la jeune fille se retourna pour constater que Daphné lui jetait des Noises sur la tête.

« Merlin, regardez-moi ça, les pièces tiennent toutes seules dans sa tignasse ! », railla la Serpentard tandis que Draco éclatait de rire. Cela sembla décontenancer quelque peu Daphné de voir Harry Potter rire de sa blague tandis que Draco Malfoy restait de marbre.

« Arrête, Daphné », marmonna sombrement Théodore en lui renvoyant ses propres projectiles récupérés dans les cheveux de la Gryffondor.

Pendant ce temps, Blaise avait empoigné le petit Serpentard récalcitrant par l'arrière de son pull et l'avait envoyé valser en direction des dortoirs, avant de refermer la porte du couloir. « Je t'en prie, Granger, fais-le ton rapport ! Mais il faudra également que tu expliques ce que tu fais dans une salle commune qui n'est pas la tienne, une demi-heure après le couvre-feu, en train de participer à un jeu d'argent interdit par le règlement, sans compter ce qu'on s'apprête à faire dans environ dix à quinze secondes… En gros, parle et tu es foutue autant que nous. »

Hermione fronça les sourcils, inquiète. « Quoi ? Qu'est-ce que vous- » Elle vit Zabini grimper sur un fauteuil près de la cheminée, faire basculer l'un des portrait accrochés au mur et révéler une porte cachée. Daphné repoussa sa chaise et sautilla allègrement jusqu'à Blaise, réceptionnant les verres, les bouteilles et autres denrées illicites qu'il sortait de leur cachette.

« Ben voyons, tu es à Serpentard, Granger, à quoi tu t'attendais… ? », fit Harry en imitant à la perfection les intonations traînantes et moqueuses de Malfoy. Hermione se retourna et il lui jeta un regard appuyé.

La Gryffondor regarda, consternée, les verres et les bouteilles d'alcools divers s'entasser dans les bras de Daphné, puis sur la table lorsque celle-ci déversa son chargement devant eux.

« Personnellement », fit Harry imitant à s'y méprendre le ton méprisant du vrai Malfoy, « je ne suis pas hyper chaud pour partager notre précieuse marchandise avec des Gryffondors. » Hermione lui jeta un regard soulagé pour le remercier de ce sauvetage très intelligent, mais c'était sans compter sur Nott. Le brun se leva et frappa du poing sur la table, détruisant les piles parfaites de Gallions qui s'amoncelaient devant Draco.

« Tu fais chier, Malfoy », s'emporta Nott, croyant s'adresser au véritable Draco Malfoy. « Y'en a marre de tes préjugés à la con. Tu ne peux même pas faire un effort pour une seule soirée !? » Nott vit alors Harry Potter le regarder avec des yeux ronds (sans se douter qu'il s'agissait en fait du Serpentard) et rougit légèrement. « Non, mais c'est vrai quoi … Il est sans arrêt pénible avec ça. Et pourtant, regardez … » Nott écarta les bras. « On passe pas une si mauvaise soirée que ça, tous ensemble, non ? »

Un lourd silence tomba dans la pièce. Nott regarda tour à tour tous les occupants de la tablée. Daphné lui jetait un regard dubitatif, haussant un sourcil parfaitement épilé. Blaise s'était figé, une bouteille de Whisky Pur Feu à la main et un verre dans l'autre. Potter le fixait toujours avec des yeux ronds, tandis que (ô surprise !) Malfoy semblait à présent lui sourire un peu. Et enfin, Hermione… Hermione souriait de toutes ses dents.

Théodore se rassit, soudain rouge comme une tomate, pendant que Blaise et Daphné échangeaient des sourires narquois.

« Ok, juste un verre alors… », céda Hermione, tandis que Théodore la gratifiait aussitôt d'un large sourire.

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FIN DE LA PREMIÈRE PARTIE

Bon, on se doute bien que ça ne va pas être « juste un verre ». J'espère que ce plantage de décor vous a donné des idées ! Alors, on se la fait en mode Very Bad Trip ? J'ai très envie de découvrir vos idées et vos reviews, pour pouvoir me lancer dans la suite de cette aventure. Si jamais il y en a qui sont carrément inspirés pour écrire TOUTE la suite, pas de problème ! Mentionnez-le simplement dans le résumé de votre publication et prévenez-moi par MP pour que je vienne lire immédiatement votre création et reviewer à mon tour ! :D

J'ai hâte de voir tout ça !

Bisous

Xérès