Bonjour, je suis ravie de vous présenter ma nouvelle fanfiction, qui sera cette fois sur le thème de LOTR. Cela faisait un moment que j'avais arrêté d'écrire, laissant de côté plusieurs histoires non-abouties. Mais après avoir vu le Hobbit au cinéma (^^) et m'être replongé dans les livres de Tolkien, j'ai découvert un univers d'une richesse incroyable, et cette fiction m'est venue naturellement un soir de vacances. Je l'ai écrite dans un temps record de 2 semaines, donc pas de crainte à avoir pour la suite, elle sera postée !

J'espère que cette fiction vous plaira, et que vous aimerez mon personnage OC. Toutes les références aux légendes de la Terre du Milieu, lieux et les noms des personnages elfiques/Maiar/Valars sont réels, mise à part pour quelque uns de ma création comme la famille d'Elanor ou le village de Lasdren. Sinon tout le reste est tiré des livres de Tolkien.

Je vous ferais un petit lexique à chaque fois pour vous y retrouver.

N'oubliez pas de laisser des commentaires !

Bonne lecture !

gallica.


Disclamer : Les personnages et lieux de cette histoire sont la propriété de J.R.R. Tolkien et de la Warner. Seul le contenu original de cette fanfiction et les personnages inventés (OC) m'appartiennent, et ne peuvent être copiés ou vendus à but lucratif sur d'autres plates-formes/supports.


Informations utiles avant de commencer :

Morgoth : crée par Eru Illuvatar(le grand créateur). Il est un des Valar, maître de Sauron, qui fit régner la terreur pendant le premier âge sur la Terre du Milieu. Il s'opposa violemment aux neuf Valars, avant d'être enchainé par ceux-ci dans les tréfonds du monde. Selon les chants, il parviendra à se libérer peu avant la fin du monde. Ce fut Morgoth qui créa toutes les créatures maléfiques existantes dont les orques, les dragons, les trolls, loups garous… etc.

Valar : Manwë(roi des valar et de l'air), Varda(reine des étoiles, compagne de Manwë), Ulmo(roi des eaux, mers et océans), Aulë(roi du feu et de la terre, créateur des nains) Yavanna(reine de la nature, compagne de Aulë), Oröme(grand chasseur, guide des premiers des elfes), Mandos(juge des morts), Nienna(le deuil est son domaine, représente la souffrance et inspire les sentiments humains).


Chapitre 1 : Les monstres de Morgoth

L'air caressait doucement son visage, soulevant ses cheveux bruns au grès du vent. Elanor soupira et s'étira dans l'herbe. Le printemps n'avait pas été aussi agréable depuis des années.

Depuis quelques temps, l'air s'était alourdit en Terre du Milieu et il n'y faisait plus bon vivre. Le soleil s'était fait plus rare et les forêts s'étaient assombries, et du Sud venait la rumeur que les attaques d'orques se multipliaient contre les cités des hommes. Elanor écoutait les conversations des voyageurs qui traversaient l'Eriador, s'arrêtant dans la seule auberge des environs où elle travaillait, et qui racontaient de nombreux récits de combats sanglants. On disait que le Gondor guerroyait depuis plus de dix ans contre le Mordor, et que sa défense ne tenait à présent plus qu'à un fil. Le Rohan purgeait également ses terres des orques, et il était le seul rempart qui protégeait l'Eriador, cependant il n'était plus rare d'entendre que les orques venaient et allaient sur les terres du Nord.

Elanor fixa le soleil, et ferma les yeux, aveuglée par son éclat. Le danger était à présent partout. Elle pensa au fait qu'elle était partie il y a plus d'une heure dans la forêt pour aller cueillir des herbes et des champignons et que Maggi devait l'attendre. Elle l'imaginait déjà taper du pied devant la porte du Cheval Blanc, lui jappant de se dépêcher de rentrer et de préparer les tonneaux de bière pour ce soir.

Elanor grogna et se retourna sur le ventre. Ce n'est pas qu'elle n'aimait pas son travail, mais elle ne pouvait résister de passer cet après-midi ensoleillé, sans pouvoir s'arrêter dans la forêt à l'ombre d'un hêtre. Elle aimait les arbres, et l'odeur de leurs feuilles fraiches après la pluie. Mais ce qu'elle préférait par-dessus tout c'était le contact des rayons du soleil sur sa peau, et les senteurs parfumées de l'herbe et des fleurs au printemps qui lui montait au nez lorsqu'elle se reposait.

Elle dut se faire violence pour se relever et reprendre la route en sens inverse. Elle épousseta l'herbe sur sa robe, et ramassa son sac remplis d'herbes et de quelques champignons. Elle en avait ramassée assez pour que Maggi lui fiche la paix.

Un quart d'heure plus tard, elle sortit enfin de la lisière de la forêt et se retrouva dans le village de Lasdren, qui était son village natal. Comme elle s'y attendait, Maggi l'attendait d'un pied ferme devant la porte de son auberge, le visage légèrement empourprée.

- Tu en as mis du temps !

- Désolé, je me suis égarée du sentier, répondit Elanor.

- Tu te fiches de moi ? Tu te perds souvent ces temps-ci, ne me raconterait pas tu des sottises ?

Elanor ouvrit la bouche et ne sut quoi répondre. Maggi, sachant pertinemment qu'elle n'avait pas d'excuse soupira, et lui ordonna d'entrer.

- Entres ! Toi et tes arbres. Si tu n'avais pas été humaine j'aurais pu te confondre avec un de ces satanés elfes de l'ancien âge.

Elanor lui tendit le sac, et Maggi s'en empara vivement. Elle regarda son contenu, puis ne trouvant rien à dire passa la porte de l'auberge, lui tournant le dos. Elanor entra à sa suite, et Maggi lui lança ses directives.

-Va laver les tables, et ensuite prépares les tonneaux. Dépêches-toi, nos premiers clients vont bientôt arriver.

Elanor s'exécuta, contente s'échapper à une nouvelle dispute. C'était quelque chose qui était devenu commun depuis un moment déjà. Maggi était sa mère adoptive, elle l'avait recueilli quand elle n'avait que neuf mois, et la gardait depuis avec elle à son auberge du Cheval Blanc. Elanor était orpheline, et elle n'avait que de vagues souvenirs de sa vraie mère avant sa mort. Elle ne connaissait que son nom : Rain. Celle-ci avait louée une chambre chez Maggi, juste avant de se faire emporter par la maladie lors d'un hiver très vigoureux. Par pitié, ou par la force des choses, Maggi l'avait gardée faute de pouvoir la donner à l'un de ses clients. Elanor ne doutait pas qu'elle avait dut essayer sans succès.

Elle ne lui en voulait pas. Elle comprenait qu'un enfant à charge était un fardeau en plus pour elle, car elle avait à cette époque-là trois autres bouches à nourrir. Et sa famille n'était pas très riche. Son mari était batelier et faisait traverser les marchandises sur le Brandevin de Bree jusqu'à la côte. Il gérait autrefois l'échoppe avec sa femme, mais depuis quelques années, les clients s'étaient faits plus rares. Le besoin en argent était devenu un problème à résoudre, et Nedd avait dut laisser la gestion de l'auberge à sa femme pour partir sur les fleuves, travailler comme marchant.

Cela remontait à il y a cinq ans, et depuis, Maggi n'avait cessé de déverser toute sa frustration sur Elanor. Les enfants de Maggi, Hadrim, Uriel et Hadred étaient tous les trois partis de la maison. Uriel s'était mariée à un commerçant du village, elle travaillait de temps à autre à l'auberge, donnant un coup de main à sa mère. Les deux garçons étaient partis plus au Sud, près du flot gris. Elanor avait entendu dire que l'un avait fondé une ferme et que l'autre suivait les pas de son père comme batelier. Maggi n'en parlait pas beaucoup, mais elle n'était pas heureuse du choix de ses fils. Elles les voyaient très peu, et aucun d'eux n'avaient encore trouvé d'épouse.

Elanor trouvait que Maggie était parfois trop possessive, car il lui arrivait d'avoir des crises d'hystérie lorsque ses fils repartaient vers le Sud. C'était les moments où elle était la plus désagréable avec Elanor. Peut-être qu'elle aussi comprendrait ce sentiment, le jour où elle serait mère. Ca ne donnait cependant pas l'envie à Elanor de l'être.

Maggi ne cessait de la presser de se marier, la jugeant trop jolie et trop âgée du haut de ses vingt ans pour rester enfermée dans une taverne avec des hommes souls et des rodeurs du Nord. Mais Elanor s'accommodait à cette vie et aimait bien écouter les histoires de ces voyageurs, qui se révélaient parfois passionnantes. Par ailleurs, elle ne se sentait pas prête pour se marier, ni avoir la maturité suffisante pour fonder une famille.

Elanor en frissonnait rien que d'y penser. Maggi avait mis ça sur le compte de son caractère rêveur et aventurier, disant qu'elle aimait trop les contes de fée et qu'elle n'avait pas assez le pied dans la réalité.

Peut-être était-ce vrai.

Une heure plus tard, le premier client arriva. Un homme barbu et immense, taillé comme un colosse. Elanor se précipita pour l'accueillir et l'amener à une table. Elle lui posa une pinte de bière bien remplie et un plateau de viande et de fromage avant de s'éclipser derrière le comptoir. L'auberge du cheval blanc se remplit de ses occupants au fur et à mesure, au point qu'il ne resta plus que quelques tables de vides.

Maggi essuya un verre et lui adressa un grand sourire.

-Nous allons faire une bonne recette ce soir, lui dit-elle près de l'oreille pour couvrir les rires et les discussions bruyantes des clients.

Maggi pouvait se révéler être agréable, lorsqu'elle le voulait, pensa Elanor.

La clochette de la porte d'entrée sonna à nouveau, et la porte s'ouvrit. Un homme d'une haute stature, recouvert d'un capuchon entra. Elanor et Maggi le contemplèrent un moment, puis cette dernière se pencha vers Elanor en lui chuchotant :

- Vas vérifier nos réserves, et remonte un tonneau. Je crois qu'on en a plus.

Elanor hocha la tête, et se dirigea vers la cave tandis que Maggi allait accueillir le nouveau venu. Elle le fit asseoir au fond de la salle, et celui-ci alluma sa pipe pendant qu'elle préparait son ragout. Elanor entrevit à la lueur du feu ses yeux gris et ses cheveux bruns.

Elanor prit une lampe à huile et descendit la volée de marche menant au sous-sol. Elle se mit à compter les provisions et à énumérer les tonneaux qu'il restait.

- 2, 4, 5…

Ce n'était pas suffisant pour finir la semaine. Ni même les deux jours suivants.

Par ailleurs, il manquait quelques denrées, dont de la viande de porc salée. Elanor remonta tout en trainant un tonneau derrière elle à la force des bras. Comme d'habitude, le poids du tonneau tira sur son dos et ses épaules, et elle fit son possible pour garder l'équilibre dans l'escalier en plantant ses deux pieds fermement sur le sol. C'était un exercice difficile lorsqu'on était une femme de petite taille, cependant elle avait acquis l'expérience des années et remonta aisément le tonneau. Elle ne vit cependant pas la dernière marche, et son pied buta contre celle-ci la faisant basculer en arrière. Cette faute d'inattention faillit lui faire dégringoler l'escalier, mais une main masculine la rattrapa juste à temps, bloquant sa chute et celle du tonneau.

Elanor chancela et reprit son équilibre tandis que l'homme souleva le tonneau avant de le poser à côté d'elle. Elle tourna la tête et fut étonnée de voir l'homme brun qui se trouvait quelques minutes plus tôt à la porte d'entrée. Elle écarquilla les yeux lorsqu'elle le vit soulever le tonneau aussi facilement qu'une botte de foin.

- Est-ce que ça va ? demanda l'homme.

- Oui, merci, répondit-elle.

L'homme inclina la tête sur le côté. A présent qu'il était en face d'elle, Elanor pouvait le dévisager. Elle le reconnut immédiatement. Il s'agissait d'un des rodeurs du Nord, « Grands Pas » le surnommait-on. Il avait l'habitude de venir de temps à autre, même si ça faisait plusieurs mois qu'elle ne l'avait vu. Ses manières avaient toujours été élégantes, et s'il n'avait pas été ce rodeur que tout le monde connaissait, Elanor aurait pu le prendre facilement pour un noble seigneur. Il se murmurait de nombreuses histoires à son sujet, comme quoi il descendait d'une lignée de grands seigneurs aujourd'hui éteinte.

- Elanor !

Maggi arriva avec le ragoût de Grands Pas dans une main, et un plateau de pain dans l'autre, effarée de voir que sa fille adoptive avait perturbée son client.

- Excusez-là, messire. C'est une empotée.

Elanor fronça les sourcils et ouvrit la bouche avec l'intention de répliquer. Mais Maggi la devança.

- Depuis que je l'ai recueilli elle a toujours eu les pieds flasques. Que diriez-vous de vous rassoir, désirez-vous un peu de porc salée de la Comté ? Votre ragoût est prêt, le voici. Allons suivez-moi.

Le rodeur suivit Maggi jusqu'à sa table, écoutant poliment le babillage incessant de la patronne de l'auberge.

Lorsque Maggi revint, elle paraissait un peu plus apaisée, ayant apparemment oubliée qu'elle avait insultée sa fille adoptive devant le rodeur. Elanor en revanche ne l'avait pas oubliée, et était légèrement vexée. Elle déposa le tonneau derrière le comptoir, puis nettoya avec brusquerie quelques verres à l'aide d'un chiffon sale.

- As-tu compté nos réserves ? lui demanda Maggi.

- Oui.

Maggi tourna la tête vers elle, et haussa un sourcil.

- Et bien alors ?

- Il va nous manquer du porc salé, et il reste quatre tonneaux de bière brune. Incluant celui-ci, dit Elanor en pointant le tonneau à ses pieds.

- Ah, zut. Que dis-tu d'aller à Bree demain faire les provisions ? Peut-être même pourrait-tu même aller à Ouestefel, c'est un long voyage mais il me faut quelques provisions que je ne pourrais pas trouver à Bree. C'est bien plus loin au Sud, mais bon…

Maggi hésita quelques instants, mais Elanor s'empressa de hocher la tête.

- Oui, d'accord.

Elanor accueillit cette requête avec un sentiment de compensation, et dès alors retrouva le sourire. Maggi continua de la regarder discrètement, néanmoins soucieuse de sa décision.

Intérieurement, Elanor était heureuse de pouvoir s'éloigner de l'auberge pendant un moment. Il fallait un jour à cheval pour aller à Ouestefel, qui se trouvait au Sud à la frontière de l'Eriador avec le Rohan. Ce qui signifiait qu'elle ne serait pas de retour avant deux jours.

L'esprit plus léger, Elanor passa le reste de la soirée à servir les clients de l'auberge joyeusement. Maggi nota bien ce changement, mais ne lui en tint pas rigueur et préféra ignorer l'humeur de sa fille adoptive. Les hommes rirent et prirent plaisir de la compagnie de la jeune fille, la complimentant sur sa beauté et sa jovialité. Elanor s'installa au comptoir face à un petit groupe d'hommes, et ceux-ci se mirent à raconter leurs diverses frasques des mois passés.

Peu à peu la taverne se vida, et les clients montèrent se coucher. Grand-Pas était resté dans le fond de la salle toute la soirée, seul, comme à son habitude. Elanor ne le voyait jamais discuter avec les autres clients, et à chaque fois qu'elle demandait à Maggi la raison, celle-ci haussait les épaules :

- Il est un peu bizarre, tu sais.

Le lendemain, Elanor se prépara à l'aube pour le voyage. Maggi lui confia la recette de l'auberge de la veille pour acheter les provisions, et ajouta à sa liste des épices et quelques ustensiles. Elle attela leur seul cheval de trait qu'ils avaient, Finrod, à une charrette.

Elanor n'avait pris que le strict minimum, un bout de pain et du fromage, des affaires de rechange et des sous-vêtements dans un sac, sa bourse, et son épée. Une arme léguée par sa mère à sa mort, que Maggi lui avait transmis quelques années plus tôt lors de sa première course en solitaire. Malgré que sa mère adoptive ait un sale caractère et qu'elle lui rappelle souvent qu'elle n'était pas sa vraie fille, elle n'en était pas moins honnête.

Au lieu de s'approprier l'épée qu'avait laissée sa mère pour elle, elle l'avait transmise à Elanor lorsqu'elle eut atteint l'âge de seize ans. C'est à ce moment-là que la jeune fille avait commencé à faire des voyages vers Bree et Ouestefel.

Par ailleurs, même si elle ne le montrait pas, Maggi rechignait à l'envoyer seule aussi loin. La forêt n'était pas un endroit sûr pour une jeune fille seule, disait-elle. Autrefois, c'est son mari et ses fils qui partaient faire les courses pour l'auberge, mais à présent elle était seule, et elle n'avait plus d'autre choix que d'envoyer Elanor à sa place pendant qu'elle gardait le Cheval Blanc.

- Prends garde, ces forêts ne sont plus très sures à la nuit tombée.

- Oui, je sais. Je ferais attention.

Maggi l'embrassa sur la joue pour lui dire au revoir. Elanor lança le cheval au pas, et la charrette qu'elle menait quitta rapidement le village, laissant le village de Lasdren derrière elle.

Elanor traversa la forêt pendant une journée entière et arriva à Ouestefel peu avant la nuit tombée. La route avait été longue, et Elanor était fatiguée. Elle trouva rapidement une chambre à l'auberge de l'ours gris, et une écurie pour son cheval.

Puis elle s'effondra sur le lit qu'on lui avait préparé et s'endormit aussitôt.

Il était tard dans la matinée quand elle se réveilla. Elanor se leva dans la hâte et se prépara pour le marché. Si elle n'avait pas fini les courses avant midi, elle ne pourrait reprendre la route avant le lendemain car il serait alors trop tard pour voyager de jour. Et elle ne désirait pas voyager de nuit.

Elle avait entendu dire que les bois étaient infestés de toutes sortes de bêtes la nuit. Des loups, des chiens errants, des hors-la-loi, et même des orques. Elanor n'osait imaginer pire que de se retrouver face à une bande d'orques.

Elanor flâna dans les rues, faisant toutefois ses commissions sans se presser. Lorsque la moitié de l'après-midi arriva, Elanor avait presque tout acheté et chargé dans la charrette, hormis les épices que lui avait demandés Maggi. Elle passa plus d'une heure à les chercher, pestant contre la lubie de Maggi. Puis elle trouva enfin le bon étal vers la fin du marché, et dépensa une petite fortune pour les acheter.

De retour à l'auberge, elle descendit de la charrette avec l'intention de demander à nouveau une chambre pour la nuit. Cependant, lorsque le patron de l'auberge lui annonça le prix et qu'elle fouilla dans sa bourse, elle se rendit compte qu'elle n'avait pas assez pour payer. Avec effarement elle recompta, et se demanda comment cela avait pu arriver, lorsqu'elle comprit que Maggi n'avait pas prévu assez de pièce d'or pour qu'elle puisse payer une nuit de plus à l'auberge.

Elanor releva les yeux vers le patron de l'auberge, démunie.

- Alors vous voulez réserver cette chambre oui ou non ? lui demanda-t-il. Ça fera deux pièces de bronze en plus pour l'écurie et la charrette, dit-il en jetant un coup d'œil à l'extérieur.

- Je… euh, je suis désolé… je n'ai pas assez.

L'aubergiste la regarda avec des yeux exorbités, et la chassa de son auberge.

- Désolé ma p'tite dame, je peux pas vous faire de fleur aujourd'hui. Il y a beaucoup de monde en ville cette semaine, et c'est ma dernière chambre. Si vous pouvez pas payer, je peux rien faire pour vous.

Il lui claqua la porte au nez, et Elanor tourna le dos à l'auberge, dépitée.

Elle parcourut la ville à la recherche d'autres endroits où dormir, mais toutes les auberges s'avérèrent hors de prix ou complètes. Elle regarda le soleil, et vit qu'il restait au moins trois bonnes heures avant qu'il ne se couche.

Il était trop tard pour partir, pensa-t-elle.

Pourtant elle n'avait pas le choix. Elanor hésita. Devait-elle rester ici dehors toute la nuit, laisser sa charrette en plein milieu de la rue, au risque de croiser des hommes peu fréquentables ? Ou devait-elle traverser la forêt en pleine nuit, soit disant infestée de bandits et de monstres qu'elle n'avait encore jamais vu.

Elle pesa le pour et le contre, et fit rapidement son choix. Quitte à rester en vie, autant rentrer maintenant. Elle n'allait pas passer la nuit ici, au risque de se faire voler ses provisions ou pire encore de se faire agresser, ou violer dans un coin de rue.

Elanor remonta sur sa charrette, chargée à ras-bord de tonneaux et de provisions, et posa son épée près d'elle.

- Allez, Finrod, au trot !

Le cheval partit à vive allure, et sortit de la cité sentant l'urgence de sa maîtresse.

Elanor calcula rapidement dans sa tête le temps qu'elle mettrait pour rentrer. Avec un peu de chance, elle mettrait un peu moins de six heures, ce qui la ferait arriver aux environs de minuit. Elle ferait donc une bonne partie du voyage de nuit.

Un peu anxieuse, Elanor lança Finrod sur le chemin du retour. A peine deux heures plus tard, le soleil se coucha. Par chance, le quart de lune éclairait le sentier par intervalles, ce qui facilitait la visibilité du chemin. Elanor ne se sentait malgré tout pas rassurée. La forêt était plongée dans un silence de mort seulement chahuté par le claquement sonore des sabots de Finrod sur le sentier terreux.

Au bout d'une heure, le cheval commença à s'agiter. Elanor sentit sa peur et l'angoisse monter tandis qu'elle tentait de rassurer Finrod, se doutant qu'il avait probablement senti quelque chose dans les bois. Les sens de l'animal étaient plus développés que les siens, et elle lui faisait confiance pour repérer le danger.

Son comportement était inhabituel, et Finrod finit par s'arrêter brusquement, faisant une embardée qui secoua la charrette et fit presque tomber Elanor par-dessus-bord.

- Ohé ! Tout doux, Finrod !

Le cheval s'immobilisa, les oreilles droites tendues vers un point dans la forêt.

Elanor entendit soudainement un craquement sur sa gauche. Cela ressemblait à un bruit de branche écrasé sous un pied. La terreur l'envahit cette fois complètement, et paniquée, elle ordonna à Finrod d'avancer, tout en gardant la main sur la garde de son épée qui était posée à côté d'elle. Aussitôt eut-elle donné l'ordre que quelque chose la tira par le col en arrière, et la propulsa hors de la charrette.

Elanor poussa un hurlement, qui fut étouffé par une main large, grise, puante et repoussante. Elle entendit Finrod se cabrer et hennir, tandis que des cris et des glapissements qui n'avaient rien d'humains retentissaient tout autour d'eux.

Avec horreur, Elanor vit une créature immonde se dresser devant elle et qui la plaqua au sol. L'orque lui adressa un sourire jaunâtre, et elle put contempler à loisir les crocs gâtés et acérés de l'immonde bête.

- Regardez ce que j'ai attrapé ! Celle-là doit être bonne à manger, grinça-t-il dans une étrange langue qu'Elanor ne comprit pas.

Les autres orques qui étaient au moins une dizaine, avaient grimpés dans la charrette tandis que d'autres tenaient les rênes de Finrod.

- Il y en a d'autres, répondit un autre orque qui était dans la charrette, celle-ci à un garde mangé.

- Et il y a le canasson, ajouta un troisième orque. Pas besoin de la manger, on peut jouer avec cette femelle.

L'orque qui la maintenait la regarda avec une lueur lubrique et de convoitise. Elanor poussa un nouveau cri terrifié, et se débattit. Elle gesticula ses bras et ses jambes dans tous les sens, et tenta de donner des coups de genoux à l'orque, en vain.

- Restes tranquille ! lui ordonna-t-il dans la langue commune.

Il lui donna une violente gifle qui lui fendit la lèvre et la sonna. Elanor sentit le sang affluer dans sa bouche.

Les autres orques se mirent à rire.

- Qu'est-ce que c'est ?

Un des orques souleva l'épée d'Elanor, et l'examina. A peine l'eut-il sortit de son fourreau qu'elle lui brula les mains, et il poussa un jappement en la lâchant. Elle retomba dans la charrette dans un tintement claire, presque musical.

- De l'elfique ! C'est une épée ensorcelé ! hurla celui qui avait empoigné l'épée.

- Laisses-là où elle est. Allez, prenons le canasson, la charrette et la fille, ordonna l'orque dans la charrette.

Mais Finrod ne semblait pas prêt à se laisser emmener. Il se cabra de plus belle, renversant presque la charrette sur le côté.

- Tuez le canasson, il va nous ralentir, ordonna le même orque.

- Mais qui va tirer ce machin ? répliqua un autre en désignant la charrette.

- Toi abruti !

L'autre se tut, et s'avança vers Finrod, tirant une lame ébréchée en mauvais état. Elanor se pétrifia et se mit à pleurer, sachant le triste sort qui allait être réservé à son ami. Elle ferma les yeux, attendant le coup fatal. Mais un craquement tonitruant et un cri de douleur retentit, et elle entendit avec soulagement les sabots du cheval partir au galop.

- Imbécile ! Tu l'as raté.

- Je ne pensais pas qu'il allait réussir à nous échapper! lança l'orque en se massant les côtes, là où le cheval l'avait botté.

Les orques regardèrent le cheval disparaître à l'angle du chemin, dispersant de nombreux tonneaux dans son sillage.

- Au moins on en est débarrassé ! Levons le camp !

- Ligotez la fille. On s'amusera avec celle-là plus tard, lança un autre orque.

Un deuxième orque arriva à côté de celui qui la maintenait et l'attacha des mains aux pieds, tout en prenant soin de lui fourrer un bout de tissu dans la bouche pour la faire taire. Le tissu avait un goût de saleté écœurante, mais Elanor ne put rien faire pour protester. L'orque la souleva brutalement, et la mit sur son dos comme un sac à patate.

Elanor en perdit sa respiration, l'odeur de l'orque était si puante et repoussante qu'elle dut s'y reprendre à plusieurs fois pour ne pas régurgiter son repas de midi.

Les orques ramassèrent ce qui était tombé de la charrette, puis se mirent en marche dans la forêt, abandonnant la route derrière eux.

Elanor dodelina de la tête, le sang ruisselant à présent sur son visage. A moitié consciente, elle regarda le chemin disparaître derrière eux, éloignant tout espoir de secours, mais aussi tout espoir de rentrer chez elle saine et sauve.